Thalle rubané membraneux érigé, marron-jaune, de 5 à 20 cm de hauteur en touffes
Pas d'iridescence
Dichotomies régulières dans un plan, sommets obtus (arrondis et tronqués)
Sur rochers à faible profondeur au printemps et en été
Rugulopteryx d'Okamura
Dictyota marginata Okamura 1913
Dilophus marginatus (Okamura) Okamura 1915
Dilophus okamurae E.Y.Dawson 1950
Dictyota okamurae (E.Y.Dawson) Hörnig, R.Schnetter & Prud'homme 1993
Pacifique Nord-Est, introduite en Méditerranée et Atlantique proche
Zones DORIS : ● Europe (côtes françaises), ○ [Méditerranée française]Espèce décrite du Japon et introduite dans la lagune de Thau (34) avec des naissains d'huîtres, elle est actuellement considérée comme envahissante en Méditerranée et dans l’Atlantique Nord-Est. Elle a été signalée aux Açores en 2019.
Dans son aire d'origine, elle fréquente les eaux tempérées et sub-tropicales où elle se développe de la zone intertidale* à plusieurs mètres (voire dizaines de mètres) de profondeur.
En Méditerranée, cette algue se développe sur substrat* rocheux depuis la surface jusqu'à 10-15 mètres de profondeur dans la plupart des cas, mais elle a été observée bien plus profond dans les eaux marseillaises (jusqu’à 40 m).
Les individus présents en Méditerranée ont les caractéristiques suivantes :
Le thalle* rubané érigé est de consistance membraneuse. La surface des frondes* est ondulée ou rugueuse. Les frondes en touffes denses peuvent atteindre 5 à 20 cm de hauteur (plus de 60 cm selon certains plongeurs – à confirmer) et 2,5 à 6 mm de largeur. Les ramifications sont dichotomes* dans un plan, les apex* sont obtus (arrondis et tronqués). La médulla*, monostromatique* au centre des frondes, devient polystromatique au niveau des marges.
Sa couleur marron jaune à marron verdâtre devient plus sombre quand il vieillit. Il n'est jamais iridescent.
L'algue est attachée au substrat* par des rhizoïdes* et des segments en forme de stolons* sur lesquels se développent de nouvelles frondes.
Dictyota dichotoma a un thalle en forme de ruban membraneux, fin et translucide pouvant atteindre 25 cm de hauteur et de 3 à 10 mm de largeur. Les ramifications sont nombreuses et régulièrement dichotomes dans un plan. De couleur marron jaunâtre, elle a souvent des reflets iridescents bleutés, sans présenter de marge bleue continue. La médulla* est toujours monostromatique*. Cette algue est largement répandue en Méditerranée et en Atlantique Nord-Est tempéré.
Les algues fabriquent les sucres de leur biomasse par photosynthèse*. Ce processus de transformation de l'énergie lumineuse en énergie chimique grâce à des pigments de type chlorophylle, n'est possible que dans une situation d'éclairement. Cependant la quantité de lumière nécessaire est très variable selon l'espèce.
L’espèce est dioïque* et se reproduit au travers d'un cycle digénétique* isomorphe*. La reproduction se situe entre le printemps et l'été. Les organes reproducteurs des gamétophytes* (à n chromosomes) apparaissent sur le thalle, sous forme de petites taches sombres. Les gamètes* femelles et mâles sont réunis en sores*, les gamètes femelles (oosphères*) ne sont pas flagellés et sont immobiles contrairement aux gamètes mâles (anthérozoïdes). Lors de la fécondation, il y a formation d'un zygote* (œuf). Celui-ci se développe en un thalle ou une génération sporophytique* (à 2n chromosomes) produisant, après méiose*, des sporocystes* qui libèreront des spores. Ces spores se développeront en un nouveau gamétophyte mâle ou femelle. La morphologie du gamétophyte et du sporophyte sont identiques, on parle de génération isomorphe.
Les individus qui se développent en Méditerranée ne portent pas de structures reproductives.
Dans son aire d'origine, les organes reproducteurs apparaissent quand la température de l'eau dépasse 15 °C. Sur nos côtes, la reproduction n’a pas encore été observée. Dans l’Atlantique Nord-Est, seuls les sporocystes ont été trouvés.
L'espèce se multiplie aussi de manière végétative par fragmentation et via des propagules* qui se développent à la surface du thalle. Ce mode de propagation a été adopté avec succès dans les eaux méditerranéennes.
Les individus introduits en Méditerranée ont été identifiés par examens microscopiques (coupes transversales du thalle) : dans les parties centrale et supérieure du thalle, le centre de la médulla* est monostromatique (une seule couche de cellules) alors qu’au niveau des marges, elle est polystromatique (deux à trois couches de cellules). Peu de Dictyotales ont cette caractéristique structurale. Cette piste a ensuite été confirmée par analyse génétique.
En Méditerranée, cette algue est présente en hiver et son maximum de développement est observé au printemps et en été.
La dictyote d'Okamura synthétise des métabolites secondaires actifs qui peuvent expliquer l’absence d’organismes épiphytes* et de traces de broutage.
Dans les années 1970, des importations massives de naissains d'huîtres en provenance du Pacifique Nord ont été effectuées pour restaurer le stock d'huîtres creuses d’Europe décimé par une maladie. Mal décontaminés, ces imports ont généré de nombreuses introductions d'espèces associées aux naissains. Il n'est pas impossible que d'autres imports aient eu lieu après 1977 au vu de la découverte tardive d'algues telles que la dictyote d'Okamura.
Confinée pendant plusieurs années dans la lagune de Thau où elle ne montrait pas de caractère envahissant, la dictyote d'Okamura s'est depuis échappée en mer (observation au Cap d'Agde en 2013) et a commencé à coloniser de manière gênante la côte. Elle est devenue une espèce dominante dans le détroit de Gibraltar où son impact sur les écosystèmes locaux fait l'objet d'études. La forte biomasse qu'elle génère impacte aussi les activités humaines telles que la pêche et le tourisme (accumulations massives puis décomposition sur les plages). En France, elle prolifère dans la région de Marseille où elle forme au printemps des tapis épais et nauséabonds à fleur d'eau. Elle y a été identifiée en 2019 mais d’après des usagers de la mer sa présence dans le port de Callelongue remonterait au moins à 2014.
La dictyote d'Okamura poursuit son expansion dans l'Atlantique proche et sa présence dans l'Archipel des Açores est confirmée depuis 2019. Elle a pu être transportée depuis la Méditerranée dans des eaux de ballast ou associée à des importations de fruits de mer (oursins, moules, palourdes ou huîtres).
Note d'août 2021 : Afin de suivre son expansion en Méditerranée, l'espèce est à rechercher sur tout notre littoral (continent et Corse). En cas d'observation, merci de signaler le lieu, la date et la profondeur au Dr Sandrine Ruitton (sandrine.ruitton@mio.osupythe
Il est d'usage chez les végétaux de franciser les noms scientifiques. Dictyote d'Okamura est la francisation d'un ancien nom, plus facile à retenir que Rugulopteryx et qui aide à placer cette algue dans la grande famille des Dictyotacées.
Rugulopteryx : du latin [rugulosus] = légèrement plissé et du grec [ptéron] = aile. Ce nom de genre, créé en 2006, fait référence aux surfaces rugueuses du thalle.
okamurae : en hommage à Kintaro Okamura (1867-1935), éminent phycologue Japonais.
Numéro d'entrée WoRMS : 495597
Termes scientifiques | Termes en français | Descriptif | |
---|---|---|---|
Embranchement | Ochrophyta | Ochrophytes | ou Hétérokontes, ou Straménopiles: présence d'un stade unicellulaire à 2 flagelles, un lisse et un à poils tubulaires. |
Classe | Phaeophyceae | Phéophycées | Algues brunes. |
Ordre | Dictyotales | Dictyotales | Ramification dichotome* (division en deux de façon régulière). |
Famille | Dictyotaceae | Dictyotacées | |
Genre | Rugulopteryx | ||
Espèce | okamurae |
Dictyotale importée du Japon
Générant une forte biomasse, la dictyote d'Okamura forme d'épais tapis au printemps dans les zones qu'elle colonise.
Callelongue, Marseille (13)
20/02/2019
Extrémités obtuses (arrondies et tronquées)
Observez les extrémités de forme tronquée : cette caractéristique se retrouve chez tous les individus de cette espèce, quelle que soit la morphologie du reste du thalle.
Détail de l'individu de l'herbier du MIO (Institut Méditerranéen d'Océanologie) prélevé près de l'île Maïre (Marseille, 13) le 6 février 2019 par 6 m de profondeur.
16/07/2021
Témoignage dans la lagune deThau
Ces petits individus ont été prélevés à Thau en 2005. Le thalle érigé et dichotome forme des touffes de 5 cm de hauteur pour 10 cm de diamètre.
Photo d'individus de l'herbier du MIO (Institut Méditerranéen d'Océanologie). L'échantillon a été prélevé dans la lagune de Thau (Hérault), le 2 juin 2005.
16/07/2021
Individu témoin en herbier
Cet individu témoigne de la première observation scientifique de la dictyote d'Okamura en mer sur les côtes françaises (la lagune de Thau est un écosystème particulier). Les frondes sont assez fines par rapport aux individus observés ultérieurement à Marseille.
Photo d'une page A4 de l'herbier du MIO (Institut Méditerranéen d'Océanologie). L'échantillon a été prélevé au Cap d'Agde (Hérault), le 16 juillet 2013.
16/07/2021
Identifiée à Marseille en 2019
L'expansion en mer est rapide. L'espèce est actuellement bien présente dans le parc national des Calanques.
Photo d'une page A4 de l'herbier du MIO (Institut Méditerranéen d'Océanologie). L'échantillon a été prélevé près de l'île Maïre (Marseille, 13), le 6 février 2019 par 6 m de profondeur.
16/07/2021
Observation in situ
La morphologie de cet échantillon est semblable à celle des individus de l'herbier du MIO issus de la lagune de Thau. Le photographe signale que cette algue prolifère depuis quelques années sur les côtes de l'Hérault.
La Grande Motte (34), 1 m
23/09/2020
Tapis nauséabond dans le port
L'algue serait apparue en 2014 dans le port de Callelongue. Son impact s'est amplifié d'année en année. Elle forme désormais un tapis dense et nauséabond tous les étés.
Port de Callelongue, Marseille (13)
14/07/2021
Tapis dense sous l'eau
Mettons la tête sous l'eau : la dictyote d'Okamura recouvre tous les rochers du port.
Port de Callelongue, Marseille (13)
03/07/2021
Champ de dictyote d'Okamura à perte de vue
Le caractère envahissant ne fait pas de doute... Quelques sphérocoques mettent un peu de couleur sur ce tapis vert.
Île Maïre, Marseille (13)
13/02/2019
A 40 m de profondeur
Le site de plongée des Pharillons est impacté jusqu'au sable, à 40 m de profondeur. Au premier plan on distingue la dictyote d'Okamura.
Les Pharillons, Marseille (13), 40 m
02/08/2021
Dans les filets de pêche
Les pêcheurs subissent les nuisances de cette algue car elle est retenue dans les filets.
Les Pharillons, Marseille (13), 15 m
02/08/2021
A Fos-sur-mer
Signalement à l'ouest de Marseille
Plage Saint-Gervais, Fos-sur-Mer (13)
10/06/2021
Rédacteur principal : Véronique LAMARE
Correcteur : Marc VERLAQUE
Responsable régional : Véronique LAMARE
De Clerck O., Leliaert F., Verbruggen H., Lane C.E., De Paula J.C., Payo D.A., Coppejans E., 2006, A revised classification of the Dictyoteae (Dictyotales, Phaeophyceae) based on rbcL and 26S ribosomal DNA sequence analyses, Journal of Phycology, 42, 1271-1288.
Faria J., Prestes A.C.L., Moreu I., Martins G.M., Neto A.I., Cacabelos E., 2021, Arrival and proliferation of the invasive seaweed Rugulopteryx okamurae in NE Atlantic islands, BioRxiv preprint, https://www.biorxiv.org/content/10.1101/2021.06.25...
Verlaque M., Steen F., De Clerck O., 2009, Rugulopteryx (Dictyotales, Phaeophyceae), a genus recently introduced to the Mediterranean, Phycologia, 48(6), 536-542.
La page sur Rugulopteryx okamurae sur le site de référence de DORIS pour les algues : AlgaeBase
La page de Rugulopteryx okamurae sur le site de L'inventaire National du Patrimoine Naturel : INPN