Capitulum allongé et comprimé, dépourvu d'auricules
Cinq plaques très réduites (vestigiales), séparées et périphériques
Six larges bandes bleu nuit traversant pédoncule et capitulum
Pédoncule flexible et extensible, sans plaques
Espèce du grand large
Lepade striato (I)
Lepas virgata Spengler, 1790
Conchoderma virgata (Spengler, 1790) Darwin, 1851
Conchoderma hunteri (Owen, 1830)
Cosmopolite des mers tempérées-froides à tropicales
Zones DORIS : ● Europe (côtes françaises), ● Atlantique Nord-Ouest, ○ [Méditerranée française], ● Caraïbes, ● Indo-Pacifique, ○ [Atlantique Nord-Est, Manche et mer du Nord françaises]Cette espèce de haute mer, épipélagique*, est cosmopolite des mers chaudes, tempérées à tempérées froides. Elle est absente des hautes latitudes. Par exemple, en Atlantique Ouest où elle est bien connue, on l'observe du Canada à l'Uruguay.
Conchoderma virgatum est fixé par son pédoncule sur tout type d'objet flottant comme les bouts de bois, les bouées d'amarrage ou de signalisation, les bidons en plastique qui servent à signaler la présence de casiers de pêche, ainsi que sur les pilotis et sur la coque des bateaux. On l'observe également sur de nombreux vertébrés ou invertébrés pélagiques au déplacement lent et proche de la surface comme des poissons [Mola mola (poisson lune), Diodon hystrix (poisson porc-épic), Tylosurus acus (aiguille voyeuse), Alutera schoepfi (poisson lime)...], des requins, des tortues marines (la sous-espèce Conchoderma virgatum chelonophilus [qui aime les tortues] affectionne la carapace des tortues comme Lepidochelys kempii), des crabes pélagiques (Portunus sayi dans la mer des Sargasses) et des baleines au niveau des plaques encroûtantes blanchâtres où se fixent d'autres épibiontes comme de grosses balanes coronulides.
Cet animal s'accroche aussi souvent sur d'autres épibiontes* comme les balanes ou les copépodes (Pennella spp.) fixés eux-mêmes sur des requins ou d'autres poissons, des baleines ou des tortues.
On ne trouve pas ce crustacé cirripède sur les rochers ou sur les infrastructures côtières. Il s'agit donc d'une espèce fixée qui mène une vie pélagique*. Il fréquente les eaux propres non terrigènes des grands larges qu'affectionnent ses hôtes.
Conchoderma virgatum est un cirripède pédonculé dont le capitulum* allongé et comprimé est dépourvu d’auricules* (formations tubulaires faisant penser à des oreilles).
Six larges bandes, trois de chaque côté, bleu nuit à brun violacé, traversent le capitulum et le pédoncule* grisâtres.
Le pédoncule charnu n'arbore aucune plaque. Il peut être plus ou moins translucide près du point d'ancrage. Il est contractile et nettement plus long que le capitulum chez l'animal vivant lorsque celui-ci est détendu. La taille du capitulum ne dépasse pas 3,5 cm (1 à 2,5 cm pour la majorité des observations relevées dans la littérature pour des individus observés en Méditerranée, aux Caraïbes et au Brésil), celle du pédoncule détendu peut avoisiner les 10 cm. La taille moyenne des individus est aussi liée à la zone géographique fréquentée par leur hôte.
Le capitulum est formé d'une membrane chitineuse* renforcée par cinq très petites plaques (vestigiales) calcaires blanchâtres, légèrement translucides, périphériques et bien séparées les unes des autres. La carène* dorsale ou carina* est menue et arquée, la paire de plaques scrutales (ou scuta*, scutum au singulier) ventrales trilobées en forme de "T" et la paire de plaques tergales (ou terga*, tergum au singulier) terminales longues et fines. Scuta et terga sont positionnés à angle droit (voir dessins).
Par l'entrebâillement du capitulum et entre les deux plaques scutales s'extirpent 24 cirres* (il y a 12 paires d'appendices, 6 paires de chaque côté, chacun se dédoublant en deux cirres) de couleur noire, robustes et rétractables, qui filtrent l'eau environnante en quête de nourriture et d'oxygène.
Il existe plusieurs centaines d'espèces de cirripèdes pédonculés. Un examen simple ne permet pas toujours de discerner ces espèces, une dissection peut être nécessaire pour valider une identification. Néanmoins certaines espèces plus caractéristiques sont identifiables, avec un faible risque d'erreur, sur photo ou en plongée :
- Parmi les cirripèdes à plaques vestigiales du même genre :
Conchoderma auritum : pédoncule cylindrique plus long que le capitulum qui présente deux auricules bien distinctes et dont la taille est d'environ 30 mm. Plaques calcifiées extrêmement réduites. Classiquement trouvé fixé sur les balanes Coronula sp. des baleines ;
Conchoderma hunteri : capitulum violet foncé, cinq plaques bien séparées, scutum trilobé en forme de "Y", attaché aux serpents marins, cordes, bouées, dans l'Indo-Pacifique. Conchoderma hunteri est considéré aujourd'hui comme synonyme de Conchoderma virgatum.
- Parmi les cirripèdes armés de grandes plaques :
Lepas anatifera : cinq plaques lisses ou très finement striées, pédoncule beaucoup plus long que le capitulum, vit attaché aux objets flottants ;
Lepas anserifera : capitulum plus petit que celui de Lepas anatifera et aux plaques striées radialement, bord occluseur du scutum arché et protubérant ;
Pollicipes pollicipes : le pouce-pied, qui lui peut vivre fixé aux rochers, possède davantage de plaques (jusqu'à 52), son pédoncule a de petites écailles, l'entrebâillement du capitulum est teinté de rouge ;
Scalpellum scalpellum : capitulum petit et composé de 14 plaques, pédoncule très court, jusqu'à 3,3 cm de long de l'extrémité du capitulum à celle du pédoncule, vit entre 10 et 500 m de profondeur fixé en épibiose* sur des gorgones comme Eunicella verrucosa et autres organismes sessiles* érigés.
Ces organismes se nourrissent de zooplancton* (petits crustacés, œufs, larves diverses) et de particules organiques en suspension qu'ils capturent au moyen de leurs cirres déployés.
En général les cirripèdes fixés sur des animaux profitent du courant d’eau créé par leur hôte et leurs cirres pendent passivement. Nous ne savons pas ce qu’il en est de C. virgatum.
C'est grâce à l'observation de leur cycle de reproduction, et notamment grâce à l'étude de leurs larves, que l'on a pu ranger les cirripèdes dans les crustacés.
Les cirripèdes pédonculés ou "anatifes" au sens large sont essentiellement hermaphrodites* et produisent les deux types de gamètes*. Mais certains pédonculés possèdent également des mâles nains complémentaires.
Au moment de la reproduction se développe un pénis qui permet à l'animal d'émettre son sperme. La fécondation est croisée et interne. Les œufs sont alors incubés dans la cavité du manteau. Au moment de l'éclosion ce sont des larves nauplii* qui sont émises.
Les nauplii mènent alors une vie pélagique, et se transforment après six stades naupliens en larves cypris* caractéristiques des crustacés cirripèdes, qui possèdent une carapace bivalve ainsi que des cirres. Certaines de ces larves finissent par se fixer à un substrat, grâce à un cément (une substance adhésive) sécrété par des glandes situées à la base de leurs antennes. C'est la partie du corps située juste derrière ces antennes qui va s'allonger et former un pédoncule.
Voir "Biotope".
Les cas de fixation de Conchoderma virgatum sur des copépodes ectoparasites* de vertébrés marins ne semblent pas rare (Dinemoura latifolia, Pandarus satyrus, Peussopus dentatus, Pennella spp., ...).
Les cirripèdes ne lèsent pas leur hôte. On parle en général de commensalisme*.
Les représentants du genre Conchoderma, contrairement aux balanes et aux Lepas, ne semblent pas sensibles à la lumière.
Aux cirripèdes fixés, les cirres permettent également de respirer.
Conchoderma rayé est une traduction partielle du nom scientifique.
Conchoderma : du latin [concha] = coquillage et [derma] = peau, aspect d'un coquillage recouvert d'une peau.
virgata : mot latin = rayé, en rapport avec les dessins des téguments* de cette espèce.
Numéro d'entrée WoRMS : 106147
Termes scientifiques | Termes en français | Descriptif | |
---|---|---|---|
Embranchement | Arthropoda | Arthropodes | Animaux invertébrés au corps segmenté, articulé, pourvu d’appendices articulés, et couvert d’une cuticule rigide constituant leur exosquelette. |
Sous-embranchement | Crustacea | Crustacés | Arthropodes à exosquelette chitineux, souvent imprégné de carbonate de calcium, ayant deux paires d'antennes. |
Classe | Maxillopoda | Maxillopodes | Absence d'appendices abdominaux. 6 segments thoraciques maximum, 4 segments abdominaux maximum. Carapace réduite. |
Sous-classe | Thecostraca Cirripedia | Thécostracés Cirripèdes | Les Cirripèdes sont des crustacés marins, présentant des stades larvaires (larve nauplius à cornes fronto-latérales ; larve cypris bivalve) et un stade adulte pendant lequel ils vivent soit fixés de façon permanente à un substrat, soit adpatés à la vie parasitaire. Leurs paires d'appendices thoraciques biramés sont nommées cirres. |
Super ordre | Thoracica | Thoraciques | Cirripèdes fixés au stade adulte, ayant 6 paires d’appendices thoraciques biramés à l'origine de 24 cirres.. |
Ordre | Lepadiformes (ex Pedunculata) | Lépadiformes (ex Pédonculés) | Cirripèdes possédant un capitulum plus ou moins globuleux et un pédoncule par lequel ils sont fixés à un support. |
Sous-ordre | Lepadomorpha | Lépadomorphes | |
Famille | Lepadidae | Lépadidés | |
Genre | Conchoderma | ||
Espèce | virgatum |
In situ, avec des Lepas
Voici une photo rare de cet animal in situ, juste sorti de l'eau. Chez ce cirripède, à l'état vivant, le pied bien transparent peut atteindre une longueur importante (10 cm et plus ?) par rapport au capitulum dont la taille ne dépasse pas 3,5 cm. Ils sont associés ici à une autre espèce de cirripède plus commune, Lepas hillii au capitulum bien calcifié.
Petit jeu : combien voyez vous d'individus de Conchoderma virgatum et de Lepas hillii ?
(solution : environ 14 C. virgatum et 6 L. hillii dont un individu juvénile)
Sur un signal en surface, trois milles au large d'Alger
04/12/2010
Cirripède sans "carapace" et rayé
Conchoderma virgatum est un cirripède formé d'un capitulum fusionné à un pédoncule. Trois bandes brun violacé traversent le capitulum et le pédoncule de chaque côté. La coloration de fond est grisâtre.
Spécimen récolté entre 5 et 15 m sur un filet.
A trois milles au large d'Alger (Algérie), 10 m
04/12/2010
En pleine mer, loin des côtes
Ce crustacé a été collecté sur des flotteurs BioArgo (amas de bidons et de filets dérivant) lors de la campagne océanographique MOOSE-GE 2011 qui fait partie du SOERE MOOSE*. Campagne réalisée avec l'appui du navire scientifique Thétys II de l'INSU/CNRS/IFREMER et sous la responsabilité du professeur Laurent Mortier.
Les spécimens ont été recueillis en pleine mer à peu prés à mi-chemin entre Ajaccio et la presqu'île de Giens (carte). Ils étaient associés à une autre espèce de cirripède plus commune, Lepas anatifera.
*SOERE MOOSE : Systèmes d’Observation et d’Expérimentation au long terme pour la Recherche en Environnement & Mediterranean Ocean Observing System on Environment.
Méditerranée, à mi-distance entre Ajaccio et Toulon
29/05/2011
Sur un copépode ectoparasite (Pennella filosa) in situ sur un poisson lune
Cette photo rare illustre à merveille Conchoderma virgulatum (cercles rouges) installé sur un copépode (Pennella filosa) parasitant la peau d'un poisson lune Mola mola.
A 20 milles (37 km) au large de Villefranche (06)
31/08/2013
En Indo-Pacifique (ex Conchoderma hunteri)
Anciennement nommé Conchoderma hunteri, les représentants de l'Indo-Pacifique sont aujourd'hui considérés comme appartenant à l'espèce cosmopolite Conchoderma virgatum.
Philippines, Malapascua, Monad Shoal, 25 m
28/02/2012
Plaques vestigiales
La carène* dorsale est menue et arquée, la paire de scuta* ventrale se caractérise par son aspect trilobé en forme de "T" et la paire de terga* terminale est longue et fine.
Carina et terga sont positionnés à angle droit.
Dessin ancien modifié
2011
Sur un copépode ectoparasite (Pennella sp.)
Ce parasite, sans doute Pennella filosa, a été observé en Méditerranée sur un espadon Xiphias gladius.
Annual report of the New Jersey State Museum; Pl. 39 (extrait)
Reproduction de documents anciens
1911
Dessins anciens
Dessins de George Sowerby issus de : The Project Gutenberg EBook of A Monograph on the Sub-class Cirripedia (Volume 1 of 2), by Charles Darwin
fig. 2 : Spécimen entier. Vue latérale droite.
fig. 2a : Carina ou carène. Sensiblement parallèle aux scuta, légèrement concave avec un léger angle (l'umbo* : point d'où partent les lignes concentriques de croissance).
fig. 2b : Terga, vue de dessus. Ces deux plaques courbes, fines et allongées sont placées à quasiment angle droit des scuta.
fig. 2c : Sous-espèce Conchoderma virgatum chelonophilus, sans bande large (Validité de cette sous-espèce non confirmée).
fig. 2d : Sous-espèce Conchoderma virgatum olfersi, scutum à cinq lobes (Validité de cette sous-espèce non confirmée).
George Sowerby, planche III, fig. 2 : Conchoderma
Reproduction de documents anciens
1851
Dessin ancien, écorché, vue latérale droite
Dessins de George Sowerby issus de : The Project Gutenberg EBook of A Monograph on the Sub-class Cirripedia (Volume 1 of 2), by Charles Darwin
a : tergum
b : bouche
c : muscle adducteur qui permet le rapprochement des valves a sa place (valve = plaque et chitine d'un côté)
e : scutum
f : ovaire
g : organe filamenteux
h : filament près de l'articulation basale du cirre I
i, j, k, l : filaments fixés sur les pédicelles des cirres
m : carène
1 à 6 : cirres
George Sowerby, planche IX, fig. 4 : Conchoderma
Reproduction de documents anciens
1851
Rédacteur principal : Frédéric ANDRÉ
Vérificateur : Frédéric ZIEMSKI
Correcteur : René-Pierre CARRIOL
Responsable régional : Frédéric ANDRÉ
Merella P., Scala A., Marrosu R., Garippa G., 2005, Occurence of the pedunculate barnacle Conchoderma virgatum in the western Mediterranean, Vie et milieu, 55(1), 41-44.
La page de Conchoderma virgatum dans l'Inventaire National du Patrimoine Naturel : INPN