Coquille en forme de cône aplati
Apex légèrement spiralé, postérieur, recourbé et décalé vers la droite
Base ovale
Présence d'une lame intérieure blanche appelée voûte
Empilées les unes aux autres grâce à leur pied formant ventouse
Pantoufle de mer, crépidule des moules
Slipper limpet, slippersnail (GB), Pantoffelschnecke (D), Muiltje, slippertje (NL)
Patella fornicata Linnaeus, 1758
Crypta densata Conrad, 1843
Crepidula densata Conrad
Crepidula maculata Rigacci
Crepidula mexicana Rigacci
Crepidula nautiloides Lesson
Crepidula roseae Petuch
Crepidula violacea Rigacci
Crepidula virginica Conrad
Crypta nautarum Mörch
Mer du Nord, Manche, Atlantique Nord, Méditerranée
Zones DORIS : ● Europe (côtes françaises), ○ [Méditerranée française], ○ [Atlantique Nord-Est, Manche et mer du Nord françaises], ● Atlantique Nord-OuestL'espèce est originaire de l'Atlantique Nord-Ouest. Elle est présente dans l'estuaire maritime nord et sud du Saint Laurent, en Gaspésie et sur la côte du Labrador. On la trouve aussi sur la façade Atlantique Est et en Manche depuis le nord de la Suède jusqu'à l'Espagne.
Elle est particulièrement abondante en Bretagne et en Normandie (essentiellement de la baie de Saint-Brieuc à Flamanville).
Elle est parvenue depuis les années 1980 à coloniser quelques ports de Méditerranée (notamment à Sète) mais y reste encore discrète.
Les crépidules affectionnent les zones côtières de faible profondeur où elles sont toujours fixées sur un support solide, roches ou autres coquillages posés sur le sable ou la vase.
On les observera à partir de l'étage des fucus mais plus couramment dans l'étage infralittoral* et jusqu'à une vingtaine de mètres de profondeur (espèce subtidale*).
Elles n'apprécient pas les zones à fort courant.
Les crépidules tolèrent de forts écarts de température et de salinité : elles sont eurythermes* et euryhalines*.
La crépidule est un gastéropode de forme ovoïde et légèrement spiralée. L'apex* (le sommet de la coquille) est déporté vers l'arrière et décalé vers la droite. Les dimensions sont de 5 centimètres de longueur pour 2 centimètres de haut chez l'adulte. Les couleurs alternent entre le blanc et le jaune clair avec des motifs marbrés sans forme particulière allant du rose brun/violacé au rougeâtre.
En retournant un animal vivant on découvre le pied musculeux, qui ne possède pas d'opercule*, une tête aplatie équipée de deux tentacules* puis une cloison appelée voûte qui couvre la moitié de la face intérieure. Cette cloison caractéristique a valu à ce mollusque son surnom de "pantoufle de mer".
Dans la coquille vide on peut voir toute la paroi intérieure qui est pourpre tandis que la voûte est blanche. Les stries d'accroissement sont nettes.
Les crépidules sont le plus souvent groupées, empilées et collées par leur pied formant ventouse, en chaînes de 10 individus environ (parfois plus) où les plus âgés (les femelles) sont à la base. Le premier individu adhère toujours à un substrat* dur (roche, autre mollusque...).
Crepidula gibbosa (Defrance, 1818) : espèce infra- et circalittorale*, à la coquille rugueuse rougeâtre, mesurant tout au plus 3,5 centimètres de long et qui se trouve présente en Méditerranée.
Crepidula unguiformis (Lamarck, 1822) : coquille blanche, beaucoup plus plate : 2,7 centimètres de long pour 6 millimètres d'épaisseur et qui se trouve présente en Méditerranée.
Les crépidules sont des capteurs suspensivores* microphages*. Elles émettent un film muqueux collant (ressemblant à de la bave) pendant quelques instants puis le récupèrent chargé de particules nutritives. Ce film est ramené régulièrement à la bouche.
Elle sont en compétition avec les autres filtreurs* et particulièrement avec les bivalves (coquilles Saint-Jacques, huîtres, palourdes...) et sont considérées comme un véritable fléau par les conchyliculteurs.
En cas de disette ou de situation défavorable, la crépidule utilise sa radula* pour se nourrir. Des traces ont été observées dans ce sens dans le port du Havre, suivies d'analyses qui ont confirmé cette hypothèse (observations de Gérard Breton, de l'association Port Vivant).
Les crépidules sont hermaphrodites* protandres* c'est-à-dire qu'elles naissent mâles puis deviennent femelles.
Les individus sont empilés en chaînes ou les femelles sont à la base et les mâles viennent s'établir à l'autre extrémité (cela s'appelle le recrutement).
Quelques individus dans le milieu de la chaîne sont en cours d'inversion sexuelle. Sur une même chaîne toutes les femelles ne sont pas au même stade de développement.
Les femelles émettent des substances chimiques qui attirent les larves* et les jeunes mâles isolés.
La fécondation est directe (présence d'un pénis). Les œufs (5 000 à 10 000) sont protégés dans plusieurs capsules (appelées sacs ovigères) jusqu'à la fin de l'incubation. Toutes les capsules d'une même ponte sont fixées au même point du substrat. La reproduction peut avoir lieu deux fois par an.
Après éclosion, la vie larvaire* planctonique* dure environ un mois, durant lequel la larve recherche un substrat dur.
Durant cette période la mortalité s'avère très importante. La phase de libération des larves a déjà été observée et photographiée. On peut distinguer sur les clichés la forme de ces larves : il s'agit de larves véligères*.
Le détail des transformations larvaires est décrit ci-dessous en information complémentaire.
Le stade trochophore* (quelques heures après la fécondation) correspond une forme en toupie doublement ciliée par son milieu ce qui lui assure son mouvement de rotation. Le stade véligère suit cette première phase (de 2 à 20 jours) et montre au moins une excroissance formant grossièrement une voile (velum*).
S'ensuit une phase dite "pédivéligère" ou le pied s'accroit, que le velum s'atrophie engendrant une fixation sur le substrat.
Il semblerait donc que le stade trochophore chez la crépidule soit caché et donc que les larves n'éclosent que sous la forme véligère.
Crepidula fornicata se trouve fréquemment fixée sur la coquille d'autres mollusques ; il s'agit le plus souvent de celle des coquilles Saint-Jacques, avec lesquelles elles entrent en compétition.
Elles se fixent également sur les coquilles vides, sur des coquilles de gastéropodes portées par des bernard-l'ermite, et même sur la carapace de certains crustacés !
La coquille des crépidules peut à son tour être recouverte de divers épibiontes*, comme des algues, des hydraires, des bryozoaires, des balanes, des spirorbes...
Leur durée de vie est d'environ 10 ans.
Elles n'ont pas de prédateur connu.
Elles peuvent servir d'appât (parfois très efficace) pour la pêche.
La crépidule est originaire des côtes nord-est des Etats-Unis et a été introduite accidentellement en Europe à plusieurs reprises par le commerce des huîtres, la première fois en 1872. La Deuxième Guerre mondiale à grandement contribué à sa prolifération sur le littoral de la Manche. Le début des années 1970 a vu le remplacement des huîtres portugaises par les huîtres japonaises. Cette occasion a favorisé l'implantation de la crépidule sur de nombreux sites du littoral.
C'est donc une espèce invasive bénéficiant, qui plus est, d'un fort potentiel de colonisation.
Les activités conchylicoles sont un vecteur important dans la prolifération de la crépidule et les activités de pêche aux engins traînants favorisent localement sa dissémination.
De ce fait les problèmes économiques engendrés sont importants : abandon de certaines zones de pêche, augmentation des activités de tri, diminution de la taille des espèces récoltées.
L'effet le plus important de cette prolifération est l'homogénéisation des fonds. Entrent en ligne de cause : l'accumulation de coquilles en très grande quantité (10 000 au m² voire plus) et de biodépôts (matières organiques rejetées). Cela se traduit par une baisse de la biodiversité de la macrofaune même si, localement, il peut se trouver quelques niches favorables à la microfaune.
Par endroit la crépidule est si abondante qu'elle compromet, entre autres, la croissance du maërl.
Plusieurs tentatives d'éradication ou de valorisation de la crépidule ont été tentées :
Crépidule est directement dérivé du nom scientifique Crepidula.
Pantoufle de mer : à cause de la cloison intérieure bien visible en retournant une coquille vide.
Crepidula : du latin [crepido] = piédestal, soubassement de colonne. Par extension crepida désigne une petite sandale de forme très sommaire, réduite à la semelle avec un simple lien sur le cou-de-pied. Crepidula est donc une petite sandale, allusion à la forme de la coquille,
fornicata : du latin [fornix] = voûte. On pourrait croire que ce nom fait allusion à l'empilement en grand nombre et à la reproduction (c'est l'interprétation la plus commune), il fait en fait référence à la forme voûtée de la coquille et de l'empilement !
Numéro d'entrée WoRMS : 138963
Termes scientifiques | Termes en français | Descriptif | |
---|---|---|---|
Embranchement | Mollusca | Mollusques | Organismes non segmentés à symétrie bilatérale possédant un pied musculeux, une radula, un manteau sécrétant des formations calcaires (spicules, plaques, coquille) et délimitant une cavité ouverte sur l’extérieur contenant les branchies. |
Classe | Gastropoda | Gastéropodes | Mollusques à tête bien distincte, le plus souvent pourvus d’une coquille dorsale d’une seule pièce, torsadée. La tête porte une ou deux paires de tentacules dorsaux et deux yeux situés à la base, ou à l’extrémité des tentacules. |
Sous-classe | Caenogastropoda | Caenogastropodes | |
Ordre | Littorinimorpha | Littorinimorphes | |
Famille | Calyptraeidae | Calyptraéidés | Coquille spiralée, plus ou moins conique, apex submédian, parois internes partiellement résorbées. a l'intérieur, lamelle spiralée pouvant former un entonnoir dans la région ombilicale. Lindner 2011:79. |
Genre | Crepidula | ||
Espèce | fornicata |
Un empilement caractéristique
La crépidule est parfois trouvée seule, mais la plupart du temps on la trouve en empilements caractéristiques, la chaîne légèrement arc-boutée.
Tatihou, Cotentin (50), estran
09/2008
Au Croisic
La crépidule est une espèce invasive largement répandue sur tout l'ensemble du littoral, comme ici, au Croisic.
Le Croisic (44), estran
12/2007
Sur l'estran
La crépidule est fort commune sur l'estran, comme ici en Vendée. Comme la patelle et les autres gastéropodes de la zone intertidale, elle est capable de retenir une petite quantité d'eau dans sa cavité palléale, dans laquelle baignent les branchies. Elle attend ainsi le retour de la marée.
Vendée (85)
2008
Dans l'étang de Thau
Une pile de crépidules, parmi les ulves, dans l'étang de Thau.
Etang de Thau (34)
05/2009
Tête et pied
Vue de la tête (à gauche) et du pied (à droite) de la crépidule.
Tatihou, Cotentin (50), estran
09/08/2008
Epibiose
Les coquilles de crépidules sont fréquemment colonisées par des algues, des balanes, des hydraires, des bryozoaires... Parfois les coquilles sont peu visibles.
Zélande (Pays-Bas), 2 m
15/08/2007
Sur une coquille Saint-Jacques
La crépidule entre souvent en compétition avec la coquille Saint-Jacques en filtrant l'eau environnante.
Beclem, Carantec (29), 19 m
16/07/2007
Crépidule des moules
Crepidula fornicata est fréquemment étroitement associée à la moule (Mytilus edulis), ce qui lui a valu son surnom de "crépidule des moules".
Zélande (Pays-Bas), 3 m
09/2008
Sur un crabe vert !
Une observation plutôt insolite : la crépidule se fait transporter sur la carapace d'un crustacé, le crabe vert (Carcinus maenas).
Zélande (Pays-Bas), 7 m
13/09/2008
Femelle ovigère
Cette photographie montre une crépidule ovigère (pleine d'œufs dans des petits sacs).
Tatihou, Cotentin (50), estran
09/2008
Libération des larves
Des capsules ovigères viennent d'éclore, on assiste à la libération des larves.
Le photographe a été très surpris d'avoir eu la chance d'assister à la libération de ces larves, elle s'est faite en plusieurs fois, au total ce procesus a pris 3 mn environ.
Dreischor, Zélande, Pays-Bas, 5 m
04/09/2010
Larves véligères
On peut distinguer ici la forme de des larves : il s'agit de larves véligères*.
Dreischor, Zélande, Pays-Bas, 5 m
04/09/2010
Juvéniles
Les jeunes crépidules, pas encore empilées, se cachent sous les coquilles vides et sous les pierres.
Zélande (Pays-Bas), 2 m
15/08/2007
Une espèce invasive
La crépidule est, par endroit, présente en très grande quantité. Ceci n'est pas sans poser de sérieux problèmes économiques et écologiques !
Tatihou, Cotentin (50), estran
09/08/2008
Une pantoufle nacrée
Observez la cloison qui a valu à la crépidule son surnom de "pantoufle de mer" ! Observez aussi l'intérieur fortement nacré.
Trégastel (22)
24/09/2008
Rédacteur principal : Christian SCOUPPE
Vérificateur : Frédéric ZIEMSKI
Responsable régional : Frédéric ZIEMSKI
Responsable régional : Yves MÜLLER
Blanchard M., 1995, Origine et état de la population de crépidules (Crepidula fornicata) sur le littoral français, Haliotis, 24, 75-86.
Blanchard M., Ehrhold A.,1999, Cartographie et évaluation du stock de crépidules (Crepidula fornicata) en baie du Mont Saint-Michel, Haliotis, 28, 11-20.
Blanchard M., Blanchet A., Gaffet J.D., Hamon D., 2001, Dynamique de la population de crépidules, Crepidula fornicata, en baie de Saint-Brieuc, Manche-Ouest, Rapport Ifremer, Brest.
La page de Crepidula fornicata sur le site de l'Inventaire National du Patrimoine Naturel : INPN