Croissant queue jaune

Variola louti | (Forsskäl, 1775)

N° 2497

Mer Rouge, océan Indien, océan Pacifique Ouest et centre

Clé d'identification

Taille maximale 100 cm, taille communément rencontrée 75 cm
Caudale fourchue formant un croissant dont la hauteur est supérieure à celle du corps
Anale et dorsale molle pointues
Couleur de fond variable (rouge, orange, grise, brune, violette) parsemée de petites taches bleues ou roses
Marge postérieure de toutes les nageoires jaune vif

Noms

Autres noms communs français

Mérou croissant de lune (FAO, Djibouti, La Réunion), rouge grand queue, grand queue, druide, vera (La Réunion), vieille peinte des coraux (Maurice), croissant (Maurice, Seychelles), loche caméléon, loche saumonelle (Maurice, Polynésie Française), loche saumonée, saumonée hirondelle (Nouvelle-Calédonie)

Noms communs internationaux

Coronation grouper, coronation trout, common lyretail-cod, lunartailed grouper, lyretail grouper, lyretail coral trout, lyre-tail cod, lunar tailed cod, lunar-tailed rock-cod, lunar-tailed coral-trout, lunar-tailed grouper, yellow-edged lyretail, yellowedge coronation trout, moontail seabass (GB), Mero luna creciente (E), Mondsichel-Juwelenbarsch (D), Toi (Portugais), Garoupa papagayo (Mozambique), Geelrand-maanstert (Afrique du Sud)

Synonymes du nom scientifique actuel

Perca louti Forsskål, 1775
Epinephelus louti (Forsskål, 1775)
Serranus louti (Forsskål, 1775)
Serranus luti (Forsskål, 1775)
Labrus punctulatus Lacepède, 1801
Serranus punctulatus (Lacepède, 1801)
Variola punctulatus (Lacepède, 1801)
Serranus roseus Valenciennes, 1828
Serranus flavimarginatus Rüppell, 1830
Serranus longipinna Swainson, 1839
Serranus phaenistomus Swainson, 1839
Variola longipinna (Swainson, 1839)
Serranus melanotaenia Bleeker, 1857
Variola melanotaenia (Bleeker, 1857)
Serranus cernipedis Miranda Ribeiro, 1913

Distribution géographique

Mer Rouge, océan Indien, océan Pacifique Ouest et centre

Zones DORIS : ● Indo-Pacifique, ○ [Mer Rouge]

Le croissant queue jaune est présent en mer Rouge et dans les zones tropicales et subtropicales de l’océan Indien et du Pacifique Ouest et centre.
Dans l’océan Indien, on le trouve de l’île de Socotra (Yémen) à l’Afrique du Sud en passant par l’Afrique de l’Est, ainsi qu’aux Comores, à Madagascar, dans les Mascareignes*, aux Maldives, aux Seychelles et sur la côte occidentale de l’Australie.
Dans le Pacifique, on le rencontre du sud du Japon à l’Australie, avec une distribution vers l’est s’étendant jusqu’à l’île de Pâques et aux îles Pitcairn en passant par l’Indonésie, la Micronésie et la Nouvelle-Calédonie.
En revanche, il n’a pas été documenté dans le golfe Persique ni à Hawaï.

N.B. : les deux signalements de l’espèce en Méditerranée orientale (Chypre), qui pourraient concerner le même individu, sont vraisemblablement dus à un ou des rejets en milieu naturel par des aquariophiles irresponsables plutôt qu’à une migration lessepsienne*. En effet, l’ADN* de l’individu étudié ne permet pas de le relier aux spécimens séquencés dans l’océan Indien. Il se pourrait donc que cet individu vienne d’Indonésie ou des Philippines, qui fournissent la majeure partie du commerce aquariophile en matière de poissons tropicaux.

Biotope

Variola louti apprécie les eaux claires des récifs coralliens éloignés des côtes continentales ou présents autour des îles tropicales. On la trouve généralement sous le seuil des 15 m, mais on peut rencontrer de jeunes individus dès le premier mètre et l’espèce a été documentée jusqu’à 300 m.

Description

Description succincte : ce mérou au corps élancé et au museau pointu peut mesurer 100 cm. Sa couleur de fond peut être rouge, orange, grisâtre, brune, violet foncé ou brun jaunâtre, et elle est toujours parsemée de très nombreuses petites taches bleues ou roses. Toutes les nageoires sont de la même couleur que le corps et arborent les mêmes tâches, avec une large marge jaune à leur extrémité postérieure. La caudale forme un grand croissant dont la hauteur est supérieure à celle du corps.

Description détaillée :
Le corps de ce beau mérou est élancé et comprimé latéralement. Sa hauteur (calculée à l’aplomb du troisième rayon dur de la dorsale) entre de 2,8 à 3,3 fois dans la longueur standard* (longueur sans la queue) chez des individus de taille moyenne. La taille maximale de l’espèce fait débat : elle serait de 83 cm selon FishBase, mais selon certains spécialistes elle pourrait atteindre 100 cm. La taille communément rencontrée est de 75 cm.

La couleur de fond est variable et concerne l’ensemble du corps en dehors des marges postérieures des nageoires. Elle peut être rouge ou orange, grisâtre, brune, violet foncé ou brun jaunâtre. Elle est susceptible de pâlir (par exemple de passer du rouge au parme) quand l’animal veut se faire discret. Elle est parsemée de très nombreuses petites taches bleues ou roses, bordées ou non par un anneau de couleur plus foncée. Ces taches peuvent être rondes, ovales, oblongues, ou en tirets. La partie inférieure de l’abdomen* peut être jaunissante.

La tête est puissante. Sa longueur entre de 2,5 à 2,8 fois dans la longueur standard pour des individus dont cette longueur est de 12 à 40 cm. Son profil dorsal est droit de la lèvre supérieure à l’espace interorbitaire*, et bombé de cet espace à l’origine de la dorsale. Le museau est pointu. La bouche aux lèvres épaisses est terminale et protractile*. L’extrémité de la lèvre inférieure dépasse nettement celle de la lèvre supérieure. Les yeux, relativement petits, sont haut placés et globuleux. L’extrémité postérieure de l’opercule* est pointue.

Les taches présentes sur la tête sont plus denses et plus rondes que celles qui se trouvent sur le corps et elles sont généralement bordées par un anneau plus foncé. Le dessous de la mâchoire inférieure et la gorge peuvent être jaunâtres. La pupille est piriforme* avec une pointe arrondie dirigée vers l’avant. L’iris* est doré et entouré d’un large anneau rouge. La lèvre supérieure est de la même couleur et porte les mêmes taches que le reste de la tête ; la lèvre inférieure est le plus souvent de couleur uniforme dans la livrée ordinaire.

La membrane des rayons durs de la nageoire dorsale est nettement échancrée entre les quatre premiers rayons, beaucoup moins entre les suivants. Les rayons mous sont légèrement plus longs que les derniers rayons durs et leur taille augmente régulièrement en allant vers l’arrière. L’extrémité postérieure de la nageoire est pointue et dirigée vers l’arrière.
L’anale commence par trois fortes épines auxquelles succèdent des rayons mous dont la taille augmente, puis diminue pour former un long et large triangle orienté vers l’arrière. La pointe de ces deux nageoires est constituée par leur antépénultième rayon, qui est plus long que les autres.
La caudale est fourchue et forme un grand croissant
dont les lobes* sont de taille égale (à un rayon branchu près dans le lobe supérieur) et s’allongent avec l’âge. La hauteur du croissant est supérieure à celle du corps quand la nageoire est complètement déployée.
Les pectorales, en forme de pale de pagaie, sont longues et larges.
Les pelviennes sont plus longues que les pectorales et elles sont pointues, leurs deux premiers rayons sont très allongés. Elles atteignent ou dépassent l’anus quand elles sont plaquées sur le corps.

Toutes les nageoires sont de la même couleur que le corps et arborent les mêmes tâches bleues, avec une large marge jaune à leur extrémité postérieure. Celle de la caudale, large au milieu de la nageoire et s’affinant en pointe sur les lobes, évoque un croissant de lune. Cette caractéristique a inspiré de nombreux noms communs.

La livrée de stress est caractérisée par un camouflage disruptif* (destiné à brouiller la perception de la forme de l’intéressé) consistant en une marque blanchâtre plus ou moins large sur la nuque, suivie de trois courtes selles* de même couleur réparties sous la dorsale. Ces selles sont souvent suivies par une selle supplémentaire sur le pédoncule* caudal. Les deux tiers inférieurs du corps sont marqués par de grosses taches blanchâtres de forme plus ou moins circulaire, organisées en deux ou trois lignes longitudinales très irrégulières. Le jaune des bordures postérieures des nageoires pâlit.

Cette livrée s’installe progressivement, en fonction du niveau de stress. Elle commence par un léger pâlissement au niveau de ce que seront la marque nucale* et les deux premières selles sous la dorsale, puis elle s’étend aux autres marques en durcissant les contrastes de couleur. En cas de stress prolongé, la tête et le pédoncule caudal deviennent presque entièrement blanchâtres et les selles dorsales fusionnent de façon irrégulière.

La livrée de nuit reprend ce dernier patron de couleurs en durcissant encore ses contrastes.

La livrée des juvéniles est décrite dans la section consacrée à la reproduction.

Espèces ressemblantes

Variola louti pourrait être confondue avec plusieurs espèces, mais les couleurs ou la forme de la nageoire caudale suffisent à l’éviter :

  • Variola albimarginata : c’est l’autre espèce du genre, qui lui ressemble beaucoup et dont la distribution générale est similaire, de même que la distribution verticale. Sa caudale est morphologiquement identique mais à la place du large croissant jaune de V. louti, on trouve une bande rouge foncé à noirâtre plus fine à liseré blanc.
    Entre autres différences plus discrètes, les pelviennes sont plus courtes chez V. albimarginata que chez V. louti. Elles n’atteignent pas l’anus quand elles sont plaquées sur le corps, contrairement à ce qu’on peut observer chez sa proche parente. Elle est en outre plus petite : on estime que les plus grands individus ne dépassent pas 55 cm.
  • Certaines livrées d’espèces du genre Plectropomus (par ex. P. leopardus ou P. pessuliferus) peuvent prêter à confusion, mais chez ces espèces la caudale est tronquée à légèrement échancrée.
  • Il en va de même avec quelques espèces du genre Cephalopholis (par ex. C.miniata ou C. cyanostigma), mais chez ces espèces la caudale est arrondie.

Les juvéniles de V. louti et V. albimarginata peuvent éventuellement être confondus, mais les premiers se distinguent par une large bande noire au-dessus de la médiane horizontale du corps et par un gros point noir à la base de la moitié supérieure de la caudale, que n’ont pas les seconds.

Alimentation

Variola louti se nourrit essentiellement de poissons et de crustacés divers (crabes, crevettes, squilles). Elle chasse essentiellement sur le fond ou dans sa proximité.

Reproduction - Multiplication

L’espèce est hermaphrodite* protogyne* monandrique* (tous les individus naissent femelles et certains d’entre eux deviendront des mâles, en fonction des circonstances). L’essentiel de la croissance est fait pendant les six premières années. La maturité sexuelle est atteinte par les femelles au bout de 2 à 3 ans pour une taille de 25 à 27 cm, et le changement de sexe intervient en moyenne à 6 ans et 35 cm (longueurs à la fourche, du bout du museau à la pointe du rayon central de la caudale). La reproduction a lieu toute l’année à l’occasion d’agrégations, avec un pic durant les mois d’été austral (de novembre à mars), pendant les premier et dernier quartiers des phases lunaires. Les larves* sont pélagiques*.

Juvéniles : les juvéniles ont le corps plus fin que celui des adultes et ils arborent une livrée très différente. La partie supérieure du corps est brune avec une bande noire qui part de la pointe du museau, traverse l’œil et rejoint le début du pédoncule caudal. Sous cette bande noire la couleur du corps est blanche. L’ensemble est constellé de petites taches rondes bleues qui passent au blanc bleuté dans la partie blanche. Une grosse tache noire marque la base des premiers rayons de la moitié supérieure de la caudale. Toutes les marques noires portent les mêmes petites taches bleues que le reste du corps. Les nageoires sont translucides, la dorsale étant plus ou moins jaunâtre. Elles portent aussi des taches bleues et elles ne présentent pas de marge postérieure jaune comme les adultes. Les juvéniles dont la taille est inférieure à 7 cm en longueur standard ne présentent pas de bande noire sur le corps.

Les juvéniles ont une livrée de stress identique à celle des adultes.

Certains grands juvéniles et de jeunes adultes arborent temporairement une bande blanche qui part du milieu de la lèvre inférieure et progresse jusqu’à l’origine de la dorsale en suivant le profil de la tête.

Vie associée

Comme d’autres espèces de mérous, Variola louti a été observée en situation de chasse collaborative avec des murènes (en l’occurrence Gymnothorax griseus et G. javanicus), ainsi qu’avec des poulpes.

L’espèce peut être infestée par de nombreux parasites comme des vers nématodes, cestodes et acanthocéphales qui parasitent les mésentères* et les gonades* de leurs hôtes. Le ver monogène Pseudorhabdosynochus hirundineus parasite leurs branchies*.

Divers biologie

Variola louti est une espèce territoriale.

La dentition comprend une paire de grandes canines placées à l’extrémité antérieure de chaque mâchoire ; une à trois canines de taille similaire se trouvent en outre au milieu de la mâchoire inférieure. Entre ces canines se trouvent plusieurs rangées de fines dents très pointues orientées vers l’intérieur de la gueule. On trouve aussi plusieurs rangées de dents palatines*.

Sur 101 spécimens étudiés dans l’atoll d’Aldabra (ouest de l’océan Indien), le plus vieux avait 15 ans et mesurait 57,8 cm de longueur à la fourche. Ces données peuvent changer en fonction du lieu, de la taille de l’échantillon et des méthodes employées.

Le poids maximum recensé pour l’espèce est de 12 kg.

Selon Postel et al. (1963) l’espèce « voyage beaucoup », mais les auteurs ne donnent pas d’autres précisions sur le sujet.

Variola louti est susceptible de transmettre la ciguatera*.
En outre, dans les zones polluées, son foie accumule des métaux lourds.

La dorsale épineuse comprend 9 rayons durs, la dorsale molle de 13 à 14 rayons mous. L’anale comprend 3 rayons durs et 8 rayons mous. Les pectorales ont de 16 à 19 rayons.
La ligne latérale* compte 66 à 77 écailles perforées.

Informations complémentaires

Variola louti est pêchée dans un cadre artisanal, mais elle est aussi une espèce commerciale exportée bien qu’elle soit vectrice de ciguatera. Sa vente est interdite à l’île Maurice pour cette raison.
Elle est de plus concernée par le commerce de poissons vivants et par le marché aquariophile.

Cette belle espèce a été honorée par un timbre à son effigie au Mozambique, aux Maldives et à l’île Maurice.

Statuts de conservation et réglementations diverses

Le statut de l’espèce pour l'UICN* est LC (Least Concerned, traduit par « Préoccupation mineure »), ce qui signifie que les informations recueillies sur l’espèce ne permettent pas de la classer dans les autres catégories, notamment dans les trois qui alertent sur une menace (CR : en danger critique d’extinction, EN : en danger, VU : vulnérable). En fonction de quoi elle n’est pas actuellement concernée par des mesures de protection.
Certaines populations sont cependant en déclin, comme aux Maldives dans l’océan Indien et aux Mariannes dans l’océan Pacifique.

Origine des noms

Origine du nom français

Croissant queue jaune : ce nom décrit la caractéristique la plus frappante de l’animal, sa grande nageoire caudale en croissant arborant un large liseré jaune entre les pointes de ses lobes. Ce nom commun est privilégié par la FAO*.

Origine du nom scientifique

Variola : le genre est créé en 1839 par William Swainson (1789-1855) dans On the natural history and classification of fishes, amphibians, & reptiles, or monocardian animals (volume II, p. 202). Swainson n’explique pas le choix du nom du genre, mais il est possible qu’il vienne du bas latin [variola], dérivé du latin [varius], qui signifie entres autres « tacheté, moucheté ». Le mot « variola » désignait une maladie infectieuse qui a donné son nom à la variole, laquelle se caractérise initialement par des taches rougeâtres qui peuvent s’étendre sur tout le corps : les très nombreuses petites taches rouges à violacées qui couvrent le corps de V. louti, l’espèce-type* du genre, justifieraient la comparaison.
Swainson caractérise le genre par sa caudale et ses pelviennes particulièrement longues, et par la forme fourchue de la caudale (p. 168).
Il y a actuellement (2024) deux espèces dans le genre, la seconde étant V. albimarginata.

louti : l’espèce est décrite d’après les travaux de Peter Forsskål (1732-1763), explorateur et naturaliste suédois mort pendant une expédition dans la péninsule arabique. Carsten Niebuhr, seul survivant de l’expédition, publia les travaux de Forsskål en 1775 dans Descriptiones animalium avium, amphibiorum, piscium, insectorum, vermium; quae in itinere orientali observavit Petrus Forskål. Post mortem auctoris edidit Carsten Niebuhr en 1775. L’espèce est mentionnée pages 40 et 41 sous le nom de Perca louti. L’épithète spécifique est le nom donné par les Arabes à ce poisson.
La localité du type* est Djeddah (Arabie Saoudite).

Classification

Numéro d'entrée WoRMS : 218304

Termes scientifiques Termes en français Descriptif
Embranchement Chordata Chordés Animaux à l’organisation complexe définie par 3 caractères originaux : tube nerveux dorsal, chorde dorsale, et tube digestif ventral. Il existe 3 grands groupes de Chordés : les Tuniciers, les Céphalocordés et les Vertébrés.
Sous-embranchement Vertebrata Vertébrés Chordés possédant une colonne vertébrale et un crâne qui contient la partie antérieure du système nerveux.
Classe Teleostei
Ordre Perciformes Perciformes Nageoires pelviennes très rapprochées des nageoires pectorales.
Famille Serranidae Serranidés 1 à 3 épines sur l’arrière de l’opercule.
Genre Variola
Espèce louti

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