Aspect de disque plat hérissé de verrues
Bleu-vert à orange
Tentacules courts, fourchus, ramifiés
Zone marginale nue et très extensible
Souvent en petites colonies
Coral anemone, bubble mushroom, warty corallimorph (GB)
Actinia osculifera Le Sueur, 1817
Actinotryx sanctithomae, Duchassaing & Michelotti, 1860
Discosoma sanctithomae (Duchassaing & Michelotti, 1860)
Rhodactis sanctithomae (Mc Murrich, 1889)
Caraïbes
Zones DORIS : ● CaraïbesMer des Caraïbes, jusqu'aux Bahamas, semble absent du golfe du Mexique.
Le corallimorphaire verruqueux apprécie les substrats* durs (roches, récifs), de préférence bien éclairés. On le trouve de 5 à 25-30 m de profondeur.
Comme tous les corallimorphaires, Rhodactis osculifera ressemble superficiellement à un Actiniaire (anémone) mais avec des caractères anatomiques qui le rapprochent d’un Madréporaire qui serait dépourvu de squelette calcaire.
Le corallimorphaire verruqueux vit en solitaire ou le plus souvent en petits groupes issus d’un même individu par clonage.
Le pied est court et épais, masqué par le disque oral qui s’étend largement sur le substrat (de 6 à 10 cm de diamètre).
La bouche légèrement protubérante s’ouvre au milieu du disque. Autour de la bouche, la surface du disque est couverte de petites expansions qui sont des tentacules modifiés : ces tentacules oraux sont courts, épais et fourchus ou ramifiés. Ils sont répartis en plusieurs cercles concentriques autour de la bouche.
La couleur est variable, parfois blanc grisâtre, brune, rose, souvent d’un vert-bleu iridescent, ou même orange vif.
A la périphérie du disque il y a une zone nue, fine, dépourvue de tentacules et délicatement striée. Cette zone marginale est extensible et peut recouvrir totalement l’animal. Le bord externe de cette marge nue est frangé de très fins tentacules transparents. Les tentacules marginaux sont filiformes et de tailles inégales.
L’aspect du corallimorphaire verruqueux peut changer beaucoup : de jour le disque s’étale largement et se bombe, la marge est alors contractée et récurvée, peu visible sous le disque. De nuit c’est l’inverse : la zone périorale se contracte, la zone marginale se dilate, s’étend et se recourbe vers le haut jusqu’à prendre l’aspect d’un bol.
Deux autres Discosomatidés sont recensés en zone caraïbe : Discosoma carlgreni et Discosoma neglecta. Ce dernier est bien différent du corallimorphaire verruqueux, par contre carlgreni présente, comme Rhodactis osculifera, des tentacules marginaux filiformes et des tentacules fourchus, courts et rares, répartis sur le disque oral.
Les tentacules oraux présentent la particularité d’être presque dépourvus de cnidocytes* ainsi que la surface du disque. Ils ne peuvent ni attraper ni retenir une proie même minuscule. Les cnidocytes* semblent concentrés dans l’endoderme et dans les tentacules marginaux. On voit parfois, de jour, des crevettes posées à la surface du disque oral, ou se déplaçant entre les tentacules fourchus, sans être attaquées.
Par contre les tentacules oraux hébergent de très nombreuses algues symbiotiques*. De jour ces tentacules sont déployés, gonflés et exposent un maximum de surface à la lumière, ils semblent servir principalement de « parc à zooxanthelles*».
De nuit les tentacules oraux sont rétractés et resserrés autour de la bouche. Si une crevette, un ver ou même un petit poisson entre en contact, la zone marginale largement déployée est capable de se rabattre et de se refermer en enveloppant complètement la proie, dans un mouvement qui dure de une à trois secondes maximum. Pendant le délai de fermeture, les tentacules marginaux parfaitement fonctionnels bloquent l’ouverture restante et empêchent la proie de ressortir du piège.
Lorsque la cloche est totalement refermée, le corallimorphaire prend l’aspect d’une grosse tomate ou d’une bulle translucide. A travers la fine paroi, on peut voir la crevette ou le ver continuer à nager quelques instants, puis peu à peu la proie est pressée contre les tentacules oraux et acheminée vers la bouche.
La digestion dure 24 à 48 h après quoi le corallimorphaire expulse les débris non digérés.
Comme les Scléractiniaires, le corallimorphaire verruqueux tire ses ressources alimentaires partiellement de la symbiose et partiellement de la prédation, mais il le fait en tirant parti de son anatomie d'une façon totalement différente et très originale.
Multiplication asexuée
On rencontre parfois des polypes avec deux bouches distinctes ou plus : probablement des individus en cours de fission longitudinale. Ils peuvent aussi se multiplier par bourgeonnement de nouveaux individus à partir de la base. Les corallimorphaires forment ainsi de petites colonies, où ils sont tous issus d'un même individu par clonage. Ces clones peuvent recouvrir la roche sur plusieurs mètres carrés.
Reproduction sexuée
Des embryons avec une cavité gastrique partiellement cloisonnée ont été retrouvés à l'intérieur des polypes, ce qui semble indiquer qu'il y a une période d'incubation des larves*. Elles sont libérées vers le mois de septembre (dans l'hémisphère Nord).
Contrairement aux Actiniaires en général, Rhodactis osculifera n'a pas vraiment d'association stable avec d'autres organismes. On a signalé occasionnellement la présence de Ancylomenes pedersoni, Periclimenes yucatanicus parmi les tentacules oraux, mais il est probable que, de nuit, ces crevettes doivent aller chercher un abri moins dangereux ailleurs.
Les individus trouvés en profondeur ont plus tendance à arborer des couleurs fluorescentes que ceux qui sont juste sous la surface, ces différences sont sans doute liées à des populations différentes de zooxanthelles.
Tous les Corallimorphaires, comme certains Scléractiniaires, se défendent en cas d'agression en éjectant par la bouche des filament mésentériques ou aconties*, bourrés de cnidocytes très fortement urticants (voir photo).
Mais Rhodactis osculifera dispose d'une arme particulière, offensive autant que défensive, utilisée dans la compétition pour l'espace vital.
On a observé que les corallimorphaires situés à proximité de coraux "agressifs" comme Meandrites sp.ou Agaricia sp. étaient capables de tuer tous les polypes à leur portée en exportant des aconties* non seulement par la bouche mais par toute la surface du disque oral, à travers l'ectoderme, et surtout par les tentacules marginaux. Ces tentacules habituellement filiformes se gonflent alors et deviennent bulbeux sous l'afflux des filaments mésentériques. Ces attaques se produisent de nuit et n'ont jamais été observées en présence d'autres compétiteurs (algues, éponges ou autres).
Longtemps connue comme Actinotryx ou Rhodactis ou Discosoma sanctithomae, d'après la description illustrée de Duchassaing, cette espèce a été récemment rapprochée de la description (pourtant assez sommaire) d' Actinia osculifera par le Sueur, d'où son nom actuel.
Corallimorphaire, faute de mieux, est repris du nom de l'ordre.
verruqueux : à cause des tentacules oraux qui ont l'air de verrues.
Discosoma : du latin [discus] = disque et du grec [sôma] =corps, donc qui a un corps en forme de disque.
sanctithomae : du nom de Saint Thomas dans les îles Vierges, l'île d'où était originaire le spécimen-type décrit par Duchassaing & Michelotti.
L'espèce est désormais connue sous le nom de Rhodactis osculifera :
Rhodactis : du grec [rhodo-] = rouge, rose et [actis] = rayon : anémone rayonnée rouge.
osculifera : du latin [oscula] = petite bouche, et [fero] = je porte.
Numéro d'entrée WoRMS : 456765
Termes scientifiques | Termes en français | Descriptif | |
---|---|---|---|
Embranchement | Cnidaria | Cnidaires | Organismes aquatiques (marins pour la plupart) libres ou fixés, carnivores, principalement à symétrie radiaire, caractérisés par des cellules urticantes : les cnidocytes. Deux morphologies principales : le polype et la méduse. La larve est une planula. |
Classe | Anthozoa | Anthozoaires | Cnidaires exclusivement marins, solitaires ou coloniaux, uniquement sous la forme polype (jamais de phase méduse dans le cycle de vie). |
Sous-classe | Hexacorallia / Zoantharia | Hexacoralliaires / Zoanthaires | Anthozoaires coloniaux ou solitaires, tentacules lisses, polypes à symétrie d’ordre 6. |
Ordre | Corallimorpharia | Corallimorphaires | Hexacoralliaires solitaires ressemblant aux madréporaires (d'où leur nom), mais sans exosquelette calcaire. Souvent en forme d'assiette avec de petits tentacules abritant le plus souvent des zooxanthelles. |
Famille | Discosomatidae | Discosomatidés | |
Genre | Rhodactis | ||
Espèce | osculifera |
Disque vert fluo
Le corallimorphaire se présente comme un disque charnu, aplati, hérissé de nombreuses petites expansions et avec une bouche proéminente au centre. Il n'est généralement pas solitaire, comme ici, mais en petites colonies.
La Baleine (Martinique), 7 m
06/12/2007
Colonie
Les corallimorphaires verruqueux se trouvent presque toujours en colonies denses, comme ici.
Rivière Claire, Martinique (972), 8 m
13/05/2008
Pied épais
Une rare photo " de profil" où on peut voir le pied court et épais des polypes, ainsi que la bouche protubérante. Le pied est habituellement enfoncé dans le support et caché par le disque buccal.
Martinique (972), Anse 3 airs, 5 m (photo prise de nuit)
04/08/2007
Tentacules oraux
Le disque buccal est couvert de petites "verrues" qui sont des tentacules modifiés, courts et fourchus. De jour, ils enflent et se déploient pour exposer à la lumière les zooxanthelles hébergées à l'intérieur.
Trou Rouge (Martinique), 9 m
10/12/2007
En gros plan
A la périphérie du disque se distinguent les tentacules marginaux. Au milieu, les petites expansions épaises et courtes, de couleur orangée, sont des tentacules modifiés.
Martinique, Anses d'Arlet, -10m
12/08/2018
Tentacules marginaux
Sur cette colonie très dense où les individus se recouvrent partiellement, on remarque la finesse des tentacules marginaux, espacés le long de la bordure du disque.
Cap Enragé (Martinique), 7 m
10/12/2007
Variante rousse
Certaines colonies ont les tentacules oraux d'un orange vif, légèrement fluorescents, et très fourchus. Il s'agit pourtant de la même espèce.
Jardin de Salomon (Martinique), 12 m
12/12/2007
Variante indigo
La couleur la plus fréquente est un vert fluorescent. Mais voici une petite colonie de corallimorphaires d'un superbe bleu-violet.
Trou Rouge (Martinique), 11 m
10/12/2007
Repli
Ce corallimorphaire dérangé est en train de se refermer en s'enveloppant dans sa zone marginale étendue.
La Baleine (Martinique), 10 m
06/12/2007
Tomate verte
De jour, il arrive qu'un individu dérangé se referme sur lui-même en prenant l'aspect caractéristique d'une grosse tomate verte.
Photo primée au concours "Les Yeux de Doris 2008"
Delgrès, Basse-Terre (Guadeloupe 971), 12 m
03/2007
Position de jour
De jour : cette crevette du Yucatan se promène sans crainte entre les tentacules oraux du corallimorphaire.
Saint Pierre, Martinique (972), 20 m
17/05/2008
Marge étirée
A la tombée de la nuit, les tentacules oraux se rétractent. La marge fine se dilate et commence à s'étaler en préparation de la position de chasse de nuit.
Sec des Boucaniers (Martinique), 7 m, de nuit
30/11/2006
Position de chasse
Ce corallimophaire est en position de chasse nocturne : la zone périorale est contractée, la zone marginale largement dilatée en forme de bol, prête à se refermer sur une proie éventuelle. Les tentacules marginaux sont bien déployés.
Les Saintes, (971), photo de nuit
07/2007
Piège
Sur ce corallimorphaire en position de chasse, remarquer l'extension des tentacules marginaux prêts à fonctionner. Les tentacules oraux, eux, sont contractés et non fonctionnels.
Deshaies, Guadeloupe (971), 9 m (de nuit)
13/08/2008
Agression
Probablement en réponse à une agression subie, ce corallimorphaire éjecte par la bouche ses filaments mésentériques bourrés de cnidocytes urticants, accompagnés d'une bonne dose de mucus.
Martinique
20/06/2007
Rédacteur principal : Anne PROUZET
Correcteur : Frédéric SINNIGER
Responsable régional : Anne PROUZET
Elliott J., Cook, B.B., 1989, Diel variations in prey capture behavior by the corallimorpharian Discosoma sanctithomae : mechanical and chemical activation of feeding, Biological Bulletin, Marine Biological Laboratory, Woods Hole, 176(3), 218-228.
Le Sueur A., 1817, Observations on several species of the genus Actinia ; illustrated by figures, Journal of the Academy of Sciences of Philadelphia, 1(1), 149-154, 169-189.
Miles J.S., 1991, Inducible agonistic structures in the tropical corallimorpharian, Discosoma sanctithomae, Biological Bulletin, Marine Biological Laboratory, Woods Hole, 180(3), 406-415.
La page de Rhodactis osculifera sur le site Hexacorallians of the World : Fautin, Daphne G. 2013. Hexacorallians of the World. http://geoportal.kgs.ku.edu/hexacoral/anemone2/index.cfm
La page de Rhodactis osculifera dans l'Inventaire National du Patrimoine Naturel : INPN