Crabe gris violacé terne, yeux rouges
Carapace veloutée jusqu'à 5 à 6 cm de longueur et 7 à 10 cm de largeur
Présence de 5 dents antéro-latérales sur la carapace
Pattes avec des jointures rouges et des motifs bleus
Pattes postérieures dites "natatoires" de forme aplatie
Il existe une cinquantaine de noms vernaculaires en France pour cette espèce patrimoniale très connue et appréciée en pêche à pied. Ci-après quelques exemples :
Velvet swimming crab, velvet swimcrab, velvet crab, velvet fiddler, devil crab, lady crab (GB), Nécora (E), Nècora (Cat), Navalheira (P), Samtkrabbe, Wollige Schwimmkrabbe (D), Fluwelen zwemkrab , Spanjool (NL), Fløyelskrabbe (N)
Cancer puber Linnaeus, 1767
Polybius (Necora) puber (Linnaeus, 1767)
Liocarcinus puber (Linnaeus, 1767)
Macropipus puber (Linnaeus, 1767)
Portunus puber (Linnaeus, 1767)
Cancer velutinus Pennant, 1777
Atlantique Nord-Est, Manche, Méditerranée
Zones DORIS : ● Europe (côtes françaises), ○ [Méditerranée française], ○ [Atlantique Nord-Est, Manche et mer du Nord françaises]Cette espèce se rencontre en Atlantique Nord-Est (de la Norvège au Sahara occidental, en Macaronésie*) et en Méditerranée où elle aurait été introduite vers les années 1960. Il semblerait qu’elle soit absente de Corse et aucun signalement récent n’a été fait à l’est de Toulon pour la Méditerranée française. Les signalements méditerranéens, en dehors des côtes espagnoles et françaises, correspondent probablement à des erreurs d'identification ou de localisation, ou encore à des spécimens isolés (restaurants, aquariologie) n'ayant pas engendré de population locale.
Ce crabe vit près du littoral sur les fonds sablonneux et rocheux jusqu'à 80 m de profondeur. Il peut se rencontrer sur l’estran sous les pierres et dans les cuvettes.
Il affectionne les surplombs rocheux recouverts d'algues.
La carapace de ce crabe mesure jusqu'à 5 à 6 cm de longueur et 7 à 10 cm de largeur. Elle est veloutée et porte des rides transversales irrégulières. Sa couleur est gris violacé terne. On constate la présence de 8 à 10 dents entre les 2 yeux, les 2 dents centrales étant un peu plus longues que les autres. La carapace présente 5 dents antéro-latérales. Les yeux sont rouge vif. La face ventrale est de couleur crème à reflets bleutés.
Les mâles ont un abdomen étroit et triangulaire. Les segments 3 à 5 de l'abdomen du mâle sont fusionnés alors qu’ils sont libres chez la femelle.
Des lignes bleues sont visibles sur les pattes dont les jointures sont rouges. Ce crabe peut nager grâce à ses pattes postérieures dites "natatoires" de forme aplatie ; ces dernières servent aussi (et surtout !) à l'enfouissement en marche arrière dans le sédiment.
Des anomalies de coloration ont été rapportées chez l'étrille : des spécimens complètement bleus ou blancs ont été observés.
Chez les Polybiidés on peut citer les espèces suivantes :
L’étrille fripée Polybius corrugatus (anciennement Liocarcinus corrugatus) a une carapace couverte de poils courts et présente de nombreuses petites lignes transversales claires ; les 5 dents du bord antéro-latéral de la carapace sont pointues et dirigées vers l’avant. Les dents frontales sont au nombre de trois et sont arrondies. La couleur générale de ce crabe est rouge-orangé à brune. Il se rencontre jusqu’à 150 m de profondeur dans presque toute l’Europe mais il est absent de mer du Nord et de Manche orientale. Cette espèce a été signalée dans d'autres pays lointains mais il s'agit en fait d'autres espèces très proches. Polybius corrugatus au sens large est donc ce qu'on appelle un "complexe d'espèces".
L’étrille à pattes bleues Polybius depurator est un crabe très commun dont la carapace mesure jusqu'à 5,2 cm de large avec 3 dents égales et pointues entre les yeux ; elle est rugueuse et rougeâtre. Cette espèce se rencontre dans toute l'Europe jusqu'à au moins 300 m de profondeur.
Le crabe à sardine Polybius henslowii nage en banc au large dans le golfe de Gascogne ; il attaque les maquereaux et les sardines.
Chez l'étrille nageuse Achelous hastatus, la carapace possède 8 ou 9 épines antéro-latérales, la dernière étant très forte. Le dactyle de la dernière patte a un ocelle* sombre très marqué.
Cette espèce est un prédateur nocturne omnivore et opportuniste, s’attaquant à la petite faune vagile* : mollusques bivalves et gastéropodes, vers marins (polychètes), petits crustacés. Elle a aussi des mœurs nécrophages*. Elle peut attaquer les lièvres de mer Aplysia depilans et Aplysia punctata.
La période de reproduction a lieu entre février et novembre, avec un pic de ponte de mars à juin. L'étreinte de l'étrille peut être longue mais le moment où la femelle est réceptive se situe uniquement pendant la mue. L'hiver, les femelles pondent au large. Les adultes se rapprochent des côtes du printemps jusqu'à l'automne. La quantité d’œufs varie de 5 000 à 45 0000 œufs selon la taille de la femelle. L'éclosion se fait au stade pré-zoé et se transforme en zoé en quelques heures. Il y a cinq stades zoé avec épine rostrale, dorsale et latérale, une des épines latérales du telson* est perdue dans les stades ultérieurs. Il n'y a qu'un stade mégalope ce dernier n'ayant plus de trace de l'épine dorsale. La durée de la phase larvaire entre l’éclosion et la mégalope dépend des conditions physico-chimiques, en particulier de la salinité et de la température : 28 jours à 25 °C et 48 jours à 15 °C.
Croissance : la largeur de la carapace mesure 2 cm à 1 an ; 4 cm à 2 ans ; 6 cm à 6 ans ; 10 cm à 10 ans.
La longévité habituelle est de l'ordre de 4 à 5 ans.
Les prédateurs potentiels sont principalement la loutre, les oiseaux, les tortues marines, les poissons, les grands crustacés et les céphalopodes. Comme de nombreux décapodes côtiers, ce crabe peut être parasité par des métacercaires enkystées de trématodes. Il est aussi parasité par la sacculine Sacculina carcini, le bopyre Portunion moniezii ainsi que par des Ciliés. Des études ont conduit à l'identification d'un dinoflagellé parasite infectant l'étrille. L'étrille est également parasitée par le cercozoaire Paramarteilia canceri.
Les étrilles (en particulier les plus grosses) peuvent être concrétionnées ou porteuses d'épibiontes* divers : algues rouges (Apoglossum ruscifolium, Calliblepharis jubata , Erythroglossum laciniatum, Osmundea pinnatifida, Lithophyllum incrustans ...) algues brunes, annélides (Spirobranchus triqueter), bryozoaires (Electra pilosa), crustacés (Caprella linearis, Jassa ocia, balanes), cnidaires (Aglaophenia kirchenpaueri, Clytia hemisphaerica, Obelia spp.)...
Cette espèce est très vive et défend âprement son territoire en écartant les pinces.
Cette espèce est pêchée à pied ou à l'aide de casiers et est appréciée pour sa chair fine : tout est bon à manger dans l'étrille.
A la provençale, par exemple, sautée à l'huile d'olive puis cuite à petit feu avec un peu d'eau, ail, persil, thym, laurier et fenouil, ce bouillon parfumé servant à cuire du riz rond.
L'étrille permet aussi la confection d'une excellente bisque qui pourra se consommer aussi bien chaude que froide, voire se mettre au congélateur pour l'hiver.
Etrille : vient du vieux français estrille et donc du latin strigila ou strigilis, « râcloir » sans doute en lien avec le front de l'espèce qui est comme un peigne à nombreuses petites dents.
Necora : l’origine de ce nom de genre est lié au nom vernaculaire de l'espèce type en Galice (Espagne).
Holthuis 1987 qui a créé ce genre dit "The name Necora is chosen as it is short, euphonious and furthermore is the vernacular name given to the type species in Galicia, Spain. Gender of generic name: feminine."
puber : du latin [puber] = poilu.
Numéro d'entrée WoRMS : 107398
Termes scientifiques | Termes en français | Descriptif | |
---|---|---|---|
Embranchement | Arthropoda | Arthropodes | Animaux invertébrés au corps segmenté, articulé, pourvu d’appendices articulés, et couvert d’une cuticule rigide constituant leur exosquelette. |
Sous-embranchement | Crustacea | Crustacés | Arthropodes à exosquelette chitineux, souvent imprégné de carbonate de calcium, ayant deux paires d'antennes. |
Classe | Malacostraca | Malacostracés | 8 segments thoraciques, 6 segments abdominaux. Appendices présents sur le thorax et l’abdomen. |
Sous-classe | Eumalacostraca | Eumalacostracés | Présence d’une carapace recouvrant la tête et tout ou partie du thorax. |
Super ordre | Eucarida | Eucarides | Présence d'un rostre. |
Ordre | Decapoda | Décapodes | La plupart marins et benthiques. Yeux composés pédonculés. Les segments thoraciques sont fusionnés avec la tête pour former le céphalothorax. La première paire de péréiopodes est transformée en pinces. Cinq paires d'appendices locomoteurs (pinces comprises). |
Sous-ordre | Brachyura | Brachyoures | Les brachyoures ont un abdomen réduit replié sous le céphalothorax. Ils sont représentés par les crabes et les araignées de mer. |
Super-famille | Portunoidea | ||
Famille | Polybiidae | Polybiidés | Bord antéro-latéral de la carapace avec le plus souvent 5 dents (dent orbitaire externe comprise) ; front avec le plus souvent 3 dents ou lobes ; carapace hexagonale à peine plus large que longue ; dernière paire de pattes aplatie adaptée à la nage et à l'enfouissement. (valable pour les genres Bathynectes, Liocarcinus, Macropipus, Necora, Ovalipes, Parathranites, Polybius, Raymanninus...) |
Genre | Necora | ||
Espèce | puber |
Beau spécimen
Necora puber , caché dans une faille. Attitude typique.
Ar Veskleg, Trébeurden (22), 18 m
13/08/2007
Détail anatomique
Détail des 2 paires d'antennes et des pièces buccales.
Arcachon, 10 m
09/05/2007
Macro
Cet individu a été surpris par des plongeurs en train de découper avec ses pinces un lièvre de mer.
Paimpol, 20 m
17/06/2006
Détail
Détails des dents latérales et de l'œil rouge.
Carantec, la barre des flots, 21 m
07/2000
Individu leucique
Des anomalies de coloration ont été rapportées chez l'étrille : des spécimens complètement bleus ou blancs ont été observés. Voici un individu blanc.
Notez la position particulière des pattes postérieures dites "natatoires" de forme aplatie ; ces dernières servent à nager mais aussi (et surtout !) à l'enfouissement en marche arrière dans le sédiment.
Lanmodez(22), Pleublain, sous pierre à marée basse
20/02/2019
C'est un garçon !
Les mâles ont un abdomen étroit et triangulaire. Les segments 3 à 5 de l'abdomen du mâle sont fusionnés alors qu’ils sont libres chez la femelle. Spécimen leucique.
Lanmodez (22), Pleublain, à marée basse
20/02/2019
Détail des dents sur la carapace
Cet individu se délectait d'une moule. Notez bien les dents sur la carapace, bien visibles sur cette photo : les 5 dents antéro-latérales et 8 à 10 dents entre les 2 yeux, les 2 dents centrales étant un peu plus longues que les autres.
Saintes-Maries-de-la-Mer (13), digue ouest, 2 m, nuit
10/12/2023
Défense
Attitude classique de défense. On note les jointures des pattes de couleur rouge.
Baie de Morlaix, 12 m
16/07/2005
Cherchez l'erreur
Cet individu a une seule pince. Il a dû se la faire prendre par un prédateur comme le congre. Normalement à la prochaine mue, une nouvelle pince déjà en préparation apparaîtra.
Baie de Morlaix (29), 12 m
16/07/2005
Pré-accouplement
Deux individus en position d'attente d'accouplement qui n'aura lieu qu'à la mue de la femelle. Le mâle plus imposant est au-dessus de la femelle bien protégée par son congénère.
La Cotinière, Oléron (17), 5 m
28/08/2007
Accouplement
Notez que la femelle s'est retournée par rapport à la position de pré-accouplement (ça se voit mieux sur la photo de face). Sur cette photo prise de dessus, on ne voit que son abdomen déplié.
Zélande (Pays-Bas), Den Osse, 10 m, de nuit
21/08/2023
Ponte
Cette femelle protège sa ponte contre son abdomen.
Notez les 2 dents centrales entre les deux yeux qui sont un peu plus longues que les autres.
Ploubazlanec (22), Pointe de L'Arcouest, marée basse
22/02/2019
Exuvie
Cet individu vient de muer. L'exuvie, plus petite et aux yeux décolorés, est en bas de la photo.
Ploubazlanec (22), dans la baie de Launay
03/03/2009
Epibiose
Cet individu est bien camouflé, sa carapace entièrement colonisée d'épibiontes*. A l'arrière-plan, un macropode (Macropodia rostrata) et un oursin grimpeur (Psammechinus miliaris).
Luc-sur-Mer (14), 3 m, en apnée
25/02/2006
En Méditerranée
Cette espèce se rencontre en mer du Nord, Manche, Atlantique Nord-Est mais également en Méditerranée.
Le Rouet, Côte Bleue (13), 3 m
22/08/2011
Prédation
Cette étrille se délecte du bras d'une étoile de mer.
La Trinité-sur-Mer (56), 13 m
22/05/2011
Prédateur
La seiche est un prédateur redoutable de l'étrille. C'est par l'arrière qu'elle la saisit, pour ne pas subir les pinces.
Les Ridens, Boulogne-sur-Mer (62), 20 m
20/10/2007
HLM à étrilles
Comment expliquer le comportement grégaire de ces étrilles rassemblées sur une éponge ramifiée Haliclona oculata ? Il y en avait au moins une douzaine.
Voici une piste proposée par Pierre NOËL :
"Sur une épave, il n'y a peut-être pas une foultitude d'abris où se cacher, et les crabes se contentent de ce qu'ils trouvent d'adapté à leur taille ? Il est peut-être plus facile de se défendre en groupe contre les prédateurs que tout seul dans son coin ? Les étrilles aiment bien se mettre les fesses dans les anémones à l'instar d'autres crabes comme les Pilumnus ou les Inachus. Même les cigales de mer s'y mettent, tout comme les crevettes (Periclimenes) et les poissons. S'il n'y avait pas d'anémones convenables sur l'épave, les étrilles auraient adopté une éponge ? Faute de grives, on mange des merles !"
Epave
12/08/2012
Rédacteur principal : Denis ADER
Rédacteur : Véronique LAMARE
Vérificateur : Jacques DUMAS
Correcteur : Pierre NOËL
Responsable historique : Denis ADER
Responsable régional : Sylvain LE BRIS
Barrett J. H., Yonge C. M., 1958, Collins pocket guide to the sea shore, Collins, London, 1-272.
Coz R., 2013, Une approche interdisciplinaire de la pertinence et de la faisabilité d’une co-gestion de la pêche récréative sur l’île d’Oléron : l’étrille (Necora puber, Linnaeus, 1767) comme modèle biologique, Thèse, Université de La Rochelle, 17 septembre 2013.
González Gurriarán E., 1977, Alguno aspectos del comportemiento en la necora, Macropipus puber (L.) (Decapoda Brachyura), Boletin de la Real Sociedad Española de Historia Natural (Sección Biologica), 75, 473-479.
González Gurriarán E., 1978, Introduction al estudio de la alimentation en la necora, "Macropipus puber" L. (Decapoda - Brachyura), Boletin del Instituto Español de Oceanografia, Madrid, 4(242), 81-94.
Holthuis L. B., 1987, Necora, a new genus of european swimming crabs (Crustacea, Decapoda, Portunidae) and its type species, Cancer puber L., 1767, Zoologische Mededelingen, Leiden, 61(1), 1-14.
Livory A., 1997, Crabes de la Manche : le point des connaissances, L'Argiope, 18-19 (automne 1997-hiver 1998), 18-64.
Martin S., Cheslett D., Collins E., Georgieva S., Connor I. O., Swords F., Dwyer K. O., 2024, Variation in Paramarteilia canceri infections in velvet crab Necora puber, Diseases of Aquatic Organisms, 157, 61-72.
Monod T., 1956, Hippidea et Brachyura ouest-africains. Mémoires de l'Institut fondamental d'Afrique noire, IFAN, Dakar, 45, 1-674.
Paulmier G., 1997, Atlas des invertébrés du golfe de Gascogne inventoriés dans les captures des chaluts - Campagnes Ressgasc 1992-1995 et Evhoe 1995, IFREMER éditeur, Nantes, RST/DRV/RH/97-12, 1-110.
Rice A. L., Ingle R. W., 1975, A comparative study of the larval morphology of the British portunid crabs Macropipus puber (L.) and M. holsatus (Fabricius), with a discussion of genetic and sub-familial larval characters within the Portunidae, Bulletin of the British Museum (Natural History), Zoology, 28(4), 121-151.
Wilhelm G., 1995, Contribution à l'étude de l'étrille Necora puber dans le Mor-Braz : données halieutiques, biologiques et pathologiques, Thèse université de Rennes I, 244p.
La page de Necora puber dans l'Inventaire National du Patrimoine Naturel : INPN
Les textes et images sont sous licence et ne sont pas libres de droit.
Pour les ayants-droits, connectez-vous.
Pour toute demande d'utilisation (exemple d'un formateur Bio de la FFESSM...) contactez nous ici.