Gros mérou mesurant généralement 2 m, maximum 2,7 m
Silhouette robuste en forme de fer de lance
Livrée terne, de gris à brun foncé, ponctuée de taches blanchâtres
Petits yeux à l'avant de la tête
Nageoires jaunes ponctuées de noir
Nageoire caudale imposante et arrondie
Mérou lancéolé, mérou géant, mérou tigre géant, loche carite, carite, cabot nègre, loche, bac, apuku ou hapuu reru (Polynésie française)
Giant grouper, brindle grouper, brindlebass, banded rockcod, coral cod, reef cod, dragon grouper, mottled-brown sea bass, Queensland grouper (GB), Mero lanceolado (E), Zackenbarsch (D), Groupa fajardo (P)
Holocentrus lanceolatus Bloch, 1790
Promicrops lanceolatus (Bloch, 1790)
Serranus lanceolatus (Bloch, 1790)
Serranus geographicus Valenciennes, 1828
Serranus abdominalis Peters, 1855
Batrachus gigas Günther, 1869
Oligorus terraereginae Ramsay, 1880
Oligorus goliath De Vis, 1882
Serranus phaeostigmaeus Fowler, 1907
Stereolepoides thompsoni Fowler, 1923
Indo-Pacifique
Zones DORIS : ● Indo-Pacifique, ○ [Mer Rouge]La loche géante est présente dans l'ensemble du bassin indo-pacifique, depuis les côtes est-africaines incluant la mer Rouge à l'ouest et jusqu'à Hawaï, la Polynésie et l'île de Pâques dans l'océan Pacifique à l'est. Pour le territoire français, on la trouve en Polynésie, à Wallis-et-Futuna et en Nouvelle-Calédonie dans le Pacifique, ainsi qu'à Mayotte et La Réunion dans l'océan Indien.
Ce poisson souvent solitaire peut se rencontrer dans les lagons, à proximité d'épaves et de grottes, sur les pentes externes des récifs, ou bien encore dans les ports, les structures d'exploitation marine et les estuaires profonds dans des eaux parfois troubles et saumâtres*. Si la profondeur maximale d'évolution est estimée à 100 m, il se rencontre fréquemment dans des eaux moins profondes voire à proximité de la surface.
Epinephelus lanceolatus est le mérou pouvant atteindre la plus grande taille au niveau mondial, avec un maximum rapporté de 2,7 m. La taille communément observée avoisine 2 m.
La silhouette est robuste. La tête relativement pointue et le rétrécissement observé au niveau du pédoncule* caudal lui confèrent une forme de fer de lance. La livrée de l'adulte est terne, variant du gris au brun foncé et ponctuée de petites taches blanchâtres sur l'ensemble du corps, à l'exception des nageoires. La livrée du juvénile est marbrée de jaune et de noir.
La bouche large et entourée de lèvres bien développées comporte de nombreuses canines courbées vers l'arrière, permettant à la loche de ne pas laisser échapper ses proies, même les plus glissantes. Relativement à la taille du poisson, les yeux situés bien en avant de la tête paraissent de petite taille. Les narines sont visibles à l'avant des yeux. L'opercule* et le pré-opercule* peuvent être observés facilement par le plongeur.
Les nageoires se distinguent du reste du corps grâce à leur teinte jaune ponctuée de points noirs. La nageoire dorsale ne comporte pas de séparation, les pectorales sont arrondies et larges, tandis que l'imposante nageoire caudale est arrondie. Les rayons mous de la nageoire dorsale, assez élevés, rejoignent l'avant du pédoncule* caudal. La nageoire anale, également élevée, présente une relative symétrie avec cette partie molle de la dorsale.
La loche géante peut être confondue avec d'autres espèces de grands mérous présentes sur la zone indopacifique, parmi lesquelles :
- Le mérou marron Epinephelus fuscoguttatus : la silhouette avant est plus trapue et les zones de coloration blanchâtres plus étendues sont ponctuées par des points noirs ; les nageoires sont plus sombres. La longueur maximale est de 1,2 m, bien moindre que la longueur moyenne de E. lanceolatus.
- Le mérou camouflage Epinephelus polyphekadion : la robe est brune maculée de larges taches claires sur le dos, et de points noirs en se rapprochant du ventre. La longueur maximale est de seulement 90 cm.
- Le mérou patate Epinephelus tukula : les tâches sombres ovoïdes sur les flancs sont nettement séparées sur la robe claire dominante. Les nageoires sont brunes.
- Le mérou malabar Epinephelus malabaricus : la robe brune et blanchâtre comporte de nombreuses petites taches noires bien visibles.
En dehors de la zone indopacifique, on peut mentionner :
- Le mérou géant de l'Atlantique Epinephelus itajara : présent à l'est du Pacifique et dans l'Atlantique tropical et subtropical, il ne partage aucune aire de répartition commune avec la loche géante. C'est un mérou de stature équivalente à la loche géante mais sa robe est brune et blanche ponctuée de points noirs. Il est signalé dans les Antilles françaises pour la zone DORIS.
La loche géante fait par ailleurs l'objet de nombreuses hybridations pour l'élevage (Sun 2016).
Epinephelus lanceolatus est un prédateur des récifs coralliens. Son menu est varié, mais il semble que les poissons (aussi bien osseux que cartilagineux), les céphalopodes (poulpes) et les crustacés (langoustes, gros crabes) soient ses proies favorites. De jeunes tortues ont également été trouvées dans ses contenus stomacaux.
Les mouvements d'un individu marqué à l'aide d'un dispositif acoustique, autour des passes d'un récif de Nouvelle-Calédonie, semblent indiquer que le poisson se nourrit préférentiellement à l'aube et au crépuscule (Clua 2015).
L'espèce est hermaphrodite* et les individus peuvent changer de sexe selon les besoins en reproducteurs. Ces changements de sexe sont liés aux relations au sein d’une population, plutôt que réglés sur des périodes annuelles fixes de reproduction. Cette flexibilité constitue un avantage pour coloniser durablement le milieu, car elle permet de maintenir un équilibre des effectifs de la population en rapport avec l’environnement : disponibilité en nourriture et espace à conquérir sont les facteurs les plus influents. Malgré cela, le renouvellement de l’espèce peut être long et aléatoire. La maturité sexuelle est atteinte par des individus mesurant 1,3 m environ, soit un âge de 6 ans pour une longévité estimée à 37 ans.
Comme d'autres espèces de mérous, la loche géante se regroupe annuellement en certains lieux particuliers pour se reproduire. Les déplacements observés sur un individu en Nouvelle-Calédonie, ainsi qu'une étude réalisée auprès des pêcheurs avec l'appui de plongeurs à Zanzibar, permettent de situer la période de regroupement et de reproduction respectivement entre les mois d'octobre et décembre dans un cas et novembre et février dans l'autre (Clua 2015 & Samoilys 2013).
E. lanceaolatus est parfois accompagné de rémoras, poissons-pilotes et autres petites carangues. Mise à part cette cohabitation, les individus sont plutôt solitaires. Ses prédateurs naturels sont les requins.
La loche géante et ses hybrides peuvent être infectés par le virus de la nécrose nerveuse ou bétanodavirus. Celui-ci peut engendrer une mortalité quasi intégrale de ces poissons en aquaculture (Yu 2019).
La bouche est protractile* (capacité à être projetée vers l'avant). Cela permet l'aspiration des proies par augmentation du volume interne de la bouche.
Les gros individus sont généralement sédentaires : ils occupent un
territoire qu'ils ne quittent que temporairement, pour aller se
reproduire sur des zones de regroupement. Des concentrations locales de plusieurs individus (environ 5 ou 6) nous ont néanmoins été signalées.
Cette espèce est devenue rare car sa capture est assez facile, notamment pendant la période du frai* : sa taille imposante en fait un trophée recherché par les pêcheurs sous-marins qui ont largement contribué à sa disparition de certaines zones. Pourtant, sa chair peut être toxique car elle est capable d’accumuler la toxine responsable de la ciguatera*.
En Méditerranée, les gros représentants du genre Epinephelus sont communément appelées mérous, tandis que dans les mers tropicales, ils portent le nom de loches.
Considéré comme espèce VU (vulnérable) dans les classements de la liste rouge publiée par l'UICN* en 1996 et 2006, Ephinephelus lanceolatus a depuis fait l'objet d'une reclassification dans la catégorie Data Deficient (manque de données). Cette nouvelle évaluation datant de 2016 est notamment liée aux lacunes, tant qualitatives que quantitatives, des connaissances scientifiques actuelles portant sur l'espèce. La population étant malgré tout considérée comme déclinante, il est recommandé de limiter les actions de pêche la ciblant, tout en progressant dans la connaissance de sa biologie.
En vertu de ces éléments très parcellaires et peu rassurants, la loche géante fait l'objet de règlementations locales visant à sa préservation. Ces règlementations, détaillées dans l'évaluation de la liste rouge de l'UICN de 2016, consistent en des interdictions partielles ou totales de capture : c'est notamment le cas en Australie, Afrique du Sud, Mozambique (avec de sérieux doutes sur le respect des règlementations en vigueur sur cette zone), Samoa américaines, Nouvelle-Zélande et îles Andaman.
Loche : du gaulois [leuka] = blanc, en référence à la couleur de la partie ventrale.
géante : en allusion à la formidable stature de certains spécimens, le plus gros des mérous au plan mondial.
Epinephelus : du grec [epi] = sur et [nephelus] = nuage, "couvert de nuages". Ce mot décrit une livrée portant des taches contrastées, irrégulières, disposées de manière désordonnée sur tout le corps.
lanceolatus : directement repris du latin et signifie "lancéolé", en forme de lance.
Numéro d'entrée WoRMS : 218224
Termes scientifiques | Termes en français | Descriptif | |
---|---|---|---|
Embranchement | Chordata | Chordés | Animaux à l’organisation complexe définie par 3 caractères originaux : tube nerveux dorsal, chorde dorsale, et tube digestif ventral. Il existe 3 grands groupes de Chordés : les Tuniciers, les Céphalocordés et les Vertébrés. |
Sous-embranchement | Vertebrata | Vertébrés | Chordés possédant une colonne vertébrale et un crâne qui contient la partie antérieure du système nerveux. |
Super classe | Osteichthyes | Ostéichthyens | Vertébrés à squelette osseux. |
Classe | Actinopterygii | Actinoptérygiens | Ossification du crâne ou du squelette tout entier. Poissons épineux ou à nageoires rayonnées. |
Sous-classe | Neopterygii Teleostei | Néoptérygiens Téléostéens | Poissons à arêtes osseuses, présence d’un opercule, écailles minces et imbriquées. |
Super ordre | Acanthopterygii | Acanthoptérygiens | Rayons épineux aux nageoires, écailles cycloïdes ou cténoïdes, présence d'une vessie gazeuse et pelviennes thoraciques ou jugulaires, sans être systématiquement présents, sont des caractères que l'on ne rencontre que chez les Acanthoptérygiens. |
Ordre | Perciformes | Perciformes | Nageoires pelviennes très rapprochées des nageoires pectorales. |
Sous-ordre | Percoidei | Percoïdes | Une ou deux nageoires dorsales dont les éléments antérieurs sont des épines aiguës. Nageoires pelviennes avec une épine, rayons mous. |
Famille | Serranidae | Serranidés | 1 à 3 épines sur l’arrière de l’opercule. |
Genre | Epinephelus | ||
Espèce | lanceolatus |
Très gros mérou
Cette imposante loche, le plus grand des mérous au niveau mondial, a trouvé refuge dans une structure métallique immergée en Australie, pour le plus grand bonheur des plongeurs qui peuvent l'y admirer. Elle fait également office d'hôte à un rémora, à qui elle offre le gîte et le couvert. On remarque les motifs particulièrement colorés des nageoires, contrastant avec la teinte globalement terne du poisson.
Exmouth navy pier, Australie occidentale, 10 m
28/04/2002
De dessous
Cet individu à la robe relativement claire a bien voulu se laisser photographier de dessous, exhibant le graphisme jaune ponctué de noir de ses nageoires paires, pectorales et pelviennes.
Exmouth navy pier, Australie occidentale, 10 m
28/04/2002
De face
Contrastant avec les très grandes dimensions de l'espèce, les yeux situés en avant de la tête paraissent petits. On remarque bien les taches claires ponctuant la tête de la loche géante.
Nouvelle-Calédonie (98), 16 m
04/03/2006
Profil antérieur
Sur la partie antérieure de cet individu, on distingue les taches claires marquant la tête, ainsi que la coloration jaune ponctuée de noir caractéristique sur la nageoire pectorale.
Nouvelle-Calédonie (98), 16 m
04/03/2006
Vue arrière
La taille de ce très gros individu est estimée entre 2,5 m et 3 m (la carangue juvénile placée à ses côtés donne l'échelle). La coloration jaune tachetée des nageoires postérieures est caractéristique de l'espèce. Cet individu est parasité et peut-être malade à en juger par la coloration blanche autour de la bouche.
Germana cap, Maldives, 47 m
24/01/2023
Aux Maldives
Chez cette loche géante, on note la silhouette relativement élancée, la robe sombre tachetée, ainsi que la forme très arrondie, quasiment circulaire, de la nageoire caudale.
Guraidhoo Kandu, atoll Kolhumadulu (Thaa), Maldives, 40 m
03/02/2006
A Mayotte
Même sans éclairage et dans le bleu de profondeurs importantes, il est possible de reconnaître E. lanceolatus à sa robe tachetée, sa silhouette élancée et ses nageoires caractéristiques. Elle est ici en compagnie d'un rémora fixé sur la partie antérieure de son ventre.
Passe Bateau, Mayotte (978), 30 m
08/09/2022
En petite groupe
Ces loches à la robe brun sombre ont été photographiées dans une eau assez trouble à Mayotte. On remarque la silhouette massive des deux individus, ainsi que la queue arrondie du poisson situé à l'arrière-plan.
Mayotte (978), 15 m
06/06/2013
Squelette
Ce squelette exposé à Sydney permet de visualiser l'impressionnante bouche de la loche géante, ainsi que la denture permettant de retenir les proies les plus glissantes.
Muséum de Sydney, Australie
04/2006
Timbre poste
Voici la reproduction d'un timbre postal des Grenadines, retrouvé par Yvan CARO, philatéliste expert et passionné. Ce timbre fait partie d'une série émise en 1975, faisant la promotion de la pêche de gros poissons tels que thon, marlins, coryphène, wahoo, espadon et barracuda.
N/A
24/09/2022
Vidéo : aux Maldives
Ce gros mérou à la robe sombre se laisse observer par les plongeurs. On note sa silhouette en forme de fer de lance, à l'origine de son appellation, ainsi que sa large nageoire caudale.
Maldives, océan Indien, 40 m
04/2015
Rédacteur principal : Cédric MITEL
Rédacteur : Gaël MODRAK
Vérificateur : Virginie LEON
Responsable historique : Cédric MITEL
Responsable régional : Gaël MODRAK
Clua E., Chauvet C., Mourier J., Werry J.M., Randall J.E., 2015., Pattern of movements within a home reef in the Chesterfield Islands
(Coral Sea) by the endangered Giant Grouper, Epinephelus lanceolatus, Aquatic Living Resources, 28(1), 53-58.
Jung-Goo M., Chung-Bae K., Jae Myung Y., Eun Kyung L., Sung K., Choong-Hoon J., Byung-Il K., 2013, First Record of the Giant Grouper Epinephelus lanceolatus (Perciformes: Serranidae: Epinephelinae) from Jeju Island, South Korea, Fisheries and Aquatic Sciences, 16(1), 49-52.
Samoilys M., Jiddawi N., Robinson J., 2013, A niche fishery targeting the Giant Grouper (Epinephelus lanceolatus) in Zanzibar. In: Robinson, J. and Samoilys, M. (eds), Reef Fish Spawning Aggregations in the Western Indian Ocean : Research for Management, 93-101.
Sun Y., Guo C.-Y., Wang D.-D., Li X.F., Xiao L., Zhang X., You X., Shi Q., Hu G.-J., Fang C., Lin H.-R., Zhang Y., 2016, Transcriptome analysis reveals the molecular mechanisms underlying growth superiority in a novel grouper hybrid (Epinephelus fuscogutatus♀ × E. lanceolatus♂), BMC Genetics, 17, 24.
Yu Q., Liu M., Wei S., Xiao H., Wu S., Qin X., Shi D., Li S., Wang T., Li P., 2019, Isolation of Nervous Necrosis Virus from Hybrid Grouper (Epinephelus fuscoguttatus ♀ x Epinephelus lanceolatus ♂) Cultured in Guangxi, China, Fish Pathology, 54(1), 16-19.
La page sur Epinephelus lanceolatus sur le site de référence de DORIS pour les poissons : FishBase
La page de Epinephelus lanceolatus dans l'Inventaire National du Patrimoine Naturel : INPN