Vivaneau gazou

Clé d'identification

Noms

Distribution géographique

Atlantique Ouest tropical

Lutjanus synagris est présent dans l’ouest de l’océan Atlantique, du nord de la Caroline du Nord jusqu’au sud du Brésil y compris le golfe du Mexique, la mer des Caraïbes et les Bermudes.

C'est autour des Antilles, dans le golfe du Mexique et sur la côte nord de l’Amérique du Sud qu'il est le plus abondant.

Biotope

Lutjanus synagris fréquente les eaux côtières peu profondes entre 2 et 40 m. Il évolue dans divers habitats mais c'est principalement sur les récifs et les zones sablonneuses recouvertes de végétation que l'on peut l'observer. Cette espèce a également été signalée à des profondeurs de 400 mètres.

Une fois installé, il est réputé rester toute sa vie au même endroit.

Les juvéniles vivent dans les zones côtières protégées, indifféremment dans des eaux troubles ou claires.

Description

Lutjanus synagris est un poisson de forme oblongue comprimé latéralement. Adulte, il atteint une taille entre 20 et 30 cm (maximum 50 cm).

Son corps est de couleur gris argenté à rose saumoné et rouge. Le dos et les côtés supérieurs des flancs sont roses à rougeâtres. Le bas des flancs et le ventre sont argentés avec une teinte jaunâtre. Une série de rayures jaunes ou dorées traversent le corps, en diagonale au-dessus de la ligne latérale*, à l'horizontale au-dessous, du fait de la disposition des écailles. Une tache noire diffuse est située au-dessus de la ligne latérale* et en dessous de la partie antérieure des rayons mous de la nageoire dorsale. Cette tache peut ne pas être présente.

Parfois des bandes verticales apparaissent sur les flancs. Lorsqu'il évolue en profondeur, la livrée de ce poisson est plus sombre avec des couleurs nettement plus prononcées.

Le museau pointu. La mâchoire inférieure est légèrement prognathe*. La bouche est dotée de canines modérément développées et à peu près de même taille sur les deux mâchoires. Deux ou trois bandes jaunes, parfois roses, sont visibles sur la tête. Elles s'étirent du museau jusqu'à l'œil.

Les nageoires sont de couleur jaunâtre à rougeâtre. La nageoire dorsale est continue. Elle est constituée d’une première moitié épineuse (10 épines) et d'une seconde partie molle (12 ou rarement 13 rayons) avec une terminaison arrondie. La nageoire anale est arrondie avec 3 épines et 8 (rarement 9) rayons mous. Les nageoires pectorales sont relativement courtes et n’atteignent pas le niveau de l’anus comme chez d'autres lutjans. La nageoire caudale (15 à 16 rayons) est légèrement fourchue. Elle peut être bordée d'une couleur sombre.

Les juvéniles sont plus clairs avec des nageoires dorsales teintées de rouge, des nageoires pelviennes teintées de jaune et des bandes verticales pâles sur le corps. Comme chez les adultes, une tache sombre est présente sur l'arrière du dos.

Espèces ressemblantes

Dans les zones que fréquente Lutjanus synagris, ce dernier pourrait être confondu avec des lutjans arborant une tache sombre au-dessous de la nageoire dorsale :

- le vivaneau sorbe (Lutjanus analis) qui a un dos nettement plus haut que Lutjanus synagris et qui présente deux lignes bleues obliques sous l'œil que n'a pas ce dernier. Ses nageoires dorsale et anale sont angulaires alors qu'elles sont plus rondes chez Lutjanus synagris ;

- le pagre mahogani (Lutjanus mahogoni) qui n'a pas de lignes verticales jaunes à roses sur le corps et dont les nageoires dorsale et anales sont souvent bordées d'une couleur rougeâtre. Son œil est nettement plus grand que celui de Lutjanus synagris.

Alimentation

Lutjanus synagris est un carnivore opportuniste qui chasse principalement la nuit. Il se nourrit de diverses proies trouvées dans le large éventail d'habitats dans lequel il évolue : poissons, crevettes, crabes et divers autres crustacés, céphalopodes et gastéropodes.

Les juvéniles se nourrissent de proies appropriées à leur taille comme certains organismes planctoniques* et les petits invertébrés.

Reproduction - Multiplication

Lutjanus synagris est une espèce gonochorique* (sexes séparés) ovipare*. Elle arrive à maturité sexuelle lorsque sa taille se situe entre 10 et 23 cm.

Le frai* a lieu en haute mer, loin de l’habitat côtier habituellement fréquenté. Il se produit tout au long du printemps et de l’été, selon l'endroit. À Cuba, le frai se produit de mars à septembre avec des pics en juillet et août, tandis qu’à Porto Rico, il se produit en mai. Il donne lieu à de grandes agrégations de poissons.

La fécondation est externe. Les mâles et les femelles nagent en remontant à la surface et relâchent leurs gamètes* en pleine eau juste sous la surface. Après avoir été fécondés, les œufs éclosent dans un délai de 23 heures. Ils ont un diamètre de 0,65 à 0,80 mm. Une petite gouttelette d’huile assure leur flottabilité. Après une existence pélagique*, les larves* se déplacent vers des eaux peu profondes en bordure de côtes (zones sableuses, herbiers, lagunes, mangroves*,...) pour se développer à l'abri des prédateurs.

En 1969, le chercheur naturaliste américain Robert I. Wicklund a observé un épisode de frai de Lutjanus synagris au large du sud-est de la Floride. La parade nuptiale a commencé à la tombée du jour (19H30-20H00). Les poissons se sont rassemblés près du fond en petits groupes de 5 à 10 individus et ont commencé à se poursuivre. Ainsi plusieurs mâles arborant une couleur sombre s'intéressaient à la même femelle de couleur plus claire en lui heurtant la partie arrière du corps. Au bout d'un moment, l’agrégation est devenue dense et a lentement quitté le fond. Après une montée de 2 m environ, les poissons sont devenus nerveux, puis se sont soudainement propulsés dans plusieurs directions libérant leurs gamètes dans la colonne d’eau. Le frai s'est terminé avant le coucher du soleil.

Vie associée

Lutjanus synagris évolue en banc parfois accompagné d'autres espèces de poissons de son gabarit comme la gorette blanche (Haemulon plumieri) et le vivaneau sarde grise (Lutjanus griseus).

Ses prédateurs comprennent les requins et d’autres grands poissons prédateurs, y compris d’autres espèces de vivaneaux.

Divers biologie

Lutjanus synagris est un poisson craintif qui ne se laisse pas facilement approcher de près. Son âge maximal estimé est de 10 ans.

Le nom anglais de "snappers", qui signifie "happeurs" et donné aux lutjans, vient du fait que ceux-ci ont l'habitude de claquer des mâchoires lorsqu'ils sont capturés.

Informations complémentaires

Dans certaines régions, la consommation de la chair de ce poisson n'est pas sans risque d'une intoxication alimentaire appelée la ciguatera*, notamment s'il s'agit d'individus de grande taille.

On pense que, comme d’autres poissons prédateurs, il accumule la toxine responsable (ciguatoxine) en se nourrissant de poissons herbivores qui mangent une algue microscopique de la famille des Dinoflagellées (Gambierdiscus toxicus) proliférant sur les coraux morts ou malades.

En 1860, le zoologiste cubain Felipe Poey (1799-1891) a décrit un vivaneau particulier et rare, Mesoprion ambiguus (devenu par la suite Lutjanus ambiguus), comme pouvant être un hybride naturel entre deux espèces, Ocyurus chrysurus et Lutjanus synagris. Depuis cette description, Lutjanus ambiguus a été déclaré espèce valide par certains auteurs, hybride par d’autres. En 1989, une étude menée par un biologiste américain, William, F. Loftus, l'a classé dans la catégorie des hybrides en se basant, entre autres, sur la rareté de ce poisson pour être une espèce valide et sur le fait que les aires de répartition et les modes et saisonnalité du frai* sont identiques pour les deux espèces parentales.

Depuis, un laboratoire américain a réussi à produire un hybride de ces deux espèces conforme à l’espèce décrite comme Lutjanus ambiguus par Poey. Ce qui renforce l'idée que L. ambiguus n’est pas une espèce valide mais plutôt un hybride naturel.

Compte tenu de la facilité apparente avec laquelle Ocyurus s’hybride avec Lutjanus, et du manque de caractères morphologiques pour différencier les deux genres, les auteurs de l'article paru dans le Bulletin of marine science soutiennent que le genre Ocyurus devrait être un synonyme de Lutjanus. Des poissons, possibles hybrides entre Ocyurus chrysurus et Lutjanus griseus, ont déjà été ramenés par des pêcheurs.

Origine des noms

Origine du nom français

Vivaneau : dénomination générique utilisée pour désigner un ensemble d'espèces appartenant à la famille des Lutjanidés. Elle vient du nom de l'espèce Lutjanus vivanus et signifie "vivant, vivace", probablement en rapport avec son activité débordante dans le récif ;

gazou : ou gazon. Peut-être en raison de son intérêt pour les zones sablonneuses recouvertes de végétation où les pêcheurs antillais savaient y trouver des bancs ?

Origine du nom scientifique

Lutjanus : du malais "ikan lutjang" : nom d'un poisson, latinisé par Marcus E. Bloch, ichtyologue allemand (1723-1799) pour la première espèce de ce genre. Bloch croyait à tort que ce nom venait du Japon. Dans la description qu'il fait de ce poisson, il écrit : " Le Japon produit ce poisson où il porte le nom de Ikan Lutjang ; nom qui m'a servi pour la dénomination du genre de ces poissons. Le poisson présent s'appelle comme nous venons de le dire Ikan Lutjang, au Japon, Lutian chez les François, les Allemands et les Anglois". (Histoire naturelle générale et particulière des poissons, 7ème partie, p. 85) ;

synagris : nom d'un poisson de la Méditerranée donné par les anciens grecs et repris par Aristote dans son traité d'histoire naturelle "Histoire des animaux" (vers 343 av. J.-C.). Le naturaliste suédois Carl von Linné (1707-1778) a utilisé ce nom, trouvant certainement une ressemblance avec ce poisson méditerranéen, le denté commun (Dentex dentex), qu'il a également décrit. Il avait initialement rangé ces deux espèces dans le genre Sparus.

Classification

Numéro d'entrée WoRMS : 159800