Janthine pâle

Janthina pallida | W. Thompson, 1840

N° 4463

Cosmopolite (presque uniquement dans l'Atlantique intertropical et tempéré, toute la Méditerranée)

Clé d'identification

Coquille globuleuse fine et fragile
Couleur blanchâtre ou violet très pâle
Vit en surface, accrochée à son radeau de bulles, souvent associée aux vélelles
Ponte rose collée au radeau de bulles
Hauteur de la coquille jusqu’à 25 mm
Ouverture très large et plus haute que le dernier tour, dilatée en avant

Noms

Noms communs internationaux

Violet snail, purple sea snail, common purple sea snail, bubble raft shell, pale purple sea snail, pale janthina (GB), Veilchenschnecke, Flosschnecke (D), Paarse zeilslak (NL), Caracol violeta (E), Conchiglie planctoniche (I)

Synonymes du nom scientifique actuel

Janthina rosea Anton, 1839
Janthina patula Philippi, 1844
Janthina striolata A. Adams & Reeve, 1848
Janthina pallida var. minor Monterosato, 1878
Amethistina laeta Monterosato, 1884
Janthina laeta Monterosato, 1884

Le nom de genre Ianthina est également rencontré dans les publications. Souvent utilisée par les auteurs du XIXème siècle, un peu moins au cours du XXème, cette orthographe n'est pas valide et ne doit plus être utilisée.

Distribution géographique

Cosmopolite (presque uniquement dans l'Atlantique intertropical et tempéré, toute la Méditerranée)

Zones DORIS : ● Atlantique Nord-Ouest, ● Caraïbes, ● Indo-Pacifique, ● Europe (côtes françaises), ○ [Méditerranée française]

Cette espèce semble présente presque uniquement dans l'Atlantique intertropical et tempéré, toute la Méditerranée comprise. Elle a très rarement été signalée ailleurs comme au Mozambique, en Inde ou dans le Pacifique et en Australie, mais il pourrait s'agir d'erreurs taxonomiques.

Elle n'est pas présente sur la façade atlantique française.

Biotope

La janthine pâle est un organisme de pleine mer (pélagique*) qui fait partie du pleuston*, c'est-à-dire des organismes aquatiques qui vivent en surface, à l'interface eau-air. Elle préfère les eaux chaudes des zones tropicales et tempérées. Elle flotte près de la surface accrochée à un radeau de bulles. Le vent peut la ramener près des côtes où elle s'échoue. Elle est fréquemment retrouvée sur des hydrozoaires pélagiques tels que les vélelles (Velella velella) et parfois aussi les physalies (Physalia physalis).

Description

La janthine pâle se tient à l'envers, accrochée à son radeau de bulles qu'elle fabrique avec du mucus.
Sa coquille globuleuse est fine et fragile. Elle mesure jusqu'à 25 mm. Sa surface est marquée de fines stries axiales et spirales. Elle a un apex* bien marqué et environ 4 spires* munies d'une petite carène*. Son ouverture est très large et plus haute que le dernier tour, et elle porte une petite incision. Elle est dilatée en avant. Le labre* interne s'enroule autour de la columelle*. La coquille n'a pas d'opercule* ni d'ombilic* chez l'adulte.
La coloration de la coquille est blanchâtre ou violet très pâle, elle est parfois plus foncée à la base (côté pied). Les deux zones sont alors nettement séparées.
Les parties molles de l'animal sont de couleur gris à violet foncé, presque noire. La tête présente un long proboscis* (trompe) cylindrique, terminé par la bouche. Elle porte une paire de tentacules* sensoriels fourchus. Les yeux ne sont pas visibles.

Espèces ressemblantes

Dans les années 50, pas moins de 60 espèces étaient décrites dans le genre Janthina. Une révision du genre en 1953 a réduit leur nombre à 5. Ces différentes espèces, toutes cosmopolites, sont rarement rencontrées mais peuvent être facilement confondues avec Janthina pallida.

Janthina janthina (Linnaeus, 1758) : la coquille, de forme triangulaire, présente des tours peu bombés, marqués de fines stries axiales et spirales. Elle mesure jusqu'à 30 mm, rarement plus, ce qui en fait l'espèce la plus grande du genre Janthina. Le labre externe et la columelle* se rejoignent pour former un angle droit. Il n'y a pas d'ombilic*. De couleur violette, elle est plus foncée à la base. Les parties molles de l'animal sont de couleur violet foncé, presque noire. Chez cette espèce, il n'y a pas de ponte rose sous le radeau de bulles comme c'est le cas chez toutes les autres espèces du genre Janthina.

Janthina exigua Lamarck, 1816 : la coquille, plus petite, mesure entre 5 et 17 mm (exceptionnellement 30 mm). Elle est relativement haute et pointue. Elle présente de fines stries de croissance, en chevrons sur le dernier tour. Ces chevrons forment un sillon se terminant par une échancrure bien nette au niveau du labre externe. L'ouverture arrondie est nettement plus petite que le dernier tour. La coquille de couleur violette présente une ligne pâle sous la suture* séparant les 5 tours de spire. L'espèce est cosmopolite dans les mers tempérées et tropicales. Elle est rare en métropole et a été signalée à la Réunion. Sa ponte est rose.

Janthina globosa Swainson, 1822 : la coquille globuleuse mesure jusqu'à 24 mm de haut (rarement 40 mm). Elle est couverte de stries de croissance en chevrons sur le dernier tour. Son ouverture est large. La columelle est droite et forme un prolongement au niveau du labre. Ce dernier peut montrer une légère échancrure. Une profonde suture sépare les tours de spire. De couleur violette, la coquille présente une ligne pâle sous cette suture. L'espèce est cosmopolite dans les mers tempérées et tropicales.

Janthina umbilicata d'Orbigny, 1840 : c'est l'espèce la plus petite. La coquille mesure jusqu'à 9 mm (rarement jusqu'à 14 mm). De couleur violet foncé, elle est plus allongée et présente un apex pointu. Elle est couverte de fines stries sur les tours, en chevrons sur le dernier tour. Un sillon profond, formé par les chevrons, se termine au niveau de l'ouverture par une nette échancrure. Cette espèce est pantropicale. Elle ne se rencontre ni en Europe, ni en Méditerranée.

Un autre genre, rare et peu étudié, fait également partie de la famille des janthinidés, le genre Recluzia. La coquille assez allongée, de couleur marron, est couverte d'un périostracum* vert olive. Le corps de l'animal est jaune. Dans ce genre, une espèce se rencontre à la Réunion : Recluzia jehennei Petit de la Saussaye, 1853.

Alimentation

Il ne semble pas y avoir de données précises sur l'alimentation de Janthina pallida. D'une façon générale, les janthines sont des espèces carnivores qui se nourrissent d'hydrozoaires pélagiques tels que la vélelle Velella velella (Linnaeus, 1758), la physalie Physalia physalis (Linnaeus, 1758) ou les porpites Porpita porpita (Linnaeus, 1758). Des insectes marins de la famille des Gerridae (genre Halobates par exemple) ont également été signalés au menu des janthines.
Le cannibalisme au sein de la famille des janthinidés n'est pas rare.

La radula* des janthines ne présente pas de dents médianes, comme la grande majorité des Mollusques Gastéropodes. En revanche, elle possède un nombre indéfini de longues dents latérales, en forme de crochet, parfaitement adaptées pour saisir ses proies.

Reproduction - Multiplication

Ce gastéropode serait hermaphrodite* protandre*, c'est-à-dire d'abord mâle puis femelle. Apparemment, les individus de petite taille seraient les mâles et ceux de grande taille les femelles. Il n'y aurait qu'un changement de sexe au cours de la vie d'un individu.
La reproduction de la janthine est quelque peu inhabituelle. Le mâle ne possède pas d'organe copulateur, il produit deux types de spermatozoïdes*, et les femelles n'ont pas d'organe pour recevoir et stocker le sperme des mâles. Pour éviter la dispersion des spermatozoïdes dans le milieu environnant, le mâle va en produire un deuxième type, plus gros, qui n'est pas fertile (appelé spermatozoïde oligopyrène). Son rôle est de transporter les spermatozoïdes fertiles (ou spermatozoïdes eupyrènes), qui vont s'attacher en grand nombre au niveau de sa queue (formant une structure appelée spermatozeugma). Lors de l'accouplement, les deux individus se retrouvent face à face, dans une position de "pseudo-copulation", et les spermatozoïdes "transporteurs" vont se déplacer jusqu'à la cavité palléale* de la femelle. C'est à ce moment-là, que les spermatozoïdes fertiles vont quitter leur "véhicule" et entrer dans le canal génital* de la femelle pour aller féconder les ovocytes* dans l'ovaire.

Cette espèce est ovipare* comme les autres espèces de janthines, à l’exception de Janthina janthina qui est ovovivipare*. La femelle pond des œufs de couleur rose dans des capsules en forme de poire, qu'elle attache au-dessous de son radeau de bulles. Quand les larves éclosent, au stade véligère*, elles prennent un peu d'air de ce radeau pour produire à leur tour leurs propres bulles.

Vie associée

Les janthines sont fréquemment retrouvées sur des hydrozoaires pélagiques dont elles se nourrissent (Velella velella, Physalia physalis et probablement Porpita porpita).

La coquille offre un site de support à de nombreuses espèces dans un environnement pauvre en substrat* solide. Elle peut servir de support à des gastéropodes nudibranches pélagiques comme l'éolis à pinnules Fiona pinnata (Eschscholtz, 1831). Elle peut être couverte d'espèces opportunistes telles que des anatifes du genre Lepas ou des colonies d'hydraires de l'espèce Obelia geniculata (Linnaeus, 1758). Elle peut également servir de lieu de ponte pour le nudibranche pélagique Glaucus atlanticus Forster, 1777. Le crabe de Christophe Colomb Planes minutus (Linnaeus, 1758) est de couleur bleue s'il est présent parmi les janthines.

Les janthines sont un hôte intermédiaire du copépode parasite du genre Cardiodectes. Il vit librement dans la cavité palléale ou accroché aux lamelles branchiales. La proportion d'individus parasités est très élevée. Lors d'une étude dans les Caraïbes, à la Barbade, sur 125 spécimens collectés, 115 étaient parasités par ce copépode. En général, les hôtes finaux des copépodes du genre Cardiodectes sont des poissons-lanternes vivant dans la zone bathypélagique*, entre 300 et 1500 mètres de profondeur.

Cette espèce fait partie des rares prédateurs d'hydrozoaires pélagiques. Avec le genre Recluzia, seuls les nudibranches pélagiques, les tortues marines et le marlin sont connus pour se nourrir de physalie. Les janthines auraient un rôle non négligeable dans la régulation des populations de Physalia, Velella et Porpita. Même de petites populations de ces hydrozoaires montrent au moins quelques janthines.

Les tortues marines en général et la tortue caouanne Caretta caretta (Linnaeus, 1758) en particulier, sont des prédateurs des janthines. Les autres prédateurs sont les oiseaux de haute mer (comme les albatros et les puffins) ou des oiseaux plus côtiers comme les laridés, ainsi que les poissons pélagiques comme la thonine commune Euthynnus alletteratus (Rafinesque, 1810) ou la coryphène commune Coryphaena hippurus Linnaeus, 1758.

Divers biologie

Afin de se défendre, les janthines utilisent le camouflage. Sous l'eau, les poissons auront des difficultés à distinguer la partie claire de la coquille sur un fond clair (ciel). Vu du ciel, les oiseaux auront du mal à détecter la partie plus foncée de la coquille sur le bleu foncé des profondeurs. Cette forme de camouflage est appelée contre-illumination ou loi de Thayer.

Lors de la prédation d'hydrozoaires pélagiques, il n'est pas rare d'observer l'émission d'un liquide bleu-violet. Certains auteurs ont suggéré que ce liquide a un rôle anesthésiant sur la proie, dans le but d'éviter la décharge des nématocystes*. Cette hypothèse reste cependant à confirmer.
Ce colorant bleu-violet pourrait également servir de moyen de défense face aux éventuels prédateurs.

Le radeau de la janthine est essentiel à sa survie. Si elle s'en détache, elle va couler immédiatement. Sans accès à l'air, elle sera incapable d'en reconstruire un. Au moment de se nourrir, la janthine peut se séparer temporairement de son radeau pour pouvoir se déplacer librement sur sa proie. Elle pourra alors le récupérer, resté attaché au bord de sa proie, ou en reconstruire un nouveau. La construction d'un radeau prend environ 1 heure.

Informations complémentaires

La janthine pâle est rarement observée sur nos côtes, toutefois elle peut s'échouer en grand nombre sur les plages comme aux printemps 2017 et 2018.

Des études récentes montrent que la famille des janthinidés dérive de la famille des épitoniidés. Ces mollusques benthiques*, dont fait partie le scalaire, Epitonium clathrus (Linnaeus, 1758), se nourrissent d'anémones ou de coraux. Lors de la ponte, un mucus est sécrété par les femelles afin de protéger les œufs.

La théorie actuelle concernant l'évolution vers un mode de vie neustonique* est que, dans un premier temps, des bulles d'air ont été emprisonnées au sein du mucus protégeant les œufs. Cette bouée de mucus a permis à la femelle de monter à la surface, le mâle restant au fond. Cette caractéristique se retrouve dans le genre Recluzia qui est, d'un point de vue phylogénétique, un intermédiaire entre les épitoniidés et le genre Janthina.
Dans un deuxième temps, les mâles auraient acquis la capacité à former ces bouées. Ces adaptations, représentant un avantage pour l'accès à la nourriture, ont été conservées par le processus de sélection naturelle.

L'opercule est absent chez l'adulte mais bien présent chez la larve. Lors de la métamorphose*, celui-ci va disparaître. En effet, le mode de vie de la janthine, en permanence attachée à son radeau, rend l'opercule inutile, la sélection naturelle l'a éliminé.

Les juvéniles ont une coquille dextre* (enroulée à droite) ; celle des adultes aussi, comme la plupart des autres gastéropodes.

Les janthines feraient partie des coquillages dont on a extrait la pourpre naturelle dans l'Antiquité. En effet, après un traitement acide, le liquide bleu-violet qu'elles sécrètent passe très rapidement au rouge. A Narbonne, les romains avaient des ateliers de teinture, très célèbres pour leur pourpre. Les janthines, dont on retrouve parfois les coquilles en grand nombre sur les plages narbonnaises, devaient être utilisées, en plus de Bolinus brandaris (Linnaeus, 1758), Hexaplex trunculus (Linnaeus, 1758) et Stramonita haemastoma (Linnaeus, 1767).

D'une façon générale, les diverses espèces de janthines sont très prisées par les collectionneurs de coquillages, en raison sans doute de leur rareté relative et de leur belle couleur bleue. Plusieurs timbres postaux ont été édités représentant ces coquillages.

Origine des noms

Origine du nom français

Janthine pâle : nom dérivé du nom scientifique et relatif à la coloration de la coquille, blanchâtre ou violet très pâle.

Origine du nom scientifique

Janthina : du grec [ianthinos] = relatif à la couleur violette.

pallida : du latin [pallida] = pâle, blême. Allusion à la coloration de la coquille.

Classification

Termes scientifiques Termes en français Descriptif
Embranchement Mollusca Mollusques Organismes non segmentés à symétrie bilatérale possédant un pied musculeux, une radula, un manteau sécrétant des formations calcaires (spicules, plaques, coquille) et délimitant une cavité ouverte sur l’extérieur contenant les branchies.
Classe Gastropoda Gastéropodes Mollusques à tête bien distincte, le plus souvent pourvus d’une coquille dorsale d’une seule pièce, torsadée. La tête porte une ou deux paires de tentacules dorsaux et deux yeux situés à la base, ou à l’extrémité des tentacules.
Sous-classe Caenogastropoda Caenogastropodes
Ordre non attribué non attribué

Ce taxon n'a pas encore reçu un nom de la part des spécialistes.

Famille Janthinidae Janthinidés

Coquille mince, légère, turbinée-arrondie, violette ou incolore. Lindner 2011:94. Animal vivant à la surface des océans fixé à un radeau de bulles.

Genre Janthina
Espèce pallida

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