Algue brune membraneuse de 10 à 50 cm de longueur et environ 1 cm de largeur
Ramifications dichotomes
Extrémités du thalle bifides et pointues
Une nervure centrale
Présence souvent de longues boursouflures latérales caractéristiques le long de la nervure
Réceptacles pointus, bifurqués et divariqués
Estuaires
Fucus cornu, goémon cornu
Horned wrack (GB), Wachsbleicher tang (D)
Chondrus ceranoides (Linnaeus) Stackhouse 1797
Fucus harveyanus Decaisne ex J.Agardh, 1868
Fucus divergens J.Agardh, 1872
Fucus ceranoides f. divergens (J.Agardh) Kjellman, 1880
Fucus ceranoides f. harveyanus (Decaisne ex J.Agardh) Kjellman 1880
Virsodes ceranoides (Linnaeus) Kuntze, 1891
Du Spitzberg au Portugal
Zones DORIS : ● Europe (côtes françaises), ○ [Atlantique Nord-Est, Manche et mer du Nord françaises]L’espèce se rencontre sur les côtes européennes depuis le Portugal jusqu’au Spitzberg (Norvège).
Elle est absente de la mer Baltique.
La répartition de cette espèce sur nos côtes n’est pas continue.
Le varech cornu est inféodé aux milieux estuariens présentant un apport d’eau douce. Il se rencontre fixé sur un substrat* dur. C'est l’espèce de Fucus la plus tolérante à la dessalure (elle peut résister plusieurs semaines dans une eau ne contenant que quelques milligrammes de sel par litre).
Fucus ceranoides est une espèce caractéristique de plusieurs habitats européens :
Fucus ceranoides est une algue brune membraneuse de 10 à 50 cm de longueur et environ 1 cm de largeur présentant des ramifications dichotomiques*. Elle est fixée au substrat* par un disque.
Sa texture membraneuse est caractéristique.
L’extrémité du thalle* est généralement bifide et pointue. Les rameaux portent une nervure centrale et sont démunis de flotteurs.
L’algue présente souvent de longues boursouflures latérales caractéristiques le long de la nervure.
Les thalles rencontrés en limite de répartition amont dans les estuaires ont généralement une forme plus grêle, avec des axes principaux plus étroits.
Fucus ceranoides peut ressembler aux autres espèces de Fucus rencontrées sur l’estran.
Il se distingue de Fucus vesiculosus par l’absence de vésicules arrondies et de Fucus spiralis par le fait que ses rameaux ne sont pas torsadés. Il arrive, dans certaines conditions de stress particulières, que Fucus spiralis présente des boursouflures latérales assez proches de celles de Fucus ceranoides.
Les extrémités du thalle des deux espèces sont cependant nettement différentes, celles de Fucus ceranoides étant généralement bifides et pointues (ce qui lui vaut son nom vernaculaire britannique, que l’on peut traduire par « goémon cornu »), alors que celles de Fucus spiralis sont larges et arrondies.
L’hybridation bien connue entre espèces de Fucus peut conduire à la présence d’individus ayant des caractéristiques mixtes, ce qui peut parfois compliquer la détermination.
Comme toutes les algues, le fucus cornu est un organisme autotrophe* photosynthétique*. L'algue tire son énergie de la lumière solaire, et grâce à l'absorption d'eau, de dioxyde de carbone et des sels minéraux dissous dans l’eau, elle fabrique les matières organiques nécessaires à son développement.
Fucus ceranoides est une algue généralement dioïque*. La littérature évoque des cas de thalles hermaphrodites*, mais ceux-ci sont très probablement des plants hybrides (avec Fucus spiralis ou Fucus vesiculosus).
Les organes sexuels, mâles ou femelles, se différencient dans des conceptacles* groupés sur des réceptacles terminaux, pointus, bifurqués et divariqués, plus étroits que les rameaux et groupés en éventails unilatéraux.
La libération des gamètes* a habituellement lieu deux fois par lunaison (aux environs de la pleine lune et de la nouvelle lune), aux alentours des pleines mers de jour. L’émission des gamètes est activée par d’autres facteurs que la seule lunaison, notamment la turbidité de l’eau et la salinité.
La fécondation se déroule en eau à forte salinité et l’émission des gamètes précède cet événement de quelques heures au plus. Il est intéressant de constater que cette algue s’est particulièrement adaptée à son biotope*. En effet, le blocage de la polyspermie* (létale pour les œufs concernés) chez les fucales est conditionnée à la présence d’ions sodium (Na+). Une fécondation dans une eau pas assez salée conduirait donc à un taux de polyspermie, et donc d’échecs de la reproduction élevés. La période de la marée dans laquelle se déroule l’émission des gamètes chez Fucus ceranoides permet de contourner cette difficulté. Le taux de fécondation est particulièrement élevé (plus de 95 % des œufs émis sont fécondés). Les zygotes* très peu mobiles se fixent donc à proximité immédiate de leurs parents.
L’habitat préférentiel de Fucus ceranoides est particulièrement contraignant. Le cortège d’espèces associées est donc relativement limité. On trouvera notamment des algues du genre Ulva (notamment Ulva lactuca et Ulva compressa). On pourra également rencontrer le crabe vert Carcinus maenas.
La phylogénie* des espèces appartenant au genre Fucus est particulièrement complexe, les hybridations entre espèces étant fréquentes. Ainsi, des thalles de Fucus ceranoides comportant à la fois des conceptacles* unisexués et bisexués ont été rencontrés, ces observations étant expliquées par une hybridation avec Fucus spiralis (qui est une espèce hermaphrodite*).
Des études ont montré que la concentration en composés phénoliques et en pigments est plus importante dans les thalles exposés à de fortes variations de salinité.
Une étude récente, portant sur différentes populations de Fucus ceranoides de Galice, a mis en évidence l’existence de 3 populations nettement différenciées sur le plan génétique, conséquence d’une absence de brassage génétique entre populations (João Neiva et al..,2012). Ceci serait lié à un effet « barrière de densité de populations». Les preferenda de cette espèce sont stricts et toutes les zones favorables sont déjà occupées, ce qui rend très difficile l’implantation d’un zygote* provenant d’une autre zone géographique.
Comme chez toutes les Fucales, la faible dispersion des zygotes vient encore accentuer ce phénomène.
Une étude plus récente a mis en évidence le même phénomène dans les eaux bretonnes, avec 2 populations principales génétiquement bien différenciées et quelques sous-populations locales (Katy R. Nicastro et al., 2020). Cette étude conclut par ailleurs que les facteurs hydrodynamiques actuels (courants marins) contriburaient à la différenciation de ces populations.
Des études génétiques conduites à partir d’ADN ribosomique (acide désoxyribonucléique) de différentes espèces de Fucus ont montré que la divergence entre les différentes espèces est très récente (quelques millions d’années), Fucus serratus étant la première espèce à se différencier. Cette divergence récente rend particulièrement délicate la détermination des espèces à partir d’une analyse génétique, d’où l’intérêt des études portant sur des caractères morphologiques.
Le terme varech désigne les algues constituant la laisse de mer et est souvent utilisé pour désigner les Fucus, compte tenu de leur contribution importante aux laisses de mer.
Le nom français proposé est une traduction du nom vernaculaire utilisé par les anglophones pour cette algue, mais également la traduction du nom d’espèce donné par Carl von Linné.
Le genre Fucus a été désigné par Linné à partir du nom latin [fucus] = plante marine, qui vient du grec ancien [fykos] = algue (a donné la racine phyco-).
Linné a défini le nom d'espèce ceranoides du latin [cera] = cornes et du suffixe [-oides] = à l'aspect de, pour rappeler le fait que le thalle porte des pointes en forme de cornes.
Numéro d'entrée WoRMS : 145542
Termes scientifiques | Termes en français | Descriptif | |
---|---|---|---|
Embranchement | Ochrophyta | Ochrophytes | ou Hétérokontes, ou Straménopiles: présence d'un stade unicellulaire à 2 flagelles, un lisse et un à poils tubulaires. |
Classe | Phaeophyceae | Phéophycées | Algues brunes. |
Sous-classe | Fucophycidae | ||
Ordre | Fucales | Fucales | |
Famille | Fucaceae | Fucacées | |
Genre | Fucus | ||
Espèce | ceranoides |
Un tapis
Présence de boursouflures caractéristiques le
long du thalle. L'espèce ne se rencontre que dans les estuaires et de
préférence près des apports d'eau douce.
Estuaire du Douron - Plestin-les-grèves
(22)
25/02/2022
Vue détaillée de l'extrémité d'un rameau
Chez Fucus ceranoides, la
terminaison des rameaux est généralement bifide.
Estran, région de Roscoff (29)
24/04/2013
Rédacteur principal : Christophe QUINTIN
Vérificateur : Marc VERLAQUE
Responsable régional : Yves MÜLLER
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La page de Fucus ceranoides dans l'Inventaire National du Patrimoine Naturel : INPN
La page sur Fucus ceranoides sur le site de référence de DORIS pour les algues : AlgaeBase