Coquille, solide et lourde, en forme de casque, base de forme presque triangulaire
10 à 13 cm (jusqu'à 25 cm) de longueur
Surface dorsale avec 3 rangées de protubérances
Stries de croissance coupées par de fines lignes spiralées produisant un effet de treillis
Large lèvre externe épaisse avec 10 à 12 fortes dents blanches arrondies, bordées de brun foncé
Couleur crème brunâtre tachetée de brun foncé et grande tache brune sur la face inférieure
Pas de périostracum
Casque tubéreux, casque-roi
King helmet, Caribbean helmet,
king conch, queen conch (GB), Casco real, casco de mulo, quinconte (E), Königshelm,
Königshelm-Schnecke, Königs-Sturmhaube (D), Koningshelmslak (NL).
Buccinum tuberosum Linnaeus, 1758
Cassis (Cassis) tuberosa (Linnaeus, 1758)
Buccinum striatum Gmelin, 1791
Cassidea tuberosa Bruguière 1792
Cassis triquetra Rigacci, 1866
Cassis triangularis Coulon, 1936
Caraïbes
Zones DORIS : ● CaraïbesCassis tuberosa est présent aux Etats Unis d'Amérique de la Caroline du Nord (Cap Hatteras 35° N) à la Floride, aux Bermudes, à l’entrée du golfe du Mexique, aux Caraïbes, jusqu’au sud-est du Brésil (nord de l’Etat de Espirito Santo : 21° latitude Sud). Il est également aux îles du Cap Vert.
Cassis tuberosa vit dans les eaux côtières peu profondes (0 à 27 m mais surtout entre la surface et 9 m) sur le sable, sur des débris coralliens, dans les herbiers de Thalassia testudinum, Halodule wrightii et Syringodium filiforme. On le trouve également dans des peuplements de macroalgues et les récifs coralliens entaillés de sillons de sable. Ce casque peut s’enfouir partiellement.
La coquille, solide et lourde, en forme de casque, la base a une forme presque triangulaire, avec une spire basse de 7 à 10 tours. Chez l’adulte elle peut mesurer 10 à 13 cm ( jusqu’à 25 cm) de longueur. La surface dorsale porte trois rangées de protubérances, elle est ornée de stries de croissance coupées par de fines lignes spiralées produisant un effet de treillis.
La base portant l’ouverture est triangulaire, forme un bouclier couvrant toute la partie inférieure de la coquille et se termine en pointe dans la partie supérieure. Cette base porte, jusqu’à l’ouverture, des ondulations longues et étroites en forme de crêtes.
L’ouverture est étroite et longue avec une large lèvre externe épaisse portant 10 à 12 fortes dents blanches arrondies, bordées de brun foncé. Le canal siphonal* est court et recourbé.
L'opercule* corné est allongé, petit, aux extrémités arrondies. Il est de couleur brun clair.
Le siphon*, d’assez gros diamètre, peut s’allonger considérablement.
La couleur de la coquille est crème brunâtre tachetée de brun foncé sur la lèvre. Une grande tache brune occupe la zone pariétale* moyenne.
Il n’y a pas de périostracum*.
Cassis tuberosa est l'espèce la plus abondante et probablement la plus largement distribuée des espèces de ce genre dans l'Atlantique Ouest. Sa base de forme triangulaire est caractéristique.
Dans cette région, elle peut cependant être confondue avec :
Cassis flammea : la coquille a une forme ovale et n’a pas de couleur brune entre les dents labiales.
Cassis madagascariensis : la base est ovale orangée et noire.
Comme les autres casques, Cassis tuberosa se nourrit, principalement de nuit, d’oursins réguliers et irréguliers comme :
Oursins réguliers : Diadema antillarum, Echinometra lucunter, Lytechinus variegatus, Tripneustes ventricosus, Arbacia sp., Eucidaris tribuloides ;
Oursins irréguliers (oursins de sable, dollars des sables) comme : Clypeaster rosaceus, Clypeaster subdepressus, Leodia sexiesperforata, Mellita quinquiesperforata, Cassidulus caribaearum , Meoma ventricosa, Plagiobrissus grandis, Echinoneus sp., Moira sp. .
Cassis tuberosa commence à rechercher ses proies au crépuscule (avec un maximum d’activité entre 23 h et 6 h). Il se déplace à une vitesse de l’ordre de 0,3 cm par seconde. Il localise ses proies par olfaction (chémoréception*) à l’aide du siphon* qu’il étend vers l’avant ainsi que ses tentacules*.
Une fois la proie détectée et à sa portée, il soulève l’avant du pied pour recouvrir l’oursin sans le toucher. La coquille fait alors un angle de 30° par rapport au sol. Le siphon est étendu en direction de l’oursin. Le pied sécrète une épaisse couche de mucus pour se protéger des piquants et des pédicellaires*. Le proboscis* s’allonge (jusqu’à 1 à 1,5 fois la longueur de la coquille) et son extrémité entre en contact avec la proie. Il libère de l’acide sulfurique (apparition de bulles). Cette sécrétion acide contient également des neurotoxines.
L’oursin comme par exemple Diadema antillarum, ne réagit plus ni au toucher et ni à la lumière (il n’y a plus de convergence des épines vers une zone d’ombre). Le casque monte alors sur l’oursin et se laisse tomber. Les lobes antérieurs du pied saisissent l’oursin. La partie antérieure du pied enlève partiellement les piquants. Le proboscis, à l’aide de l’acide et de la radula*, découpe alors une rainure circulaire dans le test* de l’oursin. Le disque central issu de la découpe est alors poussé dans la cavité du test. Le trou mesure 5 à 9 mm de diamètre. Il faut une dizaine de minutes pour le forage.
Le trou est pratiqué sur le côté des oursins réguliers et sur la face aborale* des oursins aplatis. Probablement parce que les gonades* et d’autres tissus riches sont à proximité. Parfois le proboscis pénètre par le péristome* membraneux ou chez Diadema antillarum par le périprocte*.
La consommation des tissus internes prend environ 1 à 3 heures (voire plus). Lorsque l’intérieur comestible a été consommé (sauf le contenu de l’estomac et les tissus autour de la lanterne d’Aristote si elle est présente), le casque peut également manger les podias* et les pédicellaires ainsi que des piquants. Ces derniers ont été retrouvés intacts dans les fèces, ils sont empilés parallèlement en faisceaux et entremêlés de fins filaments noirs pouvant atteindre 30 cm de long.
Cassis tuberosa est un prédateur beaucoup plus efficace sur le sable que sur les substrats rocheux. Le type de substrat et le relief topographique peuvent dissuader Cassis de s’attaquer à un Diadema antillarum par exemple.
En aquarium, Cassis tuberosa a consommé des Astérides.
Comme chez les autres gastéropodes (du taxon des Caenogastropodes) les sexes sont séparés (on parle de gonochorie*). Un accouplement est donc nécessaire afin d’assurer la fécondation* des ovules* chez la femelle. Il y a peu ou pas d’informations à ce sujet.
Une femelle a été observée, de jour, à faible profondeur, pendant sa ponte dans une touffe de macroalgue du genre Padina. Elle a déposé, en une seule couche de 13 x 10 cm , environ 200 capsules ovigères* en forme de vase de couleur orange. Les capsules étaient espacées de 2 à 3 mm. La ponte a duré au moins 2 heures et ensuite la femelle s’est partiellement enfouie un peu plus loin. La ponte a rapidement été cachée par l’algue support.
Les embryons*, comme chez les autres Cassidés, se développent en larves* trochophores* puis en larves véligères* planctoniques* avant de se métamorphoser* en jeunes adultes benthiques*.
Cette espèce est solitaire, mais si les proies sont abondantes, de nombreux spécimens peuvent être présents dans la zone.
Comme l’animal s’enfouit seulement partiellement dans les sédiments, sa coquille peut présenter de nombreux organismes encroûtants (parfois c'est le seul substrat dur disponible à cet endroit) d’autant plus que la coquille n’a pas de périostracum*. Des algues vertes (Neomeris annulata, Acetabularia sp.) et rouges (coralliennes ou non) , des crabes comme Mithraculus sculptus, des patelles, et des organismes perforants comme l'éponge Cliona millepunctata ont été observés sur les coquilles.
Cassis tuberosa se déplace rarement dans la journée, il reste partiellement enfoui dans le sable (quand il y en a), ne laissant dépasser que 2 ou 3 des protubérances supérieures.
Par sa présence il peut contrôler les trop grandes populations d’oursins.
En raison de la beauté de sa coquille à tous les stades de croissance, C. tuberosa a été la cible de la pêche pendant des décennies à des fins ornementales ainsi que pour alimenter le commerce de souvenirs et de curiosités marines.
Cassis tuberosa (avec l’animal ou la coquille vide) est utilisé en médecine traditionnelle (traitement de l’asthme au Brésil), comme curiosité marine ou ornementale (collections de coquillage, lampe de table) ou comme objet d'artisanat (camées). A noter que pour la confection des camées, Cassis tuberosa a peu de poids dans la glyptique (art de graver les coquillages) par rapport à Cassis madagascariensis et Cypraecassis rufa nettement plus appréciés pour la qualité de leur coquille. Les populations anciennes s'en servaient comme outils (instruments de musique, cuillère) et dans les rituels magico-religieux (religion afro-brésilienne appelée Candomblé).
Certaines populations consomment le pied et le muscle columellaire*.
Des juvéniles de cette espèce sont consommés par le poisson osseux Amphichthys cryptocentrus.
Cassis tuberosa ne figure pas sur la liste de l'UICN* (Union Internationale pour la Conservation de la Nature et de ses ressources). Dans les évaluations locales, comme par exemple dans les Caraïbes colombiennes, l'espèce a été inscrite dans le livre rouge des espèces menacées comme vulnérable (VU), et au Brésil l'espèce est classée comme quasi menacée (NT).
Casque royal : traduction du nom anglais.
Cassis : du latin [cassis] = casque en métal. Dès 1651 un prêtre jésuite italien (Filippo Bonanni, 1638-1725) passionné de malacologie (l'étude des mollusques) a décrit ces coquillages comme ressemblant à un casque de soldat. Mais c’est en 1777 que le scientifique italien Giovanni Antonio Scopoli (1723-1788) a créé le genre Cassis.
tuberosa : du latin [tuberosus] = plein de bosses. Allusion aux tubercules de la coquille.
Numéro d'entrée WoRMS : 224977
Termes scientifiques | Termes en français | Descriptif | |
---|---|---|---|
Embranchement | Mollusca | Mollusques | Organismes non segmentés à symétrie bilatérale possédant un pied musculeux, une radula, un manteau sécrétant des formations calcaires (spicules, plaques, coquille) et délimitant une cavité ouverte sur l’extérieur contenant les branchies. |
Classe | Gastropoda | Gastéropodes | Mollusques à tête bien distincte, le plus souvent pourvus d’une coquille dorsale d’une seule pièce, torsadée. La tête porte une ou deux paires de tentacules dorsaux et deux yeux situés à la base, ou à l’extrémité des tentacules. |
Sous-classe | Caenogastropoda | Caenogastropodes | |
Ordre | Littorinimorpha | Littorinimorphes | |
Famille | Cassidae | Cassidés | Coquille solide à sculpture axiale (souvent à varices tuberculées); ouverture relativement étroite, labre épaissi, canal siphonal court, oblique. callosité columellaire plus ou moins épaisse. Dimorphisme sexuel marqué. Lindner 2011:89. |
Genre | Cassis | ||
Espèce | tuberosa |
Tel qu'on peut le voir dans son biotope
L'animal est à peine enfoui. La coquille est colonisée par différents organismes dont des algues vertes.
Plage de Petite Anse à pointe Noire, Guadeloupe (971), 4 m
02/04/2012
La coquille retournée
La forme triangulaire de la base est caractéristique ainsi que les dents de la lèvre externe entourées de brun. La callosité columellaire présente des crêtes et une tache brune caractéristiques.
Plage de Petite Anse, Pointe Noire, Guadeloupe (971), 4 m
02/04/2012
Vue par l'arrière
La spire est complètement recouverte par des algues et autres organismes. L'opercule corné est visible.
Plage de Petite Anse à pointe Noire, Guadeloupe (971), 4 m
02/04/2012
L'opercule vu de plus près
L'opercule est étroit. Le bord postérieur du pied est également visible.
Plage de Petite Anse à pointe Noire, Guadeloupe (971), 4 m
02/04/2012
Juste après le retournement
L'animal n' a pas fini de se rétracter dans sa coquille. La sole du pied, repliée, est encore visible.
Plage de Petite Anse à pointe Noire, Guadeloupe (971), 4 m
02/04/2012
Sur le sable
L'animal est rétracté dans sa coquille couverte d'algues vertes
Bonaire (Petites Antilles), 2 m
19/03/2012
Retourné
La base en forma de triangle et la tache brune sont bien visibles.
Bonaire (Petites Antilles), 2 m
19/03/2012
L'attaque d'un oursin
Les différentes attitudes de Cassis tuberosa au repos et pendant la poursuite et l'attaque d'un oursin.
a - Le casque est au repos, le siphon est vertical et les 2 tentacules ne sont pas en extension ;
b - L'animal est en chasse. Le siphon est dirigé vers l'avant en quête d'informations sur une proie. Les 2 tentacules sont en extension. A leur base on distingue les yeux ;
c - L'oursin a été détecté. Le casque commence à se soulever ;
d - L'animal forme une arche au-dessus de l'oursin sans le toucher ;
e - L'oursin est sous le casque, le siphon est orienté vers le haut. La tête et le proboscis sont à gauche de l'oursin ;
f - Etape finale, l'ensemble est vu par en dessous. L'oursin est immobilisé par les 2 lobes antérieurs du pied. La tête avec les 2 yeux à la base des tentacules est prolongée par le proboscis.
Figure 1, extraite de l'article de Hughes R.N. et Hughes H.P.I. 1971
Reproduction de documents anciens
1971
Rédacteur principal : Yves MÜLLER
Vérificateur : Philippe LE GRANCHÉ
Responsable régional : Yves MÜLLER
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La page de Cassis tuberosa dans l'Inventaire National du Patrimoine Naturel : INPN
La page de Cassis tuberosa sur le site de référence de DORIS pour les mollusques est ici : Molluscabase