Ascidie coloniale en forme de vase, parfois allongée, jusqu’à 10 cm de diamètre
Couleur variable entre le vert, le blanc et le brun
Consistance molle, mucus collant
Orifices inhalants en nombreux petits trous rapprochés, un grand orifice exhalant au sommet
Réseau de canaux transversaux visible par le cloaque commun
Ascidie molle, didemnum molle, didemnide verte, synascidie-urne
Tall urn ascidian, green barrel sea squirt, green reef sea-squirt (GB), Ascidia urna verde (E), Grüne Riffseescheide (D), Grote kolonievormende urnzakpijp (NL)
Diplosomoides molle Herdman, 1886
Leptoclinum molle (Herdman, 1886)
Lissoclinum molle (Herdman, 1886)
Didemnum sycon Michaelsen, 1920
Indo-Pacifique tropical, mer Rouge
Zones DORIS : ● Indo-Pacifique, ○ [Mer Rouge]Cette espèce très commune est largement répartie dans le domaine Indo-Pacifique tropical, incluant la mer Rouge.
La grande synascidie-urne a été observée dès les premiers centimètres jusqu’à 60 m de profondeur, sur substrat* dur éclairé.
En Nouvelle-Calédonie, la forme verte et grosse vit sur des fonds de sable blanc au voisinage des eaux du large.
La grande synascidie-urne a la forme d’un vase ventru et court, de 1 à 10 cm de diamètre, avec de très petits et nombreux siphons inhalants sur la tunique* et un siphon exhalant de grande taille au sommet du vase. Certaines colonies sont de forme plus allongée, voire lobée.
La consistance est molle. L’urne a de la matière en son centre, qui est une invagination de la couche basale de la tunique, et un réseau de canaux qui relient le thorax de certains zoïdes individuels à l’ouverture cloacale commune.
Une couche de spicules* calcaires, sphériques et blancs, est présente dans la tunique commune. Ils sont souvent concentrés autour des siphons cloacaux qui apparaissent plus blancs que le reste de la tunique.
Les colonies sont de couleur verte, marron ou blanche, voire un mélange de ces couleurs selon la présence de lumière. La couleur verte est due à des algues symbiotiques* (voir § vie associée). Ainsi, les colonies présentes à faible profondeur sont généralement petites, d’un blanc brillant, dû à une grande densité de spicules en surface de la colonie, avec des pigmentations marron ou gris sombre. Les colonies présentes à plus grande profondeur sont plus grandes, moins pigmentées et ont moins de spicules.
La grande synascidie-urne sécrète de grandes quantités de mucus très collant, qui la rendent a priori facile à reconnaître au toucher !
Les colonies sont souvent rencontrées en fortes concentrations.
La grande synascidie-urne peut être confondue avec Atriolum robustum, la petite synascidie-urne, de 3 cm maximum, de couleur verte, rose et/ou marron, mais dont les siphons inhalants sont proportionnellement plus gros et moins nombreux. L’outre ne comporte pas de réseau de canaux qui relient les zoïdes au siphon cloacal commun et ne sécrète pas de mucus collant.
Chez Atriolum robustum, chaque siphon buccal est surélevé. La surface a un aspect de petites outres mamelonnées accolées contrairement à Didemnum molle. Notons que la confusion est tellement généralisée entre les petites colonies de D. molle et A. robustum, qu'il est difficile d'avoir un avis tranché, certains pensent que la "petite à gros trous" est réellement A. robustum et que la "bosselée" serait une autre espèce. Nous nous sommes référés aux publications de référence de C. et F. Monniot pour nous faire notre opinion personnelle.
Ces animaux sont des filtreurs* microphages*. Ils se nourrissent de petites particules, depuis les molécules en suspension, jusqu’aux débris et micro-organismes animaux et végétaux.
Les ascidies génèrent un courant d’eau (rentrant par les orifices inhalants individuels) pour capturer les particules en suspension. Les particules digérées et les déchets sortent ensuite par le gros siphon exhalant apical.
La reproduction peut être asexuée et sexuée.
Reproduction asexuée : formation et extension de la colonie par bourgeonnement à partir de l’individu souche.
Reproduction sexuée : les représentants de la famille des Didemnidés sont hermaphrodites*, la fécondation est interne et le développement indirect. Les gonades* se trouvent dans le post abdomen et c’est là qu’a lieu la fécondation. Le développement embryonnaire amène à la différenciation des organes internes, de la chorde* et de la queue pour former une larve nageuse ressemblant à un têtard. Ces larves* nageuses sont libérées dans le milieu par le siphon cloacal des zoïdes*. La vie pélagique* est très courte et les larves se fixent au substrat par des papilles adhésives. A partir de là, commence la métamorphose* qui donnera un individu adulte.
Les colonies se reproduisent par lobulation* : elles s'allongent et se segmentent en deux parties. Cette stratégie permet de coloniser de grandes surfaces et de s'adapter au substrat. Les colonies filles sont en général de la même couleur que la colonie mère.
Plus d’une dizaine d’espèces d‘ascidies tropicales de la famille des Didemnidés (dont la synascidie-urne) vivent en symbiose avec des cyanobactéries (procaryotes* photosynthétiques*, anciennement appelées algues bleu-vert) du genre Prochloron. Les cellules de Prochloron sont bien individualisées et sont situées sur la paroi du siphon cloacal de l’ascidie-urne. Elles contiennent comme pigment accessoire de la chlorophylle b (comme les plantes supérieures) mais pas de phycobilines, contrairement aux autres cyanobactéries. Cette caractéristique a laissé penser lors de leur découverte qu’elles pouvaient constituer un chaînon manquant entre les cyanobactéries et les végétaux supérieurs. Cependant, les études récentes basées sur l’analyse de leur génome ont démontré qu’il n’en est rien et que la capacité de synthétiser la chlorophylle b est sans doute apparue plusieurs fois au cours de l’évolution.
L'ascidie-urne est l'hôte des ectoparasites Lobomolgus okinawaensis et Doroixys capillosus.
Des vers plats commensaux du genre Ascidiophilla peuvent aussi se rencontrer sur ces ascidies (voir photo).
La synascidie-urne peut se déplacer grâce à des filaments sis sur la base en contact avec le substrat. Ces filaments s’accrochent à proximité et tirent l’ascidie vers sa nouvelle position.
Une étude a montré un déplacement de plusieurs centimètres d’une colonie sur 12 jours. En prime, les 16 ascidies initiales ont donné 35 ascidies par division de certaines d’entre elles pendant la migration (scission entre 2 siphons exhalants adjacents pendant l’élongation) !
En plus des spicules et du pigment brun, la synascidie-urne contient des composés anti-UV (mycosporines) dans sa tunique, qui sont d’autant plus concentrés que la profondeur est faible (et donc l’intensité lumineuse est forte). Les quantités de spicules, de pigment bruns et d’anti-UV sont ajustées selon la luminosité pour protéger les algues symbiotiques sans empêcher la photosynthèse.
Les cyanobactéries photosynthétiques du genre Prochloron ont une influence sur la croissance et la forme de la synascidie-urne. Le manque de lumière rend l’ascidie plus aplatie et l’incite à se déplacer. Un individu bien éclairé peut prendre 40 % de poids de plus qu’un individu exposé à une lumière plus faible.
La synascidie-urne produit de nombreux composés ayant des propriétés cyto-toxiques faisant l’objet de recherches en vue d’applications biomédicales.
Synascidie-urne se réfère à la forme en récipient de cette ascidie coloniale.
Ascidie molle se réfère à la consistance de ce tunicier.
Didemnum : du grec [duo] = deux et [demnion] = matelas, lit, dans le sens ici de "logette". En effet, dans le premier de ses "Mémoires sur les animaux sans Vertèbres", Savigny, le créateur de ce nom, décrit ainsi le genre Didemnum : "Polype occupant deux loges, abdomen pédiculé" ; par opposition au genre Aplidium : "Polype occupant une seule loge, abdomen et ovaire sessiles".
molle : du latin [mollis] = mou, souple.
Numéro d'entrée WoRMS : 212513
Termes scientifiques | Termes en français | Descriptif | |
---|---|---|---|
Embranchement | Chordata | Chordés | Animaux à l’organisation complexe définie par 3 caractères originaux : tube nerveux dorsal, chorde dorsale, et tube digestif ventral. Il existe 3 grands groupes de Chordés : les Tuniciers, les Céphalocordés et les Vertébrés. |
Sous-embranchement | Urochordata / Tunicata | Urochordés / Tuniciers | Chordés marins fixés (ascidies) ou pélagiques (thaliacés), solitaires ou coloniaux. Epaisse tunique cellulosique. Deux siphons, pharynx bien développé, la chorde larvaire régresse chez l'adulte (sauf chez les Appendiculaires). |
Classe | Ascidiacea | Ascidies / Ascidiacés | Tuniciers fixés. Solitaires ou coloniaux (seuls capables de bourgeonnement). Chorde uniquement au stade larvaire. Siphon inhalant au sommet, proche du siphon exhalant latéral. Souvent en eau peu profonde. |
Ordre | Aplousobranchia | Aplousobranches | Ascidies coloniales. |
Famille | Didemnidae | Didemnidés | Aplousobranches avec thorax et abdomen. Zoïdes très petits et courts formant de fines colonies encroûtantes. Incrustations calcaires étoilées. (Ce n'est pas le cas du genre Diplosoma). |
Genre | Didemnum | ||
Espèce | molle |
Couleur verte
La grande synascidie-urne a la forme d’un vase ventru et court, de 1 à 10 cm de diamètre, avec de très petits et nombreux siphons inhalants sur la tunique et un siphon exhalant de grande taille au sommet du vase. La couleur verte est due à la présence de cyanobactéries symbiotiques.
Nouvelle-Calédonie, île des Pins, Daa Djare, 10 m
06/10/2009
Dominante blanche
La couleur de la colonie dépend de la présence de lumière. La couleur blanche est due à la présence de spicules calcaires en grande concentration quand la colonie est exposée à une forte luminosité, ce qui permet de réfléchir la lumière et de protéger les cyanobactéries symbiotiques.
Moalboal (Philippines), 15 m
11/02/2008
Tricolore
Les colonies sont de couleur verte, marron ou blanche, voire un mélange de ces couleurs selon la présence de lumière. Les pigments bruns, les spicules blancs et l’anti-UV naturel sont ajustés selon la luminosité pour protéger les algues symbiotiques sans empêcher la photosynthèse.
Sulawesi Nord (Indonésie), Bunaken, 20 m
12/04/2010
Très brunes
Ces individus présentent une grande quantité de pigment brun sur la surface de la tunique. Les prochlorons verts (cyanobactéries) sont protégés dans l'ouverture cloacale.
Mayotte, Passe en S
30/01/2010
A faible profondeur
Ces jeunes colonies sont sur une roche exposée à la lumière. Sous forte luminosité à faible profondeur, les colonies sont souvent à dominante blanche (due aux spicules calcaires), mais ici le pigment brun est bien visible aussi.
Mayotte, Choizil, 2 m
17/11/2007
Réseau de canaux
Le réseau de canaux qui relient le thorax de certains zoïdes individuels à l’ouverture cloacale commune est bien visible sur les grandes colonies. Au centre, l'invagination de la couche basale de la tunique.
Alor (Indonésie), 15 m
07/04/2008
Avachie
Cette colonie allongée est peut-être en train de se déplacer et/ou va entamer le processus de reproduction asexuée.
Bali (Indonésie), Tulamben, 20 m
22/04/2011
Dressée
Etrange conformation comme campée sur deux jambes. Les ascidies violettes sont des ascidies encroûtantes Eusynstyela latericius.
Bali (Indonésie), 28 m
04/2009
Allongée
Pas moins de 4 orifices exhalants pour cette colonie ! A quand la lobulation ?
Philippines, Apo, 18 m
28/11/2011
Deux siphons exhalants
La présence d'un deuxième siphon exhalant est le prélude à la division pour former deux colonies distinctes selon le phénomène de lobulation*.
Malaisie, Mantabuan, 20 m
04/12/2008
C'est bien Didemnum molle !
Il est facile de confondre la grande et la petite synascidie-urne, c'est écrit partout. Et pour cause : la plupart des illustrations visibles dans les guides et sur le web concernant Atriolum robustum sont en fait des Didemnum molle... Ne regardez pas la taille relative et la densité des siphons inhalants. Si vous avez un doute, regardez à l'intérieur si l'ouverture est assez grande (la grande a les canaux internes transversaux caractéristiques qu'on aperçoit ici).
Maldives, Madivaru, 26 m
02/02/2006
Sur substrat mobile
Des aventurières, fixées sur un mollusque (vivant) Latirolagena smaragdula.
On voit bien sur cette photo les filaments sis sur la base en contact avec le substrat qui permettent à la colonie de se déplacer. Ces filaments s’accrochent à proximité et tirent l’ascidie vers sa nouvelle position.
Nouvelle-Calédonie, Voh, 9 m
12/11/2008
Solidaires
On voit bien les filaments grâce auxquels la petite colonie s'accroche à la grande. Cette dernière a élu domicile à l'extrémité d'un corail-fouet.
Mayotte, Passe en S, 15 m
05/02/2011
Anneau blanc
Les spicules calcaires sont souvent concentrés autour du siphon cloacal qui apparaît plus blanc que le reste de la tunique.
Malaisie, Mantabuan, 20 m
04/12/2008
En rangs serrés
Groupe de grandes ascidies-urnes sur un substrat rocheux.
Notez plusieurs colonies allongées présentant deux siphons exhalants, qui donneront bientôt 2 colonies distinctes.
Mayotte, Passe Nourrice, 4 m
02/10/2011
En brochette
Il n'est pas rare de rencontrer des colonies d'ascidies-urnes couvrant des branches de gorgones ou de coraux-fouets, formant une belle brochette.
Notez que plus la colonie est grosse, plus elle est déformée, seules les petites sont bien rondes.
Apo (Philippines), 19 m
16/02/2008
Sur un promontoire
Comme si elles montaient la garde sur un bout de corail mort.
Zanzibar, Kichuani Spot, 6 m
04/11/2011
Ver plat commensal
Un ver plat, Ascidiophilla alba Newman, 2002, est commensal de Didemnum molle. Il en reprend effectivement couleurs et motifs.
Philippines, 10 m
11/03/2011
Rédacteur principal : Véronique LAMARE
Vérificateur : Daniel VAULOT
Vérificateur : Frédéric ANDRÉ
Responsable régional : Véronique LAMARE
Cowan M.E., 1981, Field observation of colony movement and division of the ascidian Didemnum molle, Mar. Ecol. Prog. Ser., 6, 335–337.
Hirose E., Hirabayashi S., Hori K., Kasai F., Watanabe M.M., 2006, UV Protection in the Photosymbiotic Ascidian Didemnum molle Inhabiting Different Depths, Zoological Science 23(1), 57-63.
Lewin R.A., 1976, Prochlorophyta as a proposed new division of algae, Nature, 261, 697-698.
Olson R.R., 1983, Ascidian-Prochloron symbiosis: the role of larval photoadaptation in midday larval release and settlement, Biol. Bull, 165, 221-240.
Olson R.R., 1986, Light-enhanced growth of the ascidian Didemnum molle/Prochloron sp. symbiosis, Marine Biology, 93(3), 437-442.
La page de Didemnum molle dans l'Inventaire National du Patrimoine Naturel : INPN