Eponge encroûtante, cornée
Corps massif développant de nombreux lobes, généralement tubulaires
Hauteur moyenne de cinq centimètres
Grands oscules exhalants de deux centimètres de diamètre, au sommet
Surface de coloration nuancée, rose pâle à mauve foncé, parsemée de petits conules
Eponge cavernicole violette
Pink sponge (GB), Disidea (I), Esponja diside (E), Höhlenwächterschwamm (D), Roze stekelspons (NL)
Spongelia avara (Schmidt, 1862)
Dysidea fragilis var. ramosa (Schulze, 1879)
Dysidea fragilis var. tubulosa (Schulze, 1879)
Spongelia pallescens fragilis var. ramosa (Schulze, 1879)
Spongelia pallescens fragilis var. tubulosa (Schulze, 1879)
Spongelia incrustans var. adriatica (Czerniavsky, 1880)
Spongelia incrustans var. suchumensis (Czerniavsky, 1880)
Méditerranée, Atlantique proche
Zones DORIS : ● Europe (côtes françaises), ○ [Méditerranée française]Espèce présente dans l'ensemble de la Méditerranée et en Atlantique proche ; serait également présente en mer de Chine (partie sud).
Les signalements en Manche pourraient correspondre en réalité à d'autres espèces de Dysidea (D. fragilis, notamment).
En revanche, D. avara semble s'être également implantée en mer de Chine (Formose), sur Pearl Harbor (Hawai' i Kai, Waikîkî) et jusqu'aux côtes nord-est de l'Australie (Port Philip Bay, par exemple).
Espèce volontiers sciaphile*, assez commune sur les substrats durs, elle colonise des cavités ou des surplombs aux algues coralligènes*, affectionnant principalement les surfaces assez planes, horizontales, entre 20 m et 40 m (voire au-delà, vers 70 m).
Elle peut couvrir des surfaces de plusieurs décimètres carrés, voire un mètre carré.
Eponge encroûtante, cornée, au corps massif présentant de nombreux lobes le plus souvent tubulaires ; elle forme des ramifications. Elle s'élève en moyenne de cinq centimètres en adhérant au substrat*. Au sommet s'ouvrent de grands oscules* exhalants de deux centimètres de diamètre.
Sa surface possède une coloration nuancée allant du rose pâle au mauve foncé ; elle est parsemée de petits conules (terminaisons bien différenciées correspondant à la terminaison des fibres), hauts de 5 mm.
Le squelette se compose exclusivement de fibres de spongine* contenant du sable et des spicules* étrangers (cette espèce est dépourvue de spicules propres).
Dysidea fragilis (Montagu, 1818), dite « éponge mie de pain ».
D. avara se distingue de D. fragilis, en ce que les intervalles entre les papilles n'offrent pas à l'observateur la faculté de voir facilement la structure fibreuse formant un réseau dense.
Dysidea pallescens (Schmidt, 1862), dont on visualise mieux la structure fibreuse formant un réseau assez dense. Sa coloration est fort proche de D. avara et ne peut donc être retenue comme un critère de différenciation.
Comme tous les porifères, cette éponge se nourrit de particules en suspension qu'elle filtre et achemine dans le corps par un faible courant autoproduit par l'intermédiaire de cils spécialisés. Les particules de nourriture sont ensuite digérées et assimilées par des cellules modifiées à cette fin.
Le régime alimentaire naturel de Dysidea avara, a été étudié par Ribes et al. (1999). Son régime est hétérogène. Elle tire 85 % de ses besoins en carbone essentiellement des procaryotes bactéries hétérotrophes*, (Prochlorococcus sp., Synechococcus sp.), du pico et du nano-plancton. Dans une moindre proportion, elle absorbe également des eucaryotes (protozoaires, phytoplancton - diatomées - et ciliés). La capacité de cette éponge à se nourrir de proies de tailles très diverses lui permet de se maintenir de manière plutôt constante tout au long de l'année, en fonction de la variation des apports saisonniers.
Dysidea avara (comme Dysidea fragilis ou Cacospongia mollior) utilise les scyphopolypes de Nausithoe punctata, un scyphozoaire, comme substitut aux fibres squelettiques, réduisant vraisemblablement ses dépenses métaboliques associées à la construction squelettique (Uriz et al., 1992). Le mutualisme est avéré en ce que le scyphozoaire profite apparemment d'une protection accrue contre la prédation. Cette éponge possède en effet les capacités d'une défense chimique contre des prédateurs (pour la toxicité cf. plus avant « informations complémentaires »). De surcroît, le flux inhalant généré par l'éponge transporte de petites particules susceptibles d'être capturées par le scyphozoaire.
Selon Coma et al. (2002) les taux de respiration de Dysidea avara varient de deux à trois fois pendant le cycle annuel, démontrant un modèle saisonnier marqué (cette particularité vaut également pour Paramuricea clavata et Halocynthia papillosa). En revanche aucun cycle journalier ni aucune variabilité significative de ce taux n'ont été notés d'un jour sur l'autre durant des mois. A noter que le taux de respiration de ce suspensivore actif se trouve corrélé à la température (comme Halocynthia papillosa) et qu'il augmente avec elle.
Cette éponge figure au menu de nudibranches comme le chromodoris bleu, le doris tricolore.
Les substances antibiotiques actives des éponges peuvent se propager très loin et, en raison de leur pouvoir antibiose, inhiber la croissance de larves planctoniques, stopper la division cellulaire. Le sesquiterpène de Dysidea avara bloque ce processus chez les œufs d'oursins fécondés. Ces propriétés intéressent la recherche pharmaceutique, notamment dans le cadre de la lutte contre le V.I.H.
L'avarol, composé bioactif extrait de Dysidea avara, possède une activité anti-psoriasis.
L'espèce est maintenue en aquaculture, à des fins médicales et pharmaceutiques.
Son origine vernaculaire évoque directement la forme.
Dysidea : du grec [dus] = mal fait et [idea] = aspect extérieur, apparence. Les contours de cette éponge polymorphe sont irréguliers et semblent donc mal faits.
avara : du latin [avarus] = qui désire avidement, avide.
Mais pourquoi tant de haine chez Oskar Schmidt dans cette désignation ? Si l'on se remet dans le contexte de l'époque de sa désignation taxonomique (1862), on est fondé à penser que ce terme se réfère à l'excellente capacité à retenir l'eau chez cette éponge riche en spongine.
Termes scientifiques | Termes en français | Descriptif | |
---|---|---|---|
Embranchement | Porifera | Spongiaires / Eponges | Organismes exclusivement aquatiques, filtreurs, fixés au substrat, de formes variables, et percés d'orifices inhalants (ostioles ou pores) et exhalants (oscules). |
Classe | Demospongiae | Démosponges | Eponges dont la charpente est constituée de spicules siliceux (différenciés en méga- et microsclères) et de collagène dispersé ou structuré en fibres de spongine. Ovipares ou vivipares, larve typique = parenchymella. |
Ordre | Dictyoceratida | Dictyocératides | « Eponges à réseau de corne ». Squelette entièrement composé de fibres de spongine anastomosées et souvent organisées en réseaux primaire, secondaire voire tertiaire. Fibres généralement homogènes ou légèrement stratifiées avec ou sans moelle centrale. Pas de spicules. Eponges vivipares. |
Famille | Dysideidae | Dysidéidés | |
Genre | Dysidea | ||
Espèce | avara |
Colonie implantée sous un rocher
Une colonie caractéristique du milieu coralligène, sciaphile, photographiée sous une grosse roche.
Iles Médès (Espagne), 15 m
11/10/2007
Détail de la colonie précédente
Cette éponge encroûtante, cornée, au corps massif présente de nombreux lobes tubulaires.
Sa surface possède une coloration nuancée allant du rose pâle au mauve foncé ; elle est parsemée de petits conules (terminaisons bien différenciées correspondant à la terminaison des fibres).
Iles Médès (Espagne), 15 m
11/10/2007
Extrémité d'un lobe tubulaire
Le corps massif développe de nombreux lobes, dont la hauteur moyenne est de cinq centimètres. Au sommet s'ouvre un grand oscule exhalant. Si l'éponge cheminée se rencontre oridinairement entre 20 m et 40 m, il peut arriver que les conditions de son implantation soient propices à moindre profondeur.
Cette éponge s'est développée dans une zone réputée exposée à une pollution industrielle (importantes activités au XIXe siècle), au plomb et à l'arsenic, par lessivage des sols du proche littoral.
Calanque de Samena, Marseille (13), 10 m
17/11/2008
Dans les Alpes-Maritimes
Une colonie de l'éponge cheminée rose garde les restes du Robuste II, en baie de Golfe-Juan, dans le 06.
Epave du Robuste II, Golfe-Juan (06), 26 m
13/07/2013
Rédacteur principal : Vincent MALIET
Vérificateur : Jean VACELET
Responsable régional : Michel KUPFER
Coles S.L., De Felice R.C., Eldredge L.G., Carlton J.-T., 1999, Historical and recent introductions of nonindigenous marine species into Pearl Harbor, Oahu, Hawaiian Islands, Marine Biology, 135, 147-158.
Coma R., Ribes M., Gili J.M., Zabala M., 2002, Seasonality of in situ respiration rate in three benthic suspension feeders, Limnology and Oceanography, 47, 324-331.
Picton B.E., Stone S.M., Howson C.M., 1997, The species directory of the fauna and flora of the British Isles arrounding seas, Porifera, Ulster Museum Publication, 276, 12-24.
Ribes M., Coma R., Gili J-M., 1999, Natural diet and grazing rate of the temperate sponge Dysidea avara (Demospongiae, Dendroceratida) throughout an annual cycle, Marine Ecology Progress Series, 176, 179–190.
Uriz M.-J., Rosell D., Maldonado M., 1992, Parasitism, commensalism or mutualism ? The case of Scyphozoa (Coronatae) and horny sponges, Marine Ecology Progress Series, 81, 247-255.
Uriz M.-J., Martin D., Rosell D., 1992, Relationships of biological and taxonomic characteristics to chemically mediated bioactivity, Marine Biology, 113, 287-297.
La page de Dysidea avara dans l'Inventaire National du Patrimoine Naturel : INPN