Taille maximum 20 cm
Couleur pâle, translucide, blanc bleuâtre sur le dessus et fortement tachetée de brun-orange clair et de brun-violacé foncé
8 bras relativement courts
2 rangées de ventouses sur chaque bras
Aspect rugueux de la surface dorsale du manteau
Papilles érectiles sur le contour des yeux
Spoonarm octopus, deep sea octopus, Baird's devil-fish (GB), Deepsea polpo (I), Nordatlantischer Oktopus
Octopus bairdii A.E.Verrill, 1873
Octopus piscatorum A.E.Verrill, 1879
Benthoctopus piscatorum (A.E.Verrill, 1879)
Octopus lentus A.E.Verrill, 1880
Bathypolypus lentus (A.E.Verrill, 1880)
Bathypolypus proschi Muus, 1962
Atlantique Nord et arctique
Zones DORIS : ● Atlantique Nord-OuestLe poulpe de Baird est présent en Atlantique Nord-Ouest : du Labrador au sud-est de la Floride ; incluant le golfe du Saint-Laurent, le fjord du Saguenay, la baie de Fundy en Nouvelle-Écosse, la baie d'Hudson ainsi que dans l'archipel de Saint-Pierre et Miquelon.
On le retrouve également en Europe en Islande, en Norvège plus particulièrement au Svalbard.
Une étude critique rédigée par le scientifique Muss B.J. en 2002 a identifié 6 espèces de Bathypolypus en Atlantique. L'auteur a mis en évidence une profonde confusion parmi les octopodes d'eau profonde des genres Bathypolypus et Benthoctopus provenant d'erreurs d'identification du Bathypolypus arcticus de l'Atlantique (Prosch, 1849) communément appelé poulpe boréal, dont on montre ici qu'il est composé d'au moins deux espèces allopatriques* : la forme nominale ( Bathypolypus arcticus) est une espèce vraiment Arctique ; l'autre Octopus bairdii Verrill, 1873 est une forme boréale d'eau froide qui a été réintégrée en tant que Bathypolypus.
Le poulpe de Baird est plutôt un habitué des eaux froides (de 2 à 10 degrés Celsius). Il affectionne les fonds vaseux et sableux à grande profondeur entre 20 et 1 545 m. En période de reproduction, il se déplace sur des fonds rocheux.
Le poulpe de Baird est un petit poulpe de couleur de fond généralement pâle, translucide, d'un blanc bleuâtre sur le dessus et fortement tachetée de brun-orange clair et de brun-violacé foncé. Ses couleurs sont changeantes. Sa taille maximale est de 20 cm. Le corps est court, épais, un peu déprimé, largement arrondi en arrière, séparé de la tête par un léger rétrécissement sur les côtés. La tête est presque aussi large que le corps, renflée au-dessus et autour des yeux, concave au milieu. Autour des yeux, et surtout devant et au-dessus, il y a de nombreux petits tubercules coniques, souvent irréguliers et rugueux ; un peu à l'écart de la face supérieure de chaque œil, se trouve un petit appendice érectile et de forme conique (cirre*) ; il mesure de 5 à 10 mm.
D'aspect rugueux, la surface dorsale du manteau, de la tête, des bras et du contour des yeux sont recouverts de papilles* érectiles. La tête est dans le prolongement du manteau*. Les yeux sont gros et les globes oculaires proéminents. La bouche a une position ventrale centrale, d'une forme typique en "bec (pointe) de perroquet".
Les huit bras sont relativement courts se rétrécissant en pointes minces. Ils comportent deux rangées de petites ventouses bien espacées. Elles sont petites, peu nombreuses, alternées assez régulièrement sur les deux rangées sur tous les bras. Le troisième tentacule* droit, nommé hectocotyle* est modifié, de par sa fonction reproductrice. Il possède de 26 à 40 ventouses pour la population de l'est de l'Amérique tandis que les spécimens de l'ouest du Groenland et de l'Atlantique Est en ont de 35 à 49. L'extrémité de l'hectocotyle (ligula) est en forme de cuillère, elle mesure de 25 à 35 mm. Le poulpe de Baird est dépourvu de nageoires et son manteau est attaché. La femelle diffère peu du mâle à l'exception du troisième bras..
On peut confondre le poulpe de Baird avec la sépiole à paupières Rossia palpebrosa et la sépiole aux grandes ailes Rossia megaptera. Ces dernières se caractérisent par la présence de deux nageoires latérales ovales et séparation du manteau. Le poulpe de Baird en est dépourvu.
Sa nourriture est principalement constituée d'ophiures-pâquerettes Ophiopholis aculeata dont le poulpe de Baird ne consomme que les bras, de petits mollusques et de petits crustacés tels que la crevette des sables Crangon septemspinosa ou de gammares Gammarus spp.
La maturité sexuelle du poulpe de Baird est atteinte à partir de l'âge de 2 ans. Les mâles effectuent diverses démonstrations pour attirer les femelles potentielles en vue de la copulation. Lors de l'accouplement, le mâle se sert de son troisième bras (à droite en partant du milieu de la tête), l'hectocotyle*, modifié en spatule à l'extrémité et parcouru sur sa longueur par une gouttière. Il saisit la femelle et introduit l'hectocotyle dans la cavité palléale* de la femelle pour injecter les spermatophores* dans l'oviducte*. La copulation dure entre 2 et 3 minutes.
Les œufs sont incubés par la femelle pendant plus de 400 jours à 7,5 °C (durée également confirmée en aquarium), soit environ un tiers de la durée de vie stipulée des bairdii. La femelle reste à proximité de ses œufs pour les nettoyer régulièrement et les protéger ; elle limite alors fortement son alimentation durant toute la période d'incubation.
Les embryons éclosent au stade planctonique* (longueur de manteau de 6 mm) et vivent ainsi pendant un certain temps avant de grossir et de mener une existence benthique* en tant qu'adultes. Les adultes mâles et femelles meurent généralement peu de temps après la ponte et la couvaison.
Ses principaux prédateurs sont entre autres le loup atlantique Anarhichas lupus, la morue franche Gadus morhua, l'aiglefin Melanogrammus aeglefinus, le flétan du Groenland Reinhardtius hippoglossoides, le sébaste Sebastes marinus, le phoque barbu Erignathus barbatus et le phoque du Groenland Phoca groenlandica.
Dans la baie de Fundy, sa présence est associée à celle du pétoncle géant Placopecten magellanicus.
Sa longévité estimée serait supérieure à 3 voire 6 ans, ce qui est beaucoup plus que la moyenne des autres poulpes qui se situe aux alentours d'une année.
Sa croissance pondérale quotidienne est estimée entre 0,117 % par jour à 2,4 °C et 0,779 % par jour à 9,9°C.
Génétique et variabilité intraspécifique : les études génétiques sur Bathypolypus bairdii restent limitées. Des analyses ADN* récentes suggèrent une faible diversité génétique entre différentes populations, ce qui pourrait indiquer une faible dispersion larvaire. Une meilleure compréhension de la structure génétique permettrait de préciser l'existence éventuelle de sous-populations distinctes et d'évaluer la résilience de l'espèce face aux perturbations environnementales.
Adaptations physiologiques : pour survivre dans les environnements profonds et froids, Bathypolypus bairdii possède des enzymes* métaboliques adaptées aux basses températures. Son système circulatoire riche en hémocyanine améliore le transport de l'oxygène dans les eaux qui en sont faiblement dépourvues. De plus, sa capacité à réguler son métabolisme en fonction des variations de pression et de température constitue une adaptation clé pour la vie abyssale*.
Cette espèce a été découverte pour la première fois lors d'une opération de dragage, en 1872, sur le vapeur américain « Mosswood », dans la baie de Fundy, au large d'Eastport dans le Maine (États-Unis).
Écologie comportementale : Bathypolypus bairdii adopte principalement une stratégie de chasse opportuniste, se nourrissant de petits crustacés et de mollusques. Son comportement est majoritairement benthique, avec des déplacements lents sur le fond marin. Peu d'études ont décrit son comportement social, mais comme la plupart des octopodes, il est probablement solitaire en dehors des périodes de reproduction. Les mécanismes de défense incluent la dissimulation par mimétisme* avec le substrat* et la libération d'un nuage d'encre en cas de menace.
Écologie fonctionnelle : cette espèce joue un rôle clé dans la chaîne trophique* benthique en tant que prédateur intermédiaire. En consommant des invertébrés benthiques, elle contribue à réguler les populations de crustacés et mollusques. À son tour, Bathypolypus bairdii sert de proie pour des poissons de grande profondeur et d'autres céphalopodes. Son rôle dans l'écosystème* souligne l'importance de la conservation de ses habitats pour maintenir l'équilibre des communautés marines profondes.
Impacts anthropiques : les principales menaces anthropiques pour Bathypolypus bairdii incluent la pêche en eaux profondes, la pollution chimique et l'acidification des océans. Bien que cette espèce ne soit pas directement ciblée par les activités de pêche, la destruction de son habitat par le chalutage de fond pourrait réduire ses populations. L'augmentation des températures océaniques pourrait également affecter la répartition de ses proies, modifiant ainsi sa dynamique alimentaire.
Selon les données actuelles, Bathypolypus bairdii n'est pas répertorié sur la Liste Rouge de l'UICN*. Cependant, la rareté des études sur cette espèce rend difficile l'évaluation précise de son statut de conservation. Les menaces potentielles incluent les pratiques de pêche en eaux profondes et les effets du changement climatique sur son habitat benthique. Une évaluation plus approfondie des populations locales permettrait de mieux comprendre son statut et les mesures de protection nécessaires.
Aucune stratégie de conservation spécifique n'est actuellement mise en place pour Bathypolypus bairdii. Cependant, son inclusion potentielle dans des aires marines protégées (AMP) pourrait limiter les impacts de la pêche en eaux profondes. Il serait recommandé de mener des études de suivi pour évaluer l'état des populations et d'intégrer cette espèce dans des programmes de surveillance écologique. La sensibilisation à la préservation des habitats benthiques pourrait également favoriser la protection indirecte de cette espèce.
Poulpe vient du grec [polupous] = pieds multiples.
Baird : en hommage à Spencer Fullerton Baird, ornithologue, ichtyologiste et conservateur de musée américain. Il est le premier conservateur nommé à la Smithsonian Institution.
Bathypolypus : du grec [bathus] = profond et du grec [polupous] = à plusieurs pieds.
bairdii : latinisation du nom de Spencer Fullerton Baird
Numéro d'entrée WoRMS : 157011
Termes scientifiques | Termes en français | Descriptif | |
---|---|---|---|
Embranchement | Mollusca | Mollusques | Organismes non segmentés à symétrie bilatérale possédant un pied musculeux, une radula, un manteau sécrétant des formations calcaires (spicules, plaques, coquille) et délimitant une cavité ouverte sur l’extérieur contenant les branchies. |
Classe | Cephalopoda | Céphalopodes | Yeux complexes, coquille interne, externe cloisonnée ou absente, cavité palléale musclée, siphon musculeux, tentacules ou bras (munis de ventouses). |
Sous-classe | Coleoidea | Coléoïdes | Ventouses sur les bras, au nombre de 8 au moins. Bras hectocotyle chez le mâle pour le transfert des spermatophores. 2 branchies, 2 néphridies, une coquille interne ou vestigiale, des chromatophores, une poche à encre, un grand cerveau. |
Super ordre | Octobrachia | Octopodiformes | Céphalopodes à huit bras, connectés par une sangle interbrachiale. Corps en sac globuleux. Ventouses rondes symétriques sans anneau corné. Jamais de crochets. |
Ordre | Octopoda | Octopodes | 8 bras. Corps en forme de sac. Ce sont les poulpes. |
Sous-ordre | Incirrina / Incirrata | Incirrates | Nageoires et lame interbrachiale perdues. Benthiques pour la plupart. |
Famille | Bathypolypodidae | ||
Genre | Bathypolypus | ||
Espèce | bairdii |
Vue d'ensemble
Il possède 8 bras courts dotés chacun de deux rangées de ventouses. Sa coloration est pâle, translucide, d'un blanc bleuâtre sur le dessus et fortement tachetée de brun-orange clair et de brun-violacé foncé.
Fjord du Saguenay, Québec, Canada, 20 m
27/11/2021
Taille
Ce petit poulpe peut mesurer jusqu' à 20 cm.
Sainte-Rose-du-Nord, Québec, Canada, 18 m
14/11/2020
Aspect
Le manteau* d'aspect rugueux est recouvert de papilles* érectiles.
Fjord du Saguenay, Québec, Canada, 20 m
27/11/2021
Les cirres
Deux petits appendices (cirres*) sont présents en haut des yeux et lui donne une apparence de petit diable.
Sainte-Rose-du-Nord, Québec, Canada, 18 m
08/12/2020
Habitat
Le poulpe de Baird affectionne particulièrement les fonds vaseux du fjord du Saguenay au Québec.
Sainte-Rose-du-Nord, Québec, Canada, 18 m
14/11/2020
Habitat
Le poulpe de Baird affectionne les eaux très froides et les fonds vaseux. Fait surprenant et encore à ce jour non expliqué, il remonte parfois entre 20 et 25 m dans le fjord du Saguenay, alors qu’il vit habituellement à des profondeurs de plus de 250 m.
Sainte-Rose-du-Nord, Québec, Canada 25 m
06/06/2012
Individu sur fond sableux
Cet individu a pris une teinte fortement orangé.
Sainte-Rose- du-Nord, Québec, Canada, 27 m
23/09/2013
Variante de coloration
La coloration de cet individu tire d'avantage vers le rose et le violet.
Fjord du Saguenay, Québec, Canada, 20 m
27/11/2021
Individu en plein eau
Le poulpe de Baird est visible entre autres dans le fjord du Saguenay (région au Nord de Tadoussac, Qc). Les premiers mètres d'eau du fjord sont composés d'eau douce (entre 3 et 9 mètres) et sont extrêmement chargés en sédiments. Au-delà de cette profondeur, on pénètre dans la couche d'eau salée. L'utilisation d'une lampe est alors indispensable.
Sainte-Rose-du-Nord, Québec, Canada, 25 m
06/06/2012
Planche XLI
Traduction française de l'ouvrage original en langue anglaise de Verrill :
- Figure 1. Octopus bairdii Verrill. Mâle ; vue ventrale ; taille naturelle ; h, organe terminal en forme de cuillère du bras hectocotylisé ; i, sillon le long de la face inférieure du bras.
- Figure 1a. Le même spécimen. Bras hectocotylisé ; agrandi de 2 diamètres.
- Figure 2. Le même spécimen. Mâle ; en train de nager ; vue dorsale ; une cuillère terminale du bras hectocotylisé. D'après un spécimen vivant ; taille presque naturelle.
- Figure 3. Poulpe bairdii var. Verrill. Vue latérale d'un jeune mâle, agrandi d'environ 1 1/2 diamètre.
- Figure 3a. Le même spécimen. Appendice terminal du bras hectocotylisé ; plus gros
Verrill A E. THE CEPHALOPODS OF THE NORTH-EASTERN COAST OF AMERICA
Reproduction de documents anciens
1882
Planche XLII
Traduction française de l'ouvrage original en langue anglaise de Verrill :
- Figure 1. Octopus bairdii Verrill. Mâle ; vue dorsale d'un spécimen vivant ; taille presque naturelle.
- Figure 2. Le même. Vue latérale, d'après un spécimen vivant ; taille presque naturelle.
- Figure 3. Le même. Mâchoires ; s, mandibules supérieures ; f, mandibules inférieures ; agrandies de 2 diamètres.
- Figure 4. La même. Partie de l'odontophore ; agrandie de 22 diamètres.
- Figure 5. La même. Spermatophores. A, un avec le sac interne (S) partiellement extrudé. I, le point de départ de l'extension ; agrandi de 1 ½ diamètre ; B, un autre spermatophore dans son état original ; a, filament à la grande extrémité ; b, filament à la petite extrémité.
- Figure 6. Octopus ohesus Verrill. Mâle ; type original. Partie basale d'un des bras latéraux, pour montrer la disposition des ventouses ; agrandi de 1 ½ diamètre.
- Figure 6a. - Le même. Partie terminale du bras hectocotylé ; agrandi à 2 diamètres.
- Figure 7. Alloposus mollis Verrill. Partie d'un grand spécimen mutilé. Portion d'un bras, avec des ventouses, à partir de la base : taille naturelle.
Verrill A.E, THE CEPHALOPODS OF THE NORTH-EASTERN COAST OF AMERICA
Reproduction de documents anciens
1882
Rédacteur principal : Laurent FEY
Vérificateur : Gaël ROCHEFORT
Responsable régional : Laurent FEY
Bossé L., Sainte-Marie B., Fournier J., 1996, Les invertébrés des fonds meubles et la biogéographie du fjord du Saguenay, Rapport technique canadien sciences halieutiques et aquatiques, 2132, 45p.
BruneI P., Bossé L., Lamarche G., 1998, Catalogue des Invertébrés marins de l'estuaire et du golfe du Saint-Laurent, Publication spécifique canadienne sciences halieutiques et aquatiques, 126, 405p.
Frandsen R.P., Wieland K., 2004, Cephalopods in Greenland Water, Technical report no. 57, Pinngortitaleriffik, Greenland Institute of Natural Resources, 19p.
Isabel L., Bourdages H., Nozères., C., 2024, Guide d'identification des macroinvertébrés du relevé multidisciplinaire annuel dans l'estuaire et le nord du golfe du Saint-Laurent (NGCC Teleost 2004 - 2022), Rapport manuscrit canadien sciences halieutiques et aquatiques, 3277, 326 p.
Muus B.J., 2002, The Bathypolypus–Benthoctopus problem of the North Atlantic (Octopodidae,Cephalopoda), Malacologia, 44, 175-222p.
Nozères C., Bérubé M., 2003, Guide d'identification d'espèces marines du Saint-Laurent, Institut Maurice Lamontagne, Pêches et Océans Canada, 74p.
Wood J B., Kenchigton E., O'dor R K., 1998, Reproduction and embryonic development time of Bathypolypus arcticus, a deep-sea octopod (Octopoda, Cephalopoda), Malacologia, 39, 1-19p.
----------
La page sur Bathypolypus baiirdi n'est à ce jour (03/2025) pas disponible dans l'Inventaire National du Patrimoine Naturel