Petit buisson orange de 4 à 20 cm
Fragile et cassant
Souvent associé à une éponge translucide revêtante
Bryozoaire peu verdi par des algues
Branches aux nombreux rameaux dichotomiques bien ordonnés
Smittine, bryozoaire corne de cerf
Antler-bryozoan (GB), Briozoo corna di cervo (I), Briozoario-hastes-de-veado (P), Briozoo ramazon, briozoo cornamenta de ciervo, cuerno de ciervo (E), Hertshoornmosdiertje (NL)
Porella cervicornis (Pallas, 1766) est encore fréquemment trouvé dans les guides, la révision du genre étant récente.
Millepora cervicornis Pallas, 1766
Smittia cervicornis Pallas
Méditerranée et proche Atlantique
Zones DORIS : ● Europe (côtes françaises), ○ [Méditerranée française], ○ [Atlantique Nord-Est, Manche et mer du Nord françaises]Méditerranée et proche Atlantique. Rare en Bretagne, ce bryozoaire a été signalé aux Glénan ainsi qu'à Ouessant où il atteint sa limite nord de répartition.
Smittina cervicornis se développe sur des substrats durs (roche) peu éclairés. Il est rencontré sur des zones verticales mais aussi horizontales plus éclairées que celles fréquentées par Adeonella calveti. Ce bryozoaire est trouvé sous les surplombs mais plus souvent dans des petites anfractuosités de la roche.
A partir de 20/25 m jusqu'à plus de 50 m en Méditerranée française où il est relativement trouvé fréquemment.
En Bretagne des observations en plongée ont été faites de façon exceptionnelle à Ouessant (30 m) et aux Glénan (40 m) sur des petits ressauts de tombants rocheux où cette espèce colonise habituellement les substrats* durs du large vers 80 m et plus de profondeur.
Ce bryozoaire forme des colonies rigides, calcifiées en petits buissons de couleur orange de 4 cm (Atlantique) à 20 cm (Méditerranée) maximum. Les rameaux, aux nombreuses divisions dichotomiques et au développement ordonné dans toutes les directions, sont plus ou moins aplatis (section ovale), ils se divisent de façon dichotome et gardent la même largeur qui est de 3 à 4 mm.
Cet arbuscule qui part d'un bref tronc basal est très délicat, fragile et cassant. Il est très souvent associé à une éponge translucide revêtante Halisarca harmelini qui gaine d'un voile flou tout ou partie des rameaux et rend les lophophores moins visibles. Néanmoins, l'éponge n'occulte pas les orifices et les lophophores s'épanouissent à l'extérieur.
La base des branches est moins souvent, que chez les autres espèces de bryozoaires arbustifs, verdie par des algues microscopiques ou autres organismes microscopiques. La partie apicale des ramifications évoque les bois (cornes) d'un cerf. La surface de la colonie est rugueuse.
Observations microscopiques : Les ovicelles possèdent de nombreux pores.
Adeonella calveti très semblable, forme des colonies (10 à 20 cm) avec des rameaux plus plats et souvent plus denses que Smittina cervicornis. Il est plus sciaphile* et donc plus sous les surplombs. Couleur plus claire, pouvant devenir crème dans les habitats très ombragés.
Myriapora truncata est en forme de buisson, aux rameaux à la section bien circulaire et aux extrémités tronquées, sa couleur est plus nettement orangée. La forme générale de la colonie évoque plus le corail rouge (Corallium rubrum).
Porella compressa (J. Sowerby, 1805) d'aspect très proche est beaucoup plus nordique (chevauchement des deux espèces à Ouessant et Groix).
Comme tous les bryozoaires, c'est un filtreur* suspensivore* microphage*. Les diatomées (algues unicellulaires) et les bactéries sont la base de l'alimentation de ce bryozoaire. Les cils des tentacules sont capables de créer des microcourants permettant l'acheminement des particules alimentaires vers la bouche au centre du lophophore* (dont les fonctions sont aussi celles de respiration et de nettoyage de la colonie).
Comme tous les bryozoaires, cette espèce est capable de se reproduire de manière sexuée : les œufs fécondés vont incuber dans une chambre (ovicelle*) avant d'être libérés, la larve nageuse va ensuite se fixer pour démarrer une nouvelle colonie par multiplication asexuée. Cette multiplication asexuée peut aussi se faire à partir d'un fragment cassé ou d'un clivage des rameaux de la colonie en plusieurs colonies filles, qui vont pousser dans des directions différentes.
Smittina cervicornis est très souvent associé à une éponge translucide revêtante Halisarca harmelini qui gaine d'un voile flou tout ou partie des rameaux et rend les lophophores moins visibles. Le bryozoaire ne semble pas du tout souffrir de cette association. Il s'agit d'une véritable symbiose bénéfique aux 2 espèces car l'éponge qui est une pompe va générer un courant plus puissant que celui des cils des tentacules des lophophores et en échange le bryozoaire arbustif va offrir un support à l'éponge très fragile.
Il faut noter que les bryozoaires ont leur cavité envahie de champignons, ciliés et d'algues unicellulaires.
Bien que propres le plus souvent, les colonies de Smittina cervicornis sont en concurrence pour l'espace et peuvent se faire envahir par certaines grandes éponges ou servir de support à de petites colonies d'hydraires arbustifs ou de vers marins (voir photos).
Kaloplocamus ramosus (Cantraine, 1835) Nudibranche (Doris) présent en Méditerranée, mais aussi en Atlantique Est et Pacifique Nord-Ouest (vu au Japon), semble être un prédateur de nombreux bryozoaires (Caberea sp. Scrupocellaria sp. Tubocellaria sp.) dont le bryozoaire bois de cerf.
Il faut noter que Smittina cervicornis fait partie des 6 grands bryozoaires arbustifs (Adeonella calveti, Myriapora truncata, Pentapora fascialis, Sertella spp. et Turbicellepora avicularis) présents sur les côtes méditerranéennes françaises, qui ont été touchés par l'élévation de la température de l'eau de la fin de l'été 1999 (mortalité plus ou moins partielle de nombreuses colonies).
Bois ou corne de cerf, vient directement de la traduction de cervicornis.
Smittina : provient du nom du profeseur Fredrik (Frits) Adam [Smitt] (1839-1904), un illustre bryozoologiste et ichthyologiste suédois. Il a travaillé au Muséum d'histoire naturelle suédois de Stockholm. Son nom a été utilisé sous plusieurs déclinaisons (espéce, genre, famille), toujours pour le groupe des bryozoaires : Smittina, smitti, Smittoidea, Parasmittina ...
cervi- : de [cervicus] = cerf.
-cornis, : de [corneus] = corne, en corne, en forme de corne, dur comme la corne.
Porella : de [pora] = poreux, porosité et de [-ella] = petit.
Numéro d'entrée WoRMS : 111551
Termes scientifiques | Termes en français | Descriptif | |
---|---|---|---|
Embranchement | Bryozoa / Ectoprocta | Bryozoaires / Ectoproctes | Petits animaux coloniaux filtreurs aquatiques fixés à un substrat. Tous les zoïdes sont en continuité physique et issus de bourgeonnement à partir d’un individu unique. Chaque zoïde porte un lophophore rétractile et est abrité dans une logette. |
Classe | Gymnolaemata | Gymnolèmes | Colonies polymorphes. Les zoïdes sont cylindriques ou aplatis, les lophophores circulaires. Les parois peuvent être calcifiées ou non. Presque tous marins. |
Ordre | Cheilostomatida | Cheilostomes | Bryozoaires calcifiés, zoïdes* en forme de boîte obturée par un opercule à charnière. Gymnolèmes les plus nombreux et les plus diversifiés des régions littorales, souples à rigides. Groupe au polymorphisme marqué où l’on trouve des individus différenciés (aviculaires, vibraculaires, ovicelles globuleux…). |
Sous-ordre | Flustrina | Flustrine | |
Famille | Smittinidae | Smittinidés | Zoïdes très calcifiés, colonies encroûtantes ou arbustives, 25 genres environ. |
Genre | Smittina | ||
Espèce | cervicornis |
Smittina cervicornis
Cette colonie de Smittina cervicornis d’une dizaine de cm est en quasi-totalité revêtue de son éponge translucide dont on peut apercevoir les petits oscules ça et là (Halisarca harmelini). Ainsi les lophophores ne sont bien visibles qu'aux rares endroits où l’éponge est absente. En premier plan, sur une éponge pierre (Petrosia ficiformis) dont il se nourrit, se trouve un nudibranche blanc maculé de taches marron (Peltodoris atromaculata ou Doris dalmatien).
Puerto de la Selva (Catalogne, Costa Brava, Espagne), 25 m
2005
Petite colonie
Petite colonie de 3 à 4 cm de diamètre entièrement revêtue de son éponge associée Halisarca harmelini. Si les lophophores ne sont pas bien visibles, on distingue par contre très bien leurs emplacements qui semblent percer l’éponge revêtante.
La Ciotat (13), 20 m
03/09/2005
Colonie profonde
Située sur un petit ressaut rocheux cette colonie de Smittina cervicornis de 10 cm de diamètre s'est développée au pied d'une gorgone rouge (Paramuricea clavata). Les petits fils blancs zigzagant et qui sont accrochés sur les branches du bryozoaire, sont des colonies d'hydraires arbustifs. Une éponge blanchâtre/verdâtre partiellement translucide en périphérie se développe entre ces rameaux.
Barge de Carro, Côte Bleue à l'ouest de Marseille (13), 33 m
22/07/2006
Rare en Bretagne
Smittina cervicornis atteint sa limite Nord à l'île d'Ouessant à l'ouest de la Bretagne où il est rarement observé.
Roche du Maude, île de Ouessant (29), 20 m
15/07/2014
Identification plus compliquée en Bretagne
Smittina cervicornis peut être facilement confondu avec Porella compressa sur les côtes bretonnes et en particulier à l'île d'Ouessant.
Notez que ce spécimen breton n'est pas associé à l'éponge revêtante Halisarca harmelini.
Roche du Maude, île de Ouessant (29), 20 m
15/07/2014
Dans une anfractuosité
Smittina cervicornis dans une petite anfractuosité de la roche et sur une surface horizontale. A droite une algue verte en forme d'éventail attachée au substrat par une fine liaison : Flabellia petiolata.
Iles Medes en Espagne, 24 m
18/07/2006
Zoïdes
Les individus (zoïdes) qui composent la colonie du bois de cerf sont bien matérialisés ici par les points qui correspondent à l’ouverture des zoïdes par où sortent les lophophores.
Méditerranée
?
Rameaux à section ovale
Smittina cervicornis dans une petite anfractuosité de la roche et sur une surface verticale. Les nombreux rameaux montrent une section ovale.
Le Moulon, Côte Bleue (13), 22 m
14/04/2007
Zoïdes visibles
Les individus (zoïdes) qui composent la colonie du bois de cerf sont bien matérialisés ici par les points brunâtres qui correspondent à l’ouverture des zoïdes par où sortent les lophophores.
Grande Calanque à La Ciotat à l’est de Marseille, 25 m
06/2005
Filograna sp. en épifaune
L'éponge revêtante Halisarca harmelini est ici moins translucide, elle masque une grande partie de la base des branches. Ce petit bois de cerf en buisson est partiellement envahi par un enchevêtrement de petits tubes calcaires blanchâtres qui sont de petits vers Polychètes Serpulidés (Filograna sp.). Au dessus de l'éponge jaune digitée se trouve une petite ascidie coloniale blanchâtre, Aplousobranchia sp.1, que l'on observe surtout au printemps. Enfin de nombreux autres petits bryozoaires sont présents sur la roche de ce surplomb (au moins 5 sont identifiables …).
Ilot de l'Elvine, Côte Bleue, à l'ouest de Marseille, 26 m
06/05/2006
Bryozoaire recouvert par Halisarca harmelini
L'aspect laiteux de l'éponge sur son support est bien visible ici.
Caverna, Cap Creus, Espagne, 19 m
17/09/2016
Macro sur les zoïdes
Sur cette branche décapée à l'eau de javel, la disposition des zoïdes dont l'ouverture est proéminente à la surface de la colonie, montre une certaine régularité. Largeur des bras photographiés : 3 à 4 mm.
Laboratoire, stage de biologie du Vaucluse, Côte Bleue
04/2007
Rédacteur principal : Frédéric ANDRÉ
Correcteur : Jean-Georges HARMELIN
Responsable régional : Michel PEAN
Harmelin, J.-G., Boury-Esnault, N., & Vacelet, J., 1994, A BRYOZOAN-SPONGE SYMBIOSIS: THE ASSOCIATION BETWEEN SMITTINA CERVICORNIS AND HALISARCA CF. DUJARDINI IN THE MEDITERRANEAN. In: Hayward, P.J., Ryland, J.S., & Taylor, P.D., (editors), Biology and Palaeobiology of Bryozoans: 69- 74. Olsen & Olsen, Fredensborg.