Près de 20 mm de longueur
Corps d'une couleur généralement blanc laiteux
Cérates montrant une zone centrale bleue et une zone terminale jaune vif
Rhinophores et tentacules buccaux lisses, assez longs aux extrémités blanches à jaune opaque
Doris caerulea Montagu, 1804
Cuthona caerulea (Montagu, 1804)
Eolidia bassi (Vérany, 1846)
Eolis glotensis (Alder & Hancock, 1846)
Eolis deaurata (Dalyell, 1853)
Eolis molios (Herdman, 1881)
Méditerranée, Atlantique Ouest
Zones DORIS : ● Europe (côtes françaises), ○ [Méditerranée française], ○ [Atlantique Nord-Est, Manche et mer du Nord françaises]On rencontre l'espèce sur les côtes méditerranéennes occidentales.
On peut également la croiser dans l'Atlantique Est (depuis la Scandinavie, les côtes britanniques, jusqu'au littoral tropical africain du Sénégal. L'espèce est signalée aux Canaries et aux Açores…).
Eaux peu profondes circalittorales*. A chercher sur des hydraires.
Trinchesia caerulea, un éolidien, possède une longueur totale, lors des observations les plus fréquentes, comprise entre 10 mm et 25 mm.
Cette taille varie non seulement selon le stade de croissance mais aussi selon le secteur géographique où il est observé.
Les cérates*, sur le dos (ou papilles dorsales), s'organisent assez régulièrement en 6 à 10 bouquets de papilles (2 à 4 papilles chacun en général) en vis-à-vis, semblables à des lignes. Leur coloration peut être assez variable, mais les couleurs les plus couramment rencontrées sont (d'après les observations des auteurs) les suivantes : depuis la base de la papille, la couleur est celle du corps, blanc laiteux à transparent ; au milieu de cette papille dorsale, on remarque un anneau central large et bien délimité bleu vif (pouvant éventuellement varier de noir à vert) ; sur le dernier tiers du cérate et conjoint à l'anneau bleu, un anneau jaune vif terminal (pouvant éventuellement varier de rougeâtre à orange). Enfin, on peut souvent distinguer en s'approchant fortement, un point blanc correspondant aux cnidosacs*.
Quelques variations de couleurs sont encore décrites dans la littérature (notamment par [Picton 1994]) : fin anneau jaune sous l'anneau bleu central ou encore des ponctuations pâles au même endroit… Parfois la glande digestive visible au travers du tégument apporte sa couleur sombre.
A l'avant, la tête porte une paire de rhinophores* assez longs, non lamellés, clairs, diaphanes à transparents, mais dont les extrémités deviennent blanc opaque ou jaune opaque pâle.
De même, on distingue à l'avant une paire de tentacules oraux (ou palpes labiaux), plus courts que les rhinophores mais qui présentent une coloration semblable, de blanc à jaune.
Une ligne de même couleur marque la partie terminale du pied de l'animal, depuis les derniers cérates jusqu'à la queue.
Plusieurs espèces se ressemblent beaucoup et il a fallu des études moléculaires pour séparer certaines des espèces cryptiques appartenant au genre Trinchesia.
A l'instar de beaucoup d'éolidiens, Trinchesia caerulea se nourrit d'hydraires, principalement du genre Sertularella et semble apprécier en particulier Sertularella polyzonias (Linnaeus), Sertularella gayi (Lamouroux), Halecium halecinum (Linnaeus) et Hydrallmania falcata (Linnaeus) (Thompson & Brown,1984). Près de Marseille et selon [Vicente 1963], cette espèce se nourrit d'Eudendrium spp.
Animaux hermaphrodites*, les individus se reproduisent deux à deux, en s'échangeant simultanément leurs gamètes* lors d'un accouplement. Les pontes respectives auront lieu ensuite, déposées sur une touffe d'hydraires. La reproduction a lieu, en général, au printemps.
La ponte de Trinchesia caerulea présente une forme de « ruban » plat, assez large et pas très long, disposé sur les « branches » de l'hydraire. Ce ruban est plutôt transparent et laisse voir de nombreux points blancs. Ces points blancs sont les œufs proprement dits.
Le principal moyen de défense utilisé par les éolidiens, et donc la cuthona bleue, est le recyclage à leur propre usage des cnidoblastes* urticants appartenant initialement à leurs proies venimeuses : les hydraires ! Ainsi, Trinchesia caerulea, qui mange la tête des polypes de l'hydraire, non seulement n'est pas blessée par l'action fortement urticante des cnidoblastes de celle-ci mais fait migrer ces cellules urticantes embryonnaires intactes jusqu'à l'extrémité de son système digestif et les stocke dans ses cnidosacs*, au sommet des cérates ! Ces cellules urticantes vont se développer et sont désormais allouées à sa propre protection et se déclencheront si la cuthona bleue est attaquée. Ce mode de défense semble être fortement efficace et l'on connaît peu de prédateurs des éolidiens utilisant ces armes.
Une étude de 2017 sur Cratena peregina [Willis &al 2017] avance que les éolidiens mangeurs de polypes d'hydraires choisiraient prioritairement les polypes ayant consommé une grosse masse de micro-zooplancton plutôt que les polypes n'en ayant pas mangé. Le nudibranche se nourrirait donc également du zooplancton capturé par les polypes et ce, pour une belle part de son alimentation ! Les auteurs ont appelé ce mécanisme visant à consommer une proie au travers d'un autre organisme ayant capturé cette proie auparavant : la kleptoprédation.
Un trait caractéristique des éolidiens concerne la présence de papilles dorsales, appelées cérates. Conjointement, on constate l'absence du panache branchial visible ou présent dans d'autres sous-ordres de Nudibranches. En effet, la respiration des éolidiens n'utilise pas de branchies proprement dites mais se fait directement au travers de la membrane des cérates. On parle de respiration cutanée.
Les rhinophores* sont les organes de perception chimique des Nudibranches. C'est entre autre grâce à eux que l'animal perçoit son environnement, reconnaît la signature chimique de ses congénères ou de ses proies.
Ces rhinophores sont également utiles à l'orientation car sensibles aux paramètres physiques, comme le sens des courants, la luminosité, la température, etc.
Les palpes buccaux et labiaux sont, eux, plus précisément destinés à un rapport de contact avec l'environnement.
La radula, pièce physique primordiale dans la nutrition de la plupart des mollusques opisthobranches, est une sorte de langue râpeuse, située dans le larynx et constituée de nombreux denticules acérés. La forme de la radula, des denticules, leur agencement, sont des éléments spécifiques d'une espèce donnée et sont discriminatifs quant à l'identification et la taxonomie de cette espèce. Son observation exige néanmoins du matériel optique de laboratoire.
Cuthona bleue : l'animal porte en nom commun son précédant nom de genre (Cuthona, genre qui a changé en 2017), assorti de la couleur bleue qui le distingue bien lorsqu'on rencontre l'animal.
Trinchesia : dédiée à Salvatore Trinchese (1836-1897), zoologiste italien qui étudia les mollusques gastéropodes.
Le genre a été décrit par Hermann von Ihering en 1879.
caerulea : du latin [caerulea] = coloré de bleu, bleu, couleur d'azur.
A propos de l'ancien nom de genre, Cuthona : origine du mot incertaine. Dans les Poèmes d'Ossian, recueil de poèmes gaéliques du IIIe siècle, publiés en anglais par James Macpherson entre 1760 et 1763 et relatant une épopée irlandaise, un personnage féminin nommé Cuthona est enlevé à son fiancé Conlath. Celui-ci meurt dans une bagarre avec Toscar, le ravisseur. Cuthona meurt de chagrin 3 jours après. Origine à confirmer.
En vieil anglais : -cuth = connu, bien connu (old English dictionnary).
Termes scientifiques | Termes en français | Descriptif | |
---|---|---|---|
Embranchement | Mollusca | Mollusques | Organismes non segmentés à symétrie bilatérale possédant un pied musculeux, une radula, un manteau sécrétant des formations calcaires (spicules, plaques, coquille) et délimitant une cavité ouverte sur l’extérieur contenant les branchies. |
Classe | Gastropoda | Gastéropodes | Mollusques à tête bien distincte, le plus souvent pourvus d’une coquille dorsale d’une seule pièce, torsadée. La tête porte une ou deux paires de tentacules dorsaux et deux yeux situés à la base, ou à l’extrémité des tentacules. |
Sous-classe | Heterobranchia | Hétérobranches | |
Super ordre | Nudipleura | Nudipleures | |
Ordre | Nudibranchia | Nudibranches | Cavité palléale et coquille absentes chez l’adulte. Lobes pédieux souvent absents aussi. Respiration cutanée, à l’aide de branchies, de cérates ou d’autres appendices. Tête portant une ou deux paires de tentacules, les tentacules postérieurs ou rhinophores peuvent parfois être rétractés dans des gaines. Principalement marins ou d’eau saumâtre. |
Sous-ordre | Cladobranchia | Cladobranches | |
Famille | Trinchesiidae | Trinchésiidés | |
Genre | Trinchesia | ||
Espèce | caerulea |
Des organes sensoriels développés.
Les palpes buccaux sont plus courts que les rhinophores. Les uns et les autres se terminent par une partie opaque, jaune, comme ici ou plus blanche, comme sur la photo suivante.
Saint-Cyr-Sur-Mer (13), 20 m
29/04/2007
Blanche, bleue et jaune
Un corps laiteux translucide, des anneaux successifs bleus et jaunes, bien visibles, bien marqués sur les cérates, c’est ce qui attire l’œil sur Trinchesia caerulea de prime abord.
Impérial de Terre, Archipel de Riou, Marseille (13), 13 m
27/04/2007
Partie antérieure
On peut voir ici les rhinophores non lamellés avec, à la base, la tache oculaire (le petit point noir). Les premiers sont des organes chémo-sensoriels visant à permettre à l'animal d'appréhender son environnement grâce aux molécules présentes dans l'eau. Les taches oculaires visent quant à elles à lui fournir des indications de luminosité.
A noter que cet individu semble porter des parasites (copépodes ?) blancs sur le dos.
Pointe Causinière, cap Ferrat (06), 25 m
20/05/2018
Dans son environnement.
Trinchesia caerulea se rencontre surtout sur les touffes d'hydraires qu'elle consomme. Son décor courant en Méditerranée est celui des petits fonds coralligènes.
Impérial de Terre, Archipel de Riou, Marseille (13), 13 m
27/04/2007
Armée et dangereuse
Sur certains individus, on distingue bien, à l’apex des cérates, lepetit point plus clair marquant l’emplacement des cnidosacs. C’est là que la cuthona bleue stocke les cnidocystes non déclenchés qu’elle a ingérés et dont elle se sert comme armes de défense.
Les Impériaux, Marseille (13)
24/04/2007
De légères subtilités de couleurs
En examinant de près la coloration des cérates, on peut observer quelques nuances de couleurs d'un individu à l'autre. La glande digestive, plus ou moins sombre et vue par transparence au travers du tégument, peut interférer sur la nuance de l'anneau bleu central, voire même créer un nouvel anneau sombre entre cette partie bleue et l'apex jaune. C'est probablement le régime alimentaire de l'animal qui est responsable de ces variations de couleurs au niveau du système hépato-pancréatique.
Les Impériaux, Marseille (13)
24/05/2007
Au printemps : la reproduction
En période de reproduction, on trouve souvent la cuthona bleue rassemblée en petits groupes sur les arbuscules d’hydraires sur lesquels elle pond.
Les Moyades, Archipel de Riou, Marseille (13), 16 m
25/04/2007
Pontes
La ponte de Trinchesia caerulea se présente sous la forme d’un large ruban, plus ou moins court, posé sur les « branches » de l’hydraire. Les points blancs sont les œufs proprement dits.
Pointe Causinière, cap Ferrat, (06), 25 m
23/04/2023
Individu se nourrissant
Cuthona est équipée, comme tous les éolidiens, d’une radula lui servant à grignoter les polypes d’hydraires. C’est le cas de celle-ci, sur ce qui pourrait être Halecium halecinum.
Pointe Causinière, cap Ferrat (06), 25 m
23/04/2023
Implantation des cérates
La photo permet de bien remarquer l’implantation des cérates, ou cirres, bouquets formant presque des rangées transversales sur le dos de l’animal et séparées les unes des autres.
Pointe Causinière, Cap Ferrat (06), 25 m
20/05/2018
Rédacteur principal : Alain-Pierre SITTLER
Vérificateur : Michel KUPFER
Correcteur : Yves MÜLLER
Responsable historique : Aedwina REGUIEG
Responsable régional : Alain-Pierre SITTLER
Korshunova T., Martynov A., Picton B., 2017, Ontogeny as an important part of integrative taxonomy in tergipedid
aeolidaceans (Gastropoda: Nudibranchia) with a description of a new genus and species from the Barents Sea, Zootaxa, 4324(1), 001-022.
Korshunova T., Picton B., Furfaro G., Mariottini P. Pontes M., Prkić J., Fletcher K., Malmberg K., Lundin K., Martynov A., 2019, Multilevel fne-scale diversity challenges the ‘cryptic species’ concept, Scientific Reports, 9, 6732, 23p.
Willis T.J., Berglöf K.T.L., McGill R.A.R., Musco L., Piraino S., Rumsey C., Fernández T.V., Badalamenti F., 2017, Kleptopredation: a mechanism to facilitate planktivory in a benthic mollusc, Biology Letters, 13, 20170447.
La page sur Trinchesia caerulea dans l'Inventaire National du Patrimoine Naturel : INPN