Pointe d'alène

Ditrupa arietina | (O. F. Müller, 1776)

N° 2581

Atlantique Est et Méditerranée

Clé d'identification

Tube libre allongé et recourbé en forme de défense d'éléphant
Tube de section circulaire ouvert aux deux extrémités
Rétrécissement sur l'ouverture la plus grande

Noms

Autres noms communs français

Faux dentale

Noms communs internationaux

Tusk worm, horn tusk, slender tusk worm (GB), Stosszahnwurm, Horn-Zahnschnecke, Elephantenzahn-Röhrenwurm (D), Stootandenwurm (NL), Stødtansorm (DK), Sjøtanworm (SW)

Synonymes du nom scientifique actuel

Dentalium arietinum O.F.Müller, 1776
Dentalium corneum (non Linnaeus) Lamarck, 1818
Dentalium subulatum Deshayes, 1825
Ditrupa subulata Berkeley, 1835
Brochus arcuatus Brown, 1827 in Mörch, 1863
Ditrypa arcuata (Brown, 1827)
Placostegus libera (Sars, 1835)
Serpula libera Sars, 1835
Ditrupa libera (Sars, 1835)
Ditrupa subulata (Deshayes, 1825) in Berkeley, 1835
Dentalium goreanum Clessin, 1896
Ditrupa goreanum (Clessin, 1896)
Ditrypa arietina Bush, 1905

Distribution géographique

Atlantique Est et Méditerranée

Zones DORIS : ● Europe (côtes françaises), ○ [Méditerranée française], ○ [Atlantique Nord-Est, Manche et mer du Nord françaises]

Boréale à subtropicale, cette espèce est présente dans l'Atlantique Est, de l'Islande aux Açores, aux îles Canaries et au Sénégal, et également en Méditerranée. Cette espèce a longtemps été considérée comme cosmopolite du fait de la confusion avec les dentales et des erreurs d'identification.

Biotope

Ditrupa arietina vit sur des fonds détritiques, de sables fins et de sables vaseux avec des éléments grossiers, de 10 à 30 mètres de profondeur en Méditerranée. On la trouve mais à 100, 200 m voire jusqu'à 1 500 m de profondeur dans l'Atlantique.

Description

La première chose que l'on voit, c'est une défense d'éléphant miniature (30 mm de long, jusqu'à 55 mm, mais habituellement 25-32 mm et 2-3 mm de diamètre). Le tube calcaire blanchâtre recourbé est de section circulaire, rétréci d'un côté et ouvert aux deux extrémités. L'ouverture la plus large présente un rétrécissement, ce qui est caractéristique de l'espèce. Ce tube est toujours libre, jamais fixé. Il présente parfois deux (voire plus) étranglements successifs. Il peut présenter également des anneaux de coloration brun-orange.

Le tube contient une annélide polychète sédentaire. Celle-ci ne sort pas beaucoup de son tube. En général, quand l'animal n'est pas inquiété, seuls l'opercule* et le panache branchial sont visibles. Ce dernier porte des bandes circulaires rouges (mais peut être entièrement rouge). L'opercule, porté au bout d'un pédoncule* long rond et lisse, est en forme de gobelet surmonté d'une plaque jaune-brun.

L'animal ne mesure que 20 mm de long sur 1 à 2 mm de large pour un tube de 40 mm de long et 2 à 3 mm de large.
Comme toutes les annélides polychètes son corps est constitué de trois parties : une tête portant le prostomium* et des appendices pairs (palpes -appendice sensoriel près de la bouche-, antennes* et cirres*), un tronc allongé annelé (environ 60 métamères*) et une queue (pygidium*), ici aplatie. Le corps est rouge vif.

Espèces ressemblantes

Cette espèce, avec son tube en forme de défense d'éléphant, ne peut être confondue avec aucune autre espèce d'annélides polychètes, mais elle a été confondue avec un dentale, mollusque scaphopode.
Toutefois certaines caractéristiques peuvent éviter la confusion :

  • le tube de D. arietina est plus recourbé que la coquille du dentale ;
  • l'extrémité la plus large présente un rétrécissement ;
  • la couche externe du tube, sur un spécimen frais, est vitreuse.

Le dentale est un mollusque qui vit enfoui dans les sédiments, sa coquille en forme de défense d'éléphant est plus large, moins recourbée et ne présente pas de rétrécissement sur l'extrémité la plus large. Il y a plusieurs espèces de dentales dont : Antalis vulgaris.

Alimentation

Ditrupa arietina est un filtreur* de particules en suspension, son régime alimentaire comprend des diatomées*, des haptophytes (algues unicellulaires caractérisées par la présence d'un appendice filiforme différent d'un flagelle), des bactéries et des cyanobactéries. La taille des particules ingérées varie de 1 à 50 µm.

La pullulation de cette espèce peut avoir une importance écologique considérable par la consommation des organismes consommés.

Reproduction - Multiplication

Les sexes sont séparés. Les gamètes* sont libérés (de novembre à juin à Banyuls-sur-mer) par des contractions du corps à l'intérieur du tube et la fécondation est externe. Les larves* sont planctotrophiques* pendant quelques semaines puis migrent vers le fond où elles commencent à produire le tube.

Vie associée

De nombreux organismes épibiontes* peuvent se fixer sur la partie antérieure du tube quand l'animal est vivant :

  • des serpules comme des Hydroides (H. elegans (Haswell, 1883), H. norvegica Gunnerus, 1768),
  • des foraminifères comme Astrorhiza arenaria Carpentier in Norman, 1877, Miniacina miniacea Pallas, 1176, Cassidulina obtusa Williamson, 1858, Elphidium crispum (Linnaeus, 1767),..
  • des cnidaires comme Caryophyllia smithi Stokes & Broderip, 1828,
  • des bryozoaires,
  • des éponges,
  • et même des pontes de mollusques gastéropodes.

Quand le tube est vide, il peut être occupé par :

  • un amphipode comme Siphonoecetes striatus Myers & MacGrath, 1979
  • un siponcle comme Phascolion strombus (Montagu, 1804) ou Aspidosiphon muelleri Diesing, 1851. Dans ce cas les épibiontes fixés sur l'extrémité antérieure du tube disparaissent car le siponcle oriente cette extrémité vers le bas et c'est donc l'extrémité postérieure qui, alors, peut être colonisée.

Certains tubes (actuels et fossiles) montrent un trou rond, preuve de la prédation par un gastéropode perceur comme le natice. Cette espèce est également consommée par des poissons plats.

Divers biologie

Cette espèce était considérée comme peu commune il y a 30 ans. Depuis, on a observé des pullulations par endroits, jusqu'à plus de 11 000 (voire 20 000) individus/m² à Banyuls-sur-mer en 1994, puis 100/m² en 1996. En Atlantique, des dragages par 110 m de fond ont montré qu'il pouvait y avoir jusqu'à 14 800 individus/m².

Ditrupa arietina peut sortir de son tube sur une grande partie de sa longueur et se déplacer en se halant sur le fond.

La partie la plus fine du tube est dans le sédiment et la plus large est en dehors et permet au panache de s'épanouir. Toutefois, en plongée, nous observons les tubes couchés sur le fond.

Ditrupa arietina vit deux ans. La croissance est maximale durant la première année à l'issue de laquelle l'animal devient mature sexuellement.

Informations complémentaires

Le tube est formé de deux couches calcaires, une interne blanc-opaque et une externe translucide plus épaisse. C'est le seul genre connu de Serpulidé qui possède de la calcite magnésienne (calcite riche en magnésium) plutôt que de la calcite et/ou de l'aragonite pour la construction de la couche externe de son tube calcaire. Il s'agit probablement d'une adaptation à son mode de vie libre, différent des autres Serpulidés.

Cette espèce (et d'autres proches) existe à l'état fossile au moins à partir du Miocène (soit - 23 millions d'années). D'ailleurs les tubes vides actuels participent de façon importante à la partie calcaire d'origine biologique du sédiment.

Les populations atlantiques et méditerranéennes semblent différer par leur coloration et quelques aspects écologiques, des études approfondies sont attendues.

Origine des noms

Origine du nom français

Pointe d'alène : allusion à la forme de la coquille. Une alène est un poinçon de fer dont on se sert pour percer et coudre le cuir.

Origine du nom scientifique

Ditrupa : du grec [di] = deux et [trypa] = petit trou. Allusion aux deux orifices du tube. Nom de genre créé par le révérend M.G. Berkeley en 1835. Quelques auteurs ont utilisé Ditrypa.

arietina : du latin [arietis] = le bêlier, certainement en référence aux cornes de cet animal, quoique le tube n'est pas enroulé. Nom d'espèce créé par O.F. Müller en 1776.

Classification

Numéro d'entrée WoRMS : 130987

Termes scientifiques Termes en français Descriptif
Embranchement Annelida Annélides

Vers segmentés (annelés) à section cylindrique, à symétrie bilatérale constitués de segments semblables. Le premier segment porte la bouche et le dernier l’anus. Nombreuses formes marines, dulcicoles ou terrestres, libres ou parasites.

Classe Polychaeta Polychètes

Annélides marines. Chaque segment porte des excroissances locomotrices (les parapodes) plus ou moins développées, munies de touffes de soies chitineuses rigides. Chez la plupart des espèces, la tête porte plusieurs organes sensoriels, des mâchoires, et souvent un panache branchial coloré. Animaux libres dans la colonne d'eau ou sur les sédiments mais aussi galéricoles ou tubicoles.

Sous-classe Sedentaria - Canalipalpata Annélides polychètes sédentaires - Canalipalpata

Annélides polychètes sédentaires vivant dans des tubes ou des terriers semi-permanents, avec une paire de palpes creusés d'un sillon longitudinal cilié.

Ordre Sabellida Sabellides

Métamérie très altérée, corps divisé en deux régions distinctes, une thoracique à segments peu nombreux et une abdominale, le plus souvent à segments très nombreux, parfois seulement 3 segments chez les très petites espèces. Prostomium indistinct et peristomium faisant une collerette plus ou moins développée, entière ou divisée en lobes, branchies volumineuses (2 lobes semi-circulaires ou spiralés portant de nombreux filaments ou rayons garnis de barbules ciliées) en panache terminal disposé en entonnoir entourant la bouche.

Famille Serpulidae Serpulidés

Tube calcaire blanc, non enroulé en spirale, attaché au substrat. Panache de 30-40 appendices tentaculaires (radioles) dont quelques-uns sont transformés en un opercule. Parfois en groupes.

Genre Ditrupa
Espèce arietina

Nos partenaires