Silhouette compacte, trapue, à rostre courbé
Pattes P1 et P2 terminées par un pinceau de poils raides
Couleur de fond gris-brun à gris-vert pointillé
Cacador ou caca d'or, grand bouc, saltarelle panier
Basket shrimp (USA), Camaron cestillo (Cuba)
Atya occidentalis Newport, 1847
Atya robusta Milne-Edwards, 1864
Cancer (Astacus) innocous Herbst, 1972
Rivières des Antilles et d'Amérique Centrale
Zones DORIS : ● CaraïbesAtya innocous est présente en eau douce dans toutes les Antilles : Cuba, Jamaïque, Hispaniola, Puerto-Rico, Sainte Croix, Montserrat, Guadeloupe, Dominique, Martinique, Saint Vincent. Elle est également signalée au Panama et au Nicaragua.
La crevette-panier vit dans la partie supérieure des cours d'eau, jusqu'à 1 000 m d'altitude, de préférence dans les petits ruisseaux avec une alternance de petites cascades et de vasques plus calmes.
Cette crevette d'eau douce, de 3 à 10 cm de longueur au maximum, a un aspect trapu avec peu d'appendices visibles : les antennes sont petites, les pattes sont courtes, les yeux peu saillants, et le céphalothorax* se termine abruptement par un rostre* courbé qui lui donne un profil busqué. La cuticule est très lisse, et glissante.
La couleur d'ensemble est gris-brun ou gris-vert pointillé de brun, avec des taches crème irrégulières. Selon les populations, on peut trouver une coloration foncée sur le dos et plus claire sur les flancs, ou une coloration sombre uniforme. Les jeunes spécimens portent souvent une bande claire au milieu du dos, s'étendant du rostre au telson*, qui s'élargit ou se rétrécit à chaque segment de l'abdomen.
Les deux premières paires de pattes, assez grêles et peu pigmentées, se terminent par une pince modifiée, aplatie, dont l'article* terminal porte un pinceau de poils raides qui peut se déployer en entonnoir. L'article terminal est de couleur vive, jaune à orange.
Les 3e, 4e et 5e paires de pattes, plus robustes, se terminent par un ongle corné.
La crevette-panier rugueuse, Atya scabra, plus rare, se distingue par une taille plus importante et des pattes 3 et 4 très robustes et couvertes de petits tubercules épineux. Elle a aussi le rostre flanqué de 2 lobes latéraux pointus, en avant des yeux. Elle a la même distribution. Selon Hobbs, la meilleure façon de les distinguer, sans même les regarder, est d'essayer d'en tenir une dans la main : si elle s'échappe en moins d'une seconde c'est certainement innocous qui est beaucoup plus glissante !
Il existe une espèce plus petite (Micratya poeyi), encore appelée petit-bouc, qui vit dans le même biotope* et qui ne dépasse pas 3 centimètres. Elle possède un rostre muni de denticules*.
D'autres crevettes, de la famille des Palaemonidés, fréquentent aussi les cours d'eau des îles antillaises mais plutôt la partie inférieure et estuarienne : il s'agit des Macrobrachium (localement appelées z'habitants ou ouassous), très prisées pour leur valeur culinaire et élevées en aquaculture. Elles se reconnaissent très facilement à leur 2e paire de pattes portant de longues pinces, la silhouette générale rappelle celle d'une langoustine.
Atya innocous se nourrit de débris végétaux, de particules organiques, de diatomées* et d'algues filamenteuses récoltées soit par filtration, soit en raclant les galets avec ses "paniers".
Au repos, les pattes 1 et 2 sont pliées et les pinceaux sont peu visibles, rangés sous le céphalothorax. Pour se nourrir, la crevette déploie ses 4 paniers en entonnoir. Soit elle les tient face au courant et capte les particules en suspension par filtration, soit elle prospecte le fond en brossant littéralement le substrat* et les galets à sa portée. Pour racler le substrat, elle applique ses entonnoirs à plat sur la roche et les ferme rapidement. Les soies* raides sont pourvues de microscopiques denticules qui ont une action abrasive.
Les éléments récoltés sont ensuite saisis par les maxillipèdes* (pièces buccales) et portés à la bouche.
On trouve des femelles grainées toute l'année.
Le mâle commence par suivre une femelle ayant mué récemment, celle-ci manifeste son acceptation en faisant vibrer rapidement le 3e maxillipède. L'accouplement se fait "en croix", c'est à dire que le mâle se met sur le dos de la femelle, perpendiculairement à celle-ci, puis passe dessous, ventre en l'air, pour transférer un spermatophore* sous le ventre de la femelle avec ses pléopodes* spécialisés.
La ponte a lieu dans les 24 h après l'accouplement, chaque femelle peut porter 2 000 à 3 000 œufs sur ses pléopodes.
Une fois écloses, les larves* au stade zoé* sont emportées par le courant jusqu'à l'estuaire. Les larves ont besoin d'un certain taux de salinité (environ 3 %) pour accomplir leur développement (il y a 12 stades larvaires différents) et se métamorphoser, et elles remontent ensuite le cours d'eau. C'est une espèce dite amphidrome*, (qui voyage entre les eaux douces et les eaux salées selon son cycle de vie), et anadrome* (qui remonte les fleuves pour se reproduire).
Atya innocous est active essentiellement de nuit.
Ses corbeilles de soies lui servent aussi à se nettoyer. Elle portent des récepteurs chimiques et ont un rôle dans la perception de substances nutritives dans l'eau.
Quoique jugée "pas très esthétique", cette crevette est parfois présentée en aquariophilie car c'est une bonne nettoyeuse.
Elle est pêchée et cuisinée localement, mais semble-t-il pas spécialement recherchée (trop difficile à attraper, et pas vraiment appréciée culinairement).
Atya innocous mérite le nom de crevette-panier à cause de la spécialisation très particulière de ses premières paires de pattes.
La crevette-panier vit en eau turbulente, et se déplace plutôt lentement et prudemment en s'accrochant aux galets avec ses pattes griffues. Mais si elle est inquiétée elle "bondit" littéralement pour s'échapper, d'où sans doute les noms de Bouc, Grand-bouc, Saltarelle.
Il est intéressant de constater que ces noms sont en fait très anciens et désignent les crevettes qui sautent, dans leur ensemble ; ce concept remonte à la plus haute antiquité : ainsi en Mésopotamie, des textes cunéiformes faisaient déjà état de « sauterelles de mer » pour désigner des crevettes si les animaux étaient vendus au poids sur les marchés, et des langoustes si les animaux étaient vendus à la pièce.
Atya : nom de genre créé par Leach (qui l'écrit également Atys). C'est probablement un nom d'inspiration mythologique.
innocous (du latin innocuus), signifie inoffensif, innocent. En effet la crevette-bouc est totalement dépourvue de pinces, de griffes, d'épines ou de rostre piquant. Ce qui ne la rend pas plus facile à attraper pour autant !
Numéro d'entrée WoRMS : 586043
Termes scientifiques | Termes en français | Descriptif | |
---|---|---|---|
Embranchement | Arthropoda | Arthropodes | Animaux invertébrés au corps segmenté, articulé, pourvu d’appendices articulés, et couvert d’une cuticule rigide constituant leur exosquelette. |
Sous-embranchement | Crustacea | Crustacés | Arthropodes à exosquelette chitineux, souvent imprégné de carbonate de calcium, ayant deux paires d'antennes. |
Classe | Malacostraca | Malacostracés | 8 segments thoraciques, 6 segments abdominaux. Appendices présents sur le thorax et l’abdomen. |
Sous-classe | Eumalacostraca | Eumalacostracés | Présence d’une carapace recouvrant la tête et tout ou partie du thorax. |
Super ordre | Eucarida | Eucarides | Présence d'un rostre. |
Ordre | Decapoda | Décapodes | La plupart marins et benthiques. Yeux composés pédonculés. Les segments thoraciques sont fusionnés avec la tête pour former le céphalothorax. La première paire de péréiopodes est transformée en pinces. Cinq paires d'appendices locomoteurs (pinces comprises). |
Sous-ordre | Caridea | Caridés | Les Caridés sont caractérisés par des pléopodes natatoires. C'est à ce groupe qu'appartiennent une grande partie des espèces de crevettes. |
Famille | Atyidae | Atyidés | Les crevettes de cette famille ont les deux premières paires de pattes terminées par un pinceau de poils raides. |
Genre | Atya | ||
Espèce | innocous |
De profil
Spécimen de belle taille, avec une pigmentation sombre et des poils bien visibles sur les pattes marcheuses. Un des paniers, terminé par un doigt orange, est visible juste devant le caillou gris.
Trou à Diable, Basse-Terre, Guadeloupe (971)
07/2005
En aquarium
La vue de profil met en évidence le rostre plongeant de ces crevettes-paniers, ainsi que les corbeilles de soies raides au bout des deux premières paires de pattes.
Nos deux crevettes sont ici en posture de filtration active, face au léger courant créé par le bulleur de l'aquarium.
Les Ombrages, Martinique (972), en aquarium
25/11/2004
Vue de dessus
Trouvée dans un petit torrent de montagne, cette grande crevette (environ 6 centimètres) montre une livrée gris-brun marquée d'une bande claire au milieu du dos, du rostre au telson.
Fonds St Denis, Martinique (972)
03/12/2012
Vue de face
Il est très difficile de surprendre cette crevette dans son milieu, de si près et de face ! Malgré le léger flou du premier plan, on remarque la couleur orange vif du "doigt" au milieu de la couronne de poils raides.
Elle est ici dans le mode "filtration", les paniers face au courant.
Emerald Pool, la Dominique
22/02/2006
Les paniers en action
Dans une zone d'eau calme, favorable à la croissance de micro-algues, cette petite crevette-panier est occupée à racler le "gazon" qui a colonisé un muret en béton. Elle applique chaque panier sur le substrat puis le soulève rapidement, décollant ainsi les algues avec ses soies abrasives. (Le mouvement rappelle celui d'une personne qui débouche un évier avec une ventouse).
Fonds St Denis, Martinique (972)
03/12/2012
Biotope
Voici l'environnement préféré des crevettes-paniers adultes : un petit torrent d'eau claire avec alternance de radiers et de cascades, et beaucoup de végétation pour se cacher en bordure du cours d'eau.
Trace des Jésuites, Martinique
14/01/2007
Rédacteur principal : Anne PROUZET
Correcteur : Pierre NOËL
Responsable régional : Anne PROUZET
Chace F. A. Jr., Hobbs H. H. Jr., 1969, The freshwater and terrestrial decapod crustaceans of the West Indies with special reference to Dominica, United States National Museum Bulletin, 292, 1-258.
Felgenhauer B.E., Abele L.G., 1983, Ultrastructure and Functional Morphology of Feeding and Associated Appendages in the Tropical Fresh-Water Shrimp Atya innocous (Herbst) with Notes on Its Ecology, Journal of Crustacean Biology, 3(3), 336-363.
Felgenhauer B.E., Abele L.G., 1983, Aspects of Mating Behavior in the Tropical Freshwater Shrimp Atya innocous (Herbst), Biotropica, 14(4), 296-300.
Hobbs, H. H. jr. & Hardt, C. W. jr., 1982, The shrimps of the genus Atya (decapoda :Atyidae), Smithsonian Contributions to Zoology, 364, 1-153.
Lévêque C., 1974, Crevettes d'eau douce de la Guadeloupe (Atyidae et Palaemonidae), Cahiers de l' O.R.S.T.O.M., série Hydrobiologie, 8(1), 41-49.
Newport G., 1847, Notes on the genus Atya of Leach, with description of four apparently new species, in the cabinets of the British Museum, Annals and Magazine of Natural History, London, 19, 158-160.
La page d'Atya innocous dans l'Inventaire National du Patrimoine Naturel : INPN