Mérou pouvant atteindre une grande taille, généralement 1,5 m, maximum 2,5 m
Corps robuste et allongé, robe brune barrée de larges bandes foncées à l'arrière
Points noirs visibles surtout sur la tête, le dos et les nageoires
Yeux bien à l'avant de la tête semblant de petite taille chez l'adulte
Caudale imposante et arrondie
Mérou goliath, mérou géant, têtard
Serranus itajara Lichtenstein, 1822
Promicrops itajara (Lichtenstein, 1822)
Serranus mentzelli Valenciennes, 1828
Serranus galeus Müller & Troschel, 1848
Serranus guasa Poey, 1860
Promicrops esonue Ehrenbaum, 1915
Promicrops ditobo Roux & Collignon, 1954
Atlantique tropical et subtropical
Zones DORIS : ● Atlantique Nord-Ouest, ● Caraïbes, ○ [Guyane française]En Atlantique Est, le mérou E. itajara est présent le long des côtes d'Afrique de l'ouest, depuis le Sénégal jusqu'à l'Angola. En Atlantique Ouest, il est mentionné depuis le nord de la Floride jusqu'au sud du Brésil, incluant les côtes françaises de Martinique, Guadeloupe et Guyane. Dans cette dernière région, malgré des évaluations difficiles à mener, il est bien présent aux îles du Salut et dans les mangroves littorales.
Initialement signalé dans le Pacifique Est, il a été établi en 2009 qu'il ne s'agit pas là-bas d'une sous-population de E. itajara, mais de l'espèce proche E. quinquefasciatus.
Comme la plupart des mérous et quel que soit son âge, le mérou géant de l'Atlantique recherche des habitats comportant des failles ou des crevasses afin de se cacher lorsqu’il n’est pas en chasse. Capable d’un choix large d’habitat à l’état juvénile (mangroves à structure complexe, rivières saumâtres à fonds rocheux chaotiques ou substrats durs d’îles marines), il devient exclusivement marin à l'âge adulte (lorsqu’il atteint la taille de 1,1 m environ). Il recherche alors des fonds rocheux à fort relief jusqu'à des profondeurs pouvant atteindre 90 m environ. Il apprécie également les structures portuaires et pétrolières ainsi que les épaves.
Le corps d'Epinephelus itaraja est robuste et allongé. La taille adulte est de 1,5 m et peut atteindre un maximum de 2,5 m, faisant de ce mérou l'un des plus grands à l'échelle mondiale.
La robe globalement brune présente des variations jaunâtres, verdâtres ou encore grisâtres. De larges bandes foncées barrent l'arrière du corps, plus ou moins visibles en fonction des individus, qui laissent la place à des taches moins organisées géométriquement vers la tête. Des individus à la robe assez uniforme peuvent également être observés. Dans tous les cas, de petits points noirs sont bien visibles sur l'ensemble du corps avec une densité plus élevée sur la tête et le haut du corps. Ces ponctuations se retrouvent en forte densité sur les nageoires.
La bouche large et entourée de lèvres bien développées comporte de
nombreuses canines courtes recourbées vers l'arrière, permettant de ne
pas laisser échapper ses proies. Relativement à
la taille du poisson, les yeux situés bien en avant de la tête paraissent de petite taille. Les narines sont visibles à l'avant des yeux.
La nageoire dorsale ne comporte pas de séparation, les pectorales sont arrondies et larges, de même que l'imposante nageoire caudale.
Les rayons mous de la nageoire dorsale, assez élevés, s'étendent jusqu'à
l'avant du pédoncule* caudal. La nageoire anale, également élevée,
présente une relative symétrie avec la partie molle de la dorsale.
Du fait de son allure massive et de ses dimensions imposantes, le mérou géant de l'Atlantique est assez facile à identifier au sein de son aire de répartition. Il est remplacé par l'espèce très similaire E. quinquefasciatus côté Pacifique et la loche géante Epinephelus lanceolatus dans une large partie de l'Indo-Pacifique.
Les juvéniles, souvent bien contrastés et bicolores brun et crème, peuvent faire penser à Epinephelus striatus.
Epinephelus itaraja est un prédateur à l'alimentation diversifiée, généralement lent, mais capable d'accélérations fulgurantes pour capturer ses proies. L'analyse de 9 contenus stomacaux réalisée en Floride a permis d'établir qu'il se nourrit principalement de crustacés (80% de langoustes, crabes et crevettes) et de poissons (dont certaines raies et diodons). Il peut également consommer des poulpes et de jeunes tortues marines.
A l'est du golfe du Mexique, la reproduction a lieu de juin à décembre avec un pic observé entre juillet et septembre. La maturité des mâles arrive entre 4 et 6 ans pour une taille voisine de 1,1 m, tandis qu'elle est observée pour des femelles de 6 à 7 ans mesurant environ 1,3 m. La fécondité d'une femelle de 1,4 m dépasse 50 millions d'ovocytes*.
On soupçonne ce poisson d'être hermaphrodite* protogyne* (d'abord femelle puis mâle) comme nombre de ses congénères. Toutefois, cette hypothèse n'a pas été formellement démontrée à ce jour. De surcroît, le fait que les mâles soient matures avant les femelles est de nature à s'interroger sur sa validité.
Comme d'autres espèces de mérous, E.itajara se rassemble ponctuellement en groupe pouvant compter plusieurs dizaines d'individus pour frayer autour de certains récifs naturels (voire artificiels, notamment des épaves), le rendant très vulnérable à certaines formes de pêche durant cette période. Des observations font état de comportements de cour se produisant lors des périodes de pleine lune d'août : le mâle caresse les fentes branchiales de la femelle et émet des séries de "booms" sourds, peut-être liés à la défense territoriale.
Une étude (Mann 2009) évoque une activité sonore liée à la reproduction se produisant préférentiellement entre minuit et 3h du matin, en dehors des phases de pleine lune (contredisant l'ensemble des autres articles trouvés), permettant peut-être de minimiser la prédation par les prédateurs planctonivores*. Malgré l'absence d'observation directe, des couples de poissons pourraient se reproduire au sein d'un système harémique* en remontant brièvement dans la colonne d'eau. La ponte et la fécondation se produisent en pleine eau. Les larves* pélagiques* dérivent ensuite avant d'atteindre les milieux côtiers et notamment les mangroves pour se développer avant de partir vivre au large
Au Brésil, la reproduction semble se produire préférentiellement durant les phases de pleine lune des mois de décembre à février.
E. itajara constitue l'hôte de nombreux parasites tels trématodes, nématodes, isopodes, copépodes (Sadovy 1999).
Il sert également de refuge mobile à des espèces de poissons souhaitant se protéger des prédateurs ou contribuant à son nettoyage et à son déparasitage (Carangidés, autres petits pélagiques, gobies).
La longévité maximale relevée atteignant 37 ans, il est possible que ce poisson puisse vivre une cinquantaine d'années en l'absence de prédation humaine.
Il est fait état de comportements potentiellement agressifs vis-à-vis des plongeurs.
De fortes concentrations de mercure ont été trouvées dans les tissus d'individus pêchés en Floride, pouvant nuire à la santé et à la capacité reproductive de ce poisson.
Dans sa publication de la liste rouge des espèces menacées de 2018, l'UICN* considère que le mérou géant de l'Atlantique est une espèce vulnérable (statut VU). Il est même considéré comme en danger (statut EN) localement dans le golfe du Mexique (il était en danger critique d'extinction soit "CRitically endangered" lors de la précédente évaluation en 2011).
Dans les zones où il était auparavant abondant, il a été très largement victime de la surpêche durant la seconde partie du vingtième siècle. Il cumule des caractéristiques le rendant particulièrement sensible à la prédation humaine, telles sa longévité, l'âge assez élevé auquel il arrive à maturité, le fait qu'il se regroupe périodiquement en des lieux précis pour se reproduire et son caractère peu craintif vis-à-vis des pêcheurs sous-marins. Le déclin des mangroves où se développent les jeunes pose également problème.
Des mesures de protection intégrale ont été mises en œuvre dans certains pays, comme dans le sud-est des Etats-Unis en 1990 et au Brésil en 2002, permettant de freiner le déclin de l'espèce. Ce n’est malheureusement pas le cas en France, et notamment en Guyane française où semble pourtant exister une belle population, notamment aux îles du Salut.
Malgré les interdictions de capture appliquées localement, il demeure difficile d'évaluer la reconstitution des stocks, et ce d'autant plus qu'une grande quantité de ces poissons continuent d'être victimes du braconnage et que leurs migrations les rendent toujours vulnérables lorsqu'ils se déplacent en dehors des zones où il sont protégés.
Mérou : le mot vient de l’espagnol [mero], d’origine obscure, qui signifie « vieille de mer, mérou ». On trouve le mot espagnol francisé en 1752 dans la quatrième édition du Traité de l'orthographe franc̜oise, en forme de dictionnaire (Tome 2, p. 382) de P. Restaut, avec la définition suivante : « Méro : sorte de poisson ».
géant de l'Atlantique : il s'agit d'une des plus grandes espèces de mérous au plan mondial avec la loche géante ; à la différence de cette dernière qui vit dans la zone indo-pacifique, E. itajara vit exclusivement en Atlantique depuis qu'il a été démontré qu'E. quinquefasciatus constitue une espèce à part entière, et non une sous-population de E. itajara vivant dans le Pacifique Est.
Epinephelus : du grec [epi] = sur et [nephelus] = nuage, "couvert de nuages". Ce mot décrit une livrée portant des taches contrastées, irrégulières, disposées de manière désordonnée sur tout le corps.
itajara : cette qualification signifiant littéralement "roi" en malais est probablement issue d'une méprise concernant la distribution de ce gros mérou qui n'est présent qu'en Atlantique. On peut supposer qu'il a été confondu à l'époque avec la loche géante E. lanceolatus bien représentée dans l'Indo-Pacifique.
Numéro d'entrée WoRMS : 159353
Termes scientifiques | Termes en français | Descriptif | |
---|---|---|---|
Embranchement | Chordata | Chordés | Animaux à l’organisation complexe définie par 3 caractères originaux : tube nerveux dorsal, chorde dorsale, et tube digestif ventral. Il existe 3 grands groupes de Chordés : les Tuniciers, les Céphalocordés et les Vertébrés. |
Sous-embranchement | Vertebrata | Vertébrés | Chordés possédant une colonne vertébrale et un crâne qui contient la partie antérieure du système nerveux. |
Super classe | Osteichthyes | Ostéichthyens | Vertébrés à squelette osseux. |
Classe | Actinopteri | ||
Sous-classe | Neopterygii Teleostei | Néoptérygiens Téléostéens | Poissons à arêtes osseuses, présence d’un opercule, écailles minces et imbriquées. |
Super ordre | Acanthopterygii | Acanthoptérygiens | Rayons épineux aux nageoires, écailles cycloïdes ou cténoïdes, présence d'une vessie gazeuse et pelviennes thoraciques ou jugulaires, sans être systématiquement présents, sont des caractères que l'on ne rencontre que chez les Acanthoptérygiens. |
Ordre | Perciformes | Perciformes | Nageoires pelviennes très rapprochées des nageoires pectorales. |
Famille | Serranidae | Serranidés | 1 à 3 épines sur l’arrière de l’opercule. |
Genre | Epinephelus | ||
Espèce | itaraja |
Juvénile de face
Ce jeune individu présente la tête large et la robe tachetée caractéristique de l'espèce. Vu sa petite taille (environ 25 cm), les taches paraissent de grande taille en regard de celles observées sur l'adulte.
Crique patate, Guyane, 1 m
13/09/2018
Juvénile de profil
Ce juvénile guyanais (environ 25 cm) a trouvé refuge sous une roche à très faible profondeur.
Crique patate, Guyane, 1 m
13/09/2018
Adulte de belle taille
Sur cette photo monochrome d'un spécimen mesurant plus de 2 m, on observe l'imposante bouche et les petits yeux situés bien en avant de la tête. De petites carangues ont trouvé refuge autour de cet impressionnant poisson.
Costa-Rica
05/09/2002
Rédacteur principal : Gaël MODRAK
Vérificateur : Thomas MENUT
Responsable régional : Gaël MODRAK
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La page d'Epinephelus itaraja sur le site de référence de DORIS pour les poissons : FishBase
La page d'Epinephelus itaraja dans l'Inventaire National du Patrimoine Naturel : INPN