Poisson filiforme (anguilliforme) associé aux holothuries
Tête volumineuse
Yeux assez gros et mâchoire forte, dentition robuste
Corps translucide, dépourvu d'écailles et comprimé latéralement
Longues nageoires dorsales et anales soudées et terminées en pointe à l'extrémité caudale
Taches or-argenté irisées sur les flancs et la région thoracique
Fierasfer, poisson thermomètre
Pearl fish, pearlfish (GB), Galiotto (I), Rubioca, zurriaga (E), Nadelfish (D) Cipolla a denti (Corse), Pixota de llonguet (Catalan)
Gymnotus acus Brünnich, 1768
Diaphasia acus (Brünnich, 1768)
Notopterus fontanesii Risso, 1810
Fierasfer fontanesii (Risso, 1810)
Ophidium imberbe Cuvier, 1815
Fierasfer imberbis (Cuvier, 1815)
Ophidium fierasfer Risso, 1827
Fierasfer maculata Swainson, 1839
Porobronchus linearis Kaup, 1860
Vexillifer dephilippii Gasco, 1870
Encheliophis tenuis Putnam, 1874
Carapus birpex Arnold, 1956
Carapus cuspis Arnold, 1956
Méditerranée, côtes ouest africaines
Zones DORIS : ● Europe (côtes françaises), ○ [Méditerranée française]Présent dans toute la Méditerranée et la côte ouest d'Afrique du Nord. Communément observé au large de l'Italie, de l'Espagne et de la France. Trouvé également en mer Egée et en Adriatique.
A l'âge adulte, Carapus acus vit essentiellement en association avec plusieurs espèces d'holothuries, principalement Parastichorus regalis (holothurie des sables) dans les eaux profondes tempérées de la Méditerranée et du nord-est de l'océan Atlantique, mais aussi avec Holothuria tubulosa (holothurie tubuleuse) à moindre profondeur. De fait, sa répartition bathymétrique* est grande puisqu'on peut le rencontrer entre 1 et 150 m.
Plusieurs méthodes de pénétration de l'hôte sont décrites (voir ci-après) mais au final, l'aurin pourra laisser dépasser sa tête de l'anus de l'holothurie. L'aurin pourra sortir de son hôte pour se nourrir.
L'aurin a généralement un corps translucide avec des taches or-argenté à rougeâtres irisées sur les flancs et la région thoracique. Les nageoires dorsale et anale sont très longues et soudées. La queue se termine en pointe. La caudale est décrite comme absente dans la famille des Carapidés.
Les principales caractéristiques morphologiques de l'aurin s'expliquent par son mode de vie passé à l'intérieur d'une holothurie. Son corps comprimé latéralement, sa tête puissante et l'absence d'écailles sont autant d'atouts pour arriver à ses fins : rejoindre l'abri de l'orifice cloacal ou de l'arbre respiratoire de l'holothurie qui va l'héberger.
L'aurin se caractérise aussi par une gueule arrondie et une bouche largement fendue. La dentition se compose d'une rangée externe de grandes dents coniques incurvées et de plusieurs petites dents du côté interne. L'oeil est assez gros mais avec une toute petite pupille centrale.
Carapus acus mesure une vingtaine de cm à l'âge adulte. Des analyses par radiographie ont permis de dénombrer 84 à 92 vertèbres chez ce poisson, expliquant ainsi la souplesse requise pour pénétrer les holothuries (voir divers biologie). L'anus est situé juste en arrière de la tête, ce qui permet à l'aurin d'expulser ses déjections sans salir son hôte et de déféquer sans sortir de son abri.
La seule espèce ressemblante en Méditerranée pourra être Echiodon dentatus mais celle-ci d'une part ne vit pas associée à un hôte et d'autre part se retrouve à de plus grandes profondeurs (entre 120 et 3250 m), les juvéniles étant nageurs et les adultes benthiques*.
Les autres espèces du genre Carapus se retrouveront dans les eaux chaudes de l'Indo-Pacifique, différentes espèces d'holothuries servant d'hôte préféré.
Il semble que les jeunes aurins soient capables de se nourrir des glandes reproductrices ou des branchies de leur holothurie hôte. Celles-ci n'en souffrent pas trop (a priori) car elles possèdent de grandes facultés de régénération des organes abimés ou perdus. Les aurins adultes pourront sortir de leur hôte pour se nourrir principalement de petits crustacés (décapodes, amphipodes, isopodes), d'annélides ou même d'autres Carapidés (Carapidae), avant de regagner leur abri. L'activité du Carapus est essentiellement nocturne.
Le comportement de reproduction de l'aurin est largement méconnu mais différents éléments laissent penser que l'accouplement à l'intérieur de l'hôte est possible. En effet, une même holothurie peut renfermer plusieurs individus de sexes différents. La reproduction à l'intérieur de l'arbre respiratoire de l'holothurie favorisera la proximité des gamètes* et offrira aux adultes ainsi qu'aux œufs juste fécondés une protection temporaire contre la prédation.
La période de reproduction se situe entre juillet et septembre. Les œufs flottent en amas à la surface. De minuscules larves* éclosent au bout de trois jours. Les alevins subissent une métamorphose* quand ils atteignent environ 80 mm, s'aplatissant latéralement et prenant les caractéristiques de l'adulte. C'est le moment où ils se dirigent vers le fond, à la recherche d'un hôte pour y poursuivre leur croissance.
Selon les auteurs, les relations entre l'aurin et son hôte sont considérées comme du parasitisme de type inquilisme* (dans cette forme, le parasite, appelé individu inquilin, trouve chez l'hôte l'habitat, la protection mais pas la nourriture. Si elle est bénéfique pour l'inquilin, l'association est censée être neutre pour l'hôte) ou de type commensalisme* (association de deux ou plusieurs individus d’espèces différentes où l’un au moins est bénéficiaire sans qu’aucun ne soit lésé). Un critère de distinction entre les différentes formes de parasitisme viendra de l'identification du régime alimentaire du poisson.
Les poissons du genre Carapus pourront entretenir des relations commensales* également avec des étoiles de mer, certains bivalves ou des ascidies.
Le comportement de pénétration des espèces du genre Carapus a été décrit en détails. Le poisson cherchant à pénétrer une holothurie nage avec la tête vers le fond et explore les objets. Quand un hôte est trouvé, le poisson détecte la partie postérieure et l'orifice cloacal par le courant d'eau exhalé par l'arbre respiratoire. Deux stratégies sont alors observées : soit le poisson pénètre l'hôte la tête la première en se propulsant d'un violent coup de queue et il se retournera ensuite, soit il place sa tête à l'entrée de l'anus et replie sa fine extrémité caudale vers la tête grâce à sa grande souplesse. L'aurin est alors capable de détecter le moment où l'holothurie provoque un courant respiratoire exhalant pour introduire l'extrémité de sa queue dans l'anus. L'aurin se redresse alors et finit de pénétrer son hôte en marche arrière. Cette seconde stratégie, queue en premier, est la plus répandue. Une fois à l'intérieur de son hôte, Carapus logera dans l'arbre respiratoire.
La dénomination Pearlfish (poisson perle) tire son origine de la découverte de poissons morts, paralysés et complètement recouverts de nacre à l'intérieur de certaines huîtres.
Par un mécanisme complexe de contraction de certains muscles reliés à la vessie natatoire, les poissons du genre Carapus sont capables de produire des sons spécifiques de chaque espèce. Carapus acus peut produire des sons hors ou dans l'holothurie hôte. Le rôle de ces productions de sons reste allusif. Les hypothèses vont de la recherche et l'identification d'un partenaire sexuel, au marquage d'un territoire. Le son pourrait encore servir à spécifier la taille de l'animal.
L'aurin est sans intérêt commercial pour la pêche.
Aurin : du latin [aurinus] = doré (d'après Larousse)
Fierasfer : dérive du Provençal fielat-fèr, fierasfèr avec fielat, fieras qui signifie "murène" (ou petit congre en Provence) et venant de filets ou fils, et fèr qui dérive du latin ferus = fier, sauvage. Le fierasfer est donc un "fil sauvage" ou une "murène féroce"!
Carapus : du grec [kara] = tête et [apous] = littéralement "sans pied"
acus : dérivé du latin = peut signifier rapide et/ou pointu
Numéro d'entrée WoRMS : 126661
Termes scientifiques | Termes en français | Descriptif | |
---|---|---|---|
Embranchement | Chordata | Chordés | Animaux à l’organisation complexe définie par 3 caractères originaux : tube nerveux dorsal, chorde dorsale, et tube digestif ventral. Il existe 3 grands groupes de Chordés : les Tuniciers, les Céphalocordés et les Vertébrés. |
Classe | Actinopterygii | Actinoptérygiens | Ossification du crâne ou du squelette tout entier. Poissons épineux ou à nageoires rayonnées. |
Ordre | Ophidiiformes | Ophidiiformes | Poissons à l'allure de petit serpent (court). Nageoire anale et dorsale reliées à la caudale. 380 à 400 espèces dont 90% vivent au delà de 500 mètres. |
Famille | Carapidae | Carapidés | |
Genre | Carapus | ||
Espèce | acus |
Sur le sable, de nuit
La coloration du poisson thermomètre ou aurin est gris translucide laissant voir l'arête centrale comme rougeâtre. Ce poisson se caractérise par un corps filiforme terminé en pointe à l'extrémité caudale. La taille habituelle des adultes est de l'ordre de 15 - 20 cm.
Cerbère, Côte Vermeille (66), 12 m
10/09/2021
En position de recherche d'un hôte
L'aurin parcourt le fond la tête en bas lorsqu'il recherche une holothurie où se cacher.
Notez la transparence du corps laissant bien voir ses nombreuses vertèbres. La masse blanchâtre représente les viscères.
Antibes (06), stage RABA, de nuit
13/08/2006
Anus très antérieur
L'anus de l'aurin est situé très en avant du corps, juste en dessous de la tête (flèche).
Il s'agit ici d'une vue ventrale de la partie antérieure du corps montrant aussi le début de la très longue nageoire ventrale et la masse viscérale blanchâtre.
Antibes (06), stage RABA, de nuit
13/08/2006
Détails de la tête et de l'avant du corps
Trois aurins ont été observés vers 12 m sur du sable, sans holothurie à proximité immédiate, lors d'une plongée à Cerbère. Tous les trois ont eu le même comportement : la tête en bas et complètement indifférents aux plongeurs.
L'oeil est assez gros mais avec une toute petite pupille centrale.
Cerbère, Côte Vermeille (66), 12 m
10/09/2021
Corps filiforme terminé en pointe
Photo ex-situ d'un poisson vivant, de 80 mm de long et trouvé dans une holothurie Holothuria tubulosa prélevée à 12 m de fond.
Tamaris, Côte Bleue (13), 12 m
13/08/2010
Corps transparent
Le corps de l'aurin présente toujours une certaine transparence plus ou moins agrémentée de taches rougeâtres comme ici.
Photo ex-situ d'un poisson vivant, de 80 mm de long et trouvé dans une holothurie Holothuria tubulosa prélevée à 12 m de fond.
Tamaris, Côte Bleue (13), 12 m
13/08/2010
Grande gueule
La tête volumineuse est arrondie et la bouche largement fendue.
Tamaris, Côte Bleue (13), 12 m
13/08/2010
Tête de face
Les yeux sont globuleux de grande taille.
Tamaris, Côte Bleue (13), 12 m
13/08/2010
Planche 81, M.H.N. de Nice
Cet ancien dessin datant de 1878 illustre deux individus prélevés à Nice. Notez que le nom commun d'aurin était déjà utilisé à cette époque et que le nom scientifique reconnu était Fierasfer imberbis signifiant littéralement "murène féroce imberbe" !
MHN de Nice
Reproduction de documents anciens
09/08/1878
Rédacteur principal : Jacques COVES
Vérificateur : Frédéric ANDRÉ
Responsable régional : Frédéric ANDRÉ
González-Wangüemert M., Maggi C., Valente S., Martínez-Garrido J., Vasco Rodrigues N., 2014, Parastichopus regalis, principal hôte de Carapus acus dans les eaux tempérées de la mer Méditerranée et du nord-est de l'océan Atlantique, La Bêche-de-mer, 34, 38-42.
Parmentier E., Vandewalle P., 2003, Morphological adaptations of Pearlfish (Carapidae) to their various habitats, In book: Fish adaptations, Chapter: 11, Publisher: Oxford & IBH, India, Editors: Val AL, Kapoor BG, pp.261-276p,
Parmentier E., Vandewalle P., 2005, Further insight on carapid - holothuroid relationships, Marine Biology, 146, 455-465.
Trott L.B., 1981, A general review of the pearlfishes (Pisces, Carapidae), Bull. Mar. Sci., 31, 623-629.
La page sur Carapus acus sur le site de référence de DORIS pour les poissons : FishBase
La fiche de Carapus acus dans l'Inventaire National du Patrimoine Naturel : INPN