Parasite sur la langue de poissons marins
Corps aplati dorso-ventralement de forme oblongue et convexe
Ensemble du corps de couleur blanche, cirée
Tête petite, triangulaire et enclavée dans le corps
Deux yeux comme deux taches sombres
Sept paires de pattes avec des crochets de fixation
Longueur maximale : 3,5 cm
Parasite Betty, pou de langue, pou mangeur de langue, alien de la langue (traduction de l'expression anglo-saxonne)
Betty, tongue-biter (GB)
Meinertia italica (Schiödte & Meinert, 1883)
Méditerranée, Atlantique proche
Zones DORIS : ● Europe (côtes françaises), ○ [Méditerranée française]Ceratothoa italica est potentiellement partout en Méditerranée, même s'il semble plus rare sur les côtes africaines.
Il est également signalé en Atlantique sur les côtes nord-ouest de l'Afrique, comme par exemple en Mauritanie.
Plusieurs écrits semblent montrer que ce parasite, comme ses espèces ressemblantes, soit en phase de colonisation d'autres territoires.
Cet isopode, parasite de plusieurs espèces, partage donc le biotope* de ses hôtes. Mais son premier biotope est, de fait, la langue de ces poissons !
Cet isopode, parasite situé sur la langue de nombreux poissons marins, est difficilement visible du fait de sa localisation sur son hôte.
Il présente un corps aplati dorso-ventralement et de forme oblongue et convexe. Son corps, deux fois et demie plus long que large, est entièrement blanc, d'aspect ciré. Il est métamérisé* et donc segmenté. Il comprend la tête, le thorax et l'abdomen.
La tête, ou céphalon*, est courte et petite, triangulaire dans sa partie inférieure et semi-arrondie dans sa partie supérieure. Elle est enchâssée dans le corps par les marges latérales du thorax qui l'englobent. Deux yeux, peu marqués comme des taches sombres, à faible pigmentation, se situent sur les bords de la tête. Ils ne sont pas proéminents.
Le thorax, ou péréion*, comporte 7 segments. Chacun d'eux porte une paire de pattes, ou appendices thoraciques, qui se terminent par des crochets de fixation : ce sont eux qui s'accrochent à la langue de l'hôte. Les mérus* de ces pattes thoraciques portent une forte expansion.
L'abdomen, ou pléotelson*, débute par une forte dépression dans sa largeur et des segments courts pour s'élargir progressivement jusqu'au telson* large et trapu.
Les mâles sont plus petits que les femelles ; ces dernières peuvent atteindre 35 mm.
Les espèces ressemblantes sont nombreuses et il est même souvent difficile de les distinguer. Une des raisons est qu'il existe sans doute des espèces connues sous différents noms (synonymes non encore reconnus). La plupart d'entre elles, ainsi que leurs hôtes, est généralement inféodée à des zones géographiques bien déterminées :
- Dans les eaux européennes de l'Atlantique, Ceratothoa steindachneri Koelbel, 1879 sur la vive Echiichthys vipera, les serrans Serranus hepatus, S. cabrilla, S. scriba, les sars Diplodus annularis, D. vulgaris, les raies Raja asterias, R. polystigma et Rostroraja alba ;
- Ceratothoa capri en Méditerranée sur le sanglier Capros aper ;
- Ceratothoa collaris dans l'Atlantique africain et en Méditerranée sur le denté Dentex filosus, les pageots Pagellus erythrinus, P. acarne, Pseudotolithus moorii ;
- Ceratothoa parallela (Otto, 1828) en Méditerranée et Atlantique, sur les bogues Boops boops et divers autres Centracanthidés :
- Ceratothoa oestroides (Risso, 1816), en Méditerranée et proche Atlantique, sur les bogues, les bars, les maquereaux et les dorades ;
- Ceratothoa oxyrrhynchaena Koelbel, 1878 au Japon, en Chine, en Méditerranée et proche Atlantique sur les bogues, les mendoles Spicara maena, les Saint-Pierre Zeus faber, les grandes roussettes Sciliorhinus stellaris, les torpilles marbrées Torpedo marmorata.
Dans d'autres zones géographiques, on trouve :
- Ceratothoa gaudichaudii (H. Milne Edwards, 1840) au Chili ;
- Ceratothoa gilberti (Richardson, 1904) au Mexique ;
- Ceratothoa imbricata (Fabricius, 1775) dans une vaste zone englobant l'Afrique du Sud, la mer Rouge, l'Australie et la Chine ;
- Ceratothoa angulata (Richardson, 1910) en Inde et
- Ceratothoa exigua, en particulier sur les vivaneaux Lutjanus guttatus du Pacifique.
Il semble que Ceratothoa italica se nourrisse principalement de la langue et du sang de son hôte, mais aussi accessoirement de son mucus buccal. Son régime est essentiellement hématophage*. On remarque qu'il reste en place et remplace matériellement cette langue. Cependant, on trouve dans la littérature des avis divergents. En effet, certains estiment que C. italica ne se nourrit que du sang provenant d'une artère de la langue et que c'est cette ponction qui entraîne l'atrophie de la langue. D'autres estiment qu'il mange d'abord la langue puis ponctionne l'artère ensuite.
C'est une espèce gonochorique*, à reproduction sexuée. La femelle porte ses œufs sous le thorax. Ils sont protégés dans la cavité incubatrice par une série de fines lames transparentes, les oostégites*, qui ménagent un espace où sont conservés et incubés les œufs. Il en sortira des larves* dénommées pulli (pullus au singulier).
Ce parasite a été trouvé sur plusieurs espèces de poissons :
Pagellus erythrinus (Linnaeus, 1758) Pageot commun
Oblada melanura (Linnaeus, 1758) Oblade
Spondyliosoma cantharus (Linnaeus, 1758) Dorade grise
Dicentrarchus labrax (Linnaeus, 1758) Loup
Diplodus annularis (Linnaeus, 1758) Sparaillon
Lithognathus mormyrus (Linnaeus, 1758) Marbré
Spicara maena (Linnaeus, 1758) Mendole.
La femelle Ceratothoa italica nage pour atteindre un poisson-hôte ; elle pénètre par les branchies* pour atteindre la langue, en se déplaçant et se fixant à l'aide de ses griffes. Le parasite va se nourrir de la langue, et donc du sang et du mucus de sa victime. Il va par la suite remplacer la langue de son hôte.
Des études faites en Turquie ont démontré qu'un poisson parasité par Ceratothoa italica présentait une perturbation de sa formule sanguine.
Cet endoparasite* intra-buccal ne pose aucun risque à la consommation du poisson-hôte pour l'espèce humaine.
Il ralentit la croissance des poissons-hôtes et limite leur espérance de reproduction, de développement et de vie.
Les chercheurs ont constaté que "Betty" prospère dans les zones surexploitées par la pêche. Dans une zone protégée, proche de l'Espagne, seulement 30 % des poissons sont infectés, alors que dans les zones de pêche intensive, en Italie par exemple, le taux des victimes (prévalence du parasite) atteint alors 47 %. De même, l'impact sur la santé des poissons est plus négatif dans les zones de surpêche que dans les zones protégées.
Il y a une trentaine d'espèces de Ceratothoa connues dans le monde, dont 8 en Méditerranée.
"Isopode de la langue des poissons" est une proposition du site DORIS, liée à la position de ce parasite sur le poisson-hôte.
Ceratothoa : du latin [ceratus] = enduit de cire, ce qui évoque l'aspect ciré ou huilé, lisse du corps de cet isopode.
italica : du latin [italicus] = d'Italie, où cette espèce a été localisée, décrite et étudiée (station-type = Adriatique).
Numéro d'entrée WoRMS : 118869
Termes scientifiques | Termes en français | Descriptif | |
---|---|---|---|
Embranchement | Arthropoda | Arthropodes | Animaux invertébrés au corps segmenté, articulé, pourvu d’appendices articulés, et couvert d’une cuticule rigide constituant leur exosquelette. |
Sous-embranchement | Crustacea | Crustacés | Arthropodes à exosquelette chitineux, souvent imprégné de carbonate de calcium, ayant deux paires d'antennes. |
Classe | Malacostraca | Malacostracés | 8 segments thoraciques, 6 segments abdominaux. Appendices présents sur le thorax et l’abdomen. |
Sous-classe | Eumalacostraca | Eumalacostracés | Présence d’une carapace recouvrant la tête et tout ou partie du thorax. |
Super ordre | Peracarida | Péracarides | Les femelles sont dotées d'une cavité d'incubation formée par des expansions lamelleuses des péréiopodes. |
Ordre | Isopoda | Isopodes | Corps comprimé dorso-ventralement, première paire d’antennes beaucoup plus petite que la seconde, yeux non pédonculés. 7 paires de pattes de même apparence. |
Sous-ordre | Cymothoida | Cymothoides | ils portent des appendices buccaux comprenant une mandibule et un processus permettant de couper. |
Famille | Cymothoidae | Cymothoïdés | |
Genre | Ceratothoa | ||
Espèce | italica |
Sur la langue d'un marbré pêché
Cet isopode de 35 mm parasite à plus de 30 % la langue du marbré Lithognathus mormyrus. Le marbré de 450 g a été pêché (palangre nocturne) au large de la plage de Sainte-Croix/Côte Bleue (13).
Sainte-Croix, Côte Bleue (13), 14 m (prélèvement)
17/08/2012
Vue de face sur un prélèvement de langue
Cet individu a été trouvé sur un marbré de 450 g pêché (palangre nocturne) au large de la plage de Sainte-Croix/Côte Bleue (13).
Sainte-Croix, Côte Bleue (13), 14 m (prélèvement)
17/08/2012
Face postérieure et queue
Gros plan sur la queue (telson).
Noter sur le dernier segment abdominal le bord postérieur triplement ondulé, un des critères d'identification de l'espèce.
Sainte-Croix, Côte Bleue (13), 14 m (prélèvement)
17/08/2012
Face ventrale
Ventre bien gonflé ? Il s'agit d'une femelle qui porte des oeufs sous le thorax. Ils sont protégés dans la cavité incubatrice par une série de fines lames transparentes, les oostégites* qui délimitent ainsi un marsupium où les œufs sont incubés. Il en sortira des larves dénommées pulli (= pullus au singulier).
Sainte-Croix, Côte Bleue (13), 14 m (prélèvement)
17/08/2012
Gros plan sur la tête
Faciès inquiétant qui explique que l'on compare souvent cet isopode à un alien.
Sainte-Croix, Côte Bleue (13), 14 m (prélèvement)
17/08/2012
Ceratothoa steindachneri
Avec toutes les réserves d'usage sur l'identification des espèces sur photo, on peut indiquer que si on associe hôtes et distribution géographique, la seule espèce possible est Ceratothoa steindachneri car c'est la seule trouvée sur des Serranidae, genre Serranus (ici, serran écriture), et qui soit bien représentée en Méditerranée où elle semble commune, en particulier sur les côtes de France en Provence Alpes Côte d'Azur.
Fréjus (83)
20/07/2014
Rédacteur principal : Alain MAYOUX
Correcteur : Pierre NOËL
Responsable régional : Sylvie DIDIERLAURENT
Brusca R.C., Gilligan M.R., 1983, Tongue replacement in a marine fish (Lutjanus guttatus) by a parasitic isopod ( Crustacea : Isopoda), Copeia, 3, 813-816.
Horton T., 2000, Ceratothoa steindachneri (Isopoda : Cymothoidae) new to British waters with a key to North-East Atlantic and Mediterranean Ceratothoa, Journal of the Marine Biological Association, U. K., 80, 1041-1052.
Sala-Bozano M., Van Oosterhout C., Mariani S., 2012, Impact of a mouth parasite in a marine fish differs between geographical areas, Biological Journal of the Linnean Society, 105(4), 842-852.
La page de Ceratothoa italica dans l’Inventaire National du Patrimoine Naturel : INPN