Gorgone pourpre

Paramuricea clavata | (Risso, 1826)

N° 223

Méditerranée occidentale, Atlantique proche de Gibraltar

Clé d'identification

Pourpre, parfois jaune, en partie ou en totalité
Rameaux gros, courts et de section ronde
Colonies atteignant 1 m d'envergure

Noms

Autres noms communs français

Gorgone rouge, gorgone caméléon, gorgone bleue

Noms communs internationaux

Purple gorgonian (GB), Gorgonia rossa (I), Gorgonia roja (E), Rote Gorgonie, violette Fächerkoralle (D)

Synonymes du nom scientifique actuel

Gorgonia clavata
Muricea chamaleon
Paramuricea chamaleon
Clematissa chamaeleon (Koch, 1887)

Distribution géographique

Méditerranée occidentale, Atlantique proche de Gibraltar

Zones DORIS : ● Europe (côtes françaises), ○ [Méditerranée française]

L'espèce, très abondante en Méditerranée occidentale, est absente de son secteur oriental. En Atlantique, elle a été observée dans des zones assez proches de Gibraltar : sur les côtes du Portugal et sur celles du Maroc.

Biotope

C'est une espèce sciaphile* des fonds rocheux, présente sur les tombants orientés au nord, sous les surplombs, ou à l'entrée des grottes. Elle est souvent fixée sur les parois verticales, en peuplement dense. Elle est rencontrée depuis 7 m minimum jusqu'à 110 mètres de profondeur. Elle est considérée comme une espèce caractéristique de la biocénose coralligène, à côté d'Eunicella singularis et d'Eunicella cavolinii, quoique généralement observée dans des eaux plus profondes.

Description

Cette belle gorgone présente des colonies dont la hauteur est comprise entre 30 et 100 cm.
Celles-ci sont aussi larges que hautes.
Le coenenchyme*, c'est à dire la partie charnue qui recouvre l'axe squelettique, est le plus souvent de couleur pourpre, parfois les extrémités sont jaunes et plus rarement, c'est la colonie entière qui est jaune. Quelques individus de teinte blanc neige ont été observés de manière très ponctuelle (à Ceuta, des photos en France sont recherchées). Cette gorgone se fixe au substrat rocheux par un élargissement de sa base. L'arborescence est plutôt dans un seul plan, mais elle est souvent irrégulière, se développant dans d'autres plans. Les rameaux sont dichotomiques*, c'est-à-dire avec des branches se divisant par deux. Leur section est ronde, et leur diamètre est d'environ 6 mm.
Les calices*, c'est à dire les ouvertures des polypes dans la partie charnue du tégument, sont bas, tuberculés, et de la même couleur que les rameaux qui les portent. Les polypes* ont aussi la même couleur que leurs rameaux (leur partie visible est aussi nommée anthocodia*). Les polypes pourpres ou jaunes, très grands (8 mm) sont disposés uniformément sur toute la surface des rameaux.

Observations au microscope :
Les sclérites* (petites structures calcaires qui donnent une certaine rigidité aux tissus mous des gorgones) sont translucides, en forme de plaques à aiguillons, de fuseaux à aiguillons, ou d'étoiles à aiguillons ; ils sont grands et asymétriques, et certains sont incurvés. Les aiguilles (ou fuseaux), simples ou ramifiées, sont caractéristiques du genre Paramuricea, avec des verrues uniquement sur la partie extérieure.
Longueur moyenne : 200 à 400 µm.
On considère souvent que pour la reconnaissance, ces sclérites constituent un critère sûr d'identification du genre et partiellement de l'espèce.

Espèces ressemblantes

Il y a des risques de confusions, mais faibles, entre de jeunes colonies de Paramuricea clavata et des branches de corail rouge, mais la gorgone pourpre se distingue facilement de Corallium rubrum. Celui-ci est bien moins rameux et ses polypes sont blanc translucide.
Les polypes de la gorgone jaune Eunicella cavolinii sont blancs à jaunâtres et sur des bosses bien visibles, les colonies de cette gorgone sont bien plus petites et les branches plus grêles.
Lorsque l'alcyon encroûtant Alcyonium coralloides recouvre les colonies d'Eunicella singularis, il peut y avoir un risque de confusion avec la gorgone pourpre, mais cet alcyon possède une surface bien plus irrégulière que celle de la gorgone pourpre, et les polypes de l'alcyon encroûtant sont d'une couleur plus claire que celle du tégument qui les entoure.

Alimentation

L'organisation coloniale de plusieurs milliers d'individus ou polypes, permet à la nourriture capturée par quelques-uns de nourrir toute la communauté. La digestion des particules se fait uniquement en contact direct avec les mésentères* dans l'espace creux du polype et dans les canaux les reliant. Dans ceux-ci, les nutriments flottent sous forme de molécules. De manière à optimiser les chances de capture, les arborescences sont surtout orientées perpendiculairement au courant afin de capter les particules organiques en suspension (vivantes ou mortes).

Reproduction - Multiplication

Chez les gorgones, les sexes sont séparés (espèce gonochorique*). Les mâles lâchent leur gamètes* en pleine eau. La fécondation* a lieu dans la cavité gastrique des femelles pour donner les œufs. Au stade planula, la larve a la forme d'un disque aplati de 2 à 3 mm, elle sort de la cavité gastrique pour aller se fixer sur un fond favorable. Ces larves planula sont libérées généralement à la fin de l'été (en juin et juillet, parfois en août). Les larves sont portées par le courant, mais elle peuvent aussi se déplacer, localement. Après 1 à 4 semaines d'errance, elles se fixent en un lieu favorable pour créer une nouvelle colonie. Après fixation d'un l'individu, des tentacules poussent et une invagination se produit pour former la cavité gastrique. A partir du polype initial ou oozoïde* se développent des stolons creux sur lesquels bourgeonnent les autres polypes ou blastozoïdes*.
La croissance est de 1 à 5 centimètres par an (par bourgeonnement) pour atteindre l'âge adulte vers 15 ans, soit pour les plus grandes une taille proche de 1 mètre. La longévité est mal connue mais probablement supérieure à 25 ans.

Vie associée

Un bon nombre d'épibiontes* ou d'opportunistes profitent des rameaux de cette grande gorgone pour s'accrocher et bénéficier de meilleures possibilités de capter, sur ce poste bien situé, les particules nutritives.
Il s'agit fréquemment d'autres octocoralliaires comme les alcyons encroûtants (Alcyonium coralloides), d'hexacoralliaires comme l'anémone buissonnante Savalia savaglia, d'éponges, de vers coloniaux (salmacines...), de bivalves (Pteria sp.), de bryozoaires, de crustacés (balanes)...

Divers biologie

La taille maximale est atteinte vers 10-15 ans.

Cette espèce, comme c'est le cas pour d'autres gorgones, peut être la proie de nudibranches comme Marionia blainvillea.

On a trouvé dans cette espèce du diméthyltryptamine (N,N-diméthyltryptamine) ou DMT. C'est une substance psychotrope puissante !

Informations complémentaires

Comme toutes les gorgones, cette espèce est fragile : évitez les coups de palmes !
Les filets de pêche et les mouillages des bateaux peuvent également hélas occasionner des dégâts irréversibles.

Sur certains sites, certaines populations de cette espèce ont été victimes d'une mortalité importante. Beaucoup de mystères subsistent en ce qui concerne les causes et les processus (voir [DUMAS 2001]).

Origine des noms

Origine du nom scientifique

Paramuricea :
para- : , du grec [para] = proche de. Ici il faut comprendre : proche du genre "Muricea".
muricea, en latin, veut dire chose épineuse ou écailleuse, et ce nom a été donné à certains cnidaires étudiés d'après des échantillons conservés dans l'alcool, le sommet des polypes rentrés présentant alors un aspect épineux !
Deux hypothèses ont été émises : nom donné à cause de la ressemblance de son tégument avec celui d'une mûre, ou parce qu'elle vit près des récifs (les "pointes"). La première semble plus probable.

clavata, directement repris du latin, et qui veut dire "muni de clous", à cause de l'aspect des rameaux.

Classification

Numéro d'entrée WoRMS : 125387

Termes scientifiques Termes en français Descriptif
Embranchement Cnidaria Cnidaires

Organismes aquatiques (marins pour la plupart) libres ou fixés, carnivores, principalement à symétrie radiaire, caractérisés par des cellules urticantes : les cnidocytes. Deux morphologies principales : le polype et la méduse. La larve est une planula.

Classe Anthozoa Anthozoaires Cnidaires exclusivement marins, solitaires ou coloniaux, uniquement sous la forme polype (jamais de phase méduse dans le cycle de vie).
Sous-classe Octocorallia / Alcyonaria Octocoralliaires / Alcyonaires Anthozoaires coloniaux, parfois solitaires. Polypes de petite taille à symétrie radiaire d’ordre 8 (8 tentacules portant 2 rangées de pinnules). Exosquelette calcaire ou spicules calcaires ou fibres organiques.
Ordre Alcyonacea Alcyonacés Octocoralliaires dont les polypes sont enfouis dans un coenosarc épais plus ou moins calcifié. Polypes allongés qui restent accolés les uns aux autres en bouquets. Spicules fusiformes et épineux. Ce groupe renferme les alcyons (ou coraux mous), les gorgones, et les coraux vrais.
Sous-ordre Holaxonia Holaxonides / Gorgonides Axe squelettique organique souple plus ou moins calcifié portant les polypes. Colonies en forme de fouet, d'éventail, de candélabre. Ce sont les gorgones.
Famille Plexauridae Plexauridés
Genre Paramuricea
Espèce clavata

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