Holothurie de petite taille (maximum 4 cm, individu contracté)
Couleur gris bleu à violacé uniforme et plus ou moins foncé
Gros podia dorsaux et ventraux cylindriques avec un disque terminal noirâtre
Podia disposés en deux rangées irrégulières le long de chaque radius
Cercle de quinze tentacules dendritiques externes autour de la bouche
Little African sea cucumber (GB)
Cucumaria africana Semper, 1867
Orcula cucumiformis Semper, 1868
Cucumaria assimilis, Bell, 1886
Pseudocucumis theeli Ludwig, 1887
Pseudocucumis africana Ludwig, 1888
Phyllophorus transvectus Sluiter, 1914
Zones tropicales de l’océan Indien et de l’océan Pacifique Ouest et centre
Zones DORIS : ● Indo-PacifiqueOn peut rencontrer cette espèce dans l’océan Indien, de l’Afrique de l’Est et du Sud jusqu’au golfe du Bengale en passant par Madagascar, les Mascareignes, les Seychelles et les Maldives. On la trouve également dans l’océan Pacifique, de la Chine et de l’Indonésie aux îles du Pacifique Sud et la Polynésie française.
Elle n’est pas présente en mer Rouge.
Afrocucumis africana est le plus souvent rencontrée en zone intertidale* de 0 à 10 m, mais elle a parfois été observée jusqu’à 20 m. Elle apprécie l’hydrodynamisme important des platiers exposés dans les récifs coralliens et celui des côtes rocheuses. Elle privilégie, quel que soit le substrat*, les zones jonchées de débris sous lesquels elle se cache. On l’observe aussi très fréquemment dans des crevasses, ce pourquoi l’espèce est classée dans la cryptofaune*. Le placement de ses podia* de part et d‘autre de chacun des radius* lui permet de se fixer dans n’importe quelle position dans ces crevasses.
Afrocucumis africana est une holothurie de petite taille (maximum 4 cm, individu contracté), le poids des adultes est généralement inférieur à 10 g. Sa forme est subcylindrique s’affinant aux extrémités. Sa couleur la plus fréquente est un gris bleu à violacé uniforme et plus ou moins foncé, mais certains spécimens (observés au Kenya) peuvent varier du vert foncé au brun. Le trivium* est parfois un peu plus pâle. Le tégument* est fin et ferme au contact. Il est lisse à légèrement plissé quand l’animal n’est pas contracté. Certains individus se couvrent partiellement de divers débris de corail, de coquille ou d’algue.
Les podia dorsaux et ventraux sont cylindriques, gros et généralement courts (ils sont longs quand ils sont en extension) avec un disque terminal noirâtre. Ils sont disposés en deux rangées irrégulières le long des radius*, quelques podia pouvant être dispersés dans les zones interradiaires* (ou interradius*) chez certains individus. Il n’y a pas de papilles sur le bivium*.
L’anus et la bouche sont en position terminale. La bouche est pourvue d’un cercle de quinze tentacules* dendritiques* externes et d’un autre cercle de cinq petits tentacules internes. Les tentacules externes, fortement ramifiés, peuvent mesurer plus de la moitié de la longueur du corps quand ils sont déployés. Leur structure est celle des tentacules d‘une holothurie suspensivore* (filtreuse).
L’espèce ne possède pas d’organe de Cuvier*.
Afrocucumis africana peut être confondue avec d’autres holothuries dans sa zone de distribution.
Les juvéniles d’Ohshimella ehrenbergii sont morphologiquement similaires aux adultes d’Afrocucumis africana, et l’espèce partage les mêmes types de micro-habitat (sous les blocs et dans les fissures), bien qu’on puisse la trouver sur d'autres substrats et à de plus grandes profondeurs. L’adulte est beaucoup plus grand, et sa couleur est orange foncé à brun rouille ou rosâtre. Les podia des juvéniles sont réduits à 2 ou 3 rangées (ils sont nombreux et dispersés chez les adultes), ce qui peut entraîner la confusion avec Afrocucumis africana, mais leur couleur devrait permettre de distinguer les deux espèces. O. ehrenbergii est présente dans l’océan Indien et en mer Rouge.
Un observateur inattentif pourrait éventuellement confondre Afrocucumis africana avec Holothuria difficilis, souvent présente dans le même type d’habitat, mais celle-ci est marron foncé, porte des papilles sur le bivium et sa bouche est entourée de courts tentacules peltés* toujours dirigés vers le substrat (c'est une espèce limnivore*). De surcroît, elle émet très rapidement des tubes de Cuvier quand on la dérange (A. africana n'en possède pas).
Afrocucumis africana est suspensivore*, comme toutes les espèces de l’ordre des Dendrochirotidés. Elle déploie ses tentacules fortement ramifiés et couverts de mucus dans le courant, notamment à marée montante, pour capturer des organismes planctoniques* ainsi que des particules organiques et inorganiques. Ces tentacules sont régulièrement ramenés vers la bouche, qui prélève la nourriture.
Cette espèce se reproduit par voie sexuée, et peut-être aussi par voie asexuée. La reproduction sexuée a lieu au début des mois chauds, en même temps que la température de l’eau augmente et que le plancton* (nécessaire à l’alimentation des juvéniles) devient abondant. Les gamètes* sont émis dans la colonne d'eau. Les larves* sont pélagiques* et lécithotrophiques*. Les stades larvaires se déroulent en pleine eau, puis le juvénile se pose définitivement sur le substrat et évolue vers le stade adulte. Les juvéniles de 1 cm ont le même aspect que les adultes, les podia étant moins nombreux.
Chez les holothuries capables de scissiparité*, la reproduction asexuée se produit par scission transversale, après altération des tissus et constriction du corps à un endroit précis (spécifique à chaque espèce), suivies d’un étirement précédé ou non d’une torsion. Chacune des parties ainsi créées cicatrise rapidement au point de rupture, et régénère ensuite les éléments de son organisme restés dans l’autre partie. Une fois l’organisme régénéré, la partie extérieure manquante repousse.
Ce mode de reproduction est soupçonné chez Afrocucumis africana, après la dissection d’individus qui sont apparus privés d’anneau calcaire (un anneau de dix plaques calcaires entourant le pharynx), ce qui permet de supposer qu’il s’agissait de parties postérieures n’ayant pas complètement achevé la régénération de la partie antérieure. Toutefois, dans la mesure où des femelles « couveuses » (les œufs étant incubés sous le trivium) ont aussi été rapportées dans une autre population, il se pourrait que les individus en question fassent partie d’espèces cryptiques* formant un "complexe" d'espèces. Quoi qu’il en soit, la reproduction asexuée n’a pas été précisément documentée pour l’espèce au jour de rédaction de cette fiche (août 2018).
Les tissus de l’espèce contiennent des substances ayant montré des propriétés contraceptives (anti-implantation) et antivirales.
Les spicules* comprennent de larges plaques perforées en forme de lentilles (bombées des deux côtés) spécifiques du genre, des petites plaques multiperforées et des bâtonnets perforés aux extrémités. Les plaques sont hérissées d’épines pyramidales.
Afrocucumis africana peut être trouvée soit isolée, soit en agrégations à très forte densité (jusqu’à 615 individus par m2). Les individus sont peu mobiles. Ils peuvent rester très longtemps au même endroit si la nourriture est abondante et régulière.
Comme beaucoup d’espèces d’holothuries, Afrocucumis africana se sépare périodiquement de la couche superficielle de son tégument. J. P. McMurrich a suggéré en 1894 un lien entre cette desquamation et l'excrétion de résidus de l'activité métabolique par les arbres respiratoires, résidus qui seraient portés vers le tégument et ainsi périodiquement éliminés.
Holothurie africaine : c'est la traduction du nom scientifique. En l’absence de nom vernaculaire établi, ce nom est une proposition du site DORIS.
Afrocucumis : nom composé formé du préfixe [Afro-], qui renvoie au latin [Africa] = Afrique, et du nom latin [cucumis], qui désigne un concombre. La morphologie de nombreuses espèces d’holothuries est coutumièrement comparée à celle du concombre (Cucumis sativus), et l’un des noms communs du groupe est « concombre de mer ».
Le sens du mot Afrocucumis est donc « concombre de mer africain ».
africana : féminin de l’adjectif latin [africanus], qui désigne ce qui est africain.
Le genre Afrocucumis fut créé par Deichmann en 1944 pour classer Pseudocucumis africana, désormais synonyme d’A. africana. Il comprend actuellement trois espèces (A. africana, A. ovulum et A. stracki). La localité du type* (sous P. africana) est l’île de Zanzibar, au large des côtes de Tanzanie, ce qui explique l’épithète spécifique du nom scientifique.
Termes scientifiques | Termes en français | Descriptif | |
---|---|---|---|
Embranchement | Echinodermata | Echinodermes | Symétrie radiale d'ordre cinq (chez les adultes). Squelette de plaques calcaires bien développé sous le derme. Présence d'un système aquifère auquel appartiennent les podia souvent visibles extérieurement. |
Sous-embranchement | Echinozoa | Echinozoaires | Echinodermes non étoilés de forme globuleuse ou allongée. Ce groupe renferme les oursins et les concombres de mer. |
Classe | Holothuroidea | Holothuroïdes | Echinodermes vermiformes, ouverture buccale à l’extrémité antérieure du corps et entourée d’une couronne de tentacules rétractiles, anus postérieur, une seule gonade : holothuries, concombres de mer. Endosquelette réduit à de microscopiques ossicules ou plaques, inclus dans la paroi du corps. |
Ordre | Dendrochirotida | Dendrochirotes | Holothuries aux tentacules buccaux arborescents adaptés à la capture du plancton. |
Famille | Sclerodactylidae | ||
Genre | Afrocucumis | ||
Espèce | africana |
Petite holothurie
Afrocucumis africana est une holothurie de petite taille. Le spécimen photographié ici mesure 4 cm, ce qui en fait un grand individu pour l'espèce.
Lagon de l'Ermitage, La Réunion, océan Indien, 1,5 m, en PMT
03/10/2015
Taille moyenne
Cet individu d’environ 2,5 cm illustre la taille moyenne probable de l’espèce.
Lagon de l'Ermitage, La Réunion, océan Indien, 1,5 m, en PMT
07/10/2015
Incrustation
Afrocucumis africana est une spécialiste des crevasses et des fissures. Dans un habitat où elle ne trouve que des blocs de corail mort, elle garde sa tendance à s’incruster dans les creux du relief de la face inférieure de ces blocs. Comme l'ont fait les deux individus photographiés ici.
Lagon de l'Ermitage, La Réunion, océan Indien, 1,5 m, en PMT
05/05/2016
Tentacules dendritiques
La bouche est pourvue d’un cercle de quinze tentacules dendritiques externes fortement ramifiés, qui lui servent à filtrer le plancton dans le courant, ainsi que des particules organiques et inorganiques.
Lagon de l'Ermitage, La Réunion, océan Indien, 1,5 m, en PMT
31/10/2016
Podia
Les podia du bivium sont gros et semblent courts.
Il suffit d’observer ceux du trivium, au contact du substrat, pour voir qu’ils sont longs en extension. Ces podia sont distribués en rangs le long de chaque radius, ce qui permet à cette espèce de se fixer dans n’importe quelle position dans les fissures de la roche ou des blocs de corail mort.
Lagon de l'Ermitage, La Réunion, océan Indien, 1,5 m, en PMT
29/03/2017
Tégument
Quand l’animal n’est pas contracté, on peut voir que le tégument est lisse et finement plissé, et cela d’autant plus facilement qu’il n’y a pas de podia dans les zones interradiaires.
Lagon de l'Ermitage, La Réunion, océan Indien, 1,5 m, en PMT
19/04/2017
Couverture de débris
Il n’est pas rare de trouver des individus couverts de débris d’assez grande taille comparée à la leur. La raison d’être de ce comportement n’est pas connue. L’espèce étant cryptique il s’agit sans doute davantage de protection contre la prédation que contre le rayonnement solaire.
Lagon de l'Ermitage, La Réunion, océan Indien, 1,5 m, en PMT
02/04/2016
Desquamation
Comme de nombreuses holothuries, Afrocucumis africana se sépare périodiquement de la couche superficielle de son tégument. La cause de ces desquamations n’est pas connue avec certitude.
Lagon de l'Ermitage, La Réunion, océan Indien, 1,5 m, en PMT
28/01/2016
Juvénile
On peut observer que ce juvénile de moins d’un centimètre a le même aspect général que les adultes, les podia étant évidemment moins nombreux.
Lagon de l'Ermitage, La Réunion, océan Indien, 1,5 m, en PMT
28/01/2016
Scissiparité ?
La capacité de se reproduire asexuellement par scission transversale n’est pas documentée chez Afrocucumis africana, mais certains auteurs soupçonnent que l’espèce est scissipare. Chacun des individus photographiés dans ce montage présente un signe caractéristique d’une scission récente : une partie postérieure tronquée au tégument plus clair et manifestement plus fin du fait de la cicatrisation. En outre, trois d'entre eux montrent une excroissance à divers stades d’évolution au centre de la section tronquée : c’est de cette façon que la partie manquante commence à se régénérer après scission et régénération des organes internes chez les espèces scissipares. Il se pourrait donc bien que le soupçon de certains auteurs se trouve un jour confirmé
Lagon de l'Ermitage, La Réunion, océan Indien, 1,5 m, en PMT
2017-2018
A Mayotte
L’espèce est présente dans les zones tropicales de l’océan Indien et de l’océan Pacifique ouest et centre. Il est la plupart du temps difficile d’identifier une holothurie dendrochirote à partir des seuls tentacules, le corps étant encavé, mais il est probable que le sujet de cette photo soit Afrocucumis africana.
Mayotte, océan Indien, 1,50 m, de nuit
07/05/2017
Rédacteur principal : Philippe BOURJON
Vérificateur : Alain-Pierre SITTLER
Responsable régional : Alain-Pierre SITTLER
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