Ascidie coloniale encroûtante en lame fine
Couleur généralement jaune orangé
Attachée au substrat sur une large surface
Orifices inhalants distribués régulièrement, clairement étoilés (6 languettes)
Orifices inhalants surélevés (surface du cormus finement bosselée)
Orifices exhalants clairs et frangés de très petits denticules blancs
Synascidie jaune, didemnidé jaune
Yellow synascidian (GB), Sinascidia amarilla (E)
Méditerranée et Atlantique Est
Zones DORIS : ● Europe (côtes françaises), ○ [Atlantique Nord-Est, Manche et mer du Nord françaises], ○ [Méditerranée française]Fréquent en Méditerranée occidentale, Polysyncraton bilobatum se rencontre également en Atlantique, Manche et mer du Nord depuis les eaux irlandaises, bretonnes jusqu'aux côtes marocaines, sénégalaises et jusqu'à l'Afrique du Sud.
En Méditerranée, c'est une espèce du coralligène*, des prairies de phanérogames (posidonies) et jusqu'aux zones sédimentaires du plateau continental (microcosme des zones chalutables). On retrouve ces colonies fixées sur des substrats solides (roche ou autres organismes), ainsi que sur la base des posidonies. Elles ne sont généralement que modérément exposées au courant marin et à la lumière. Depuis l'infralittoral jusqu'à une centaine de mètres de profondeur.
En Atlantique, Manche et mer du Nord, cette espèce est présente sur la roche et solidement ancrée depuis le niveau de basse mer jusqu'à une quarantaine de mètres de profondeur.
Polysyncraton bilobatum est une ascidie coloniale qui forme des colonies encroûtantes en fines lames et à la consistance de cuir. Son épaisseur est de l'ordre de 1 à 3 mm. La surface couverte par une colonie peut atteindre plusieurs dizaines de décimètres carrés, mais la majorité des colonies sont le plus souvent de petite taille (quelques centimètres de diamètre).
La couleur de cette espèce est classiquement jaune orangé, mais des colonies blanches, jaune pâle, à beige orange, orange clair ou orange vif existent aussi. Les marges de la colonie sont souvent plus claires, blanches.
Les petits orifices inhalants ont un diamètre de 0,25 mm environ et présentent une implantation assez régulière, comme s'ils suivaient des lignes géométriques sur toute la tunique (le cormus*) de l'animal. Ces lignes plus ou moins évidentes et parallèles à des "veines" chez les grosses colonies, se dirigent vers les siphons cloacaux. Les siphons buccaux sont ornés de 6 languettes (ou lobes) plus clairs que le cormus. Comme chez tous les Polysyncraton, ces orifices montrent clairement un aspect étoilé. Les siphons inhalants sont visiblement surélevés par rapport à la surface commune de la colonie chez Polysyncraton bilobatum.
Plus gros et bien plus rares, les orifices exhalants (ou siphons cloacaux communs), de forme plus ou moins arrondie et tubulaire, mesurent 1 à 3 mm de diamètre. Ils sont plus clairs que le reste de la colonie et presque toujours marqués par de très petits denticules blancs (amas de spicules) répartis irrégulièrement au bord de l’ouverture cloacale commune. Ce dernier caractère macroscopique est le seul qui aide vraiment à faire la différence à l’œil nu entre les Polysyncraton (bilobatum et lacazei) et les nombreuses autres espèces de didemnidés ressemblants. Le plus souvent, seule une étude microscopique des zoïdes permet l’identification exacte.
Toutes les ascidies de la famille très homogène des Didemnidés sont très difficiles à identifier avec certitude sous l'eau ou sur photographie. Sachant qu'aucune colonie n'a été prélevée pour identification microscopique, toutes les photographies des fiches traitant ces espèces sont à considérer comme "pouvant ressembler in situ à cela".
Didemnum fulgens peut être très facilement et prioritairement confondu avec P. bilobatum mais ses siphons buccaux sont moins étoilés, son aspect de surface plus lisse et sa présence strictement limitée à l'infralittoral.
Polysyncraton lacazei est plus charnu et le plus souvent de couleur rouge.
Didemnum drachi est entièrement jaune, veiné, enveloppant et peu adhérent.
Didemnum maculosum présente une forme jaune et lisse.
Lissoclinum weigelei est une petite ascidie coloniale encroûtante blanche de 2 à 3 cm pour 4 mm d'épaisseur, aux bords arrondis. Les siphons buccaux forment de petits pores brunâtres.
Lissoclinum perforatum forme des plaques en croûte blanche opaque de 2 mm d'épaisseur, aux contours irréguliers mais arrondis. La surface du cormus est lisse sans surélévation au regard des zoïdes. Cette espèce est présente des côtes britanniques et françaises jusqu'en Méditerranée.
Ces animaux sont des filtreurs microphages*. Ils se nourrissent de petites particules, depuis les molécules en suspension jusqu’aux débris et micro-organismes animaux et végétaux.
Les ascidies génèrent un courant d’eau (rentrant par les orifices inhalants individuels) pour capturer les particules en suspension. Les particules alimentaires se trouvant dans l'eau sont filtrées par un mucus sécrété par la face ventrale de la cavité pharyngienne, puis acheminées par des cils dans l'estomac puis l'intestin. Les particules digérées et les déchets sortent ensuite par le siphon exhalant. Le regroupement de plusieurs de ces siphons forme un cloaque commun qui débouche, via un réseau de veines, à la surface de la colonie par une grosse ouverture.
La reproduction peut être asexuée et sexuée.
Reproduction asexuée : formation et extension de la colonie par bourgeonnement à partir de l’individu souche.
Reproduction sexuée : les représentants de la famille des Didemnidés sont hermaphrodites*, la fécondation est interne et le développement indirect.
Les gonades* se trouvent dans le post-abdomen où a lieu la fécondation. Le développement embryonnaire amène à la différenciation des organes internes, de la chorde* et de la queue pour former une larve nageuse ressemblant à un têtard. Ces larves nageuses sont libérées dans le milieu par le siphon cloacal des zoïdes. La vie pélagique est très courte et les larves se fixent au substrat par des papilles adhésives. A partir de là, commence la métamorphose qui donnera un individu adulte.
Les ascidies coloniales de la famille des Didemnidés (Didemnidae) sont souvent parasitées par des copépodes de la famille des Notodelphyidae.
Description microscopique de Polysyncraton bilobatum :
Il s'agit d'une espèce intermédiaire entre le genre Didemnum et Polysyncraton.
Absence de languette cloacale, contrairement à P. lacazei.
12 tentacules oraux.
Testicules en forme de deux hémisphères semblant former deux lobes (bilobatum ?)
Les spicules sont étoilés (15 branches environ), leur distribution dans la tunique est dense et régulière.
Les organes spiculogéniques (responsables de la fabrication des spicules), situés entre la seconde et la troisième rangée de stigmates*, sont surmontés d'un petit tube et en position verticale.
Les espèces de la famille Didemnidae ont en commun les 6 languettes étoilées des petits siphons inhalants, mais ces languettes ne sont pas systématiquement colorées de blanc.
Il est à noter que, si l'on observe avec attention ces orifices inhalants, on verra que 3 languettes sont légèrement plus grandes (1 sur 2) que les 3 autres [Lafargue 1987].
Quand les individus sont dérangés ou exposés à l’air (à marée basse, par exemple), ils referment leurs siphons exhalants et inhalants. Ces derniers deviennent presque invisibles et le cormus prend l'aspect de cuir.
Au toucher, ces ascidies se rétractent légèrement (elles sont dotées d'un système nerveux plus élaboré que les spongiaires qui réagissent moins aux stimuli - c'est aussi un moyen possible pour faire la différence en plongée).
Elles sont fermes et lisses. Les colonies de Polysyncraton bilobatum sont propres, n'accueillent pas d'épibiontes* sur leur tunique. On pense qu'elles utilisent naturellement une sorte d'antifouling pour garder la tunique bien nette.
Détermination des Didemnidés :
Une dissection est toujours nécessaire pour une détermination fiable des ascidies. Pour les représentants de la famille des Didemnidés (Didemnidae), elle est basée sur la morphologie des larves et la forme des spicules calcaires étoilés présents le plus souvent dans la tunique. La seule observation des spicules n'est pas suffisante. Effectivement, leur forme est proche d'une espèce à l'autre et leur densité parfois très variable au sein d'une même espèce rend ce critère insuffisant pour une bonne identification.
Les ascidies de la famille des Didemnidés sont caractérisées par les critères suivants :
- ascidie toujours composée (coloniale) dont les zoïdes sont inclus dans une tunique commune (cormus*),
- le corps est divisé en deux parties : branchie d'un côté (thorax) et tube digestif avec gonades de l'autre (abdomen),
- le tube digestif est situé sous la branchie,
- la totalité des gonades est incluse dans l'anse intestinale,
- la branchie est plane sans papilles internes ni sinus longitudinaux,
- estomac sans diverticules hépatiques,
- pas de vésicule rénale,
- le bourgeonnement se fait par la fusion de deux bourgeons œsophagiens (l'un est à l'origine de la branchie, l'autre de l'abdomen, voir le schéma dans la fiche Didemnum coriaceum).
Les espèces du genre Didemnum sont caractérisées par les critères suivants :
- quatre rangs de stigmates*,
- spermiducte courbé,
- 1 ou 2 testicules,
- siphon branchial à 6 lobes,
- présence de spicules calcaires (sauf exception).
Les espèces du genre Polysyncraton présentent les mêmes caractéristiques que celles du genre Didemnum, sauf :
- plus de deux testicules (exception pour P. bilobatum qui a deux testicules),
- languette bifide bien développée au siphon cloacal (exception pour P. bilobatum qui en est dépourvu).
Les espèces du genre Trididemnum sont caractérisées par les critères suivants :
- trois rangs de stigmates,
- spermiducte courbé,
- un testicule,
- nombreuses ouvertures cloacales communes surmontées d'un tube.
Les espèces des genres Diplosoma et Lissoclinum (très proches) sont caractérisées par les critères suivants :
- spermiducte droit,
- siphon cloacal avec simple trou, sans tube ni appendice (languette).
Didemne jaune est une proposition du site DORIS.
Polysyncraton : composé des préfixes grecs [poly-] = multiple, [syn-] = avec, ainsi que du grec [crater] = cratère, vase grec arrondi dans lequel on mélangeait l'eau et le vin et à partir duquel on remplissait les coupes que l'on passait ensuite à chaque convive. L'ensemble paraphrase le mot synascidie qui a quasiment le même sens.
bilobatum : = bilobé. Peut-être à cause des testicules en forme de deux hémisphères semblant former deux lobes. (?, à confirmer).
Numéro d'entrée WoRMS : 103590
Termes scientifiques | Termes en français | Descriptif | |
---|---|---|---|
Embranchement | Chordata | Chordés | Animaux à l’organisation complexe définie par 3 caractères originaux : tube nerveux dorsal, chorde dorsale, et tube digestif ventral. Il existe 3 grands groupes de Chordés : les Tuniciers, les Céphalocordés et les Vertébrés. |
Sous-embranchement | Urochordata / Tunicata | Urochordés / Tuniciers | Chordés marins fixés (ascidies) ou pélagiques (thaliacés), solitaires ou coloniaux. Epaisse tunique cellulosique. Deux siphons, pharynx bien développé, la chorde larvaire régresse chez l'adulte (sauf chez les Appendiculaires). |
Classe | Ascidiacea | Ascidies / Ascidiacés | Tuniciers fixés. Solitaires ou coloniaux (seuls capables de bourgeonnement). Chorde uniquement au stade larvaire. Siphon inhalant au sommet, proche du siphon exhalant latéral. Souvent en eau peu profonde. |
Ordre | Aplousobranchia | Aplousobranches | Ascidies coloniales. |
Famille | Didemnidae | Didemnidés | Aplousobranches avec thorax et abdomen. Zoïdes très petits et courts formant de fines colonies encroûtantes. Incrustations calcaires étoilées. (Ce n'est pas le cas du genre Diplosoma). |
Genre | Polysyncraton | ||
Espèce | bilobatum |
Ascidie coloniale encroûtante jaune orangé
Les lames sont minces et adhèrent fermement au substrat. Les siphons inhalants sont clairement étoilés chez le genre Polysyncraton.
La compétition pour l'espace se fait ici avec diverses espèces de bryozoaires encroûtants.
Tamaris, Côte Bleue (13), 30 m
18/08/2008
Dans le coralligène, espèce fréquente
Polysyncraton bilobatum est bien plus fréquent que l'on ne le pense sur le littoral méditerranéen, bien qu'absent de tous les guides de biologie sous-marine traitant de la Méditerranée. Il s'agit du didemnidé le plus commun avec Diplosoma spongiforme et Didemnum coriaceum sur le littoral méridional français.
Tamaris, Côte Bleue (13), 30 m
18/08/2008
Didemnidé jaune en lame mince
L'aspect de cette colonie de mer du Nord ressemble bien à celles de Méditerranée.
Notez les siphons communs exhalants tubulaires et plus clairs.
Les Ridens, Manche, 20 m
10/2007
En Bretagne
Lieu dit "Vaéré" entre Plougonvelin et la Pointe Saint-Mathieu.
Finistère Nord, 7 m
28/05/2008
Siphons cloacaux et petits denticules blancs
Sur la côte catalane espagnole.
Llançà, Costa Brava (Espagne)
27/02/2010
Parmi les bryozoaires, en épibionte sur une gorgone
Les limites de la colonie sont souvent plus claires.
Sec du Langoustier, Porquerolles (83), 20 m
15/06/2009
Fort effet couvrant
Recadrage sur la colonie précédente.
Le bryozoaire arbustif et robuste Turbicellepora avicularis, lui-même épibionte de la gorgone rouge Paramuricea clavata en arrière plan, ne semble pas pouvoir lutter contre ce didemnidé envahissant.
Sec du Langoustier, Porquerolles (83), 20 m
15/06/2009
Siphons étoilés
Colonie jaune clair parmi les algues.
Noter les siphons buccaux bien étoilés à six languettes et dont 3 languettes sont légèrement plus grandes (1 sur 2) que les 3 autres. Cette caractéristique est valable pour toutes les espèces de didemnidés.
PACA, Cap d'Antibes (06), 16 m
24/01/2010
Didemnidé le plus souvent discret
Le plus souvent les colonies méditerranéennes sont de petite taille comme ici, elles passent inaperçues aux yeux des plongeurs.
Au centre les petites pinces colorées appartiennent au pagure sédentaire Calcinus tubularis, à gauche duquel deux grandes balanes grises Balanus perforatus s'orientent vers nous.
Côte Vermeille (66)
N/A
Petite colonie jaune
Les siphons buccaux sont bien étoilés (6 lobes). Le bord de l'unique siphon cloacal est finement dentelé.
La fine granulation que l'on distingue est dûe aux nombreux spicules calcaires inclus dans la tunique commune.
Le Graillon, Antibes (06), 8 m
18/04/2009
Sous une algue
Colonie partiellement contractée.
Le Graillon, Antibes (06), 8 m
18/04/2009
Contracté sur l'estran à marée basse
L'identification est bien sûr impossible dans ces conditions, l'hypothèse P. bilobatum reste néanmoins plausible.
Manche Ouest, Agon Coutainville, partie basse de l'estran
10/09/2011
Forme jaune clair aux pieds des posidonies
Cette espèce est fréquemment rencontrée aux pieds des feuilles dans l'herbier de posidonie.
Large Aragnon, Côte Bleue (13), 21 m
24/08/2008
Épiphyte des feuilles de posidonie
Les feuilles de posidonie recouvertes par des colonies de Didemnidés sont très souvent repliées en deux par le poids de l'ascidie. Cette ascidie coloniale présente des figures géométriques, c'est peut être Didemnum drachi ?
Pointe du Vaisseau, Port Cros (83), 20 m
03/06/2006
Forme blanche ? Identification difficile !
Il est bien aléatoire le plus souvent de vouloir nommer précisément des colonies blanches, effectivement de nombreuses espèces peuvent avoir cette coloration claire.
Néanmoins l'organisation des siphons buccaux, eux-mêmes surélevés et associés à la présence de veines nues débouchant dans les siphons cloacaux nous oriente vers une forme blanche de Polysyncraton bilobatum (?).
Cagnes (06)
13/06/2009
Identification souvent difficile !
Ce didemnidé est impossible à identifier sur photo et c'est très souvent le cas pour cette famille.
Si la couleur jaune orangé évoque ici Polysyncraton bilobatum, l'aspect et l'organisation des zoïdes peuvent évoquer éventuellement Didemnum fulgens.
Grotte à corail, Antibes (06), 9 m
13/07/2008
Rédacteur principal : Frédéric ANDRÉ
Vérificateur : Benoît CHALLIER
Vérificateur : Valérie CARO
Responsable régional : Frédéric ANDRÉ
Lafargue F., Wahl M., 1987, The didemnid ascidian fauna of France, Ann. Inst. Océanogr., 63 (1), 1-46.