Crevette moyenne à grande
Couleur gris-vert de jour
Bout de la queue rouge de nuit
Rostre long dépassant l'écaille antennaire
Bouquet posidonia, bouquet posidonie, bouquet méditerranéen, bouquet d'herbier, crevette épée
Posidonia prawn (GB), Gamberetto della posidonia (I), Camarón Posidonia (E)
Palemon trisetaceus Risso, 1816
Palemon crenulatus Risso, 1827
Leander xiphias Ortmann, 1890
Méditerranée et Atlantique proche
Zones DORIS : ● Europe (côtes françaises), ○ [Méditerranée française]Le bouquet des posidonies se rencontre dans toute la Méditerranée (Espagne, France, Italie, Grèce, Turquie, Israël, Egypte, Tunisie...). Elle est également présente en Atlantique, à proximité relative de l'ouverture de la Méditerranée (Maroc, Canaries, Madère).
Cette crevette habite principalement les prairies de posidonies, mais peut s'en écarter la nuit. Elle peut aussi être présente dans les algues photophiles (cystoseires et Caulerpa prolifera en particulier), les herbiers de zostères, de cymodocées (Cymodocea nodosa) ; elle se rencontre rarement dans le coralligène et dans les étangs littoraux.
D'après la littérature, sa distribution bathymétrique va de la côte à une dizaine de mètres de profondeur ; une photo “DORIS" la montre à 17 m de profondeur à Antibes.
Le bouquet des posidonies est une crevette de taille moyenne, jusqu'à 7 cm environ pour les femelles (les mâles sont nettement plus petits).
De jour, la couleur générale est gris-vert. Les antennes peuvent présenter de discrets anneaux blancs. La nuit, les yeux brillent et la couleur générale est plus transparente, avec l'apparition d'une teinte rouge à l'avant de l'animal (sur les écailles antennaires*), et surtout à l'arrière : le bout de la queue est franchement rouge.
Le rostre est long et légèrement retroussé.
Les deux premières paires de pattes sont munies de pinces ; la seconde est nettement plus grande que la première.
Si vous avez la possibilité d'observer d'assez près, ou en labo, une de ces crevettes :
Les chromatophores* (cellules pigmentaires) sont petits et à peine visibles ; ils ne forment ni motif ni lignes distinctes, contrairement à ce qu'on peut voir chez d'autres crevettes.
Le rostre dépasse légèrement l'extrémité des écailles antennaires* chez les grands individus (les écailles antennaires sont les deux palettes plates situées de part et d'autre du rostre et fixées à la base des antennes : voir photo).
Ce rostre est muni de 6 à 8 dents dorsales (dont une ou deux en arrière de l'orbite) et de plusieurs dents ventrales.
Plusieurs autres espèces de Palaemon existent en Europe. En Méditerranée, on peut trouver à peu près dans les mêmes secteurs deux espèces présentant des lignes de chromatophores sombres sur la carapace et sur l'abdomen à savoir la grande crevette rose Palaemon serratus (qui préfère les milieux moins éclairés : grottes et zones rocheuses), et Palaemon elegans (qui préfère les eaux très proches de la surface et les lagunes).
La crevette rose Palaemon adspersus a une coloration similaire (sans lignes sombres distinctes) mais ne se rencontre pas en pleine mer ; elle se cantonne plutôt dans des eaux légèrement dessalées des estuaires et des lagunes.
Attention : dans le livre de George et George (1980), la photo de Palaemon xiphias est identifiée comme Hippolyte inermis, autre habituée des posidonies, bien que cette dernière espèce soit notablement différente.
Ce prédateur sédentaire a tendance à consommer des invertébrés benthiques divers trouvés sur les posidonies, sur les algues photophiles et sur le sable : petits crustacés (amphipodes, isopodes, mysidacés, copépodes, ostracodes), vers (polychètes), mollusques, ophiures, algues... L'alimentation varie aussi en fonction de la taille et du sexe de cette crevette.
On peut trouver des femelles ovigères* de juin à septembre. Les œufs font 0,6 à 0,7 mm de diamètre.
La fécondité est très variable : de 300 à 3 000 œufs par ponte selon la taille de la femelle.
Une saison de reproduction comporte plusieurs pontes.
La longévité est de un à deux ans.
Comme les autres bouquets, cette espèce est occasionnellement parasitée par l'isopode épicaride Bopyrus squillarum Latreille, 1802. A certaines époques et à certains endroits (par exemple au Racou, près de Perpignan), il peut arriver que les taux d'infestation soient très élevés (prévalence de 20 à 25%) ; cependant, ce chiffre ne dépasse pas habituellement 1 à 2%.
Le bouquet des posidonies est surtout actif la nuit. Pendant la journée, la crevette se tient sur les feuilles de posidonies, la tête souvent en bas. En Grèce, le capelan Trisopterus minutus est connu comme prédateur de Palaemon xiphias.
Le bouquet des posidonies est une espèce comestible pouvant éventuellement être vendue fraîche sur les marchés locaux. Comme de nombreuses autres crevettes similaires, l'animal qui est sombre sur le vivant devient rose-rouge après la cuisson. Cette espèce est également utilisée comme appât pour la pêche. Elle est parfois présentée en aquariologie marine.
Bouquet est un nom couramment donné aux grosses crevettes roses. Ce nom vient de l'ancien français bouquet (XIIe siècle) qui signifiait petit bouc. Ce nom aurait été donné soit à cause des bonds de l'animal (cf. cabri, ou chèvre qui a donné un autre nom vernaculaire des crevettes à savoir "chevrettes"), soit à cause de ses "barbes" (ou les moustaches) qui sont en fait les antennes de la crevette, particulièrement développées chez cette espèce.
Des posidonies, à cause de l'habitat principal de l'espèce.
Palaemon : du grec [palaemon], proprement "le lutteur", surnom de Mélicerte, fils d'Athamas et de Leucothoe, après qu'il fut changé en dieu marin. C'était le protecteur des ports, sous son nom latin de Portunus.
xiphias, directement issu du grec, signifie épée (c'est aussi le nom de genre de l'espadon Xiphias gladius), c'est peut-être une allusion au rostre assez long de cette espèce.
Numéro d'entrée WoRMS : 107617
Termes scientifiques | Termes en français | Descriptif | |
---|---|---|---|
Embranchement | Arthropoda | Arthropodes | Animaux invertébrés au corps segmenté, articulé, pourvu d’appendices articulés, et couvert d’une cuticule rigide constituant leur exosquelette. |
Sous-embranchement | Crustacea | Crustacés | Arthropodes à exosquelette chitineux, souvent imprégné de carbonate de calcium, ayant deux paires d'antennes. |
Super classe | Multicrustacea | ||
Classe | Malacostraca | Malacostracés | 8 segments thoraciques, 6 segments abdominaux. Appendices présents sur le thorax et l’abdomen. |
Sous-classe | Eumalacostraca | Eumalacostracés | Présence d’une carapace recouvrant la tête et tout ou partie du thorax. |
Super ordre | Eucarida | Eucarides | Présence d'un rostre. |
Ordre | Decapoda | Décapodes | La plupart marins et benthiques. Yeux composés pédonculés. Les segments thoraciques sont fusionnés avec la tête pour former le céphalothorax. La première paire de péréiopodes est transformée en pinces. Cinq paires d'appendices locomoteurs (pinces comprises). |
Sous-ordre | Caridea | Caridés | Les Caridés sont caractérisés par des pléopodes natatoires. C'est à ce groupe qu'appartiennent une grande partie des espèces de crevettes. |
Famille | Palaemonidae | Palaémonidés | Pinces de la seconde paire de pattes beaucoup plus fortes que la première ; carpopodite de la seconde paire de pattes non divisé en articles ; rostre généralement moyennement long avec dents sur le bord dorsal et ventral. Espèces marines littorales ou d'eaux saumâtres. |
Genre | Palaemon | ||
Espèce | xiphias |
Aspect général
Le bouquet des posidonies a une couleur générale gris-vert, finement ponctué de minuscules taches sombres (les chromatophores*). Noter le rostre qui dépasse légèrement l’extrémité des écailles antennaires. Les seules pièces buccales visibles sont les troisièmes maxillipèdes quelque peu roses et poilus. Les deux premières paires de pattes se terminent par une pince. A l’intérieur du céphalothorax, en arrière des yeux, la masse sombre est l’estomac déjà relativement bien rempli, et le filet noir plus postérieur remontant dorsalement est le début de l’intestin. Le cordon sombre dans l’abdomen est la chaîne nerveuse ventrale. Le croissant bleu-ciel en avant des yeux est dû au reflet du flash sur un des flagelles antennulaires.
Antibes, 10 m, de nuit
09/11/2008
Livrée nocturne
Explorant des paquets d’algues photophiles à la recherche de nourriture, cette femelle en pleine vitellogenèse* présente une coloration nocturne ; le corps est transparent et l’extrémité de la queue (= uropodes* + telson*) est bien rouge. Noter les points blancs sur les antennes sombres.
Antibes (06), 5 m, de nuit
11/05/208
Femelle ovigère
La tête en bas, accrochée aux feuilles de posidonies, cette grosse femelle ovigère n’est pas sens dessus dessous : cette position est familière aux crustacés des posidonies.
Antibes (06), 8 m, de nuit
01/08/207
Femelle en pleine nuit
En pleine nuit, la coloration de cette femelle qui « fait le coralligène » diffère notablement de la livrée diurne : le corps est transparent et les extrémités (écailles antennaires à l’avant, bout de la queue à l’arrière) sont rouges. Les pigments oculaires sont en position nocturne et réfléchissent l’éclairage artificiel au moment de la prise de vue : les yeux sont « brillants ». Par transparence dans le céphalothorax on peut voir un organe vert brillant, l’ovaire, ici en milieu de vitellogenèse*. La prochaine ponte devrait intervenir dans une dizaine de jours. Les deux points blancs entre les deux yeux sont les deux statocystes, organes d’équilibration. Chez les crevettes, il est situé à la base des antennes.
La profondeur de 17 m où a été prise cette photo semble la donnée la plus profonde enregistrée.
Graillon, Cap d'Antibes (06), 17 m, de nuit
29/04/2008
Pyjama rouge
Cet individu, probablement un mâle, présente une coloration nocturne typique. Le céphalothorax transparent laisse entrevoir un organe rouge en surface, l’estomac et l’intestin, encore peu rempli en début de nuit. Les pinces que l’on voit sont celles de la seconde paire, plus développées que celles de la première paire. Le point blanc entre les deux yeux est un des deux statocystes*, organes d’équilibration. Chez les crevettes, il est situé à la base des antennes.
Lido, Villefranche-sur-mer (06), 8 m, de nuit
03/10/2008
Ecailles antennaires
La vue de dessus nous permet de voir très nettement la forme des écailles antennaires.
Sausset (13), 4 m, de nuit
30/09/2011
Dans les posidonies
Femelle ovigère de Palaemon xiphias, une espèce méditerranéenne assez strictement inféodée aux posidonies. Remarquer les yeux très réfléchissants et la couleur rougeâtre plus marquée à l’avant (écailles antennaires) et à l’arrière (bout de la queue).
La Love, Antibes (06), de nuit
13/08/2006
Cachée entre deux feuilles
Pendant la journée, le bouquet des posidonies se cache au sein d’un faisceau de feuilles de posidonies. Noter que le rostre dépasse l’extrémité des écailles antennaires et que ces dernières, tout comme le bout de la queue de l’animal, sont transparents ou vert-grisâtre ; la nuit, le pigment des chromatophores situés à ces endroits se disperse, et les tissus avoisinants deviennent rouges.
Photo prise en aquarium, sujet prélevé à 7 m.
Banyuls (66), de jour.
04/1982
Vert d'œuf
Un gros plan sur les flancs de cette femelle ovigère permet de voir les œufs logés dans la cavité incubatrice. Au moment de la ponte, les œufs sont reliés entre eux par des filaments qui les agglutinent en grappes ; ces dernières sont fixées sur les pléopodes* de la mère à l’aide de poils en crochet. Ici, les œufs sont vert clair et on ne distingue pas de jeune embryon à l’intérieur. Ils ont été pondus seulement quelques jours avant que le photographe numérise la scène. En arrière-plan à gauche, on devine l’ovaire (vert) qui a déjà repris sa vitellogenèse* pour assurer la ponte suivante. Mi-mai, ce n’est que le début de la saison de reproduction… Chez les crevettes, les femelles en saison de reproduction ont souvent des dépôts de pigments blancs assez marqués sur les flancs ; c’est bien le cas ici.
Antibes (06), 4 m, de nuit
11/05/2005
Fin d'incubation
En fin d’incubation, les œufs ne sont plus verts. L’embryon a consommé l’essentiel de ses réserves vitellines (non pas son « jaune d’œuf », mais ici son « vert-d’œuf !), et sa propre couleur beige transparaît car les membranes qui l’entourent sont transparentes. Au moment de l’éclosion, à la tombée de la nuit, la femelle prend souvent la position visible sur cette photo : l’abdomen relevé, les pléopodes battent doucement pour faciliter l’émergence des larves. Noter que les grappes d’œufs ne sont plus entièrement contenues dans la cavité incubatrice abdominale, mais qu’elles débordent largement sur les flancs de la mère.
Dolias, Cap d’Antibes, 8 m, de nuit
10/06/2008
Le bopyre de la crevette
Cette crevette est victime d’un autre crustacé, le bopyre (Bopyrus squillarum Latreille, 1802), un ectoparasite qui se fixe sur les branchies. La couleur jaune clair correspond à celle des œufs de la femelle du parasite. Le mâle est très petit et ne peut se voir par transparence qu'en vue très rapprochée. Ce mâle est souvent sombre et possède la forme typique d'un isopode libre type "cloporte".
Vallée des Gorgones, Nice (06), 5 m, de nuit
30/06/2008
En train de grignoter ?
Cette crevette de face pourrait être en position de prise alimentaire. Ses pièces buccales sont juste au-dessus de la marge d’une algue verte moyennement coriace, l’udotée (Flabellia petiolata). Est-elle en train de grignoter ? C’est possible. Noter au milieu les troisièmes maxillipèdes quelque peu roses et poilus, et les premières pattes locomotrices en avant-plan. La première paire porte des pinces minuscules, peu visibles ; par contre, les pinces portées par la seconde paire se voient mieux. Les antennes sont déployées en l’air en position de vigilance.
Antibes (06), 10 m, de nuit
09/1/2008
Rédacteur principal : Pierre NOËL
Vérificateur : Grégory DALLAVALLE
Responsable régional : Anne PROUZET
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La page de Palaemon xiphias dans l'Inventaire National du Patrimoine Naturel : INPN