Corps anguilliforme d'une longueur maximale documentée de 1,40 m (moyenne 50 cm)
Couleur grise à brun clair avec (la nuit) de nombreuses barres verticales grises à noirâtres
Bande oblique noirâtre de la partie inférieure de l’œil à la commissure des lèvres
Commissure des lèvres à l’aplomb de la limite postérieure des yeux ou derrière cette ligne
Origine de la dorsale en avant de l’aplomb de l’extrémité postérieure des pectorales
Anguille-congre, anguille-ciseaux (Maurice), congre oiro
Ash-colored
conger eel, ashen conger eel, black-edged conger, blackedged conger, blacklip
conger, indian conger eel, longfin African conger, longfin conger, moustache
conger (GB), Congrio de aleta larga (E), Safio de Moçambique (Mozambique), Mungafi
(Comores), Lamalura, lamerana (Madagscar), Swartrand-seepaling (Afrique du Sud)
Conger cinereus cinereus Rüppell, 1830
Conger flavipinnatus Bennett, 1832
Conger cinereus marginatus Valenciennes, 1850
Conger altipinnis Kaup, 1856
Mer Rouge, océan Indien et zones tropicales et subtropicales de l’océan Pacifique Ouest et centre
Zones DORIS : ● Indo-Pacifique, ○ [Mer Rouge]Cette espèce peut être rencontrée en mer Rouge, dans l’océan Indien et dans les zones tropicales et subtropicales de l’océan Pacifique à l’exception d’Hawaï.
Dans le Pacifique, elle est présente d’ouest en est de l’Indonésie à l’archipel des Tuamotu et du nord au sud, du sud du Japon à l’Australie, l’île Lord Howe, les îles Kermadec et l’île de Pâques.
Conger cinereus fréquente les lagons et les pentes externes jusqu’à 80 m de profondeur. On peut le rencontrer sur fond sableux, en zone corallienne et dans les herbiers. Il fréquente aussi les estuaires.
Le corps est anguilliforme, subcylindrique en partie antérieure et comprimé en partie postérieure. Il est dépourvu d’écailles. La longueur de la tête entre de 7 à 9 fois dans la longueur totale. La longueur maximale documentée est de 1,40 m, la taille moyenne est de 50 cm.
La couleur va d’un gris plus ou moins foncé au brun clair. Ces couleurs pâlissent, éventuellement jusqu’au blanc, dans la zone ventrale. La nuit, le corps est généralement marqué par de nombreuses barres verticales grises à noirâtres de forme, de largeur et d’emplacement variables. Ces marques se prolongent parfois, en pâlissant, sur la nageoire dorsale. La ligne latérale*, continue, est formée de pores espacés entourés d’une petite tache blanche qui les rend visibles sur les parties grisées de la livrée de nuit.
La tête est fine, longue et pointue avec un front plat et de grands yeux, dont le diamètre entre un peu plus de trois fois dans la hauteur de la tête. La bouche est longue, les lèvres sont épaisses. La mâchoire supérieure est un peu plus longue que l'inférieure. Les narines antérieures sont tubulaires, elles sont placées de part et d’autre du bout du museau juste au-dessus de la lèvre supérieure. Les narines postérieures forment un pore devant les yeux. La commissure des lèvres se trouve à l’aplomb de la limite postérieure des yeux ou derrière cette ligne. Une bande oblique noirâtre commence sous l’œil et se prolonge au-dessus de la lèvre jusqu’à la commissure des lèvres (c’est la « moustache » du nom vernaculaire*). On trouve généralement trois pores de couleur blanche alignés verticalement derrière les yeux. Il y a de nombreux autres pores sur la
tête, notamment au-dessus de la lèvre supérieure et dans la partie
inférieure de la tête, mais ils sont en général peu ou pas discernables.Les nageoires dorsale et anale sont continues et soudées, à l’extrémité postérieure du corps, à une nageoire caudale réduite à quelques rayons et indiscernable chez l’animal vivant. Ces nageoires ne comportent pas de rayons durs.
L’origine de la dorsale se situe en avant de l’aplomb de l’extrémité postérieure des pectorales quand elles sont plaquées sur le corps. L’anale s’étend le long des deux-tiers postérieurs du corps. Ces nageoires sont gris pâle à bleuâtres, avec un large liseré noir précédé d’une bande blanche. On observe fréquemment une tache noire sur une partie des pectorales (généralement à leur extrémité), le reste de la nageoire étant grisâtre.
Comme toutes les espèces de l’ordre des Anguilliformes, Conger cinereus n’a pas de nageoires pelviennes.
Conger cinereus se distingue de toutes les autres espèces de congres par les caractéristiques suivantes, repérables sur le terrain :
L’espèce se nourrit de poissons, de crustacés et d’autres invertébrés, qu’elle chasse la nuit.
A notre connaissance, la biologie de la reproduction n’est pas documentée chez cette espèce à la date de publication de cette fiche (août 2019).
Certaines des espèces du genre Conger étudiées se sont révélées semelpares*. Les individus cessent de se nourrir avant la maturité sexuelle et la dégradation du corps (décalcification, perte des dents, etc.) commence avant la migration en eau profonde, où les géniteurs se produisent puis meurent.
Tous les poissons du super-ordre des Elopomorphes (qui comprend l’ordre des Anguilliformes, donc la famille des Congridés) ont des larves* dites « leptocéphales ». Le corps de ces larves, très comprimé et transparent, est en forme de ruban ou de feuille. Il est adapté à des conditions de vie très différentes de celles des adultes : ces larves vivent en plein océan alors que les congres adultes fréquentent des eaux côtières peu profondes. Ce stade larvaire est long (il peut aller jusqu’à un an). Il s’achève sur une rapide métamorphose*, qui va produire un juvénile dont la morphologie, identique à celle des adultes, est adaptée à une vie benthique*.
La couleur des juvéniles est uniformément blanchâtre avec une gorge et un abdomen blancs et des nageoires translucides. Les nageoires dorsale et anale ne portent de liseré noir qu’en partie postérieure, cette marque progressant vers l’avant avec la taille et donc l’âge. La « moustache » caractéristique n’est pas décelable chez les individus d’environ 5 cm, elle apparaît discrètement au-delà de cette taille, puis elle s’affirme.
L’activité de Conger cinereus est nocturne. Il reste caché dans un trou, une crevasse, sous une pierre ou un bloc de corail mort pendant la journée. La nuit, il peut être attiré par les torches des plongeurs sans qu’il s'agisse de phototropisme* positif, puisque tous ne réagissent pas ainsi. Certains sont peut-être plus curieux que d’autres.
L’espèce est solitaire. Elle est prédatée notamment par le serpent marin Laticauda colubrina.
Les mâchoires portent deux rangées de dents, celles de la rangée extérieure étant plus grandes et très rapprochées de façon à créer un bord tranchant.
La colonne vertébrale de C. cinereus comprend de 139 à 148 vertèbres.
L’ancienne sous-espèce endémique d’Hawaï (Conger cinereus cinereus) a été élevée au rang d‘espèce sous le nom de Conger marginatus en 2005.
La famille des Congridés est divisée en trois sous-familles, les Bathymyrinés, les Congrinés et les Heterocongrinés. C. cinereus appartient aux Congrinés.
L’espèce est pêchée artisanalement dans l’ensemble de sa distribution. Elle n’est évaluée ni par l’UICN* ni par la CITES. Toutefois, la dégradation mondiale de certains de ses habitats (herbiers et récifs coralliens notamment), associée au fait que les individus ne se reproduisent qu’une fois dans leur vie, pourrait être une cause de déclin justifiant une réglementation de sa pêche.
Congre : traduction du mot latin « conger ».
à moustache : en référence à la bande oblique noirâtre qui couvre la partie postérieure des lèvres.
Conger : nom latin désignant les congres. Le genre est attribué à Louis-Augustin Bosc d'Antic (1759-1828), naturaliste français qui mentionne ce nom en 1817 dans le Nouveau Dictionnaire d'histoire naturelle appliquée aux arts, principalement à l'agriculture, à l'économie rurale et domestique en se basant sur un texte de Cuvier. Le genre comprend actuellement 15 espèces.
cinereus : adjectif latin signifiant « cendré, de couleur cendrée ». L’espèce que décrit Eduard Rüppell (1794-1884) en 1830 est bien Conger cinereus, comme le prouvent la description et la figure qu’il en donne, mais il ne s’aperçoit pas que l’espèce est nouvelle. Il pense avoir affaire à Muraena cinerea (actuellement Muraenesox cinereus), dont il estime qu’elle doit être classée dans le genre Conger sous le nom de C. cinereus. Le premier usage cohérent du taxon accompagné par une description a été fait par le zoologiste Carl Benjamin Klunzinger (1834-1914), qui a crédité Rüppell de l’autorité taxonomique malgré son erreur.
La localité du type* est la mer Rouge.
Termes scientifiques | Termes en français | Descriptif | |
---|---|---|---|
Embranchement | Chordata | Chordés | Animaux à l’organisation complexe définie par 3 caractères originaux : tube nerveux dorsal, chorde dorsale, et tube digestif ventral. Il existe 3 grands groupes de Chordés : les Tuniciers, les Céphalocordés et les Vertébrés. |
Sous-embranchement | Vertebrata | Vertébrés | Chordés possédant une colonne vertébrale et un crâne qui contient la partie antérieure du système nerveux. |
Classe | Actinopterygii | Actinoptérygiens | Ossification du crâne ou du squelette tout entier. Poissons épineux ou à nageoires rayonnées. |
Ordre | Anguilliformes | Anguilliformes | Corps allongé, serpentiforme, nageoires anale et dorsale en continuité avec la caudale, pas de nageoires pelviennes. |
Famille | Congridae | Congridés | |
Genre | Conger | ||
Espèce | cinereus |
Nocturne
Conger cinereus a une activité exclusivement nocturne et se cache en journée.
Les barres grises qui marquent son corps n’apparaissent que la nuit.
Lagon de l'Ermitage, La Réunion, océan Indien, 1,5 m, en PMT et de nuit
05/04/2015
Tête
La tête est fine, longue et pointue avec un front plat et de grands yeux. Une de ses caractéristiques est la « moustache » esquissée sous l’œil, qui se prolonge au-dessus de la lèvre postérieure jusqu’à la commissure des lèvres. Ce gros plan permet en outre d‘observer les narines antérieures tubulaires placées de part et d’autre du bout du museau. Notez aussi les pores présents sur la tête, les trois plus larges étant placés verticalement derrière les yeux.
Lagon de l'Ermitage, La Réunion, océan Indien, 1,5 m, en PMT et de nuit
22/15/2015
Ligne latérale
La ligne latérale est formée de pores espacés entourés d’une petite tache blanche qui les rend visibles sur les parties grisées de la livrée de nuit. Notez que cet individu se trouve au sommet d’un massif d’Acropora : ces congres peuvent se déplacer avec aisance ailleurs que sur le substrat.
Lagon de l'Ermitage, La Réunion, océan Indien, 1,5 m, en PMT et de nuit
26/10/2010
Nageoire caudale
La nageoire caudale est indiscernable sur le terrain, mais elle existe bien : elle est réduite à quelques rayons. Une membrane relie ses rayons extérieurs aux derniers rayons de la dorsale et de l’anale, ce qui donne l’impression d’une nageoire continue.
Lagon de l'Ermitage, La Réunion, océan Indien, 1,5 m, en PMT et de nuit
26/11/2016
Jeune individu
Cet individu, photographié de jour, se trouvait sous un bloc de corail mort.
Sa taille (environ 15 cm) montre qu’il est jeune, tout comme l'indique aussi la bordure noire des nageoires, cantonnée au dernier tiers du corps.
Lagon de l'Ermitage, La Réunion, océan Indien, 1,5 m, en PMT
08/03/2014
Barres estompées
La couleur des barres grises associées à la livrée de nuit est d’intensité variable, les variations sombres étant probablement liées au stress (chasse, présence indésirable, etc.). Cet individu ne semblait guère dérangé par la présence d’un observateur, comme le montrent ses barres grises à peine visibles.
Lagon de l'Ermitage, La Réunion, océan Indien, 1,5 m, en PMT, de nuit
11/12/2011
Parfois attiré par la lumière
Conger cinereus peut être attiré par les torches des plongeurs nocturnes sans qu’il s'agisse, semble-t-il, de phototropisme* positif puisque tous ne réagissent pas ainsi.
Lagon de l'Ermitage, La Réunion, océan Indien, 1,5 m, en PMT, de nuit
05/04/2015
Chasse
L’espèce se nourrit de poissons, de crustacés et d’autres invertébrés. Cet individu a probablement repéré un petit crustacé dans les méandres du substrat détritique.
Lagon de l'Ermitage, La Réunion, océan Indien, 1,5 m, en PMT, de nuit
28/12/2015
Caché !
Cet individu a été trouvé caché en pleine nuit, ce qui n’est pas habituel.
La cachette est typique de celles qui les protègent de jour (sous le pied d’un massif ou sous des roches ou des blocs de corail mort)
Lagon de l'Ermitage, La Réunion, océan Indien, 1,5 m, en PMT, de nuit
24/11/2010
Dans un herbier
On peut rencontrer Conger cinereus sur fond sableux, en zone corallienne et dans les herbiers
Sada, Mayotte, océan Indien, 1 m, de nuit
23/04/2017
Nettoyage d'une plaie
La position sur le dos de cet individu est probablement une demande pressante de nettoyage de la plaie qu’il porte sur la gorge. Une crevette nettoyeuse Stenopus hispidus est déjà au travail, mais l’affaire semble aussi intéresser un labre nettoyeur Labroides dimidiatus juvénile.
Pointe rouge, île de Curieuse, archipel des Seychelles, océan Indien
23/03/2017
A Mayotte
Cet individu, photographié dans un îlot proche de la barrière du lagon de Mayotte, se trouvait dans 50 cm d’eau.
Passe en S, Mayotte, océan Indien, sur le platier, de nuit
25/03/2011
En Indonésie
Cette photo a été prise à Hoga island, dans les îles Wakatobi (province de Sulawesi du Sud-Est, Indonésie).
Cet archipel se trouve au sud-est de l’île des Célèbes et le nom Wakatobi est un acronyme formé des deux premières lettres du nom des quatre plus grandes îles de l'archipel (Wangi-Wangi, Kadelupa, Tomia et Binongko).
Hoga Island, archipel des îles Wakatobi, Indonésie, océan Pacifique, de nuit
30/05/2018
Rédacteur principal : Philippe BOURJON
Vérificateur : Alain-Pierre SITTLER
Responsable régional : Alain-Pierre SITTLER
Figueroa D.E., Macchi G., Haimovici M., 2010, News about the reproductive ecology of the southern conger eel Conger orbignianus, Journal of the Marine Biological Association of the United Kingdom, 90, 461-465.
Lecomte-Finiger R., Maunier C., Khafif M., 2004, Les larves leptocéphales, ces méconnues, Cybium, 28(2), 83-95.
Pernetta J.C., 1977, Observations on the habits and morphology of the sea snake Laticauda colubrina (Schneider) in Fiji, Canadian Journal of Zoology, 55(10), 1612-1619.
Smith D.G.,1999, Congridae-congereels, in FAO Species Identification Guide for Fishery Purposes, The Living Marine Resources of the Western Central Pacific, Vol. 3, Batoid Fishes, Chimaeras and Bony fishes, part1 (Elopidae to Linophrynidae), K.E.Carpenter and V.H.Niem (eds), Rome, 1680–1687.
Smith D.G., Ho H.C., 2018, Review of the congrid eel genus Conger (Anguilliformes: Congridae) in Taiwan, Zootaxa, 4454(1), 168-185.
La page de Conger cinereus sur le site de référence de DORIS pour les poissons : FishBase