Ver plat de forme ovale de 20 mm au maximum
Rose à fines lignes blanches
Bord margé de blanc puis de magenta
Deux tentacules céphaliques antérieurs de couleur magenta
Reptation rapide
Planaire rose
Pink flatworm (GB), Planaria rosea (I), Planaria rosada, planaria roja, planaria rosa (E), Rosa Bandplanarie (D), Rozepaarse platworm (NL)
Beaucoup d'espèces du genre Prostheceraeus ont été décrites en fonction de leur morphologie externe et de leur couleur, mais l'anatomie interne (organes sexuels) n'a pas toujours été étudiée en détail. Pour cela, plusieurs "formes" possèdent une position taxonomique incertaine (incertae sedis*). C'est particulièrement le cas pour la forme rose qui se dispute le nom de P. roseus ou de P. giesbrechtii suivant les publications et le besoin, plus ou moins marqué de leurs auteurs, de coller aux descriptions originales (règle de l'antériorité), fussent-elles fort incomplètes et, pour partie, contraires à toutes les observations faites ultérieurement.
Voir, dans la rubrique "informations complémentaires" en bas de la fiche, l'origine de ces incertitudes.
Méditerranée, océan Atlantique tempéré oriental nord
Zones DORIS : ● Europe (côtes françaises), ○ [Méditerranée française]Espèce rencontrée sur le pourtour méditerranéen et les côtes africaines atlantiques orientales, du Portugal au Sénégal ainsi qu'à Madère et, plus rarement, dans l'archipel des Canaries.
On peut observer P. roseus sur de nombreux substrats durs, sous les pierres, dans les fentes, les anfractuosités et les interstices de fonds rocheux les plus infimes, de la surface à 60 m de profondeur. C'est plus particulièrement sur des parois verticales ou inclinées recouvertes d'algues calcaires, d'éponges, de bryozoaires, d'hydraires et d'ascidies, ceci dès les zones bien éclairées jusqu'au coralligène à Paramuricea, que nous trouverons P. roseus où elle est à la recherche d'aliments. On la trouve également sur les fonds détritiques mais toujours proche de la roche. Des rassemblements de plusieurs individus ne sont pas inhabituels (espèce grégaire).
Le ver plat rose de Méditerranée (ou planaire rose) est un ver plat foliacé aux bords plissés mesurant 15 mm de longueur au repos. Sa capacité à facilement s'étirer et à s'arrondir peut faire varier sa taille de 10 à 20 mm. Animal très fin, son épaisseur est de 1 à 1,5 mm. Sa forme est ovale avec la partie antérieure plutôt aplatie et la partie postérieure plus pointue.
La coloration de la face dorsale est d'un rose lilas caractéristique, en fonction de la profondeur et de l'éclairage, ce ver plat peut apparaître plus ou moins violet, mauve voire bleu, à cause de l'absorption de la lumière. Le bord est margé de blanc sur tout le tour du corps, suivi par une seconde bande plus large de coloration magenta. La ligne médiane est aussi formée d'une bande de la même couleur. De chaque côté de cette bande centrale, il y a cinq fines lignes blanches, trois d'entre-elles rejoignent leurs homologues en arrière du corps. D'autres très fines lignes partielles s'intercalent entre les cinq lignes principales.
Mis à part deux tentacules magenta situés au niveau de la partie antérieure et issus du plissement de celle-ci (caractéristique du genre), il est démuni d'appendices sur le dessus du corps.
La face ventrale du corps est de couleur plus claire, rose uniforme. Cette face ventrale présente une ventouse centrale formée de l'orifice unique " bouche-anus" prolongé par un pharynx qui lui permet de se maintenir sur le fond en cas de nécessité (courant...). Le corps est recouvert de minuscules cils (invisibles à l'œil nu) qui permettent à l'animal de se déplacer par reptation* à des vitesses parfois surprenantes. L'animal peut également se déplacer en nageant par des mouvements d'ondulation lorsqu'il se retrouve en pleine eau.
Impossible à confondre avec une autre espèce voisine dans sa zone géographique, cette planaire est la plus colorée et la plus abondante que l'on peut rencontrer en Méditerranée.
De par leur forme, les vers plats peuvent être confondus avec des mollusques nudibranches (limaces de mer). Cependant, les planaires ne présentent jamais de panache branchial externe et ils ont un corps mou, fin et flasque, alors que les nudibranches sont plus épais et se contractent au toucher et deviennent plus durs.
Le régime alimentaire des vers plats est mal connu, ils se nourrissent probablement d'animaux morts, d'organismes unicellulaires et aussi d'animaux fixés (spongiaires, bryozoaires, ascidies). Selon certains auteurs, ils pourraient se nourrir d'algues calcaires. Par contre, Prostheceraeus roseus fait partie des espèces qui se sont spécialisées, elle est clairement prédatrice de petites ascidies : Pycnoclavella nana Lahille, 1890, et autres Pycnoclavella spp.
Comme tous les turbellariés, le tube digestif incomplet est formé d'un pharynx qui s'ouvre sur une seule ouverture sur la face ventrale, la bouche, qui sert également d'anus. Les aliments ingérés et les aliments non digérés sont régurgités par cette même ouverture.
Pour se nourrir, l'animal dévagine une partie de son pharynx, formant une trompe sécrétant un mucus et permettant de "sucer" ses proies.
La reproduction est principalement sexuée. Les individus sont hermaphrodites protandres (d'abord mâles puis femelles), le système de reproduction est dit réciproque, c'est à dire que les partenaires vont se féconder mutuellement. Les œufs fécondés sont rassemblés au sein d'une oothèque et déposés sur le fond dans un cocon gélatineux.
La copulation est très particulière. Les planaires n'ont pas de cavité vaginale et l'insémination est hypodermique par l'intermédiaire d'un stylet mâle qui vient littéralement "poignarder" le congénère n'importe où dans son corps, introduisant ainsi directement le sperme sous la peau. Une fois à l'intérieur du corps, les spermatozoïdes se déplacent à la recherche des ovules pour les féconder. Au final, elles pondront des œufs qui seront émis isolément sur une petite hampe fixée à une pierre ou des algues.
Des processus particuliers peuvent entraîner une reproduction asexuée par scissiparité : le pouvoir de régénération de ces animaux est particulièrement étonnant. Ainsi, coupé en morceaux, chaque partie pourra régénérer les parties manquantes pour reformer un individu entier et viable.
Métazoaire, triploblastique acœlomate, ce ver plat, comme tous les turbellariés, n'a pas de système circulatoire ni d'organes respiratoires car les échanges gazeux se font par toute la surface du corps.
Chez les vers plats, il existe des zones d'afférences lumineuses (yeux tentaculaires), généralement peu visibles, placé en bordure ou en arrière des pseudo-tentacules, sur le dos. Cette dernière, petits points noirs organisés en deux lignes dans l'axe médian, juste derrière le double repli marginal, comprend de nombreux yeux cérébraux (des cellules sensibles à la lumière, reliées au ganglion cérébral).
Les planaires utilisent 2 modes de déplacement. D'une part la reptation, qui est due à l'agitation des cils qui tapissent le corps mais aussi à la contraction des muscles (longitudinaux, circulaires et transversaux). D'autre part la nage qui est rendue possible par des ondulations de la périphérie du corps commandées par des contractions musculaires. Notez que tous ces mouvements ne sont pas liés à un système nerveux central, il n'y a pas de "cerveau" donneur d'ordre.
C'est un animal très fragile, fin comme une feuille de papier à cigarettes. Il ne faut pas le toucher, il risquerait de se déchirer.
La littérature sur les vers plats n'est pas très fournie et les contradictions sont importantes.
C'est le cas du ver plat rose de Méditerranée.
Suivant les auteurs, le nom scientifique de cette espèce est Prostheceraeus roseus Lang, 1884 ou Prostheceraeus giesbrechtii Schmarda, 1859. Dans certains cas ces deux noms sont considérés comme synonymes et dans d'autres comme deux espèces différentes.
En effet, ce ver plat pourrait présenter deux variations de coloration. Une variété de coloration rose avec des lignes longitudinales blanches, appelée Prostheceraeus roseus et une variété bleue avec des lignes longitudinales blanches et une ligne médiane jaune, appelée Prostheceraeus giesbrechtii.
Il existe aussi une variété "albinos" transparente avec juste les lignes blanches qui est également considérée par certains comme une variation de couleur de la planaire rose (nommée sur DORIS Prostheceraeus sp.1).
Parmi ces 3 formes, la planaire rose est très commune, la planaire blanche translucide est relativement fréquente et la planaire bleue est rare.
Ver plat : ces espèces sont considérés comme des vers et... ils sont très plats.
Parfois, un des noms communs rencontré pour cette espèce est planaire rose. Planaire vient du féminin du latin scientifique planarius, plat. Ver plathelminthe (turbellarié triclade) non annelé, libre, aquatique. Ce terme ne devrait donc pas être utilisé pour cette espèce qui appartient à l'Ordre des Polycladides... même si dans la pratique ce nom vernaculaire* est utilisé pour nombre de vers plats de la Classe des Turbellariés.
rose de Méditerranée : ces précisions ramènent bien entendu à la couleur principale et à la distribution de l'espèce.
A noter que "de Méditerranée", peut être un peu trompeur puisque l'on peut rencontrer cette espèce dans l'Atlantique oriental proche !
Prostheceraeus : du grec [prosthen-] = en avant ; et [keras] = corne : qui a des cornes à l'avant, en référence aux deux tentacules antérieurs.
roseus : rose.
Termes scientifiques | Termes en français | Descriptif | |
---|---|---|---|
Embranchement | Platyhelminthes | Plathelminthes | Vers plats à symétrie bilatérale, portant des organes des sens simples sur la tête, tube digestif à une seule ouverture ventrale. Nombreuses espèces libres ou parasites. |
Classe | Turbellaria | Turbellariés | Vers plats libres (non parasites) mus par une ciliature ventrale. Tube digestif ramifié qui possède une seule ouverture au centre de la face ventrale. |
Sous-classe | Archoophora | Archoophores | |
Ordre | Polycladida | Polyclades | Turbellariés à intestin très ramifié. Espèces de grande taille. Planaires marines. |
Sous-ordre | Cotylea | Cotylés | Polyclades caractérisés par la présence d’une ventouse ventrale permettant aux vers de se maintenir sur le fond. |
Famille | Euryleptidae | Euryleptidés | Vers plats lisses ou à papilles, souvent de couleur vive. Grands tentacules (parfois absents). Pharynx tubulaire et organe copulateur masculin unique dirigés vers l'avant. |
Genre | Prostheceraeus | ||
Espèce | roseus |
Glissant sur le substrat
Les caractéristiques principales de cette espèce sont la couleur rose - d'où le nom commun de planaire rose -, les lignes blanches, les bords plissés du corps et les 2 petites cornes antérieures.
Les Farillons, Marseille (13), 18 m
17/05/2007
Rose à 5 fines lignes blanches
De chaque côté de la bande centrale, il y a cinq fines lignes blanches, trois d'entre-elles rejoignent leurs homologues en arrière du corps.
Numérotées de 1 à 5 du centre vers l'extérieur, celles qui sont continues sont les n° 1, 3 et 4, d'autres très fines lignes partielles s'intercalent entre les cinq lignes principales.
Tiboulen de Frioul, île de Frioul, Marseille (13)
11/05/2006
Zone oculaire
On voit excellemment bien sur cette image la tache oculaire médiane, composée de nombreuses cellules sensitives et qui offre au ver plat une idée de son environnement d'un point de vue de la luminosité ambiante.
El Gato (Creus), Espagne, Méditerranée, 25 m
09/06/2018
Sur fond détritique
Il est fréquent de rencontrer P. roseus sur le sable, mais jamais très loin d'un substrat dur. Il est facile de distinguer la planaire d’un nudibranche. Corps extrêmement fin et pas d’organe sensoriel visible puisque les deux « antennes » à l’avant ne sont qu’un repli du corps. Mais sans doute la forte ressemblance avec les immangeables mollusques n’est-elle pas qu’un hasard ?
Anse Crau de Nao, rade de Villefranche-sur-Mer (06), 19 m
08/07/2005
Profond sur le sable
La planaire rose est aussi rencontrée lors de nos plongées profondes.
Les Fourmigues, presqu'île de Giens (83), 45 m
12/08/2007
Prédatrice de clavelines naines
Selon certains auteurs, la planaire rose pourrait se nourrir d'algues calcaires, à moins que ce soit des épibiontes fixés dessus. Par contre, elle est clairement prédatrice des petites ascidies Pycnoclavella sp.. On voit ici la planaire dévorer un champ de ces clavelines pour lesquelles il ne reste parfois que le pédoncule !
Archipel des Canaries, Atlantique Est, 20 m
24/06/2010
Variation de couleur
Chez certains individus, le corps de la planaire rose peut être blanc et seule une bande rose apparaît à la périphérie du corps.
Estéou, Marseille (13), 12 m
14/05/2005
Dominante violette
La couleur violette est ici très soutenue.
La Ciotat (13), 20 m
23/09/2007
Face ventrale rose clair uniforme
Les lignes blanches se semblent pas être présentes sur la face ventrale de l'animal.
Marseille (13), 10 m
17/05/2004
Transparence du corps
Comme la couleur, la transparence du corps peut varier d'un individu à l'autre...
Sec du Gendarme, Porquerolles (83), 23 m
20/05/2007
Foliacé
Le corps du ver plat peut se contorsionner de multiples manières. Jusqu'à adopter des formes étonnantes, notamment pour s'introduire dans les espaces les plus resserrés.
San Dominico, Marseille (13), 30 m
01/07/2007
Un duo au repos
Sur une épave, deux individus sont au repos. Le corps prend alors une forme circulaire.
Cette position n'est pas une position de reproduction.
Chez les Plathelminthes, la sexualité est assez spéciale... Les planaires n’ont pas de cavité vaginale et l’insémination est hypodermique par l’intermédiaire d’un stylet mâle qui vient littéralement "poignarder" le congénère n'importe où dans son corps, introduisant ainsi directement le sperme sous la peau !
Planier, Marseille (13), 25 m
25/11/2007
Reproduction
Le ver plat du haut a sorti son stylet !!
La copulation des vers plats est en effet très particulière. Ces animaux n’ont pas de cavité vaginale et l’insémination est hypodermique par l’intermédiaire d’un stylet mâle qui vient, parfois au terme d'une joute spectaculaire, littéralement "poignarder" le congénère n'importe où dans son corps, introduisant ainsi directement le sperme sous la peau. Une fois à l’intérieur du corps, les spermatozoïdes se déplacent à la recherche des ovules pour les féconder.
Il semble préférable dans ce rapport d'être le premier à planter son "dard", la fonction de mâle étant sans doute énergétiquement plus simple à gérer que celle de femelle.
La Ciotat (13), 10 m
29/06/2013
Double perforation reproductrice !
On peut observer ici les deux stylets reproducteurs en action simultanée avec perforation des faces ventrales.
Llafranc, Costa Brava, Espagne, 15 m
18/06/2013
En Méditerranée : Pyrénées-Orientales
Le ver plat rose se rencontre assez couramment en Méditerranée. Ici, dans les Pyrénées-Orientales, à Cerbère.
Cerbère (66)
07/07/2004
En Méditerranée : Var
Le ver plat rose se rencontre couramment en Méditerranée. Ici, sur la presqu'île de Giens, dans le Var.
La Roche Jaune, presqu'île de Giens (83), 18 m
16/04/2007
En Méditerranée : Alpes-Maritimes
Le ver plat rose se rencontre couramment en Méditerranée. Ici, sur le Cap Ferrat, dans les Alpes-Maritimes.
Pointe Causinière, Cap Ferrat (06), 15 m
19/06/2010
En Atlantique : dans les Canaries
On rencontre également le ver plat rose dans l'océan Atlantique Est. Ici, dans l'archipel des îles Canaries, sur les côtes de l'île de Ténérife.
Cette rencontre a été attestée par le département de biologie marine du Musée des Sciences Naturelles de Tenerife comme la première rencontre de l'espèce sur les côtes de Ténérife (même si des individus ont déjà été vus sur Lanzarote, île plus orientale dans l'archipel).
Ténérife, Archipel des îles Canaries, 20 m
24/06/2010
Rédacteur principal : Aedwina REGUIEG
Rédacteur : Sylvain LE BRIS
Vérificateur : Frédéric ANDRÉ
Responsable historique : Aedwina REGUIEG
Responsable régional : Alain-Pierre SITTLER
Novell i Ferrando C., 2001, Contribució al coneixement dels Turbellaris Polyclàdides del litoral catalá, Thesis, 262p.
Ocana Martin A., & coll., 2000, GUIA SUBMARINA DE INVERTEBRADOS NO ARTROPODOS, ed. Comares, Granada, Espana, 471p.