Poisson-faucon des Mascareignes

Cirrhitops mascarenensis | Randall & Schultz, 2008

N° 2921

Sud-ouest de l’océan Indien

Clé d'identification

Taille maximale documentée : environ 9 cm
Cinq larges selles brun foncé à brun rouge descendant sur les flancs
Grosse tache noire oblongue en partie antérieure du pédoncule caudal
Toupet de 4 à 9 cirres derrière la pointe des rayons de la dorsale épineuse
Six rayons inférieurs des pectorales plus longs et plus robustes que les autres rayons

Noms

Autres noms communs français

Attention à ne pas confondre avec une autre espèce, Cirrhitichthys guichenoti (Sauvage, 1880), qui porte, elle, le nom commun d'épervier des Mascareignes.

Noms communs internationaux

Mascarene redbarred hawkfish (GB)

Distribution géographique

Sud-ouest de l’océan Indien

Zones DORIS : ● Indo-Pacifique

L’espèce n’est signalée que de La Réunion, de Maurice et de Madagascar. Ses descripteurs soupçonnent sa présence à Rodrigues, l’île la plus orientale de l’archipel des Mascareignes*.

Biotope

Cirrhitops mascarenensis se rencontre en milieu corallien sain ou sur fond sablo-détritique ou rocheux dans les lagons et sur les pentes externes.
Sa distribution verticale n’est pas exhaustivement documentée mais l’espèce peut être observée dès le premier mètre et le spécimen le plus profond ayant servi à sa description a été collecté à 62 m.

Description

Description sommaire : petit poisson-faucon à dos rouge et flancs blancs, portant cinq larges selles brunes en partie dorsale, suivies par une grosse tache noire au début du pédoncule* caudal. La tête est pointue, avec un museau marqué par des bandes alternées rouges à orange et blanches. Les joues sont ornées de motifs vermiculés orange. Une tache kaki couvre l’angle de l’opercule*. Tous les rayons durs de la dorsale portent, derrière leur pointe, une touffe de cirres blancs à extrémité rouge. Les six rayons inférieurs des pectorales sont plus longs et plus forts que les rayons supérieurs. La caudale est tronquée.

Description détaillée :
Petit poisson-faucon dont la taille maximale documentée est de 7,5 cm en longueur standard (longueur sans la queue), soit environ 9 cm en longueur totale. Le corps est fuselé à dos élevé ; il est comprimé latéralement. Sa hauteur (calculée à l’aplomb du quatrième rayon dur de la dorsale) entre environ 3 fois dans sa longueur standard.

La couleur de fond est généralement rouge dans le tiers supérieur du corps et blanche dans ses deux-tiers inférieurs, mais elle peut être entièrement blanche chez certains individus. Le dos et les flancs sont marqués par cinq larges selles* brun foncé à brun rouge dont la longueur augmente progressivement d’avant en arrière. La première selle se situe derrière la nuque et s’étend en largeur jusqu’à la base du quatrième rayon dur de la nageoire dorsale, et en longueur jusqu’à l’angle de l’opercule. Les deux suivantes, situées sous le milieu et la fin de la dorsale épineuse, atteignent l’axe médian du corps. Les deux dernières, sous la dorsale molle, descendent jusqu’à quelques millimètres du profil ventral du corps. Deux selles rouges plus discrètes leur succèdent sur le pédoncule caudal : la première est presque entièrement couverte par une large tache noire oblongue située au début du pédoncule ; la seconde forme un quasi-anneau dans sa partie postérieure.
Les deux-tiers inférieurs des flancs portent en outre de grosses taches brunes à rougeâtres, de taille variable, disposées en séries obliques dans le prolongement des espaces laissés entre elles par les selles brunes.

La tête est pointue et relativement longue (elle entre 2,7 fois dans la longueur standard). La bouche est terminale et oblique, les lèvres sont charnues. L’espace interorbitaire est concave. Les yeux sont globuleux, indépendants l’un de l’autre et d’assez grande taille (ils entrent environ 4 fois dans la longueur de la tête). La pupille est piriforme*, l’iris* est doré autour de la pupille et rouge, avec ou sans marques blanches, au-delà. Les narines antérieures forment un petit tube surmonté postérieurement par une touffe d’environ 8 cirres* longs et fins ; les narines postérieures sont ovales et présentent un petit rebord. Le préopercule* est arrondi, ses bords sont dentelés. L’angle de l’opercule s’achève en pointe triangulaire.

Les couleurs de la tête diffèrent de celles du corps. Sa partie dorsale, de la nuque au bout du museau, est brun rouge avec de nombreuses petites taches blanches qui couvrent aussi la partie supérieure de l’œil. La couleur de fond de la partie restante est blanche. Deux à trois bandes obliques rouges relient l’œil à la lèvre supérieure. Celle-ci alterne des bandes verticales rouges et blanches, ces motifs devenant ocres à jaunes sur la lèvre inférieure. La joue et la gorge portent des motifs vermiculés orange à jaunâtres qui s’étendent sur la base de la pelvienne et le début de la zone abdominale. Une grosse tache kaki couvre l’angle de l’opercule.

La partie épineuse de la nageoire dorsale dessine un arc de cercle et est fortement échancrée. Tous les rayons durs arborent un toupet de 4 à 9 cirres derrière leur pointe. Sa partie molle a un profil régulier, ses premiers rayons sont nettement plus hauts que les derniers rayons durs. Les nageoires pectorales sont très particulières : les 8 rayons supérieurs sont branchus et pourvus de membranes, et les 6 rayons inférieurs, plus longs et plus robustes, ne sont ni branchus ni reliés par des membranes. Les pelviennes sont assez longues : leur premier rayon mou peut atteindre ou dépasser l’anus quand elles sont plaquées contre le corps. L’anale est courte, elle commence à l’aplomb du 2e ou 3e rayon mou de la dorsale. La caudale est tronquée à légèrement échancrée.

Les membranes de la dorsale épineuse, translucides à blanchâtres, sont traversées par des bandes rouges horizontales ou obliques. Les rayons durs portent des taches rouges et blanches alternées, les cirres présents derrière leur pointe sont blancs à pointe rouge. La base de la dorsale molle est blanchâtre avec des séries obliques de taches rondes rouges. Le reste de la nageoire est translucide et orné des mêmes taches rouges, parfois jaunissantes en partie supérieure.
Les pectorales sont translucides. Leur base et les 6 longs rayons inférieurs portent de petites taches orange à jaunâtres.
Les pelviennes ont des rayons blancs et des membranes translucides.
La base de l’anale est blanchâtre, le reste est translucide ; ces deux parties portent quelques taches rouges généralement peu marquées.
La nageoire caudale est translucide à rayons plus ou moins rosés.

Espèces ressemblantes

Certaines espèces de poissons-faucons susceptibles de se trouver dans la distribution très restreinte de C. mascarenensis peuvent éventuellement prêter à confusion (Amblycirrhitus bimacula, Cirrhitichthys aprinus, Cirrhitichthys falco et Cirrhitichthys oxycephalus), mais aucune de ces espèces ne présente une large tache noire sur le pédoncule caudal.

Les deux espèces les plus ressemblantes sont Cirrhitops fasciatus, présent à Hawaï, et Itycirrhitus wilhelmi, présent à l’île de Pâques et aux îles Pitcairn.

Alimentation

Les poissons-faucons, ou poissons-éperviers, sont tous carnivores. Ils se nourrissent pour l’essentiel de petits poissons et de crustacés. Cirrhitops fasciatus, l’espèce avec laquelle C. mascarenensis a longtemps été confondue, se nourrit en outre de siponcles (vers fouisseurs) et de zooplancton*.

Reproduction - Multiplication

La biologie de la reproduction n’a pas été documentée pour cette espèce à la date de publication de cette fiche (juin 2022), à notre connaissance. Toutefois, celle de quelques autres espèces de la famille des Cirrhitidés (notamment Cirrhitichthys falco) a été étudiée ou observée, et les points communs relevés par ces études pourraient être partagés par Cirrhitops mascarenensis.

Ces points communs sont les suivants : les espèces sont hermaphrodites* protogynes* (ce qui signifie que tous les individus naissent femelles et que certains d’entre eux deviendront des mâles). Les changements de sexe sont réversibles (un mâle peut redevenir femelle), en fonction des circonstances. Ces espèces sont territoriales, avec une organisation sociale de type harémique*. Chaque territoire regroupe un mâle et plusieurs femelles (généralement entre 2 et 7), dont chacune a son propre territoire à l’intérieur de celui du mâle. Une femelle dominante peut devenir mâle pour remplacer un mâle disparu, ou pour dissocier un groupe de femelles du harem quand il est trop important pour être contrôlé par le mâle en place. Les femelles attaquent les juvéniles qui tentent de recruter* au sein d’un harem constitué, et les femelles étrangères en quête d’un groupe ; mâles et femelles font de même vis-à-vis des mâles adultes errants. Certaines espèces (par exemple Oxycirrhites typus et Neocirrhites armatus) pratiquent la monogamie facultative quand leur micro-habitat l’impose (exiguïté ou au contraire trop grande dispersion).

Les accouplements ont lieu peu avant le coucher du soleil et se prolongent peu après. Après une cour dont les modalités varient en fonction des espèces, le couple fait une ascension rapide dans la colonne d’eau, à l’apex* de laquelle les gamètes* sont émis. Les larves* sont pélagiques*. A titre indicatif, la reproduction en captivité de Cirrhitichthys falco (dont la taille maximale de 7 cm est proche de celle de C. mascarenensis) a permis d’obtenir les informations suivantes : les larves sont longilignes, elles mesurent environ 2 mm à l’éclosion, plus de 3 mm trois jours après (au moment où elles commencent à se nourrir), et 5,2 mm 18 jours plus tard, les rayons de la dorsale et de l’anale étant formés.

La durée de vie larvaire semble longue chez les Cirrhitidés : elle est de 62 à 73 jours chez Oxycirrhites typus, et d’environ 51 jours chez Neocirrhites armatus. Les larves des espèces dont la distribution est vaste possèdent une vessie* natatoire qui disparaît à l’installation*. Il est probable que ce soit aussi le cas chez les autres espèces, mais la documentation manque.

Divers biologie

A priori, les adultes des poissons-faucons ne possèdent pas de vessie* natatoire, ce qui ne leur permet pas de nager dans la colonne d’eau. En revanche, ils sont bien arrimés à leur poste d’affût sur une branche de corail grâce aux 6 robustes rayons inférieurs de leurs pectorales, qui leur permettent aussi de se déplacer en « marchant » dans un massif.
Une particularité étudiée chez Cirrhitus pinnulatus, et probablement partagée par les autres poissons-faucons, facilite leur nage d’un massif à l’autre, ou le retour au poste d’affût après la capture d’une proie sur le substrat : la flottabilité de la tête est neutre ou positive. En effet, l’étude de [Phleger 1975] montre que la flottabilité négative de C. pinnulatus est partiellement compensée par la présence dans son crâne d’une quantité d’huile supérieure à celle qu’on trouve dans d’autres familles de poissons. Cette forte présence lipidique explique par exemple pourquoi un spécimen congelé jeté à l’eau restera sur le fond en position verticale, seule la caudale touchant le substrat.

Les deux mâchoires sont dotées d’une rangée extérieure de fortes dents caniniformes légèrement incurvées vers l’arrière dont la taille diminue en progressant vers la partie postérieure. Les dents les plus longues se trouvent en partie antérieure sur la mâchoire supérieure, et au milieu de la mâchoire pour l’inférieure. La mâchoire supérieure est caractérisée en outre par la présence d’une paire de dents plus petites au niveau de la symphyse (l’emplacement de la soudure des deux parties de la mâchoire). De nombreuses dents villiformes*, dont le nombre diminue en progressant vers l’arrière, longent le bord intérieur des dents extérieures dans les deux mâchoires. On trouve aussi des dents palatines*, et des dents villiformes incurvées formant un large V sur le palais.

La nageoire dorsale comprend 10 rayons durs et 14 rayons mous, l’anale 3 rayons durs et 6 rayons mous. Les nageoires pectorales ont en général 14 rayons (rarement 15), les 6 rayons inférieurs étant non branchus et plus forts que les autres. Les pelviennes ont 1 rayon dur et 5 rayons mous. La ligne* latérale comprend de 49 à 52 écailles.

La taille maximale de l’espèce a été déterminée d’après un échantillon assez faible (14 spécimens) : il se pourrait donc qu’elle soit plus importante. A titre indicatif, celle de C. fasciatus, l’espèce-sœur du Pacifique, est de 12,7 cm.

Informations complémentaires

Jusqu’à sa description par Randall et Schultz en 2008, l’espèce était considérée comme une population isolée du Cirrhitops fasciatus présent uniquement dans l’archipel d’Hawaï (sa localisation au Japon est une erreur, selon Randall et Schultz), malgré les plus de 16000 km qui les séparent. Cela était dû à l'absence de différences morphologiques ou méristiques (données numériques, par exemple le nombre de vertèbres) entre les deux espèces. Randall lui-même cautionnait cette confusion dans sa révision de la famille des Cirrhitidés de 1963, tout en observant plus tard de légères différences de livrées entre les deux populations. Ce sont des analyses moléculaires (ADN) qui ont permis de distinguer sans équivoque les deux espèces et de faire remonter à environ 5,5 millions d’années leur isolement reproductif, c’est-à-dire leur divergence.

Le plus grand poisson-épervier du monde, Cirrhitus rivulatus, peut mesurer jusqu’à 60 cm et peser 4,2 kg. On le trouve dans l’est du Pacifique, entre le golfe de Californie et le nord de la Colombie, ainsi qu’aux îles Galápagos.

Statuts de conservation et réglementations diverses

Le statut de l’espèce n’est pas évalué par l’UICN* à ce jour.

Origine des noms

Origine du nom français

Poisson-faucon : les poissons-faucons (ou poissons-éperviers) sont ainsi appelés du fait de leur technique de chasse à l’affût. Perchés sur un massif de corail, en appui sur les rayons inférieurs de leurs pectorales, ils surveillent les alentours et fondent sur leur proie à la manière des rapaces auxquels ils sont comparés.

des Mascareignes : en référence à la présence de l’espèce à La Réunion et à Maurice (voir origine du nom scientifique).

En l’absence de noms communs français ou étrangers, « poisson-faucon des Mascareignes » est une proposition DORIS.

Origine du nom scientifique

Cirrhitops : nom composé du mot grec [kirrhos], donnant le latin [cirrus], qui signifie « frange, boucle de cheveux ou de crins, aigrette », et du mot grec [ops], dérivé de [opsis], qui désigne la vue et par extension ce qui se voit, l’apparence. Le radical [cirrhit] renvoie ici au genre Cirrhitus, créé par Lacépède en 1803. Le nom signifie donc « ressemblant au genre Cirrhitus ».

Le genre Cirrhitops est décrit en 1951 par l'ichtyologiste sud-africain James Leonard Brierley Smith (1897-1968) dans The fishes of the family Cirrhitidae of the western Indian Ocean (Annals and Magazine of Natural History, Serie 12, vol. 4, n° 43, p. 637). Le descripteur ne donne aucune explication au sujet du nom choisi. En revanche, Lacépède insiste dans sa description du genre Cirrhitus comme dans celle de l’espèce-type* (Cirrhitus maculatus, actuellement Cirrhitus pinnulatus) sur la présence de « barbillons réunis par une membrane, et placés auprès de la pectorale, de manière à représenter une nageoire semblable à cette dernière ». Il ajoute dans la description de l’espèce-type que cette particularité (qu’il prenait pour une nageoire pectorale supplémentaire) donne à l’animal « un organe singulier » déterminant sa place dans la classification (Histoire Naturelle des Poissons, Tome V, pages XIX et 3-4). C’est donc ce groupe de rayons différents des autres dans la partie inférieure des pectorales, qui évoque une frange de cheveux quand les rayons sont plaqués sur le corps, qui motive le nom du genre Cirrhitus et par extension les noms de genre qui y font référence.
A noter que ni Macleay, le descripteur de la famille des Cirrhitidés en 1841, ni Lacépède dans sa description du genre Cirrhitus, ni Smith dans sa description de l’espèce-type du genre Cirrhitops, ne mentionnent la présence de cirres sur les narines et les rayons de la dorsale épineuse. Contrairement à une opinion répandue, ce ne sont donc pas ces caractéristiques qui expliquent le nom des genres dérivés du genre Cirrhitus.
L’espèce-type est Cirrhitops fasciatus. Le genre contient actuellement trois espèces acceptées.

mascarenensis : mot composé du nom anglais de l’archipel des Mascareignes* (« Mascarene islands ») et du suffixe latin [-ensis], qui signifie « originaire de ».
L’espèce est décrite en 2008 par J.E. Randall et J.K. Schultz dans Cirrhitops mascarenensis, a new species of hawkfish from the Mascarene Islands, southwestern Indian Ocean pour la distinguer de l’espèce Cirrhitops fasciatus, avec laquelle elle était jusqu’alors confondue. C. fasciatus est signalée de l’archipel d’Hawaï, et C. mascarenensis se rencontre à Madagascar et dans les deux plus grandes îles de l’archipel des Mascareignes (La Réunion et Maurice), d’où le choix de l’épithète spécifique.
La localité du type* est l’île Maurice.

Classification

Numéro d'entrée WoRMS : 474988

Termes scientifiques Termes en français Descriptif
Embranchement Chordata Chordés Animaux à l’organisation complexe définie par 3 caractères originaux : tube nerveux dorsal, chorde dorsale, et tube digestif ventral. Il existe 3 grands groupes de Chordés : les Tuniciers, les Céphalocordés et les Vertébrés.
Sous-embranchement Vertebrata Vertébrés Chordés possédant une colonne vertébrale et un crâne qui contient la partie antérieure du système nerveux.
Classe Actinopterygii Actinoptérygiens Ossification du crâne ou du squelette tout entier. Poissons épineux ou à nageoires rayonnées.
Sous-classe Neopterygii Teleostei Néoptérygiens Téléostéens Poissons à arêtes osseuses, présence d’un opercule, écailles minces et imbriquées.
Ordre Centrarchiformes Centrarchiformes
Famille Cirrhitidae Cirrhitidés
Genre Cirrhitops
Espèce mascarenensis

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