Crustacé parasite de poissons marins
Fixé sur la surface de l'hôte et visible sans dissection
Corps comportant tête, thorax et abdomen
Sept paires de pattes avec crochets de fixation
Souvent en couple (individu femelle le plus gros)
Pou de poisson, pou marin [Pediculus marinus de Rondelet (1558)]
Anilocra, fish-flea (GB), Fisch-floh, Fischassel (D), Anilocra, piojo de mar (E), Vissevlo, zeepissebed (NL)
Il n'y a pas de synonyme pour le nom de genre sauf de très anciens, par exemple Oniscus, Asellus, Cymothoa, Canolira. Il y a des ambigüités sur certains noms d'espèces : ainsi, Anilocra mediterranea est actuellement un synonyme non valide de A. physodes ou A. frontalis.
Genre cosmopolite
Zones DORIS : ● Europe (côtes françaises), ○ [Méditerranée française], ○ [Atlantique Nord-Est, Manche et mer du Nord françaises], ● Atlantique Nord-Ouest, ● Indo-Pacifique, ○ [Mer Rouge], ● CaraïbesLe genre Anilocra est cosmopolite. Les différentes espèces (et leurs hôtes) sont cependant pour la plupart inféodées à des zones géographiques bien déterminées.
Les anilocres sont des ectoparasites* de poissons marins. Certaines espèces vivent fixées à la base de la queue de l'hôte, d'autres sur la tête le plus souvent en arrière des yeux ou sur les flancs des poissons.
Les anilocres sont des crustacés isopodes de 1 à 5 cm de longueur (en fait jusqu'à 10 cm, cas de l'espèce du Pacifique Anilocra gigantea) dont la carapace est segmentée.
Leur corps comporte une tête avec des yeux visibles, un thorax de sept segments et un abdomen de six segments, en général sans prolongements latéro-postérieurs acuminés contrairement aux Nerocila. Elles possèdent des appendices thoraciques terminés par des crochets qui leur permettent de se fixer sur les poissons hôtes et de nombreux appendices bi-ramés sur la face ventrale de l'abdomen, leur permettant de respirer, mais aussi éventuellement de nager au moins durant le stade mâle.
Les anilocres sont presque toujours de couleur marron foncé uni : c'est en particulier le cas d'A. frontalis. D'autres, comme par exemple A. physodes, présentent une pigmentation dorsale souvent dissymétrique : une moitié sombre ou plus pigmentée orientée vers la surface et une moitié plus claire orientée vers le fond. C'est en fait la même chose pour les poissons hôtes.
Suivant les espèces, les anilocres sont plus ou moins spécifiques de leur(s) hôte(s). 48 espèces sont recensées sur ITIS.org.
En France métropolitaine, on trouve Anilocra frontalis Milne Edwards, 1840 et Anilocra physodes (Linnaeus, 1758). Anilocra frontalis parasite préférentiellement des labridés et dans ce cas se fixe en arrière des yeux de sa victime. Anilocra physodes n'existe pas en Bretagne ; dans le golfe de Gascogne et en Méditerranée, cette espèce parasite surtout les bogues, pageots et sars en se fixant sur leurs flancs.
Les femelles d'Anilocra physodes peuvent atteindre 5 cm de longueur alors que celles d'Anilocra frontalis ne dépassent pas 3,5 cm.
En mer Caraïbe, on trouve au moins neuf espèces différentes d'anilocres dont par exemple A. myripristis (parasite de poisson-soldat), A. laticauda et A. haemuli (parasite de mérous, de grogneurs).
On peut aussi confondre des anilocres avec des espèces du genre Nerocila. Vus de loin, les critères distinctifs de Nerocila bivittata, très commun, sont une couleur rouge à marron foncé avec presque toujours deux bandes jaunes longitudinales.
Les anilocres se nourrissent principalement du sang des poissons, mais aussi accessoirement du mucus et du tissu cutané de leur victime. Pour leur permettre ce régime essentiellement hématophage*, elles disposent d'un principe anti-coagulant qu'elles sécrètent grâce à des glandes spéciales.
Les anilocres sont d'abord mâles, puis deviennent femelles (espèce protandre*) sans se détacher de leur hôte. On ne sait pas encore comment se déroule l'accouplement de ces parasites externes. On sait toutefois que la femelle exerce sur le mâle une action inhibitrice qui oblige celui-ci à rester mâle. Lorsque la femelle meurt, cette inhibition du changement de sexe est levée et le mâle se transforme alors en une femelle. Les femelles sont donc toujours les individus les plus âgés et les plus gros.
Une fois fécondée, la femelle incube ses œufs dans une poche externe ventrale, le marsupium, délimitée par des lames incubatrices qualifiées d' oostégites. A l'intérieur de cette cavité, les œufs vont se développer donnant d'abord des embryons puis des larves*. Les larves* qui en sont libérées donnent d'abord des mancas* nageuses puis des juvéniles libres qui se fixeront sur leurs hôtes avec lesquels ils vont grandir pour évoluer en mâles.
Les anilocres sont des ectoparasites, plus ou moins spécifiques de leur(s) hôte(s) suivant les espèces.
Une étude de 2009 sur Anilocra apogonae, spécifique de l'apogon à cinq lignes Cheilodipterus quinquelineatus, a montré que l'anilocre se comportait comme un castrateur de son hôte, qu'il soit mâle ou femelle, réduisant de manière significative le succès reproducteur des apogons infectés (taille des gonades réduites, mâle incapables d'incuber les œufs dans leur bouche).
La plupart des anilocres vivent de 1 à 2 ans, mais certaines espèces peuvent vivre jusqu'à 9 ans sur leur hôte. L'hôte infesté est le plus souvent anémié et donc obligé de se nourrir davantage pour essayer de compenser les pertes dues au parasite ; il a donc plus de risque de se faire manger par un prédateur, d'autant plus que ses capacités de nage sont alors amoindries.
Les anilocres ont un impact négatif sur la pêche et surtout sur l'aquaculture. Dans les fermes d'élevage, des pertes importantes sont ainsi parfois occasionnées par ce type de parasitoses.
Traduction du nom scientifique (nom féminin).
Anilocra (tout comme Lonicera, Rocinela, Cirolana, Canolira…) est un anagramme de Carolina. L'identité de la dame qui a inspiré le scientifique anglais Leach qui a créé la majorité de ces genres est très controversée. Il peut s'agir de son épouse, mais aussi de Caroline Amelia Elisabeth of Brunswick, 1768-1821, 2ème épouse de George IV, mal aimée des sujets Anglais quand Leach a créé ces genres.
Numéro d'entrée WoRMS : 146493
Termes scientifiques | Termes en français | Descriptif | |
---|---|---|---|
Embranchement | Arthropoda | Arthropodes | Animaux invertébrés au corps segmenté, articulé, pourvu d’appendices articulés, et couvert d’une cuticule rigide constituant leur exosquelette. |
Sous-embranchement | Crustacea | Crustacés | Arthropodes à exosquelette chitineux, souvent imprégné de carbonate de calcium, ayant deux paires d'antennes. |
Super classe | Multicrustacea | ||
Classe | Malacostraca | Malacostracés | 8 segments thoraciques, 6 segments abdominaux. Appendices présents sur le thorax et l’abdomen. |
Sous-classe | Eumalacostraca | Eumalacostracés | Présence d’une carapace recouvrant la tête et tout ou partie du thorax. |
Super ordre | Peracarida | Péracarides | Les femelles sont dotées d'une cavité d'incubation formée par des expansions lamelleuses des péréiopodes. |
Ordre | Isopoda | Isopodes | Corps comprimé dorso-ventralement, première paire d’antennes beaucoup plus petite que la seconde, yeux non pédonculés. 7 paires de pattes de même apparence. |
Sous-ordre | Cymothoida | Cymothoides | ils portent des appendices buccaux comprenant une mandibule et un processus permettant de couper. |
Famille | Cymothoidae | Cymothoïdés | |
Genre | Anilocra | ||
Espèce |
Toute une famille...
Les anilocres sont des crustacés isopodes de 1 à 3 cm de longueur (sauf quelques exceptions) dont la carapace est segmentée. Leur corps comporte une tête avec des yeux visibles, un thorax de sept segments et un abdomen de six segments, en général sans prolongements latéro-postérieurs acuminés contrairement aux Nerocila.
Les anilocres sont presque toujours de couleur marron foncé uni : c'est en particulier le cas d'A. frontalis.
Villefranche sur Mer (06), 15 m, de nuit
11/04/2008
Anilocre mâle nageur
Les juvéniles et les mâles d’anilocres sont de bons nageurs pour pouvoir atteindre leur hôte sur lequel ils se fixeront.
Carry le Rouet (13), 3 m
04/1993
Mâle sur triptérygion
Il s'agit d'un spécimen mâle d'Anilocra (Anilocra frontalis ou peut-être Anilocra physodes). Le mâle peut être grand, mais il est toujours de forme plus élancée que la femelle, plutôt large et trapue.
Photo primée du concours "Les yeux de Doris" 2009.
Antibes (06), 10 m
30/03/2008
Anilocra frontalis
Il s’agit de A. frontalis car la photo a été prise en Bretagne. Position caractéristique sur un labridé au-dessus des yeux.
Ploumanach
08/2005
Couple d'Anilocra frontalis
Deux anilocres sont fixées sur la tête de ce lieu jaune. On distingue bien, du côté droit du poisson, la grosse femelle et le petit mâle.
Saint-Malo, 20 m
09/1997
Les yeux
Comme chez tous les arthropodes, les yeux sont à facettes, constitués par la juxtaposition d'yeux élémentaires appelés ommatidies* (structure en forme de cône renfermant l'appareil dioptrique pour réfracter la lumière, le bâtonnet rétinien sensible aux rayons lumineux et les fibres nerveuses). Chaque ommatidie ne reçoit qu'un seul pixel de l'image globale reçue par l'œil composé, pour former une sorte de mosaïque.
Manche Ouest Agon Coutainville
04/07/2012
Couple sur une vieille
On trouve de tout sur l'estran normand : ici une vieille, Labrus bergylta, parasitée par un coupe d'Anilocra frontalis.
Manche Ouest Agon Coutainville
04/07/2012
Madame vue de dessus
Il s'agit de la femelle d'Anilocra frontalis décrochée de la vieille parasitée (cf. photo précédente).
Manche Ouest Agon Coutainville
04/07/2012
Madame vue de dessous
Voici une photo pas banale : la femelle incube ses œufs dans une poche externe ventrale délimitée par des lames incubatrices. On voit aussi très bien les crochets qui lui servent à s'ancrer sur le poisson.
Manche Ouest Agon Coutainville
04/07/2012
Femelle incubante sur un crénilabre méditerranéen
La "surépaisseur blanche" ventrale correspond à la cavité incubatrice (encore appelée marsupium) contenant de nombreux embryons ou peut-être des larves dont on devine les yeux sur la photo sous la forme de quelques points noirs.
Elevine, Niolon (13), 10 m
19/09/2014
Anilocre juvénile
Vue au microscope d'un juvénile de 3 mm tout juste extrait du ventre de la femelle.
Calvados (14), 2 m, prélèvement réalisé en Normandie sur un jeune lieu jaune parasité par le mâle et la femelle
05/09/2017
Anilocre juvénile détail des crochets
Vue au microscope d'un juvénile de 3 mm tout juste extrait du ventre de la femelle, zoom sur les crochets.
Calvados (14), 2 m, prélèvement réalisé en Normandie sur un jeune lieu jaune parasité par le mâle et la femelle
05/09/2017
Crochets et bouche
On voit la bouche armée et les crochets renforcés aux extrémités d'un individu adulte.
Individu récupéré lors d'une pêche à la daurade grise à Binic (22), rapport 2:1 obtenu avec un objectif macro + bague allonge sur un reflex
17/08/2022
Couple d’anilocres sur sar à tête noire
Les anilocres peuvent recouvrir jusqu’à 20 % de la surface d’un poisson.
Banyuls
01/07/2006
Femelle marquée par une prédation
On aperçoit sur la face dorsale de la même femelle que sur la photo "Femelle incubante" une très légère irrégularité, latérale, droite, de la carapace.
Voici ce qu'en dit à ce sujet Jean-Paul TRILLES, spécialiste de ces crustacés parasites.
"Je pense qu'il s'agit d' un traumatisme consécutif à l'attaque par un autre poisson. De tels parasites sont éventuellement recherchés par les poissons comme nourriture occasionnelle, mais absolument pas dans un but de nettoiement parasitaire".
Elevine, Niolon (13), 10 m
19/09/2014
Anilocra haemuli, espèce Caraïbe sur mérou
Quatre anilocres pour ce petit mérou Caraïbe, une femelle de chaque côté du poisson et deux petits mâles sur le dessus.
La Martinique (972), la Citadelle, 15 m
18/05/2008
Couple d’anilocres sur mérou Caraïbe
Sur cette photo, on voit bien la tête de l'anilocre femelle (individu le plus gros).
Martinique
01/06/2002
Spécimen de l'Indo-Pacifique
Cette anilocre s'est incrustée sous la pectorale de sa victime, un Scorpénidé.
Sulawesi Nord (Indonésie), Lembeh, 15 m
07/07/2010
Sur un apogon
Cette anilocre femelle de l'Indo-Pacifique s'est accrochée sur la partie postérieure d'un apogon.
Philippines
2007
Sur un poisson-ange nain bicolore
Un couple d'anilocres sur ce poisson-ange calédonien Centropyge bicolor.
Nouvelle-Calédonie, île des Pins, 22 m
19/11/2013
Platax avec 3 anilocres (au moins)
3 anilocres sont visibles sur cette face du platax. Y en a-t-il de l'autre côté?
Mer de Banda, Archipel de Tukang Besi, Sulawesi Sud-Est (Indonésie), 6 m
04/11/2014
Epervier à points rouge parasité par des anilocres
Alor (Indonésie), Batu Kepa, 15 m
25/10/2015
Repas sur le pouce
Mauvaise rencontre de nuit pour ce plongeur, dont le doigt a servi de repas à un crustacé de passage... Il ne s'agit absolument pas d'une Anilocre mais d'un Aegidae, en l'occurrence certainement Aega rosacea. Contrairement aux Cymothoidae qui sont de véritables parasites, les Aegidae sont des prédateurs qui ne se fixent que temporairement sur les poissons uniquement pour se nourrir à partir de leur sang.
Antibes (06), 10 m, de nuit
07/12/2006
Rédacteur principal : Véronique LAMARE
Rédacteur : Vincent MARAN
Correcteur : Jean-Paul TRILLES
Correcteur : Pierre NOËL
Responsable régional : Véronique LAMARE
Adlard R.D., Lester, R.J.G., 1995, The life-cycle and biology of Anilocra pomacentri (isopoda, cymothoidae), an ectoparasitic isopod of the coral-reef fish, Chromis nitida (perciformes, pomacentridae), Australian Journal of Zoology, 43, 271-281.
Fogelman R.F., Kuris A.M., Grutter A.S., 2009, Parasitic castration of a vertebrate: Effect of the cymothoid isopod, Anilocra apogonae, on the five-lined cardinalfish, Cheilodipterus quinquelineatus, International Journal of Parasitology, 39, 577-583.
Östlund-Nilsson S., Curtis L., Nilsson G.E., Grutter A.S., 2005, Parasitic isopod Anilocra apogonae, a drag for the cardinal fish Cheilodipterus quinquelineatus, Marine Ecology Progress Series, 287, 209-216.
Romestand B., 1979, Etude écophysiologique des parasitoses à cymothoadiens, Annales de Parasitologie Humaine et Comparée, 54, 423-448.
Trilles J.-P., 1969, Recherches sur les isopodes Cymothoidae des côtes françaises. Aperçu général et comparatif sur la bionomie et la sexualité de ces Crustacés, Bulletin de la Société Zoologique de France, 94, 433-445.
Trilles J.-P., 1994, Les Cymothoidae du Monde, Studia Marina, 21/22, 1-288.
La page d'Anilocra physodes dans l'Inventaire National du Patrimoine Naturel : INPN
La page d'Anilocra frontalis dans l'Inventaire National du Patrimoine Naturel : INPN