Nudibranche au corps ovale
Taches brun foncé sur fond blanc situées sur le corps
Panache branchial et rhinophores blancs
Longueur maximale de 7 à 12 cm
Doris maculée, doris léopard, doris dalmatien, chiot dalmatien
Dotted sea-slug, cow snail (GB), Vacchetta di mare, lumaca maculata (I), Vaquita suiza (E), Leopardenschnecke, Leoparden-Sternschnecke, Kuhschnecke, Gefleckter Doris (D), Luipaardslak (NL)
Discodoris atromaculata (Bergh 1880)
Méditerranée, proche Atlantique
Zones DORIS : ● Europe (côtes françaises), ○ [Méditerranée française], ○ [Atlantique Nord-Est, Manche et mer du Nord françaises]La doris dalmatienne a longtemps été considérée comme une espèce endémique* de Méditerranée. Cependant, de nombreux observateurs l'ont vue également dans la zone de l'Atlantique voisine de la Méditerranée (côte Basque, Canaries).
La doris dalmatienne se trouve particulièrement dans les zones sombres et ombragées des fonds marins, dans les grottes, sur les parois ou le plafond, et peut se trouver à toute profondeur. Elle se trouve généralement sur l'éponge pierre Petrosia ficiformis dont elle se nourrit principalement.
La doris dalmatienne est un nudibranche au corps ovale qui se reconnaît aisément grâce aux taches brun foncé sur fond blanc situées sur son corps. Ces taches sont réparties de façon aléatoire, bien que les plus grosses et les plus sombres se trouvent généralement localisées sur la partie centrale du corps de l'animal. Ces taches, bien visibles, ont probablement pour rôle de signaler à des prédateurs potentiels que l'animal n'est pas comestible (rôle aposématique*).
Lorsque l'animal se repose, le contour de son corps est presque circulaire. Sa consistance est dure au toucher. La taille moyenne est de 5 à 7 pouvant aller jusqu'à 12 cm.
La doris dalmatienne a une branchie en forme de plume sur la partie arrière du corps. Celle-ci est composée de huit appendices à trois ramifications et est utilisée par la doris pour respirer. Elle possède également deux rhinophores* sur la partie avant du corps. Ces rhinophores sont des organes olfactifs, comportant vingt-cinq lamelles, qui augmentent la surface de réception des molécules véhiculées dans l'eau. Branchies et rhinophores sont de couleur blanche et rétractiles et il faut être très attentif pour réussir à les observer en plongée, la doris les rétractant à la moindre alerte. Quand le danger est passé, les rhinophores et les branchies ressortent lentement.
Aucune réelle confusion possible dans la zone de distribution, l'espèce étant très reconnaissable grâce à ses taches brunes.
Il est commun de dire que la doris dalmatienne se nourrit exclusivement de l'éponge Petrosia ficiformis. Une étude de 2004 a étudié les spicules contenus dans les fèces de dalmatiennes et a conclu que le régime alimentaire n'était pas aussi exclusif. La dalmatienne se nourrit en fait de 2 espèces du genre Petrosia et d'Haliclona fulva. La probabilité de rencontre sur une de ces éponges est d'autant plus grande que la limace est jeune.
L'éponge est broutée grâce à la radula*, bande râpeuse qui porte de nombreuses petites dents. Elle est caractéristique de l'embranchement des mollusques et la structure (conformation, nombres et disposition des dents, etc) de cette radula est propre à chaque espèce de nudibranche.
Les Peltodoris atromaculata sont hermaphrodites*. Lorsque les individus s'accouplent, ils échangent leurs spermatozoïdes* mâles qui s'accumulent dans une poche (la spermathèque*). Les ovules* sont fécondés lors de leur expulsion.
La ponte a la forme d'un ruban gélatineux enroulé dans le sens antihoraire, de couleur blanc-jaunâtre.
Se rencontre souvent sur l'éponge dont il se nourrit (en particulier Petrosia ficiformis).
Cette espèce est assez commune. Avant le développement de la plongée, elle était considérée comme rare, car peu de spécimens pouvaient être ramenés par dragage à la surface. La durée de vie est estimée entre 15 et 24 mois.
P. atromaculata doit être approchée doucement si l'on souhaite voir les branchies ou les rhinophores qu'elle rétracte à la moindre alerte.
P. atromaculata sécrète des substances toxiques (sesquiterpènes, polyacétylènes) pour sa défense ainsi que des spicules calcaires qui lui confèrent un aspect granuleux : les taches brunes signalant qu'elle est immangeable sont donc amplement justifiées ! Les substances répulsives sont relâchées sous forme d'un épais mucus afin qu'elles ne se diluent pas trop vite dans l'eau. Un nuage blanc peut ainsi être observé se dégageant d'un animal dérangé (éviter de faire l'expérience tout de même).
Notons que les spicules* calcaires présentes dans le manteau de la doris dalmatienne n'ont rien à voir avec les spicules siliceux de son éponge favorite, qu'on ne retrouve que dans son système digestif !
Enfin, P. atromaculata pratique l'autotomie* (se couper soi-même), abandonnant une partie de son corps à un prédateur trop entreprenant.
Une controverse existe sur le nom de genre valide de cette limace: Peltodoris ou Discodoris ? Pour les mollusques, une référence sure est la base de données CLEMAM du Muséum National d'Histoire Naturelle de Paris : http://www.somali.asso.fr/clemam/index.php.
On peut y lire que Peltodoris est le nom de genre valide : l'espèce qui avait été placée dans le genre Discodoris a été redécrite et replacée dans le genre Peltodoris - créé par Bergh en 1880 - sur des bases anatomiques par Valdès en 2002.
Un des caractères qui permet de séparer Peltodoris de Discodoris est l'absence d'une armature labiale chez les premiers (cf. Pruvot-Fol, 1954), donc le nom de genre est bien Peltodoris.
Pour tout savoir sur le cycle de vie de la dalmatienne depuis l'œuf, sa nourriture, etc..., une vidéo de 5 mn de Maud NEMOZ est disponible sur youtube.
Le nom de "doris dalmatien" a une origine simple : le terme Doris découle directement de la famille à laquelle appartient l'espèce, c'est-à-dire la famille des Discodorididés (voir l'origine du nom scientifique pour plus de détails). Le terme de dalmatien est dû quant à lui à l'apparence de l'animal, ses taches rappelant celles des chiens du même nom.
Doris étant un nom féminin, le nom français est en fait "doris dalmatienne". Cependant, la version masculine est la plus souvent employée dans les guides et chez les plongeurs. Son origine vient d'un article publié par Jacques Laborel en 1982, proposant de nommer cette limace "chiot dalmatien" en référence au film de Walt Disney.
Peltodoris: du latin [pelta] = pelte, sorte de petit bouclier en forme de croissant, à l'origine en cuir, porté par les Thraces et les Amazones. Selon la mythologie, Doris est une divinité marine qui a donné son nom aux nudibranches doridiens. Doris était la fille des dieux grecs Océanos et Thétys et était mariée au dieu marin Nérée. Ensemble, ils eurent cinquante filles, les néréides (nymphes marines).
atromaculata : du latin [atr-] = noir et [maculatus] = tacheté.
Le nom scientifique Peltodoris atromaculata signifie donc doridien à points noirs.
Numéro d'entrée WoRMS : 509315
Termes scientifiques | Termes en français | Descriptif | |
---|---|---|---|
Embranchement | Mollusca | Mollusques | Organismes non segmentés à symétrie bilatérale possédant un pied musculeux, une radula, un manteau sécrétant des formations calcaires (spicules, plaques, coquille) et délimitant une cavité ouverte sur l’extérieur contenant les branchies. |
Classe | Gastropoda | Gastéropodes | Mollusques à tête bien distincte, le plus souvent pourvus d’une coquille dorsale d’une seule pièce, torsadée. La tête porte une ou deux paires de tentacules dorsaux et deux yeux situés à la base, ou à l’extrémité des tentacules. |
Sous-classe | Heterobranchia | Hétérobranches | |
Super ordre | Nudipleura | Nudipleures | |
Ordre | Nudibranchia | Nudibranches | Cavité palléale et coquille absentes chez l’adulte. Lobes pédieux souvent absents aussi. Respiration cutanée, à l’aide de branchies, de cérates ou d’autres appendices. Tête portant une ou deux paires de tentacules, les tentacules postérieurs ou rhinophores peuvent parfois être rétractés dans des gaines. Principalement marins ou d’eau saumâtre. |
Sous-ordre | Doridina | Doridiens | Corps aplati. Anus dorsal entouré complètement ou partiellement par des branchies de remplacement ramifiées qui peuvent être rétractées (voire absentes). Mangeurs d’éponges, habituellement armés de spicules calcaires internes. |
Famille | Discodorididae | Discodorididés | Forme aplatie ovale ou un peu rectangulaire. Pied plus petit que le manteau granuleux. Possibilité d’autotomie du bord du manteau. Présence de glandes à acide. Tentacules buccaux coniques ou digitiformes. |
Genre | Peltodoris | ||
Espèce | atromaculata |
Détail du panache branchial
Sur cette photo, on voit bien les rhinophores et surtout le panache branchial, branchie en forme de plume sur la partie arrière du corps comportant 8 appendices à 3 ramifications.
Cassis (13), 20 m
06/2006
Rhinophores lamellés
Vue de près, détail des rhinophores aux 25 lamelles.
Port Cros (83), La Gabinière
19/08/2002
Rhinophores rétractiles
Un des rhinophores de cette dalmatienne s'est rétracté à l'approche du plongeur.
Marseille (13), Impérial du milieu, 15 m
20/07/2017
Texture du manteau dorsal
Les spicules calcaires disposés en "tipi" lui confèrent un aspect granuleux.
Grisgione (2B), 28 m
13/12/2015
Excrétion de mucus
Un "nuage" blanchâtre formé d'un épais mucus peut être observé se dégageant d’un animal lorsqu'il est dérangé. Il faut éviter de faire l’expérience tout de même ! C'est un stress et une contrainte perturbatrice pour le métabolisme de l'animal.
Les Embiez (83), 20 m
02/11/1994
Doris dalmatiens sur Petrosia ficiformis
Colonie de doris dalmatiens sur son éponge Petrosia ficiformis. Les rhinophores et les branchies sont sortis, ce qui est particulièrement visible pour l'individu situé en bas à gauche de la photo.
Antibes (06)
08/1999
En Dalmatie
En Dalmatie, sur la côte croate de la mer Adriatique, le doris dalmatien est appelé "Doris léopard" ! Nul n'est prophète en son pays.... Cet individu se présente sous une allure particulièrement "aplatie", au creux de son éponge favorite : l'éponge pierre Petrosia ficiformis.
Krk, Croatie, 20 m
25/08/2002
En Atlantique
Pendant longtemps, un mystère a subsisté sur la source de nourriture des doris dalmatiennes en Atlantique où l'éponge pierre n'est pas présente... (cf. explications dans la fiche).
Socoa (64), 17 m
20/07/2004
Sur Haliclona fulva
Il est maintenant prouvé que la dalmatienne ne se nourrit pas que de l'éponge pierre et apprécie aussi l'haliclone orange dans son menu. Sur cette photo, des fèces orange sont visibles, déchets probables du dernier repas sur cette éponge.
Golfe d'Ajaccio (2A), Isolella, 20 m
22/07/2016
La bouche
Qu'est-ce que cette gourmande est-elle prête à racler ?
Cerbère (66), Le dôme, 21 m
10/06/2023
Organe sexuel
Chez cet individu, on peut voir émerger sur le côté droit du corps, derrière la tête, l'organe sexuel du doris dalmatien. Normalement rétracté et invisible, il est ici déployé. La raison en est très probablement la présence du second individu, en bas de l'image. Un épisode de reproduction va sans doute débuter.
Crau de Nao, rade de Villefranche-sur-mer (06), 32 m
03/05/2009
Accouplement
Les nudibranches s'accouplent du côté droit où se trouvent leurs organes génitaux.
St Cyr-sur-mer (83), Pointe Fauconnière, 8 m
14/09/2010
En train de pondre
La ponte a la forme d'un ruban gélatineux enroulé, de couleur blanc-jaunâtre. L'attribution de la ponte à la doris dalmatienne est sans équivoque à ce stade.
Cap Estel (06), 17 mètres environ
05/06/2017
Juvénile
Sur la droite de l'adulte, on devine un (très) petit individu !
Galeria (2B), La Faille, 5 m
16/10/2007
Copépode parasite
Comme c'est le cas pour d'autres nudibranches, bien que rarement vu sur Peltodoris atromaculata, cette espèce peut être parasitée par de minuscules crustacés du groupe des Copépodes. Les deux expansions allongées bien visibles sont les sacs ovigères de la femelle.
Galeria (2B), 18 m
14/10/2012
Aux Canaries
De nombreux observateurs ont vu cette limace dans la zone de l'Atlantique voisine de la Méditerranée (côte Basque, Canaries).
Ténérife, 20 m
21/05/2009
La vie à l'ombre...
A l'ombre de cette éponge-pierre, bien grignotée par les doris dalmatiens, on trouve les pontes des doris, des bryozoaires, d'autres éponges...
Galeria (2B), 10 m
09/2011
Structure en tipi des spicules
Les spicules du doris dalmatien ont une structure en tipi qui donne cet aspect granuleux au manteau (préparation des spicules et photo de G. Breton).
N/A
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Détail des spicules calcaires
Le doris dalmatien sécrète des spicules calcaires de type aragonite (photo au microscope en contraste interférentiel, préparation des spicules et photo de G. Breton).
N/A
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Les premiers mois de la dalmatienne
Nous pouvons voir sur cette image le développement d'un œuf de doris dalmatienne, extrait in situ d'une ponte et "élevé" en bac.
Depuis les premières cellules, on observe l'apparition de la larve véligère*, de sa coquille et sa couronne ciliée caractéristique qui lui permet de se mouvoir dans sa phase planctonique. Puis le pied se défait de la coquille vers le 24e jour et l'animal commence à évoluer vers la forme juvénile. Au bout de 3 mois, la dalmatienne ne fait toujours que 2,5 millimètres mais ressemble déjà à l'adulte...
Suivi sous microscope depuis un micro-fragment de la ponte.
2015
Rédacteur principal : Delphine BILLOUARD
Vérificateur : Jacques DUMAS
Correcteur : Yves MÜLLER
Responsable régional : Véronique LAMARE
Breton G., 2004, Mais qu'est-ce qu'elles ont dans le dos, les Dalmatiennes ? Encart Bio sous-marine in Octopus, 49, juin – juillet, p. 44-45.
Gemballa S., Schermutzki F., 2004, Cytotoxic haplosclerid sponges preferred: a field study on the diet of the dotted sea slug Peltodoris atromaculata (Doridoidea: Nudibranchia), Marine Biology, 144,1213–1222.
Laborel J., 1982, Le chiot dalmatien, Océans, 112, 53-54.
La page de Peltodoris atromaculata dans l'Inventaire National du Patrimoine Naturel : INPN