Lophophore délicat en forme de fer à cheval spiralé
Lophophore de 2-3 mm de haut sur 5-10 mm de diamètre, 190 tentacules
Couleur blanchâtre à verdâtre
Animal tubicole dans un petit tube perforant ou incrusté (peu visible) sur divers substrats durs
Petit phoronidien
Horseshoe worm (nom pour les phoronidiens en général), lesser phoronid, westatlantic white phoronid (GB), Phoronide piccolo (I), Foronideo pequeno (E), Hufeisenwurm (idem), kleiner Phoronide, weißer Ostatlantischer Hufeisenwurm (D), Hoefijzerworm (idem), kleine phoronide, kleine hoefijzerworm (NL), Foronide pequeno (P), Liten foronide (N)
Phoronis (Crepina) gracilis van Beneden, 1858
Phoronis caespitosa Cori, 1889
Phoronis kowalesvkii Benham, 1889
Phoronis capensis Gilchrist, 1907
Océan Atlantique (incluant Manche, mer du Nord, Baltique), Méditerranée, mer Noire, Pacifique
Zones DORIS : ● Europe (côtes françaises), ○ [Méditerranée française], ○ [Atlantique Nord-Est, Manche et mer du Nord françaises], ● Indo-PacifiquePhoronis hippocrepia est principalement connu de l'océan Atlantique (incluant la Manche, la mer du Nord et la Baltique), de la Méditerranée, de la mer Noire. Quelques rares observations ont été validées dans le Pacifique.
Phoronis hippocrepia habite dans ou sur des substrats* durs, depuis la surface (zone de balancement des marées) jusqu’à 55 m de profondeur, mais en général de 0 à 10 m. Cette espèce fait partie de la faune fixée (sessile*) vivant sur le fond (benthos*). C’est une espèce à tendance sciaphile* qui vit dans les endroits plutôt peu éclairés comme les entrées de grottes sous-marines, dans le coralligène*, dans les ports. Cette espèce peut être perforante (coquilles de mollusques, roches calcaires, grès, coraux, algues calcaires encroûtantes) en milieu agité ou simplement encroûtante sur divers substrats en milieu calme (roches, coquilles, algues calcaires encroûtantes, bois).
Phoronis hippocrepia vit dans un tube chitineux*, enfoncé dans le substrat, difficile à voir ; en cas de danger elle s’y rétracte rapidement. Cette espèce est de couleur blanchâtre à verdâtre. Le plus souvent on ne voit que la couronne tentaculaire caractéristique en forme de fer à cheval, aux extrémités enroulées, nommée lophophore* (caractéristique des Lophophorates : Phoronidiens, Bryozoaires et Brachiopodes). Elle peut former des populations denses de plusieurs milliers d’individus par mètre carré.
Le lophophore en forme de fer à cheval, de 2 à 3 mm de haut et de 5 à 10 mm de diamètre, porte jusqu’à 190 tentacules*. L'animal mesure quelques centimètres de long (jusqu'à 10 cm) pour un diamètre maximum de 1,5 mm.
Le tube dans lequel vit Phoronis hippocrepia peut atteindre jusqu’à 10 cm de long. les tubes chitineux sont sinueux et emmêlés dans la forme perforante et recouverts de débris, fragments, grains de sable, vase pour la forme encroûtante.
Les lophophores* peuvent faire penser à de petites anémones de mer (cnidaires zoanthaires) ou au panache de certains annélides polychètes tubicoles. Ce lophophore ne semble pas se rétracter aussi rapidement que le panache des annélides polychètes. De loin on pourrait confondre ces organismes avec les scyphistomes* d’Aurelia aurita.
Pour une espèce de Phoronidien, l’identification visuelle ou sur photo est impossible sauf pour deux, voire trois, espèces sur les 11 décrites dans le monde.
La forme du lophophore présente une disposition caractéristique constante au sein d’une même espèce (c’est l’un des meilleurs critères de détermination). Le nombre des tentacules est lié à la configuration du lophophore et présente des variations importantes pour une même espèce (comme la taille et la couleur).
A part le biotope*, les dimensions et la coloration, tous les autres caractères pour une identification précise des Phoronidiens par les scientifiques nécessitent une analyse au microscope de coupes histologiques* afin de reconnaître le type de néphridie*, les fibres nerveuses géantes, les muscles longitudinaux, les gonades*, etc…
En France (sur le territoire métropolitain), seul le genre Phoronis est signalé avec 6 espèces : Phoronis ovalis, P .hippocrepia, P. australis, P. muelleri, P. psammophila, P. pallida ; dans les eaux européennes, s’y ajoutent les trois espèces du genre Phoronopsis : P. albomaculata, P. harmeri et P. californica
Phoronis hippocrepia est suspensivore* microphage*. Soumis au courant d’une masse d’eau, le lophophore* oriente sa bouche dans le courant et l'anus sous le courant ; il forme un entonnoir dirigé vers le courant pour faciliter la capture des particules alimentaires en suspension. En l'absence de tout courant, les Phoronis pivotent sur eux-mêmes à la recherche de nourriture.
Les particules alimentaires (algues, diatomées*, petits invertébrés, larves*, détritus) en suspension dans l’eau sont filtrées et retenues par les cils couvrant les tentacules du lophophore, puis acheminées par les cils jusqu’à la bouche située au centre du lophophore. Les particules non comestibles sont expulsées par le courant sortant aux extrémités des tentacules par le battement des cils.
Le tube digestif en U est complet avec un anus s’ouvrant à l’extérieur du lophophore, avec les néphridies* qui servent aussi de gonoductes*.
Ces organismes sont également capables d’absorber directement, à travers l’épiderme, des substances dissoutes comme les acides aminés (les constituants des protéines).
Phoronis hippocrepia est hermaphrodite* simultané (les organes mâles et femelles se développent en même temps dans l’animal) et pratique donc une reproduction sexuée pendant la saison estivale.
Les spermatozoïdes* sont dans un spermatophore* ovoïde qui est éjecté dans le milieu extérieur par les néphridies*. Ce spermatophore est présent uniquement chez les membres des espèces fouisseuses ou encroûtantes vivant à proximité les unes des autres.
Les spermatophores sont recueillis par d’autres individus et la fécondation, croisée, est interne. Les œufs fécondés sont expulsés à l’extérieur et se fixent dans la cavité formée par le lophophore. Cette espèce « couve » les embryons en deux masses paires à la base des tentacules internes de la la cavité formée par le lophophore. La ponte est continue, l’apport de nouveaux œufs à la masse pousse les plus vieux vers l’extérieur. Ils se développent en 4 à 5 jours en jeunes larves* actinotroques qui s’échappent.
Cette larve actinotroque planctonique* est propre aux phoronidiens. Elle a été considérée pendant quelques temps comme la forme adulte d’un organisme du plancton*. Elle a donc été décrite et a reçu un nom scientifique (Actinotrochia hippocrepia) qui n’est plus utilisé. Le lien avec l’adulte a été fait pour une autre espèce avant que l’on découvre la larve de P. hippocrepia. Cette larve actinotroque qui nage près de la surface a une vie pélagique* de plusieurs jours. Elle se nourrit d’organismes unicellulaires* (protozoaires*, diatomées*).
Après avoir sélectionné un endroit adéquat, cette larve subit une brusque et brève métamorphose* (15 à 20 minutes). Le jeune phoronidien va alors commencer à sécréter le tube chitineux dans lequel il va vivre.
Les larves actinotroques, selon les spécialistes, constituent une part importante de la biomasse du zooplancton et 25 (voire 40) types de larves différentes sont reconnues pour 11 espèces adultes connues.
Comme ces organismes possèdent également un important pouvoir de régénération, Phoronis hippocrepia peut se multiplier par fission transversale (reproduction asexuée).
Des parasites comme des Grégarines (micro-organismes protistes*) ont été observés dans le tube digestif de Phoronis hippocrepia ainsi que des Distomes (vers plats trématodes à deux ventouses) dans le corps.
Phoronis hippocrepia a été observé émergeant à la base de Caryophyllia smithi et de Leptopsammia pruvotii autour de l'île de Lundy (en mer celtique).
Phoronis hippocrepia comme d’autres vers perforants peut avoir un rôle écologique non négligeable. Cette espèce perfore le substrat en sécrétant son tube, parfois en profondeur. Elle peut aussi perforer les débris coquilliers.
Il n'y a pas d'organes de sens particulier à l'exception des cellules neurosensorielles de l'épiderme. Une paire de fosses ciliées appelées organes lophophores peut être présente dorsalement dans la concavité du lophophore. Elle est considérée comme glandulaire par certains et comme sensorielle par d'autres.
Dans la bibliographie on peut trouver le groupe des phoronidiens rabaissé au rang de classe par certains auteurs (Embranchement des Lophophoriens ou Lophophorates, ou encore Polyzoaires ou Tentaculaires).
Les prédateurs des Phoronidiens ne sont pas bien connus mais ils comprennent très certainement des poissons, des gastéropodes et des nématodes.
La partie antérieure du corps d’un phoronidien peut être consommée par un prédateur, mais elle peut être régénérée en deux ou trois jours.
Comme par endroits ces animaux peuvent former des populations denses (57 000 individus par m²), ils constituent certainement une importante source de nourriture pour les autres organismes.
Phoronis hippocrepia a une durée de vie d'environ une année.
Des Phoronis hippocrepia fossiles ont été observés dans des terrains du Cénomanien supérieur et Turonien inférieur soit de -95 à -88 millions d’années (Mésozoïque = secondaire) ainsi que dans des grès calcaires du Pliocène inférieur - 6 millions d’années (Cénozoïque ou Tertiaire).
Le nom français est directement dérivé du nom latin phoronis pour donner phoronidien. Il existe 11 espèces de phoronidiens ; aucune n’a de nom vernaculaire reconnu scientifiquement. L’espèce Phoronis hippocrepia n'est pas la plus petite espèce française observée en plongée, donc le nom de "petit phoronidien" parfois rencontré dans la littérature conviendrait plutôt à Phoronis ovalis qui est encore plus petite.
Proposition de DORIS : Phoronis au lophophore en fer à cheval.
Phoronis : selon Wright dans sa description du genre et de l’espèce en 1856, il précise que Phoronis est un des surnoms de la déesse égyptienne Isis. Toutefois dans la mythologie grecque Io (ou Isis) est la fille d’Inachus et soeur de Phoronée. Or selon les auteurs, Phoronis est l’épopée grecque de Phoronée (7ème ou 8ème siècle avant J.C.). Phoronée, roi du Péloponèse et premier roi d’Argos, est souvent considéré comme le fils d'un dieu du fleuve Inachos et d'une nymphe de l'océan Mélial. Il est reconnu pour avoir été le premier à unir les Grecs en un seul peuple. Auparavant, ils avaient vécu en groupes dispersés.
hippocrepia : la forme du lophophore (du grec [loph-] = panache, aigrette et [phor-] porter) évoque les articles échancrés en forme de fer à cheval de la gousse des plantes du genre Hippocrepis, du grec [hippo-] = cheval et [krepis] = une plante ou une semelle ou une chaussure, donc un fer à cheval.
Actinotroque : du grec [actin-] = rayon et du grec [troch- ou troqu-] = roue : à cause de la couronne rayonnante de tentacules portée par la larve
Numéro d'entrée WoRMS : 128548
Termes scientifiques | Termes en français | Descriptif | |
---|---|---|---|
Embranchement | Phoronida | Phoronidiens | Groupe marins benthiques, suspensivores sédentaires vermiformes non segmentés à symétrie bilatérale, et possédant un lophophore. Corps en 3 parties vivant dans un tube chitineux généralement recouvert de grains de sable. |
Famille | Phoronidae | Phoronidés | Unique famille de Phoronidiens. |
Genre | Phoronis | ||
Espèce | hippocrepia |
En Bretagne
Présence d’embryons dans les lophophores en forme de fer à cheval. Phoronis hippocrepia peut être régulièrement observé en Bretagne.
Trebeurden (22), 15 m
12/08/06
A Arcachon
Phoronis hippocrepia en forte densité avec des embryons dans le lophophore. En bas à gauche, deux clavelines (Clavelina lepadiformis).
Arcachon (33)
04/2000
Vue des tubes
Phoronis hippocrepia sous forme encroûtante avec vue des tubes recouverts de grains de sable et divers débris ; des embryons dans les lophophores.
Thau (34), 21 m
08/10/2005
Dans l'étang de Thau
Phoronis hippocrepia sous forme perforante. Les animaux sont en pleine extension. Embryons dans les lophophores. Ce phoronidien peut coloniser des milieux plus saumâtres que la mer, comme ici l'étang de Thau.
Thau (34), 6 m
07/10/2006
En mer du Nord
Vue rapprochée. La disposition du panache tentaculaire en fer à cheval est bien visible. Quelques individus portent des embryons.
Dunkerque (59), 10 m
2003
Bouquet discret sur la roche
Phoronis hippocrepia est ici en compagnie d'éponges tubulaires.
Ponton de la Bordelaise, étang de Thau, 3 m
05/10/2019
En Méditerranée
On peut trouver Phoronis hippocrepia le long des tombants et à l’entrée de grottes sous-marines comme ici dans le golfe de Marseille.
Tiboulen de Maire, Marseille (13), 20 m
26/05/2007
Détail des lophophores
Observez la structure fine des lophophores et de leurs tentacules ; dans chacun de ces derniers circule un capillaire avec du sang rouge.
Méditerranée française, Côte Vermeille (66)
2006
De beaux lophophores
Quelques lophophores en pleine expansion en Zélande.
Grevelingen, Zélande, Pays-Bas, 7 m
10/08/2015
Quelques aspects du lophophore de Phoronis hippocrepia
Figure 1 : vue de côté, Figure 2 : vue par dessus, Figure 3 : vue frontale du lophophore de Phoronis hippocrepia
Dyster F.D., 1858, Notes on Phoronis hippocrepia, Transactions of the Linnean Society of London 22:251-255, Figs 1,2,3,
Reproduction de documents anciens
1858
Comparaison de Phoronis hippocrepia et de Phoronis ovalis
Figure 1 : Phoronis hippocrepia agrandie et taille réelle ; Figure 2 : Phoronis ovalis agrandie et taille réelle.
Wright, T.S 1856. Description of two tubicolar animals. Proceedings of The Royal Physical Society of Edinburgh. 1: 165-167. + pl fig 1 et 2
Reproduction de documents anciens
1856
Quelques stades de la larve actinotroque de Phoronis hippocrepia
Juste pour montrer l'aspect de la larve actinotroque à différents stades de développement, avec sa pigmentation caractéristique.
Emig C. C., 1982, The biology of Phoronida, Advances in marine Biology, 19, 1-89 p. fig 13 page 23
Reproduction de documents anciens
1982
Rédacteur principal : Yves MÜLLER
Rédacteur : Frédéric ANDRÉ
Vérificateur : Frédéric ANDRÉ
Responsable historique : Frédéric ZIEMSKI
Responsable régional : Yves MÜLLER
Dyster F.D., 1858, Notes on Phoronis hippocrepia, Transactions of the Linnean Society of London, 22, 251-255.
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Emig C. C., 1999. C'est quoi un phoronidien? http://paleopolis.rediris.es/Phoronida/.
Emig C C., Roldán C., J.M. Viéitez, 1999, 2006, Les Phoronidiens des côtes européennes.
Phoronida database : avec données et bibliographie complètes sur chaque espèces – avec mises à jour régulières.
Photograph Album of the Lophophorates for Phoronis hippocrepia.
La page de Phoronis hippocrepia dans l'Inventaire National du Parimoine Naturel : INPN