Crabe présent en Atlantique Est (C. aestuarii en Méditerranée)
Carapace plus large que longue avec cinq dents antérolatérales
Couleur souvent verte (mais variable, surtout chez les jeunes)
Face ventrale claire
Entre les yeux, front avec trois « dents » arrondies et peu marquées
Dernière patte légèrement plus aplatie que les précédentes
Stylets copulateurs du mâle à extrémité courbe
Crabe enragé
Noms locaux : favouille, crabouillard, chancre, glazib (breton)
Green crab, common shore crab (GB), Granchio (I), Cangrejo verde, cambaro (E), Dwarslöper, Strandkrab (D), Strandkrabbe (N)
En Europe : Atlantique Est, extrême ouest de la Méditerranée. Espèce introduite et souvent invasive ailleurs.
Zones DORIS : ● Europe (côtes françaises), ○ [Atlantique Nord-Est, Manche et mer du Nord françaises], ● Atlantique Nord-OuestL'origine de cette espèce est l'Atlantique Est, de la Mauritanie à la Norvège. Elle ne pénètre qu'à peine en Méditerranée par le détroit de Gibraltar.
Elle a été introduite dans le Pacifique (Canada, Mexique, Amérique du Sud, Corée, Nouvelle Zélande et sud de l'Australie : Victoria fin du XIXe siècle) et dans l'Atlantique (Argentine : Patagonie 2003, et Afrique du Sud).
Dans certains cas, cette répartition artificielle est devenue invasive (Etats-Unis côtes du Pacifique : San Francisco 1989, et de l'Atlantique : Massachusetts 1817, cap de Bonne Espérance : 1983, et sud-ouest de l'Australie : 1971). Dans d'autres cas, l'invasion a avorté (Panama, Brésil, Djibouti, Madagascar, Pakistan, Sri Lanka et Thaïlande). Le crabe vert a été introduit accidentellement près du Cap Cod au XIXe siècle. Il a été observé la première fois en 1994 sur la côte ouest du Cap Breton. Il est présent à l'île du Prince Édouard. On prévoit l'expension de l'espèce dans le golfe du Saint Laurent. Il a été observé en 2008 par le groupe d'étude sur les élasmobranches et le requin du Groenland (GEERG) à proximité d'Halifax.
Au Japon, il est difficile de dire si l'espèce invasive est Carcinus aestuarii ou un hybride de C. aestuarii et C. maenas.
En Nouvelle-Zélande, l'introduction n'est pas devenue invasive car le gouvernement a rapidement pris des mesures de protection.
Ce crabe vit dans différents milieux : plage de sable, côtes rocheuses, mais aussi dans les eaux polluées, les estuaires et les schorres* (partie haute des vasières littorales) car il tolère des taux très faibles de salinité. De même, il peut vivre à des températures variant de 0 à 30 °C. Il ne s'éloigne que très peu des côtes, en suivant le niveau de la marée, même si on peut le retrouver à 60 m de profondeur. Cependant, pendant l'hiver, en Europe du nord, le crabe vert s'éloigne du rivage vers le large où il s'enfouit dans le sable.
Il vit souvent dans le sable, parmi les algues ou les trous de rochers et, surtout l'été, dans la zone des marées ou les mares supra-littorales*. Très résistant, il peut même vivre hors de l'eau une quinzaine de jours, à condition de rester dans un endroit frais et humide.
C'est le crabe le plus répandu en Europe du nord, où on le rencontre sur des littoraux variés. Sa carapace, plus large que longue, presque trapézoïdale, faiblement granuleuse, mesure six centimètres de longueur et huit de largeur. Elle est, en général, de couleur verte, très peu uniforme, souvent marquée de dessins plus foncés, mais parfois rouge, orangée ou grise, sans que le contexte environnemental y soit réellement pour quelque chose. Elle possède une découpe frontale en forme de dents arrondies entre les yeux et cinq dents acérées sur le bord antéro-latéral.
La face ventrale du crabe est plus claire que la face dorsale ; elle est jaune ou orange clair. Comme la plupart des crustacés, la croissance ne peut se faire qu'au cours d'une mue. Les mâles sont nettement plus gros que les femelles.
Toutes les pattes sont longues et effilées. Les premières à l'avant sont terminées par une pince. La dernière à l'arrière, la cinquième, est légèrement aplatie. Les articulations peuvent être orangées ou gris jaunâtre.
Ce crabe est souvent confondu avec Carcinus aestuarii, qui est également une espèce invasive, mais d'origine méditerranéenne. D'autre part, ses deux premiers pléopodes* sont droits et parallèles, alors qu'ils sont galbés vers l'extérieur chez Carcinus maenas.
Un autre crabe qui se rencontre également dans les algues littorales est assez voisin: Pirimela denticulata, plus petit, rougeâtre ou verdâtre avec sept dents pointues en avant de la carapace.
L'alimentation du crabe vert est variée : mollusques, annélides, crustacés, faune fixée, algues. Il ouvre aisément différents bivalves tels que les moules. Il est aussi détritivore* voire nécrophage* et dépèce avec adresse les animaux morts. Il peut même manger ses congénères… Il se nourrit principalement la nuit, où on le retrouve sur les plages avançant latéralement en cherchant sa nourriture, mais peut malgré tout être actif à tout moment.
La reproduction est sexuée. Le mâle coince une femelle sous lui en attendant qu'elle mue (« gardiennage pré-copulatoire »). En effet, la copulation n'a lieu qu'entre la mue de la femelle et le durcissement de sa carapace, généralement l'été. La fécondation est interne. Comme la plupart des crustacés, la femelle garde les œufs (jusqu'à 185 000) sous son abdomen, fixés aux pléopodes* (pattes nageuses). Elle les protège ainsi pendant toute la durée de l'incubation (quelques semaines, selon la température). En fin d'incubation, la femelle libère des larves* planctoniques* (larve appelée « zoé », 1 mm de long), avec une longue épine sur la tête, planctonophages * ou détritivores*. Après métamorphose, les minuscules crabes (quelques millimètres) tombent sur le fond et poursuivent leur développement jusqu'au stade adulte.
Ce crabe est très parasité : par exemple, les Zoothamnium carcini, des protozoaires, peuvent s'installer dans ses branchies.
Des crustacés peuvent également le parasiter : Choniosphaera maenalis qui se nourrit de son sang.
Un autre crustacé : le cirripède Sacculina carcini, la sacculine, proche des balanes, est fréquent sur le crabe vert : on le repère comme un sac orange sur l'abdomen du crabe qui infecte jusqu'à 50 % du corps. La larve de ce crustacé pénètre dans le crabe à un endroit ou le tégument est très fin, au niveau une articulation par exemple, et s'y développe en absorbant les nutriments et en altérant le fonctionnement des glandes endocrines comme la glande de mue ou la glande androgène. Cela empêche alors le crabe de muer et de se reproduire. Le crabe mâle est ainsi souvent plus ou moins féminisé : il change de sexe.
Des balanes s'installent parfois sur sa carapace surtout chez les gros individus (qui muent moins souvent que les jeunes).
Le crabe vert a de nombreux prédateurs : des poissons, d'autres crustacés, des oiseaux de rivage (mouettes, goélands). C'est un des mets préférés des seiches et des pieuvres ! Aussi, il est capable d'autotomie* (mutilation réflexe d'une partie du corps) en cas de capture par un prédateur, sans que cela lui soit fatal. La blessure se referme immédiatement et une nouvelle patte réapparaît à la mue suivante.
Il est possible de différencier les mâles des femelles : en regardant l'abdomen replié sous le thorax, on distingue les sexes. Celui du mâle est étroit et triangulaire, avec deux appendices ; celui de la femelle est large et arrondi, avec des pléopodes* où les œufs s'accrochent.
Une étude moléculaire a montré qu'il y a des différences génétiques entre des populations éloignées : cela tendrait à prouver que ce crabe ne peut pas traverser d'étendues profondes.
En cas de danger, ou si son milieu de vie s'assèche, il s'enfouit dans le sable.
Cette espèce est comestible, mais elle n'est pêchée qu'à petite échelle (1 200 tonnes par an, principalement en France et au Royaume-Uni).
Le crabe vert est très surveillé aux abords des bassins de conchyliculture car, pour se nourrir, il peut faire de gros dégâts sur les naissains de bivalves : il peut dévorer jusqu'à cinquante petites huîtres par jour.
D'origine européenne, cette espèce est invasive dans d'autres parties du globe. Aux Etats-Unis et au Canada, les exploitations de la côte Est produisant des myes, des pétoncles ou des clams, sont très vigilantes car il a déjà causé de grosses destructions dans les élevages. Dans le Massachusetts, une pêche massive a été déclenchée en 1995, favorisée par des subventions. Dans d'autres régions, l'invasion semble limitée par concurrence avec une espèce locale (crabe bleu, Callinectes sapidus, au nord-est de l'Amérique ; crabe des rochers, Cancer antennarius et Cancer productus, dans la baie de Cheasapeake). C'est donc une des rares espèces européennes à avoir colonisé l'Amérique, alors que l'inverse est fréquent.
Vert : évidemment du fait de sa couleur la plus fréquente.
Enragé : car les mâles ont un comportement très batailleur, les femelles étant plus paisibles. Son attitude préférée, pinces levées, est à l'origine de ce nom. Mais c'est aussi une attitude de défense : il se dresse verticalement, mettant en avant ses pinces.
Du latin [carcinus] = cancer, crabe.
Du latin [maenas] = ménade, bacchante (prêtresse du culte de Bacchus), venant du grec [maino] = rendre furieux.
Numéro d'entrée WoRMS : 107381
Termes scientifiques | Termes en français | Descriptif | |
---|---|---|---|
Embranchement | Arthropoda | Arthropodes | Animaux invertébrés au corps segmenté, articulé, pourvu d’appendices articulés, et couvert d’une cuticule rigide constituant leur exosquelette. |
Sous-embranchement | Crustacea | Crustacés | Arthropodes à exosquelette chitineux, souvent imprégné de carbonate de calcium, ayant deux paires d'antennes. |
Classe | Malacostraca | Malacostracés | 8 segments thoraciques, 6 segments abdominaux. Appendices présents sur le thorax et l’abdomen. |
Sous-classe | Eumalacostraca | Eumalacostracés | Présence d’une carapace recouvrant la tête et tout ou partie du thorax. |
Super ordre | Eucarida | Eucarides | Présence d'un rostre. |
Ordre | Decapoda | Décapodes | La plupart marins et benthiques. Yeux composés pédonculés. Les segments thoraciques sont fusionnés avec la tête pour former le céphalothorax. La première paire de péréiopodes est transformée en pinces. Cinq paires d'appendices locomoteurs (pinces comprises). |
Sous-ordre | Brachyura | Brachyoures | Les brachyoures ont un abdomen réduit replié sous le céphalothorax. Ils sont représentés par les crabes et les araignées de mer. |
Famille | Carcinidae | Carcinidés | Bord antéro-latéral de la carapace avec 5 dents souvent émoussées (dent orbitaire externe comprise) ; front avec 3 lobes ; carapace hexagonale à peine plus large que longue ; dernière paire de pattes peu aplatie et peu adaptée à la nage et à l'enfouissement. |
Genre | Carcinus | ||
Espèce | maenas |
Un crabe "vert" !
Le crabe vert présente toutes les teintes du vert. Ce couple arbore une coloration vert pomme du plus bel effet !
Oléron (17), 3 m
20/08/2007
Sur son lit de moules
Cet individu est sans doute un mâle. On peut compter les 5 dents du bord antérolatéral de la carapace.
Brittania Bridge, Menai Strait, nord du Pays de Galles (Royaume-Uni), 7 m
01/08/2002
Pré-copulation
Le mâle attend la mue de la femelle.
Arcachon (33), Mimbeau, 3 m
07/05/2007
Copulation
Le mâle coince une femelle sous lui en attendant qu’elle mue (« gardiennage pré-copulatoire »). En effet, la copulation n’a lieu qu’entre la mue de la femelle et le durcissement de sa carapace, généralement l’été. La fécondation est interne.
Ici, en Zélande.
Zeeland Brug (Pays-Bas), 17 m
11/06/2011
Etreinte en Zélande
Cette scène se déroule en Zélande (où le crabe vert semble très présent), sur un lit d'ophiures.
Plompetorenwe, Zélande (Pays-Bas), 6 m
10/07/2011
Juvénile
Les juvéniles ont des colorations nettement plus variées que les adultes. Ce juvénile est beaucoup plus clair que ses aînés. Comme les adultes, il peut s’ensabler facilement.
Trebeurden (22), estran
11/07/2007
Sans doute une femelle
La carapace du crabe vert est très dessinée.
Trebeurden (22), estran
11/07/2007
Femelle avec œufs
Les œufs sont incubés au niveau de l'abdomen, et se présentent sous forme d'un sac orangé et granuleux (contrairement à la sacculine qui est orangée mais d'aspect lisse). La couleur orangée indique que les œufs viennent d’être pondus ; au cours de l’incubation, les œufs deviennent plus sombres à cause du développement de l’embryon.
Plage de Landrellec (22)
10/04/2008
Femelle parasitée par une sacculine
Observez cette masse jaunâtre fixée sous l'abdomen du crabe vert : il s'agit d'une sacculine, un crustacé à l'aspect profondément modifié (modification secondaire dûe à son mode de vie parasitaire). Cette boule correspond à la gonade hypertrophiée du crustacé, le reste de son corps a envahi celui du crabe, provoquant sa castration.
Noter l’hyper-développement des soies abdominales.
Dunkerque (59), 3 m
1995
Oh le beau bleu !
Voici les commentaires de Pierre NOËL au sujet de ce cliché :
Il existe d'assez nombreux signalements de spécimens anormalement "bleus", chez les homards, les écrevisses ou les crabes.
En fait, la coloration des téguments chez les crustacés est due à un caroténoïde (l'astaxanthine) conjugué à une protéine (la crustacyanine) : on parle d'une caroténo-protéine. La couleur de ce complexe est extrèmement variable (bleu, vert, violet, noir, brun, rouge etc.). Il suffit d'une très petite modification de la protéine (modification de sa structure en 4-D) pour qu'une modification spectrale intervienne. C'est semble-t-il le cas ici, où la caroténo-protéine a viré du vert au bleu, à la suite d'une toute petite mutation (?).
C'est une histoire un peu glauque, j'en conviens...
Zélande, Pays-Bas, 3 m
06/09/2009
Spécimen avec gouvernail
Une moule s'est accrochée sur la carapace de ce crabe vert, qui semble ainsi muni d'un gouvernail arrière ! De la taille de la moule, on peut déduire que la dernière mue de ce crabe est certainement lointaine.
Arcachon (33), St Yves, 8 m, de nuit
22/01/2002
Vue ventrale d'un mâle, abdomen relevé
En soulevant l'abdomen du mâle, on peut observer les stylets copulateurs. Chez le crabe vert atlantique Carcinus maenas, ces stylets sont courbes dans leur moitié distale (alors que chez le crabe vert méditerranéen Carcinus aestuarii ils sont rectilignes).
Arcachon (33), Cap Ferret (pour le prélèvement)
14/11/2008
Mue (1)
Première phase de la mue d'un crabe vert.
Trégastel (22), estran
09/05/2009
Mue (2)
Suite et fin du phénomène: l'exuvie est abandonnée, et un crabe d'un vert tout neuf fait le beau sur l'estran.
Trégastel (22), estran
09/05/2009
Dans le Maine (États-Unis)
Sans doute une femelle reconnaissable à son ventre de couleur orangée.
Fort Mc Clary, Maine (États-Unis), 5 m
11/04/2009
Individu bleu vert
Cet individu de Carcinus maenas trouvé en pêche à pied a une teinte à mi-chemin entre la couleur verte classique et la bleue plus rare.
Sainte Anne du Portzic (29), estran
02/08/2015
Cavernicole
Voici les commentaires de Pierre NOEL au sujet de ce cliché :
"Les colorations vertes et orangées des crabes sont dues à des caroténoïdes. Ces pigments qui ne sont pas synthétisés par l'animal (mais simplement métabolisés) proviennent de la "végétation" ingérée (algues, diatomées, zostères...). En milieu obscur, les ressources alimentaires sont probablement essentiellement animales ou d'origine détritique et très pauvres en caroténoïdes, d'où une carence alimentaire et une faible coloration subséquente. Je suppose que si on place un de ces crabes en aquarium éclairé en le nourrissant avec des algues et des animaux qui se sont développés à la lumière, en 2 ou 3 mues (4 à 6 mois), le crabe aura une couleur normale. A contrario, si on élève un animal marin normal en le nourrissant d'aliments "blancs" (chair de merlan par exemple), il se dépigmente progressivement. C'est pourquoi on élève truites et saumons en mettant dans leurs croquettes favorites de la canthaxanthine ou de l'astaxanthine. Le principe est le même avec les pilules à bronzer à base de bêta-carotène qui sont utilisées avant les vacances d'été par l'Homo sapiens un peu pâlichon."
Boyau souterrain portuaire, Brest (29), surface
16/03/2013
Balanes et autres épibiontes
Les organismes en épibionte ont souvent une croissance rapide, surtout en été. Les gros crabes muent moins souvent que les petits. La mue peut être ralentie ou bloquée par divers parasites. Les sacculines sont visibles à l'extérieur, mais il y a aussi des parasites internes comme les entonisciens qui peuvent avoir le même effet. Les individus parasités se repèrent souvent par l'abondance des épibiontes.
île Tatihou (50), estran, de jour
14/09/2008
Cannibalisme
Un crabe vert dégustant un congénère plus petit.
Rade de Brest (29), 2 m
04/05/2009
Nécrophage
Il dépèce avec adresse les animaux morts. Ici une gonnelle (Pholis gunnellus).
Zeeland, Pays-Bas, 5 m
24/08/2022
Rédacteur principal : Sylvie DIDIERLAURENT
Vérificateur : Danièle BERTONCELLO
Correcteur : Pierre NOËL
Responsable régional : Véronique LAMARE
La page de Carcinus maenas dans l'Inventaire National du Patrimoine Naturel : INPN