Crabe vert

Carcinus maenas | (Linnaeus, 1758)

N° 719

En Europe : Atlantique Est, extrême ouest de la Méditerranée. Espèce introduite et souvent invasive ailleurs.

Clé d'identification

Crabe présent en Atlantique Est (C. aestuarii en Méditerranée)
Carapace plus large que longue avec cinq dents antérolatérales
Couleur souvent verte (mais variable, surtout chez les jeunes)
Face ventrale claire
Entre les yeux, front avec trois « dents » arrondies et peu marquées
Dernière patte légèrement plus aplatie que les précédentes
Stylets copulateurs du mâle à extrémité courbe

Noms

Autres noms communs français

Crabe enragé
Noms locaux : favouille, crabouillard, chancre, glazib (breton)

Noms communs internationaux

Green crab, common shore crab (GB), Granchio (I), Cangrejo verde, cambaro (E), Dwarslöper, Strandkrab (D), Strandkrabbe (N)

Distribution géographique

En Europe : Atlantique Est, extrême ouest de la Méditerranée. Espèce introduite et souvent invasive ailleurs.

Zones DORIS : ● Europe (côtes françaises), ○ [Atlantique Nord-Est, Manche et mer du Nord françaises], ● Atlantique Nord-Ouest

L'origine de cette espèce est l'Atlantique Est, de la Mauritanie à la Norvège. Elle ne pénètre qu'à peine en Méditerranée par le détroit de Gibraltar.
Elle a été introduite dans le Pacifique (Canada, Mexique, Amérique du Sud, Corée, Nouvelle Zélande et sud de l'Australie : Victoria fin du XIXe siècle) et dans l'Atlantique (Argentine : Patagonie 2003, et Afrique du Sud).
Dans certains cas, cette répartition artificielle est devenue invasive (Etats-Unis côtes du Pacifique : San Francisco 1989, et de l'Atlantique : Massachusetts 1817, cap de Bonne Espérance : 1983, et sud-ouest de l'Australie : 1971). Dans d'autres cas, l'invasion a avorté (Panama, Brésil, Djibouti, Madagascar, Pakistan, Sri Lanka et Thaïlande). Le crabe vert a été introduit accidentellement près du Cap Cod au XIXe siècle. Il a été observé la première fois en 1994 sur la côte ouest du Cap Breton. Il est présent à l'île du Prince Édouard. On prévoit l'expension de l'espèce dans le golfe du Saint Laurent. Il a été observé en 2008 par le groupe d'étude sur les élasmobranches et le requin du Groenland (GEERG) à proximité d'Halifax.
Au Japon, il est difficile de dire si l'espèce invasive est Carcinus aestuarii ou un hybride de C. aestuarii et C. maenas.
En Nouvelle-Zélande, l'introduction n'est pas devenue invasive car le gouvernement a rapidement pris des mesures de protection.

Biotope

Ce crabe vit dans différents milieux : plage de sable, côtes rocheuses, mais aussi dans les eaux polluées, les estuaires et les schorres* (partie haute des vasières littorales) car il tolère des taux très faibles de salinité. De même, il peut vivre à des températures variant de 0 à 30 °C. Il ne s'éloigne que très peu des côtes, en suivant le niveau de la marée, même si on peut le retrouver à 60 m de profondeur. Cependant, pendant l'hiver, en Europe du nord, le crabe vert s'éloigne du rivage vers le large où il s'enfouit dans le sable.
Il vit souvent dans le sable, parmi les algues ou les trous de rochers et, surtout l'été, dans la zone des marées ou les mares supra-littorales*. Très résistant, il peut même vivre hors de l'eau une quinzaine de jours, à condition de rester dans un endroit frais et humide.

Description

C'est le crabe le plus répandu en Europe du nord, où on le rencontre sur des littoraux variés. Sa carapace, plus large que longue, presque trapézoïdale, faiblement granuleuse, mesure six centimètres de longueur et huit de largeur. Elle est, en général, de couleur verte, très peu uniforme, souvent marquée de dessins plus foncés, mais parfois rouge, orangée ou grise, sans que le contexte environnemental y soit réellement pour quelque chose. Elle possède une découpe frontale en forme de dents arrondies entre les yeux et cinq dents acérées sur le bord antéro-latéral.
La face ventrale du crabe est plus claire que la face dorsale ; elle est jaune ou orange clair. Comme la plupart des crustacés, la croissance ne peut se faire qu'au cours d'une mue. Les mâles sont nettement plus gros que les femelles.
Toutes les pattes sont longues et effilées. Les premières à l'avant sont terminées par une pince. La dernière à l'arrière, la cinquième, est légèrement aplatie. Les articulations peuvent être orangées ou gris jaunâtre.

Espèces ressemblantes

Ce crabe est souvent confondu avec Carcinus aestuarii, qui est également une espèce invasive, mais d'origine méditerranéenne. D'autre part, ses deux premiers pléopodes* sont droits et parallèles, alors qu'ils sont galbés vers l'extérieur chez Carcinus maenas.
Un autre crabe qui se rencontre également dans les algues littorales est assez voisin: Pirimela denticulata, plus petit, rougeâtre ou verdâtre avec sept dents pointues en avant de la carapace.

Alimentation

L'alimentation du crabe vert est variée : mollusques, annélides, crustacés, faune fixée, algues. Il ouvre aisément différents bivalves tels que les moules. Il est aussi détritivore* voire nécrophage* et dépèce avec adresse les animaux morts. Il peut même manger ses congénères… Il se nourrit principalement la nuit, où on le retrouve sur les plages avançant latéralement en cherchant sa nourriture, mais peut malgré tout être actif à tout moment.

Reproduction - Multiplication

La reproduction est sexuée. Le mâle coince une femelle sous lui en attendant qu'elle mue (« gardiennage pré-copulatoire »). En effet, la copulation n'a lieu qu'entre la mue de la femelle et le durcissement de sa carapace, généralement l'été. La fécondation est interne. Comme la plupart des crustacés, la femelle garde les œufs (jusqu'à 185 000) sous son abdomen, fixés aux pléopodes* (pattes nageuses). Elle les protège ainsi pendant toute la durée de l'incubation (quelques semaines, selon la température). En fin d'incubation, la femelle libère des larves* planctoniques* (larve appelée « zoé », 1 mm de long), avec une longue épine sur la tête, planctonophages * ou détritivores*. Après métamorphose, les minuscules crabes (quelques millimètres) tombent sur le fond et poursuivent leur développement jusqu'au stade adulte.

Vie associée

Ce crabe est très parasité : par exemple, les Zoothamnium carcini, des protozoaires, peuvent s'installer dans ses branchies.
Des crustacés peuvent également le parasiter : Choniosphaera maenalis qui se nourrit de son sang.
Un autre crustacé : le cirripède Sacculina carcini, la sacculine, proche des balanes, est fréquent sur le crabe vert : on le repère comme un sac orange sur l'abdomen du crabe qui infecte jusqu'à 50 % du corps. La larve de ce crustacé pénètre dans le crabe à un endroit ou le tégument est très fin, au niveau une articulation par exemple, et s'y développe en absorbant les nutriments et en altérant le fonctionnement des glandes endocrines comme la glande de mue ou la glande androgène. Cela empêche alors le crabe de muer et de se reproduire. Le crabe mâle est ainsi souvent plus ou moins féminisé : il change de sexe.
Des balanes s'installent parfois sur sa carapace surtout chez les gros individus (qui muent moins souvent que les jeunes).

Divers biologie

Le crabe vert a de nombreux prédateurs : des poissons, d'autres crustacés, des oiseaux de rivage (mouettes, goélands). C'est un des mets préférés des seiches et des pieuvres ! Aussi, il est capable d'autotomie* (mutilation réflexe d'une partie du corps) en cas de capture par un prédateur, sans que cela lui soit fatal. La blessure se referme immédiatement et une nouvelle patte réapparaît à la mue suivante.
Il est possible de différencier les mâles des femelles : en regardant l'abdomen replié sous le thorax, on distingue les sexes. Celui du mâle est étroit et triangulaire, avec deux appendices ; celui de la femelle est large et arrondi, avec des pléopodes* où les œufs s'accrochent.

Une étude moléculaire a montré qu'il y a des différences génétiques entre des populations éloignées : cela tendrait à prouver que ce crabe ne peut pas traverser d'étendues profondes.

En cas de danger, ou si son milieu de vie s'assèche, il s'enfouit dans le sable.

Informations complémentaires

Cette espèce est comestible, mais elle n'est pêchée qu'à petite échelle (1 200 tonnes par an, principalement en France et au Royaume-Uni).

Le crabe vert est très surveillé aux abords des bassins de conchyliculture car, pour se nourrir, il peut faire de gros dégâts sur les naissains de bivalves : il peut dévorer jusqu'à cinquante petites huîtres par jour.

D'origine européenne, cette espèce est invasive dans d'autres parties du globe. Aux Etats-Unis et au Canada, les exploitations de la côte Est produisant des myes, des pétoncles ou des clams, sont très vigilantes car il a déjà causé de grosses destructions dans les élevages. Dans le Massachusetts, une pêche massive a été déclenchée en 1995, favorisée par des subventions. Dans d'autres régions, l'invasion semble limitée par concurrence avec une espèce locale (crabe bleu, Callinectes sapidus, au nord-est de l'Amérique ; crabe des rochers, Cancer antennarius et Cancer productus, dans la baie de Cheasapeake). C'est donc une des rares espèces européennes à avoir colonisé l'Amérique, alors que l'inverse est fréquent.

Origine des noms

Origine du nom français

Vert : évidemment du fait de sa couleur la plus fréquente.
Enragé : car les mâles ont un comportement très batailleur, les femelles étant plus paisibles. Son attitude préférée, pinces levées, est à l'origine de ce nom. Mais c'est aussi une attitude de défense : il se dresse verticalement, mettant en avant ses pinces.

Origine du nom scientifique

Du latin [carcinus] = cancer, crabe.
Du latin [maenas] = ménade, bacchante (prêtresse du culte de Bacchus), venant du grec [maino] = rendre furieux.

Classification

Numéro d'entrée WoRMS : 107381

Termes scientifiques Termes en français Descriptif
Embranchement Arthropoda Arthropodes Animaux invertébrés au corps segmenté, articulé, pourvu d’appendices articulés, et couvert d’une cuticule rigide constituant leur exosquelette.
Sous-embranchement Crustacea Crustacés Arthropodes à exosquelette chitineux, souvent imprégné de carbonate de calcium, ayant deux paires d'antennes.
Classe Malacostraca Malacostracés 8 segments thoraciques, 6 segments abdominaux. Appendices présents sur le thorax et l’abdomen.
Sous-classe Eumalacostraca Eumalacostracés Présence d’une carapace recouvrant la tête et tout ou partie du thorax.
Super ordre Eucarida Eucarides Présence d'un rostre.
Ordre Decapoda Décapodes La plupart marins et benthiques. Yeux composés pédonculés. Les segments thoraciques sont fusionnés avec la tête pour former le céphalothorax. La première paire de péréiopodes est transformée en pinces.  Cinq paires d'appendices locomoteurs (pinces comprises).
Sous-ordre Brachyura Brachyoures Les brachyoures ont un abdomen réduit replié sous le céphalothorax. Ils sont représentés par les crabes et les araignées de mer.
Famille Carcinidae Carcinidés

Bord antéro-latéral de la carapace avec 5 dents souvent émoussées (dent orbitaire externe comprise) ; front avec 3 lobes ; carapace hexagonale à peine plus large que longue ; dernière paire de pattes peu aplatie et peu adaptée à la nage et à l'enfouissement.

Genre Carcinus
Espèce maenas

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