Petites colonies portant des rameaux alternés
Épiphytes des posidonies et des cymodocées méditerranéennes
Exclusivement trouvées sur la tranche de leur plante support
Jusqu'à 30 mm de hauteur
Couleur jaunâtre à brunâtre peu soutenu
L'extrémité apicale de l'hydrocaule porte en fin de printemps et en été un crochet épais et étroit
Aglaophenia sp. Nutting, 1895
Aglaophenia helleri Müller-Calé & Krüger, 1913
Aglaophenia adriatica Stechow, 1919
Aglaophenia pluma f. gracillima Broch, 1933
Aglaophenia pluma Picard, 1955
Aglaophenia nanella Parenzan, 1956
Aglaophenia sp. von Schenck, 1962
Aglaophenia harpago von Schenck, 1965
Méditerranée
Zones DORIS : ● Europe (côtes françaises), ○ [Méditerranée française]Aglaophenia harpago est épiphyte* des posidonies et des cymodocées. Elle partage donc le biotope* de ces plantes marines. Cette espèce est endémique* à la Méditerranée (sa présence est restreinte à la Méditerranée : Adriatique et Méditerranée occidentale). Par exemple, les cymodocées poussant aux Canaries ne sont jamais colonisées par A. harpago, ni par d'autres espèces d'Aglaophenia d'ailleurs.
L'holotype* de cette espèce a été collecté par 15 m de fond en baie de Naples sur une prairie mixte de posidonies et de cymodocées.
Aglaophenia harpago peut être trouvée entre 3 et 40 m de profondeur mais elle ne sera présente en grande profondeur que si l'eau est très claire. Elle est inféodée à la tranche des feuilles de posidonies ou de cymodocées, sur les parties vivantes et en croissance.
Aglaophenia harpago est un petit hydraire dont les colonies (ou hydrocaules*) vivent sur la tranche des feuilles de posidonies ou de cymodocées, à intervalle de 10 à 15 mm. Ces colonies peuvent atteindre 20 à 30 mm de hauteur. Elles sont dressées quand elles sont petites mais tendent à se pencher vers l'arrière quand leur taille augmente. Elles sont fixées à la feuille par des hydrorhizes*.
La tige principale (ou hydrocaule*) donne naissance de manière alternée à des rameaux perpendiculaires, les hydroclades*. Ces rameaux portent des hydrothèques* associées à des nématothèques*. Les hydrothèques sont des structures chitineuses* protégeant les polypes* nourriciers (ou hydrantes*), tandis que les nématothèques sont des logettes contenant des polypes défensifs sans tentacules*, les nématophores*. La portion de tige entre chaque rameau est composée de 1 à 5 intersegments qui portent également des nématothèques. Certaines nématothèques contiennent des polypes reproducteurs et sont appelées corbules*. Les corbules sont courtes, avec 4 à 6 paires de côtes fusionnées latéralement chez les corbules femelles, partiellement ouvertes chez le mâle.
L'extrémité apicale de l'hydrocaule développe en fin de printemps et en été un crochet épais et étroit, recourbé vers l'arrière (Voir la rubrique Reproduction - Multiplication).
Les colonies ont une couleur jaunâtre à brunâtre peu soutenu.
A. harpago est la seule espèce d'hydraires benthiques* colonisant la tranche des feuilles de sa plante support. Si au sein du genre Aglaophenia, l'identification des différentes espèces est une affaire de spécialistes, la distribution exclusive d'A. harpago sur la tranche des feuilles rendra la confusion impossible.
Ces hydraires ont un régime carnivore microphage*. Les
polypes* nourriciers garnis de cellules urticantes, les cnidocytes*, capturent
les proies microscopiques du zooplancton*. Les nutriments issus de la digestion
sont distribués à l'ensemble de la colonie par l'intermédiaire de cavités gastrovasculaires communes.
La prise de nourriture est optimisée par le fait que les hydrocaules* peuvent tourner en fonction des courants sur une articulation complexe localisée à leur base. Les polypes nourriciers portés par les surfaces convexes des rameaux latéraux sont ainsi soumis à des courants unidirectionnels.
Chez les Aglaophenia, les colonies sont dioïques*. Cela signifie que les sexes sont séparés et que chaque colonie est donc soit mâle soit femelle. Il n'y a pas de stade méduse libre mais des larves planulas* nageuses. Pour A. harpago, la saison de reproduction sexuée s'étale de mars à juillet.
A. harpago est également caractérisée par une capacité de reproduction végétative (asexuée) originale. Au printemps et en été, l'extrémité apicale* de certaines colonies développe un crochet qui lui permet de s'accrocher à une feuille voisine de la plante support. Une rupture se produit au niveau d'une structure particulière (le prosegment) à la faveur d'un fort mouvement d'eau et une nouvelle colonie peut se développer sur un nouveau support. Les stolons* apicaux nouvellement attachés développent des hydrorhizes* qui poussent vers le haut et le bas du bord des feuilles. Le crochet devient ainsi l'origine d'un nouveau système stolonial. La colonie "mère" peut ensuite dégénérer.
Les colonies d'Aglaophenia harpago abritent des microalgues unicellulaires endosymbiotiques*, les zooxanthelles* (Symbodinium microadriaticum). Cela leur donne une teinte légèrement jaunâtre à brunâtre.
C'est une caractéristique qu'elles partagent avec les colonies d'un autre hydraire du genre Aglaophenia: A. tubiformis.
Les feuilles de Posidonia oceanica vivent entre 19 et 30 semaines. Ce substrat* éphémère nécessite de la part des hydraires épiphytes* obligatoires comme A. harpago de pouvoir coloniser des feuilles plus jeunes. Les crochets apicaux* des colonies permettent d'agripper les feuilles adjacentes puis leur colonisation.
La position de A. harpago sur la tranche des feuilles l’expose également aux poissons brouteurs et autres prédateurs.
Aglaophénia à crochet est une francisation du nom scientifique sur proposition du site DORIS. Ce nom fait référence au crochet ornant l'extrémité apicale* des colonies au printemps et en été.
Aglaophenia : du grec [aglao-] = resplendissant, et [-phainô] = qui brille ;
harpago : du latin [harpago-] = griffe, crochet.
Numéro d'entrée WoRMS : 117276
Termes scientifiques | Termes en français | Descriptif | |
---|---|---|---|
Embranchement | Cnidaria | Cnidaires | Organismes aquatiques (marins pour la plupart) libres ou fixés, carnivores, principalement à symétrie radiaire, caractérisés par des cellules urticantes : les cnidocytes. Deux morphologies principales : le polype et la méduse. La larve est une planula. |
Classe | Hydrozoa | Hydrozoaires | Cnidaires dont le cycle de vie est alterné, mais de façon inconstante, par deux phases différentes : le polype et la méduse. Présence d’un velum dans la méduse (dite craspédote), gonades ectodermiques, perte des septes, perte des cnidocytes endodermiques. Coloniaux ou solitaires. Quelques espèces d’eau douce. |
Sous-classe | Hydroidolina | Hydroïdes | Hydrozoaires dont le cycle de vie présente toujours une phase polype. |
Ordre | Leptothecata / Leptomedusa | Leptothécates / Leptoméduses | Hydroïdes coloniaux dont les polypes sont protégés par une enveloppe chitineuse, la thèque. Méduses (quand elles existent) aplaties, parfois de grande taille, portant des statocystes sur le bord de l’ombrelle, et des gonades sur les canaux radiaires. |
Famille | Aglaopheniidae | Aglaophéniidés | |
Genre | Aglaophenia | ||
Espèce | harpago |
Feuille de posidonie dont les tranches sont colonisées par Aglaophenia harpago
Seule A. harpago est capable de se développer à cet endroit. Chaque colonie est composée d'une tige principale donnant naissance de manière alternée à des rameaux portant les hydrothèques. Les colonies sont espacées d'environ 1 -1,5 cm. Les plus grandes font près de 2 cm et sont penchées vers l'arrière de la feuille.
La Tradelière, Ile de Lérins, Cannes (06), 13 m
16/06/2019
Les hydrothèques protègent les polypes nourriciers
Sur ces colonies bien érigées sur la tranche d'une feuille de posidonie, chaque rameau ou hydroclade* porte des logettes chitineuses appelées hydrothèques* où sont localisés les polypes* nourriciers. Leurs très fins tentacules visibles sur cette vue rapprochée captent les proies microscopiques grâce à leurs cnidocytes* afin de nourrir la colonie entière.
Le Mugel, La Ciotat (13), 12 m
04/05/2019
Dessin d'une colonie d'Aglaophenia harpago
Dessin d'une colonie d'Aglaophenia harpago, agrandissement d'une hydrothèque* et de sa nématothèque* associée et vue rapprochée de la région apicale portant le crochet caractéristique de cette espèce (présent sur certaines colonies au printemps et en été). Les échelles sont données pour l'hydrorhize* et l'hydrothèque.
Montage à partir des illustrations de Gravili et al., 2015 (colonie et hydrothèque) et de Svoboda et Cornélius, 1991 (région apicale).
11/11/2023
Focus sur une structure particulière : le prosegment
Le premier segment de l'hydrocaule comprend une structure
particulière, le prosegment, qui est parcourue de profonds sillons, aussi
appelés septes. Le prosegment est situé en amont du départ du premier
hydroclade. Les sillons permettent l'orientation de la colonie en fonction des
mouvements d'eau, vagues ou courants. Ils constituent aussi le point de rupture
permettant la multiplication végétative des colonies après agrippage du crochet
sur une feuille voisine de posidonie ou cymodocée.
Illustration modifiée à partir de Von Schenck, 1965. La référence complète est indiquée dans la rubrique Bibliographie et Liens
14/11/2023
Hydrorhizes visibles sur la tranche de la feuille
A gauche de la photo, les hydrorhizes sont visibles. La couronne de tentacules d'un polype est épanoui au milieu de la feuille.
Fond sableux proche de la Station de Recherches Sous-marines et Océanographiques de Calvi (STARESO), Corse (20), 10 m.
23/10/2021
Rédacteur principal : Jacques COVES
Vérificateur : Yves MÜLLER
Responsable régional : Véronique LAMARE
Responsable régional : Yves MÜLLER
Bouillon J., Medel M.D., Pagès F., Gili J.M., Boero F., Gravili C., 2004, Fauna of the Mediterranean Hydrozoa, Scientia Marina, Barcelona, 68, 438 pp.
Gravili C.V., Vito D. de., Gioia C. di, Martell L., Piraino S., Boero F., 2015, The non-Siphonophoran Hydrozoa (Cnidaria) of Salento, Italy with notes on their life-cycles: an illustrated guide, Zootaxa, 3908(1), 1-187
Hugues R.G. and Henderson D.H.J., 1989, Morphological adaptations of Aglaophenia harpago (Hydrozoa: Plumulariidae) to enhance feeding efficiency, Journal of the Marine Biological Association of the United Kingdom, 69, 17-25.
Hughes R.G., Johnson S., Smith I.D., 1991, The growth patterns of some hydroids that are obligate epiphytes of seagrass leaves, Hydrobiologia, 216/217, 205-210.
Schenk D.A. von, 1962, Spécialisation de la reproduction asexuelle de quelques hydroïdes vivant sur la Posidonia, Pubblicazioni della Stazione Zoologica di Napoli, 32, suppl., 117-122.
Schenck D.A. von, 1965, Aglaophenia harpago, a new species of the Plumulariidae (Hydroidea), Pubblicazioni della Stazione Zoologica di Napoli, 34(3), 211-215.
Svoboda A., Cornelius P.F.S., 1991, The European and Mediterranean species of Aglaophenia (Cnidaria: Hydrozoa), Zoologische Verhandelingen. Leiden, 274, 1-72.
La page d'Aglaophenia harpago sur le site de l'Inventaire National du Patrimoine Naturel : n'existe pas encore !