Holothurie de taille moyenne (taille maximum 25 cm)
Couleur beige rosé à grisâtre avec 3 à 7 taches noirâtres à rouille distribuées en 2 séries inégalement alignées le long des radius
Zone anale marquée par un anneau noir
Papilles de la face dorsale portées par de grosses verrucosités distribuées sans ordre
Bague noire sur le pédoncule des podia ventraux
Organe de Cuvier présent et très fonctionnel
Ashen sea cucumber, ashy pink sea cucumber (GB), Labuyo (Philippines).
Holothuria curiosa Ludwig, 1875
Holothuria (Holothuria) fuscocinerea Jaeger, 1833
L'appellation Holothuria (Stauropora) fuscocinerea Jaeger, 1833, indiquant le sous-genre, est une appellation également valide.
Mer Rouge et zones tropicales et subtropicales des océans Indien et Pacifique
Zones DORIS : ● Indo-Pacifique, ○ [Mer Rouge]Outre la mer Rouge, la distribution de l'espèce comprend l'océan Indien, depuis les côtes orientales de l'Afrique (de Djibouti à l'Afrique du Sud) à l'Australie en passant par Madagascar, les Mascareignes, le golfe Persique, les Maldives, l'Inde et toute la côte du sud-est asiatique. L'espèce est également présente dans l'océan Pacifique, du sud du Japon et de la Chine aux côtes occidentales du Mexique jusqu'à l'Equateur, en passant par l'est australien, l'Indonésie, les Philippines et toutes les îles du Pacifique tropical.
Cette espèce se rencontre dans les zones sableuses et sablo-détritiques* des récifs et des pentes externes ainsi que dans les herbiers. Elle vit en général entre 0 et 10 m, mais on peut la trouver jusqu'à 40 m.
Holothuria fuscocinerea est une holothurie de taille moyenne (taille maximum 25 cm). Son corps est cylindrique et s'affine aux deux extrémités. Le trivium* (face ventrale) est légèrement aplati. Le tégument* est fin, il est plissé quand l'animal est légèrement contracté mais paraît grumeleux quand il est décontracté.
La couleur du bivium* (face dorsale) est beige rosé à grisâtre avec 3 à 7 taches noirâtres à rouille distribuées en deux séries inégalement alignées le long des radius*. Ces taches sont souvent coalescentes transversalement quand elles sont en regard l'une de l'autre, au point que certains individus peuvent paraître porter des selles noirâtres sur le bivium. La couleur de fond d'autres individus peut être un ocre uniforme plus ou moins foncé.
La zone anale est marquée par un anneau noir piqueté de petites taches blanches.
Le trivium est uniformément beige clair à grisâtre.
Les papilles du bivium sont portées par de grosses verrucosités distribuées sans ordre ; elles sont translucides avec un anneau noir. Les podia du trivium sont relativement nombreux, gros et courts avec une bague noire sur le pédoncule située à peu près à mi-distance de sa base et du disque terminal, qui est blanc. Ils sont distribués sur toute la surface du trivium mais ils sont plus nombreux sur les radius*.
La bouche, ventrale, porte 20 gros tentacules peltés* entourés de papilles. L'anus est dorsal.
L'organe de Cuvier* est présent et très fonctionnel : cette espèce expulse des tubes de Cuvier bleutés peu nombreux mais de gros diamètre, souvent dès le premier contact.
Le patron de couleur claire avec deux séries de taches foncées ornant les radius du bivium est relativement répandu chez les holothuries et peut produire des confusions. Pour citer quelques espèces manifestant cette caractéristique dans la zone de distribution d’Holothuria fuscocinerea (sachant qu'aucune ne présente un anneau noir autour de l'anus ni des podia ventraux bagués de noir) :
Holothuria pervicax
: c'est avec cette espèce que les confusions sont les plus fréquentes.
La couleur de fond est beige à jaunâtre parfois cendré. Les taches
foncées présentes sur le bivium constituent des paires transversales
souvent coalescentes plutôt que des lignes parallèles longitudinales.
Les papilles sont portées par des verrucosités de grande taille de
couleur rosâtre avec de multiples petites taches blanches. L'organe de
Cuvier est présent et très fonctionnel, les tubes de Cuvier ressemblent à
ceux d'Holothuria fuscocinerea. L'espèce est répandue dans tout le domaine indo-pacifique et on la trouve aussi en mer Rouge.
Holothuria arenicola : cette espèce est de couleur généralement uniforme beige à ocre plus ou moins foncé, ses deux séries de taches radiaires sont marron rouge, son tégument est rugueux et elle porte des podia (vs des papilles) sur le bivium. Cette espèce ne possède pas d'organe de Cuvier. On la trouve en mer Rouge et dans les zones tropicales et subtropicales des océans Indien, Pacifique et Atlantique.
Holothuria insignis : c'est une holothurie de petite taille (entre 2 et 8 cm). Son bivium est noirâtre à gris-brun et le trivium est grisâtre. Bivium et trivium portent de petites verrucosités blanchâtres, et le corps est couvert par une multitude de points clairs correspondant à des amas de spicules*. Cette espèce peu connue n'est signalée que de Hong-Kong, du nord-est de l'Australie et du sud-est de l'Iran.
Holothuria pardalis : la couleur de fond est en général un beige jaunâtre à rosé piqueté d'une multitude de minuscules points blancs et d'un grand nombre de petites taches brun foncé à forme et répartition aléatoires. Cette couleur de fond présente des zones diffuses marron clair et d'autres blanches, dont les emplacements sont variables. Deux séries longitudinales comprenant généralement de 5 à 10 paires de taches brun foncé suivent les radius du bivium. Le trivium est blanc jaunâtre à jaune. Cette espèce ne possède pas d'organe de Cuvier. Sa distribution est globalement identique à celle d'Holothuria fuscocinerea.
Holothuria verrucosa : la couleur de fond est marron clair à beige rosâtre avec des zones plus claires que les autres. De larges taches brun foncé forment deux séries parallèles sur les radius du bivium. Ces taches peuvent être coalescentes longitudinalement et transversalement. Il existe des individus à couleur dominante blanc jaunâtre. Ce qui distingue le plus facilement cette espèce d'H. fuscocinerea est la présence de hautes papilles coniques sur le bivium. Cette espèce ne possède pas d'organe de Cuvier. On rencontre H. verrucosa en mer Rouge, dans l'océan Indien et dans les zones tropicales et subtropicales du Pacifique.
Holothuria lineata : cette espèce peut présenter deux séries de taches brunes parallèles le long du bivium, mais la couleur de fond est blanc sale à jaunissant moucheté d'une multitude de points blancs et de nombreuses petites taches noires éparses. Les papilles sont coniques, petites et la base de certaines d'entre elles est jaune, notamment auprès des taches brunes. Cette espèce discrète n'est signalée que par des spécimens prélevés en mer Rouge, au Mozambique, à l'île Maurice, en Australie, dans les îles Cocos (ex-Keeling) et à Hawaï.
Holothuria fuscocinerea est limnivore*, ce qui signifie qu'elle ingère le sédiment et en retient les nutriments d'origine végétale et animale, les déchets et les bactéries qui y sont contenus. Elle participe ainsi à l'équilibre des écosystèmes* côtiers tant par élimination de débris organiques que par remaniement du substrat*.
Elle ne sort de son abri pour se nourrir que la nuit.
Le mode de reproduction de cette espèce ne diffère pas de celui des autres holothuries de l'ordre des Aspidochirotes : en situation de reproduction la majorité des holothuries, mâles et femelles plus ou moins regroupés, se dresse le plus haut possible pour diffuser les gamètes* émis dans la colonne d'eau. La fécondation* a lieu au hasard des rencontres de ces gamètes dans le courant. Les larves* sont pélagiques*. Les stades larvaires (blastula*, puis auricularia*, puis doliolaria*) se déroulent en pleine eau. A la fin du dernier stade, le juvénile rejoint définitivement le substrat et évolue vers l'âge adulte.
La reproduction se déroule durant la saison chaude. Selon les saisons, la fécondité des femelles va de 500 000 à 9,9 millions d'œufs par individu, la moyenne étant d'un peu moins de 3 millions. Ce grand nombre d'œufs et leur petite taille autorise à supposer que les larves se nourrissent de plancton (vs les espèces à faible nombre d'œufs de plus grande taille, dont les larves sont lécitotrophiques*, ce qui signifie qu'elles se nourrissent des réserves abondantes présentes dans l'œuf). C'est sans doute pourquoi la reproduction a lieu pendant la saison chaude et humide, qui correspond aux périodes d'accroissement de la masse de phytoplancton* qui sert de nourriture aux larves.
Comme la majorité des espèces d'holothuries les tissus de H. fuscocinerea contiennent des molécules extrêmement toxiques groupées sous le nom de saponines, l'ensemble étant communément appelé holothurine. Cette substance provoque une hémolyse (destruction des globules rouges) pathologique dont l'effet sur les poissons et d'autres organismes marins est mortel.
On peut voir cette espèce, comme beaucoup d'autres, couverte de lambeaux de peau morte, comme si l'holothurie muait : un lien a été suggéré entre ces périodes de désquamation et l'excrétion de résidus de l'activité métabolique par les arbres respiratoires. Ces résidus seraient portés vers le tégument et ainsi périodiquement éliminés. Il peut également s'agir de déparasitage externe, la fonction précise de ce comportement n'est pas clairement élucidée. On peut voir parfois des poissons picorer cette « peau » dont se débarrasse l'holothurie.
L'armature du corps (les spicules*) est composée de tables et de boutons peu développés pour ce qui concerne le tégument* dorsal et ventral, les tentacules portent des bâtonnets incurvés, les podia ventraux des bâtonnets perforés, des plaques, des boutons et des tables, les papilles dorsales de longs bâtonnets et des tables de grand diamètre.
L'espèce est commune dans certaines parties de sa distribution, mais elle n'est pas pêchée préférentiellement, du fait de sa faible valeur commerciale. Toutefois, la raréfaction des espèces à forte valeur commerciale du fait de leur surpêche risque de reporter à court ou moyen terme le risque de déclin des populations sur les espèces de moindre valeur.
Elle est pêchée notamment en Chine, en Malaisie, aux Philippines et au Mexique.
La Liste Rouge de l'UICN classe cette espèce sous la rubrique « LC » (Least Concerned, soit : préoccupation mineure), ce qui signifie selon les texte de UICN qu'il s'agit d'une espèce pour laquelle le risque de disparition est faible (et qui est donc faiblement concernée par la nécessité de mesures de protection).
Holothurie cendre brune : traduction libre du nom scientifique : holothuria fuscocinerea.
Holothuria : le terme grec [holothourion] est le nom donné par Aristote à un animal que les ambiguïtés de description rendent impossible à déterminer. Le mot latinisé « holothurium » a désigné d'abord des cnidaires, puis a été appliqué aux échinodermes.
Une tentative de décomposition du mot grec [holothourion] en : [holo-] = entier ; et [thouro-] = impétueux, produit l'interprétation fréquente : « tout à fait impudique ». La forme phallique de ces animaux motive cette interprétation.
fuscocinerea : cette épithète spécifique est composée de deux mots latins : l'adjectif [fuscus] qui signifie sombre, noir, et le nom [cinis, cineris], qui désigne la cendre. L'adjectif [cinereus] ([cinerea] au féminin), désigne un raisin de couleur cendrée. Le mot fuscocinerea évoque donc la couleur cendrée de cette espèce, en insistant sur son aspect noirâtre.
NB : le nom scientifique complet de cette espèce est Holothuria (Stauropora) fuscocinerea. Le sous-genre Stauropora a été créé par Rowe en 1969. L'auteur compose explicitement ce nom par l'association des mots grecs [staurus], croix, et [pora], trou, et le justifie par l'existence d'un trou en forme de croix situé au centre de certains spicules caractéristiques de l'espèce-type, Holothuria discrepans. Pour ce qui concerne la morphologie externe, ce sous-genre est caractérisé par un corps d'assez petite taille (de 10 à 12 cm), dorsalement arqué et à trivium plat, des podia ventraux alignés sur trois rangs, des papilles dorsales courtes à distribution irrégulière et un collier de papilles entourant parfois la base des tentacules. Le tégument est souple et peu épais, mesurant usuellement entre 1 et 2 mm.
Termes scientifiques | Termes en français | Descriptif | |
---|---|---|---|
Embranchement | Echinodermata | Echinodermes | Symétrie radiale d'ordre cinq (chez les adultes). Squelette de plaques calcaires bien développé sous le derme. Présence d'un système aquifère auquel appartiennent les podia souvent visibles extérieurement. |
Classe | Holothuroidea | Holothuroïdes | Echinodermes vermiformes, ouverture buccale à l’extrémité antérieure du corps et entourée d’une couronne de tentacules rétractiles, anus postérieur, une seule gonade : holothuries, concombres de mer. Endosquelette réduit à de microscopiques ossicules ou plaques, inclus dans la paroi du corps. |
Super ordre | Aspidochirotacea | Aspidochirotacés | |
Ordre | Holothuriida | Holothurides | (Anciennement: Aspidochirotida / Aspidochirotes) Symétrie bilatérale, avec une sole de reptation et des podia buccaux en forme d’écusson. Présence de poumons, pas de muscle rétracteur de la bouche. |
Famille | Holothuriidae | Holothuriidés | Podia munis d’ampoules. La gonade est placée à gauche du mésentère dorsal. |
Genre | Holothuria | ||
Espèce | fuscocinerea |
Une holothurie nocturne
Holothuria fuscocinerea reste cachée le jour et n’est active que la nuit pour se nourrir.
La couleur de fond de l’espèce est généralement beige rosé à grisâtre avec 3 à 7 taches noirâtres distribuées en deux séries inégalement alignées le long des radius.
Lagon de l'Ermitage, côte ouest de La Réunion, 2 m, en PMT, de nuit
27/10/2010
Taches de couleur rouille
Les taches formant deux lignes le long des radius du bivium sont généralement brun foncé parfois violacé, mais elles peuvent être de couleur rouille. On peut observer chez cet individu une bande jaunâtre diffuse qui relie les paires de taches longitudinalement.
Lagon de l'Ermitage, côte ouest de La Réunion, 1,5 m, en PMT, de nuit
28/12/2015
Individu ocre
Les taches sur le bivium deviennent violacées et diffuses chez cet individu dont la couleur de fond est uniformément ocre.
L’anneau noir de la zone anale est recouvert de sable, mais les podia ventraux bagués de noir, que l’on distingue à la jonction entre le corps et le sédiment, ne trompent pas sur l’espèce.
On peut observer aussi qu’il « manque » une paire de taches en partie centrale du dos : il y a une grande variabilité dans le nombre et la répartition de ces taches.
Lagon de l'Ermitage, côte ouest de La Réunion, 1,5 m, en PMT, de nuit
22/12/2015
Podia ventraux
Les podia du trivium sont relativement nombreux, gros et courts avec une bague noire sur le pédoncule située à peu près à mi-distance de sa base et du disque terminal. La partie du pédoncule située sous cette bague est blanche, l’autre translucide à blanchâtre, et le disque terminal est de la même couleur.
Lagon de l'Ermitage, côte ouest de La Réunion, 1,5 m, en PMT, de nuit
22/12/2015
Anus
La zone anale est marquée par un anneau noir piqueté de petites taches blanches.
Sur cette photo prise de jour on distingue une auréole rougeâtre, qui peut virer au pourpre, autour de cet anneau.
Lagon de l'Ermitage, côte ouest de La Réunion, 1,5 m, en PMT
12/05/2010
Tubes de Cuvier
Les tubes de Cuvier sont bleutés et peu nombreux mais de gros diamètre.
Ils sont souvent émis dès le premier contact, notamment quand l’animal est stressé par le soulèvement du bloc sous lequel il se cache en journée.
Lagon de l'Ermitage, côte ouest de La Réunion, 1,5 m, en PMT
12/05/2010
Desquamation
Comme beaucoup d’holothuries, Holothuria fuscocinerea se sépare régulièrement de la couche superficielle de son tégument par desquamation.
Il peut s’agir du rejet de résidus métaboliques transportés par l’organisme vers le tégument, et/ou de déparasitage périodique, mais la fonction précise de ce comportement n’est pas clairement élucidée.
Lagon de l'Ermitage, côte ouest de La Réunion, 1,5 m, en PMT, de nuit
22/12/2015
Dans les herbiers
On peut rencontrer Holothuria fuscocinerea dans les herbiers, mais ses biotopes favoris restent les zones sableuses et sablo-détritiques des récifs et des pentes externes.
Cet individu est « sur le dos » (notez les podia bagués de noir) après le passage d’une vague plus grosse que les autres : l'adhérence de ses podia n'est pas très efficace sur un sédiment strictement sableux !
Lagon de l'Ermitage, côte ouest de La Réunion, 1,5 m, en PMT, de nuit
22/12/2016
Rédacteur principal : Philippe BOURJON
Vérificateur : Alain-Pierre SITTLER
Responsable régional : Alain-Pierre SITTLER
Benitez-Villalobos F., Ávila-Poveda O.H., Gutiérrez-Méndez I.S., 2013, Reproductive biology of Holothuria fuscocinerea (Echinodermata: Holothuroidea) from Oaxaca, Mexico, Sexuality and Early Development in Aquatic Organisms, 1, 13-14.