Deux nageoires céphaliques de grande taille en avant de la tête
Bouche terminale
5 Fentes branchiales sur la face ventrale
Corps aplati, 2,2 à 2,4 fois plus large que long
Envergure maximale de 5,5 m
Face ventrale généralement blanche, tachée de noir, dos noir taché de blanc
Taches d'épaule s'incurvant vers la partie postérieure au milieu du dos où elles peuvent se rejoindre
Taches d'épaule en forme de crochet vers le centre du dos au niveau des spiracles
Pas d'épine caudale
Caudale pouvant atteindre 123 % de la longueur du corps
Diable de mer, manta d'Alfred
Manta ray, Alfred manta, Prince Alfred's ray, inshore manta ray, coastal manta ray, resident manta ray (GB), Diavolo di mare (I), Manta (E), Riesenmanta, Riesen-Teufelsrochen (D), Manta, duivelsrog (NL), Jamanta, diabo-do-mar (P), Fafa piti (Tahitien)
Ceratoptera alfredi Krefft, 1868
Deratoptera alfredi Krefft, 1868 (mauvaise orthographe)
Manta alfredi (Krefft, 1868)
Manta fowleri Whitley, 1936
Manta pakota Whitley, 1936
Mer Rouge, Indo-Pacifique tropical et subtropical Ouest et central
Zones DORIS : ● Indo-Pacifique, ○ [Mer Rouge]On rencontre les raies manta dans la plupart des mers tropicales du globe (circumtropicales*), mais aussi dans certaines eaux tempérées (Canaries, Madère). En Atlantique Ouest, on les trouve des Bermudes à la Caroline du Sud (parfois plus au nord puisqu'elle a été observée au Canada), et du Brésil à l'Uruguay.
Selon Marshall (2009), Mobula alfredi serait la plus tropicale des raies manta, très présente en mer Rouge et dans l'Indo-Pacifique tropical et subtropical Ouest et central (présence avérée en Nouvelle-Calédonie et en Polynésie). Elle est aussi présente dans l'Atlantique tropical Est. Les individus, capables de migration, restent cependant souvent dans la même zone.
Les raies manta sont des espèces pélagiques*, habituellement observées près de la surface, rarement à plus de 40 m de profondeur. Elle sont néanmoins présentes beaucoup plus profond avec un record de profondeur nocturne de 672 m (voir divers biologie). Elles sont souvent observées dans les passes récifales. Elles fréquentent les eaux côtières, près des récifs coralliens.
Les raies manta possèdent un corps aplati. Les yeux et les spiracles* sont latéraux alors que les 5 fentes branchiales sont sur la face ventrale.
La tête est très large, et porte deux nageoires céphaliques deux fois plus longues que larges qui sont des extensions de ses nageoires pectorales. Lorsque la raie se déplace, ces deux lobes sont enroulés en spirale et pointés vers l'avant pour favoriser la pénétration dans l'eau. Pour se nourrir, elle les déroule afin de s'en servir pour canaliser l'eau vers sa bouche.
Mobula alfredi ne dépasse pas une envergure de 5,5 m. L'envergure est d'environ 2,2 à 2,4 fois la longueur du corps (queue exclue).
Chaque individu possède une coloration unique qui peut servir à l'identifier. En effet, le dos est noir, voire bleu nuit, et porte en général de larges taches blanches au niveau des épaules. La partie antérieure des taches d'épaules s'incurve vers le milieu du dos où elle peut continuer vers l'arrière de manière diffuse, suivant des tailles et des formes variables. Elle débute derrière les spiracles, formant à ce niveau un dessin en forme de crochet qui se rabat vers le centre du dos. Les deux taches d'épaule peuvent fusionner au milieu du dos.
La face ventrale est blanche avec des points noirs qui peuvent être absents ou se trouver n'importe où. Une petite tache semi-circulaire est présente des 2 côtés juste sous la 5e fente branchiale.
La bouche, de forme rectangulaire, est en position terminale. Elle est de couleur blanche ou gris clair.
Mobula alfredi ne présente pas de masse calcifiée dans la partie postérieure de son dos ni d'épine caudale. La queue est en forme de fouet. Quand elle est entière, elle peut atteindre 123 % de la longueur du corps.
Les raies manta se déplacent en faisant mouvoir leurs nageoires simultanément de haut en bas, donnant l'impression qu'elles volent sous l'eau.
Le genre Manta a été invalidé en 2017 au profit du genre Mobula suite à des analyses ADN poussées. Les différences notoires qui justifiaient le genre Manta (position terminale de la bouche, l'absence de dent sur la mâchoire supérieure, une queue beaucoup plus courte et dépourvue d'aiguillon (celui de M. birostris est très court et à la base de la caudale) apparaissent comme des caractères dérivés secondaires du genre Mobula.
Mobula birostris a des taches d'épaule qui ne se rejoignent pas au milieu du dos, et dont la partie antérieure est parallèle à la bouche. Elles forment au niveau des spiracles un dessin en forme de crochet qui s'enroule vers l'extérieur. La face ventrale ne porte pas de taches noires dans la zone médiane entre les fentes branchiales. Une tache noire semi-circulaire est visible sous la 5e paire de fentes branchiales. Une épine caudale réduite est présente à la base postérieure de la dorsale.
Mobula birostris a l'aire de répartition la plus étendue, bien qu'elle soit moins souvent rencontrée que M. alfredi. Elle est présente dans les eaux tempérées en plus de certaines eaux tropicales (en particulier au nord de la mer Rouge, dans le Pacifique Est, l'Atlantique Ouest, la partie ouest de l'océan Indien). C'est une espèce migratrice qui rejoint des lieux de vie prédéfinis, les populations ne se mélangent pas.
Les raies manta se nourrissent de plancton*, de crustacés et occasionnellement de petits poissons qu'elles dirigent vers leur très grande bouche à l'aide de leurs nageoires céphaliques. La mâchoire inférieure est pourvue de centaines de très petites dents dont on ignore la fonction, mais dont la forme et la disposition constituent un critère de distinction des espèces.
Les raies manta sont des espèces ovovivipares* : les œufs éclosent à l'intérieur du corps de la femelle, les jeunes se nourrissant initialement de leurs réserves vitellines puis absorbant un fluide composé de mucus, graisses et protéines fourni par la mère grâce à des structures spécialisées.
Les ptérygopodes* (organes copulateurs du mâle) sont situés à la base de la queue. Ce sont des structures molles et cartilagineuses très semblables à celles que l'on rencontre chez les requins.
L'accouplement dure environ deux minutes, il est précédé par une poursuite de la femelle par le mâle durant laquelle le couple effectue des vrilles et des loopings spectaculaires. Pour Manta alfredi, la reproduction a lieu en moyenne tous les 2 ans (entre 1 et 5 ans selon individus). La maturité sexuelle est atteinte au bout de 6 ans pour les mâles (entre 2,5 et 3 m d'envergure), plus tard pour les femelles (entre 3 et 4 m d'envergure). Au bout de 12 mois de gestation, la femelle met bas un (parfois deux) petit par portée qui pèse environ 10 kg et mesure environ 1,5 m d'envergure à la naissance.
Les raies manta sont souvent accompagnées par le rémora (Remorina albescens).
On rencontre également les raies manta aux « stations de nettoyage » où elles laissent aux labres nettoyeurs (Labroides dimidiatus) le soin de nettoyer leurs fentes branchiales.
La structure de la peau, les denticules* dermiques et les dents sont aussi des critères d'identification, non accessibles sur une photo. On se contentera donc de l'analyse des taches sur les 2 faces de l'animal et de la présence ou non de la masse à la base de la caudale pour identifier une raie manta.
La raie manta vit en petits groupes, il est rare de la rencontrer seule. Elle a une longévité estimée à 20 ans.
Elle est d'un naturel placide et curieux et s'approche volontiers des plongeurs. Elle ne connaît guère de prédateurs, seuls des individus blessés peuvent faire partie du menu des requins.
Elle fait parfois des bonds de plusieurs mètres au dessus de la surface, retombant dans une gerbe d'eau spectaculaire.
Une étude publiée en 2020 a montré que Mobula alfredi pouvait plonger régulièrement à plus de 200 m de profondeur avec un record à 672 m. Ces plongées profondes ont lieu principalement la nuit et semblent liées à la recherche de nourriture.
Comme pour beaucoup d'élasmobranches, les traits de vie de ces espèces (longévité importante, faible fécondité) les rendent très sensibles à l'exploitation par l'homme. Quelques pêcheries de raies manta existent pourtant aux Philippines, Mexique, Mozambique, Madagascar, Inde, Sri Lanka, Brésil, Tanzanie et Indonésie. Les nageoires, la peau, le foie, la chair et les filaments branchiaux sont utilisés pour le marché local ou exportés. La demande récente pour les filaments branchiaux, qui sont séchés et exportés sur les marchés asiatiques, a fait augmenter de manière très importante la pression de pêche sur les Manta et Mobula. Les raies manta font aussi partie des captures accessoires des thoniers senneurs ainsi que des systèmes de protection contre les requins.
Des déclins de populations ont été notés aux Philippines, Mexique, Inde, Sri Lanka, et Indonésie. Bien que des données de pêches soient rarement disponibles, la faible taille des populations ainsi que les migrations peu importantes font que le risque d'extinction local est important avec peu de possibilité que les populations disparues soient remplacées naturellement.
Les diverses pressions anthropiques (pêche directe ou indirecte, pollution, exploitation des milieux côtiers) dans les zones importantes pour l'espèce (reproduction, mise bas, nourriceries pour les jeunes), où les individus se concentrent, sont aussi un danger pour ces espèces.
Il a été démontré que certaines populations de raies manta (Hawaï, Yap) n'ont quasiment pas d'échanges avec d'autres populations et présentent une grande fidélité envers certains sites avec peu ou pas de déplacements en dehors des groupes d'îles. Ailleurs, d'autres études ont montré que certains individus sont résidents alors que d'autres se déplacent. Dans beaucoup d'endroits, en Nouvelle-Calédonie par exemple, il est connu que l'observation des raies manta est liée aux saisons.
Du fait de ces différences de comportements suivant les sites et suivant les individus, les mesures de gestion ne peuvent être que locales.
Mobula alfredi est classée depuis 2011 comme vulnérable (VU) dans la liste rouge de l'UICN (Union Internationale pour la Conservation de la Nature).
Depuis le 12 Juin 2013, toutes les espèces de l'ex genre Manta sont inscrites à l'Annexe II (espèces qui, bien que n'étant pas nécessairement menacées actuellement d'extinction, pourraient le devenir si le commerce de leurs spécimens n'était pas étroitement contrôlé) de la CITES (Convention sur le commerce international des espèces de faune et de flore sauvages menacées d'extinction).
Cette espèce est réglementée en Nouvelle-Calédonie, par parution de l'Arrêté n° 2013-1007/GNC du 23 avril 2013 relatif à l'exploitation des requins dans l'espace maritime de la Nouvelle-Calédonie : Article 3 : "Sont interdits en tout temps la pêche, la capture, la détention de requins ou de tout ou partie de l'animal. La découpe, le transport, la commercialisation, l'exposition à la vente, la vente, l'achat et l'exportation de requin ou tout ou partie de l'animal, y compris les articles de bijouterie, sont interdits. La mutilation par l'enlèvement des nageoires ou parties des nageoires (« shark-finning ») est interdite."
Diable de mer : nom donné par les pêcheurs du monde entier. Des légendes rapportent que la raie manta pouvait entraîner par le fond les bateaux de pêche. En Polynésie, on raconte qu'elle venait recouvrir, de son large « manteau », les pêcheurs de perles, apnéistes, pour les noyer…
Les faits démontrent qu'elle est totalement inoffensive pour l'homme…
Manta des récifs : par opposition à la manta géante M. birostris, qui est une grande migratrice.
Manta : de l'espagnol [manta] = manteau.
Mobula : probablement diminutif du mot mobular, nom d'une raie aux Caraïbes.
alfredi : en l'honneur du Prince Alfred 1er de Saxe-Cobourg et Gotha (1844-1900), 4e enfant de la Reine Victoria, qui a d'abord fait carrière dans la Royal Navy, période pendant laquelle il a fait le tour du monde en tant que commandant de la frégate HMS Galathea. Il est le premier membre de la famille royale d'Angleterre à avoir visité l'Australie.
Numéro d'entrée WoRMS : 1042871
Termes scientifiques | Termes en français | Descriptif | |
---|---|---|---|
Embranchement | Chordata | Chordés | Animaux à l’organisation complexe définie par 3 caractères originaux : tube nerveux dorsal, chorde dorsale, et tube digestif ventral. Il existe 3 grands groupes de Chordés : les Tuniciers, les Céphalocordés et les Vertébrés. |
Sous-embranchement | Vertebrata | Vertébrés | Chordés possédant une colonne vertébrale et un crâne qui contient la partie antérieure du système nerveux. |
Classe | Chondrichthyes | Chondrichthyens | Squelette cartilagineux, deux nageoires dorsales et une anale (primitivement), nageoire caudale hétérocerque*, deux paires de nageoires paires, bouche disposée sur la face ventrale. |
Sous-classe | Elasmobranchii | Elasmobranches | Squelette des nageoires pectorales tribasal. Deux nageoires dorsales. 5 ou 6 paires de fentes branchiales et des spiracles. |
Ordre | Myliobatiformes | Myliobatiformes | Raies dont la dentition évoque une meule. |
Famille | Myliobatidae | Myliobatidés | |
Genre | Mobula | ||
Espèce | alfredi |
Larges taches d'épaules
La forme des taches d’épaule de couleur claire est un critère d’identification des raies manta. Chez Mobula alfredi, la partie antérieure des taches d’épaules s’incurve vers le milieu du dos où elle peut continuer vers l’arrière de manière diffuse, suivant des tailles et des formes variables. Les 2 taches d’épaule peuvent fusionner, contrairement à celles de Mobula birostris.
Polynésie française, Maupiti, surface
19/04/2014
Face ventrale
Notez les taches noires sur la partie antérieure entre les fentes branchiales. Mobula birostris ne présente pas de taches noires à cet endroit.
Maldives, Embudu, PMT
02/2004
Vue de face, en phase de nutrition
Il s'agit de la même manta que sur la photo précédente. La voici, la bouche ouverte, en train de se nourrir de plancton, de crustacés et occasionnellement de petits poissons qu’elle dirige vers sa très grande bouche à l’aide de ses nageoires céphaliques.
Notez la position terminale de la bouche et les rostres qui canalisent l’eau vers la bouche. Notez aussi la forme des taches d’épaule qui dessinent au niveau des spiracles un crochet incurvé vers le milieu du dos.
Maldives, Embudu, PMT
02/2004
En déplacement
Cette raie manta s'approchait d'une station de nettoyage. Les rostres enroulés favorisent le déplacement. Cet individu présente des taches d’épaule qui fusionnent au milieu du dos.
Mozambique, Manta Reef, 25 m
03/03/2006
Détail des rostres
Les rostres sont enroulés.
Maldives, Rangali, Madivaru, 12 m
26/03/2014
Caudale et dorsale
Mobula alfredi ne présente pas de masse calcifiée dans la partie postérieure de son dos ni d’épine caudale. La queue est en forme de fouet.
Indonésie, Komodo, 31 m
27/04/2014
Fentes branchiales
La raie est à la station de nettoyage. Les fentes branchiales sont bien écartées pour favoriser le nettoyage par des labres nettoyeurs. De nombreuses taches noires sont visibles dans la partie antérieure de la face ventrale.
Micronésie, Yap, 12 m
11/2007
Nage gracieuse
Les raies manta se déplacent en faisant mouvoir leurs nageoires simultanément de haut en bas, donnant l’impression qu’elles volent sous l’eau.
Cet individu ne présente apparemment pas de taches noires sur la face ventrale
Maldives, Rangali Madivaru, 15 m
04/03/2014
Mobula alfredi mâle
Sur cette vue de dessous, on observe les fentes branchiales, ainsi que les ptérygopodes (organes copulateurs du mâle) situés à la naissance de la caudale. Le ventre est blanc avec des taches noires. La présence de taches noires dans la partie antérieure indique qu’il s’agit bien de Mobula alfredi.
Maldives, 15 m
02/2004
Mobula birostris et alfredi ensemble
En bas de l'image Mobula alfredi, en haut, Mobula birostris. Notez les différences au niveau de la forme des taches dorsales et de la couleur autour de la bouche.
Indonésie, Papua Barat, 8 m
16/12/2010
Copulation
Lors de la parade nuptiale, les individus font des vrilles et des loopings !!!
Maldives, Lankan Corner
19/01/2006
Nettoyage
Un labre nettoyeur s'active sur un des rostres.
Polynésie française, Maupiti, surface
05/10/2013
Diversité des robes
3 raies manta sur cette photo, avec des taches d’épaule caractéristiques de Mobula alfredi.
Polynésie française, Maupiti, surface
19/04/2014
Individu de Mayotte
La forme des taches d’épaule est difficile à voir sur cette photo. On peut deviner le « crochet » qui s’incurve vers le milieu du dos.
Mayotte, surface
08/04/2012
Rédacteur principal : Véronique LAMARE
Correcteur : Pierre NOËL
Responsable régional : Véronique LAMARE
Lassauce H., Chateau O., Erdmann M.V., Wantiez L., 2020, Diving behavior of the reef manta ray (Mobula alfredi) in New Caledonia: More frequent and deeper night-time diving to 672 meters, PLoS ONE, 15(3), e0228815. https://doi.org/10.1371/journal.pone.0228815
Marshall A.D., Compagno L.J.V., Bennett M.B., 2009, Redescription of the genus Manta with resurrection of Manta alfredi (Krefft, 1868) (Chondrichthyes; Myliobatoidei; Mobulidae), Zootaxa, 2301, 1-28.
White W.T., Corrigan S., Yang L., Henderson A.C., Bazinet A.L., Swofford D.L., Naylor G.J.P., 2017, Phylogeny of the manta and devilrays (Chondrichthyes: mobulidae), with an updated taxonomic arrangement for the family, Zool. J. Linn. Soc., https://doi.org/10.1093/zoolinnean/zlx018
Marshall A., Kashiwagi T., Bennett M.B., Deakos M., Stevens G., McGregor F., Clark T., Ishihara H., Sato K., 2011, Manta alfredi. In: IUCN 2013. IUCN Red List of Threatened Species. Version 2013.2. Downloaded on 05 May 2014.
La page sur Mobula alfredi sur le site de référence de DORIS pour les poissons : FishBase
La page de Mobula alfredi dans l'Inventaire National du Patrimoine Naturel : INPN