Poisson fusiforme argenté mesurant généralement entre 20 et 60 cm pouvant atteindre 1,3 m
Corps comprimé latéralement comportant une ligne latérale complète légèrement ondulée
Dos gris-vert, flancs argentés, ventre blanc
Tête massive et comprimée, bouche grande et oblique, mâchoire inférieure proéminente
Mâchoires armées de dents pointues et tranchantes
Tache noire bien visible à la base des nageoires pectorales
Nageoire caudale bien développée homocerque fourchue
Le tassergal fut un temps retrouvé sur les marchés parisiens sous l'appellation impropre de "bar marocain".
Blue fish, bluefish, tailor, elftfish, elft, elf, shad, skipjack, snapper, greenfish, snap mackerel, horse mackerel, skip mackerel, fatback (GB), Anchova, enchova, setubal (P), Anjova de banco, anjova, anchova de banco, emperador, pez azul, pez rey, chova, tsernia, sirvi, sirvia (E), Blaufisch (D), Ballerino, serra, serra imperiali, pesca serra (I), Zeepiranha, elwe, blauwebaars, blauwe vis (NL)
Gasterosteus saltatrix Linnaeus, 1766
Pomatomus saltator (Linnaeus, 1766)
Cheilodipterus saltatrix (Linnaeus, 1766)
Perca lophar Forsskål, 1775
Cheilodipterus heptacanthus Lacepède, 1801
Pomatomus skib Lacepède, 1802
Gonenion serra Rafinesque, 1810
Lopharis mediterraneus Rafinesque, 1810
Scomber sypterus Pallas, 1814
Sypterus pallasii Eichwald, 1831
Chromis epicurorum Gronow, 1854
Temnodon conidens Castelnau, 1861
Sparactodon nalnal Rochebrune, 1880
Temnodon tubulus Saville-Kent, 1893
Pomatomus pedica Whitley, 1931
Méditerranée, Atlantique et Indo-Pacifique Ouest
Zones DORIS : ● Europe (côtes françaises), ○ [Méditerranée française], ○ [Atlantique Nord-Est, Manche et mer du Nord françaises], ● Atlantique Nord-Ouest, ● Indo-Pacifique, ○ [Mer Rouge]Le tassergal est présent dans les zones tropicales et subtropicales de l'océan Atlantique et de l'océan Indien. Il est également présent dans une partie des régions tempérées de ces deux océans, dans le sud-ouest de l'océan Pacifique, en Méditerranée et en mer Noire.
De façon plus détaillée et outre la Méditerranée et la mer Noire, on le trouve sur les côtes atlantiques situées au sud d'un parallèle reliant le nord-est des États-Unis à la Vendée, et au nord d'un parallèle partant du nord de l'Argentine et passant au large de l'Afrique du Sud. Il est présent dans l'océan Indien, le long des côtes de la moitié sud de l'Australie, en Tasmanie et en Nouvelle-Zélande.
Dans les faits, il n'existe pas une population unique mais environ 8 à 10 sous-populations principales bien distinctes, réparties au travers de l'aire déjà décrite. Malgré la capacité des larves* pélagiques* à parcourir de longues distances, il a été démontré que les brassages génétiques entre ces différentes sous-populations sont très limités. Les zones occupées par ces sous-populations peuvent très schématiquement être décrites comme tel : Atlantique Nord-Ouest (Amérique du Nord du Canada au Mexique), Atlantique Sud-Ouest (Amérique du Sud depuis le Vénézuela jusqu'au au nord de l'Argentine), Méditerranée et mer Noire, Atlantique Nord-Est (côtes continentales du Portugal jusqu'au Sénégal, Açores, Canaries, Madère, îles du Cap-Vert), Sud Afrique (Angola, Afrique du Sud, Mozambique, Madagascar), mer d'Arabie (Somalie, Yémen, Oman, Inde), Australie Ouest, Australie Est.
Le tassergal est un poisson pélagique* migrateur vivant dans un espace s'étendant depuis les zones côtières à proximité immédiate de la surface jusqu'à 200 m de profondeur sur les plateaux continentaux. Les juvéniles se développent dans des nurseries situées près des côtes et en eau saumâtre*, tandis que les adultes semblent beaucoup plus sensibles aux variations de température et de salinité et ne s'aventurent jamais profondément dans les estuaires. Les migrations saisonnières sont motivées par la reproduction et la recherche de masses d'eaux répondant à des conditions optimales de température.
Le tassergal est un poisson fusiforme argenté pouvant atteindre 1,3 m et 14,4 kg pour une longévité maximale reportée de 14 ans. Les spécimens couramment rencontrés mesurent entre 20 et 60 cm.
Le corps est comprimé latéralement. Une ligne latérale* complète (s'étendant depuis l'opercule* jusqu'à la nageoire caudale) et légèrement ondulée est visible sur les flancs. Le dos de l'animal est de couleur gris-vert tandis que les flancs sont argentés et le ventre blanc. Les écailles relativement petites et visibles sont faiblement cténoïdes* (recouvertes de petites pointes fines dans leur partie postérieure ce qui leur donne un aspect rugueux).
La tête est massive et comprimée. La bouche grande et oblique s'étend jusqu'au niveau du bord antérieur de l'œil. Elle est munie de solides mâchoires armées de dents pointues et tranchantes. La mâchoire inférieure est proéminente.
Une tache noire est bien visible à la base des nageoires pectorales. Les nageoires pelviennes* et pectorales sont courtes. La nageoire dorsale est constituée de deux parties bien séparées dont la partie arrière constituée de rayons mous est la plus visible. Cette seconde partie de la nageoire dorsale et la nageoire anale, relativement symétriques et basses, rappellent celles des Carangidés. A la différence des autres nageoires, la nageoire caudale est bien développée. Elle est homocerque* et fourchue.
Le tassergal, de par ses dimensions et son allure de puissant prédateur pélagique*, peut de prime abord être confondu avec certains Carangidés, tels que la grande sériole et la liche amie notamment sur les côtes de France métropolitaine.
Il se distingue de la grande sériole par une queue moins fourchue comportant des lobes plus épais. Chez cette dernière, la seconde partie de la caudale et la nageoire anale ne sont pas symétriques et une barre oblique sombre traverse l'œil, qui s'estompe chez les grands individus adultes. Quant à la liche amie, le corps de cette dernière, plus élevé et dont les écailles sont moins visibles, est traversé par une ligne latérale nettement plus sinueuse que celle du tassergal. Chez la liche amie, les nageoires anale et dorsale sont plus hautes et la caudale plus développée et plus fourchue.
La physionomie des jeunes tassergals, et notamment celle de la tête, peut rappeler celle du bar commun. La forme du corps est toutefois plus arrondie chez le bar commun. La nageoire caudale de ce dernier est également moins développée.
Le tassergal est un prédateur vorace et opportuniste se nourrissant principalement d'autres poissons pélagiques* tels que mulets, maquereaux, sardines, anchois, harengs, chinchards, etc. Il peut également consommer des crustacés (crevettes) et des céphalopodes (calmars). Les jeunes chassent généralement en bancs près du bord tandis que les adultes chassent en groupes de quelques individus. Aussi voraces que les adultes, les jeunes tassergals peuvent par ailleurs ingérer des larves de mollusques, des crustacés, des copépodes et des vers annélides.
La voracité du tassergal serait telle qu'il serait un des rares animaux tuant plus de proies qu'il n'en consomme, probablement entraîné par une frénésie alimentaire. Certains textes très anthropomorphiques datant des années 1970 font ainsi état de poissons-plats "atrocement mutilés", remontés par un chalut après le passage d'un banc de ces poissons commettant des "méfaits apparemment gratuits" et "laissant toujours dans leur sillage de nombreux poissons dans un état pitoyable". D'autres auteurs assimilent ce poisson à "une machine à hacher animée dont le travail serait de couper et de détruire le plus possible de poissons dans le minimum de temps".
Les sexes sont séparés (espèce gonochorique*). La fécondité des femelles varierait de 400 000 à 2 000 000 d’ovules* produits et augmenterait avec la taille des individus (de 370 000 pour une femelle de 31 cm à 1 240 000 pour un individu de 54 cm). La ponte semble se produire au large des côtes et la fécondation* a lieu en pleine eau. Les œufs sont pélagiques*. Leur taille moyenne avoisine 0,7 mm. A l'éclosion, les larves* mesurent environ 2 mm. Ces larves pélagiques se développent en se rapprochant des côtes et font déjà preuve d'une certaine voracité.
Les schémas reproductifs semblent variables en fonction des sous-populations considérées. A titre d'exemple et pour ne citer que la sous-population présente sur la côte est des États-Unis, les jeunes alevins côtiers apparaissent dès le début de l'été, probablement issus des pontes de printemps survenues au large dans des zones de courants favorables. Leur taille atteint alors de 2 à 8 cm. A l'automne, ils sont abondants sur l'ensemble de la côte et pénètrent dans les estuaires. Leur taille varie de 10 à 20 cm et ils pèsent de 100 à 130 g. Au printemps suivant, ces poissons atteignent entre 20 et 30 cm pour une masse de 300 g. Au bout de deux ans, ils atteignent 40 cm en moyenne pour 1 kg. La quasi-totalité des poissons seraient matures à ce stade si l'on s'en réfère à une étude menée sur une autre sous-population de l'est australien évoquant une maturité sexuelle atteinte pour une taille moyenne de 26 cm pour les femelles et 28 cm pour les mâles. Les adultes migreront alors vers les zones de reproduction pour renouveler le cycle.
De nombreuses espèces de parasites ont été retrouvées sur ce poisson dans les différentes zones étudiées (jusqu'à 37 en Atlantique Nord dont 16 fréquemment observées). Parmi ces parasites très communément rencontrés, on peut notamment citer des larves* de vers cestodes occupant les cavités corporelles (Otobothrium sp.), des vers nématodes ciblant les gonades* femelles (Philometra saltatrix) ainsi que des vers trématodes (Prototransversatrema steeri) retrouvés sous les écailles.
En 2015, le tassergal a été inscrit dans la catégorie VU (Vulnérable) sur la liste rouge des espèces de l'UICN* (Union Internationale pour la Conservation de la Nature. En anglais : IUCN). Ce statut est principalement lié à la trop forte pression de pêche exercée sur cette espèce explicitement ciblée par la pêche professionnelle et récréative dans certaines zones au sein desquelles elle est présente.
Même si les sous-populations sont isolées les unes des autres et les impacts de la pêche sans doute fortement asymétriques en fonction des zones géographiques, les estimations conduisent malgré tout à un constat alarmant puisque la population globale du tassergal semble avoir décru en moyenne de 39 à 53% en trois générations, soit sur une période comprise entre 15 et 24 ans. Dans certaines zones comme le Sénégal, on considère même que l'espèce est éteinte commercialement tandis qu'elle était autrefois commune.
Des mesures ont par conséquent été mises en place localement consistant par exemple à définir des quotas de captures, restreindre le nombre de licences de pêches accordées, imposer une taille de maille minimale pour les filets, préserver certaines zones de pêche au moment de la reproduction, etc. Il n'en demeure pas moins que certains Etats continuent malgré tout à exercer une forte pression de pêche sans tenir compte de la situation préoccupante du stock.
Tassergal dérive d'une traduction phonétique du mot berbère "tasârgâlt" qui désigne le bar commun au Maroc. Le terme berbère "tasârgâlt" serait lui-même emprunté à l'arabe andalous. Le terme arabe "sargâl" ou "sargan" viendrait ainsi probablement de "sardan" qui signifie maquereau.
Pomatomus : du grec [Poma] = opercule et [Tomos] = coupant en raison du caractère tranchant des préopercules*. Le nom de genre Pomatomus donné par Lacépède a été sujet à controverses : dans leur "Histoire naturelle des poissons", Cuvier et Valenciennes lui auraient ainsi préféré la dénomination Temnodon (littéralement dents coupantes) qui leur semblait mieux adaptée au poisson décrit. C'est pourtant la dénomination Pomatomus qui a été retenue par les américains Uhler et Lugger, puis conservée par la suite pour décrire le tassergal qui demeure le seul représentant de son genre.
saltatrix : du latin [saltatrix] = danseur en raison des mouvements très vifs du poisson lorsqu'il est sorti hors de l'eau.
Numéro d'entrée WoRMS : 151482
Termes scientifiques | Termes en français | Descriptif | |
---|---|---|---|
Embranchement | Chordata | Chordés | Animaux à l’organisation complexe définie par 3 caractères originaux : tube nerveux dorsal, chorde dorsale, et tube digestif ventral. Il existe 3 grands groupes de Chordés : les Tuniciers, les Céphalocordés et les Vertébrés. |
Sous-embranchement | Vertebrata | Vertébrés | Chordés possédant une colonne vertébrale et un crâne qui contient la partie antérieure du système nerveux. |
Classe | Actinopteri | ||
Sous-classe | Neopterygii Teleostei | Néoptérygiens Téléostéens | Poissons à arêtes osseuses, présence d’un opercule, écailles minces et imbriquées. |
Genre | Pomatomus | ||
Espèce | saltatrix |
Prédateur pélagique
Poisson typiquement pélagique, le tassergal est parfois accompagné d'autres espèces comme cette saupe brésilienne en bas à gauche de la photo, également très présente aux Açores.
Santa Maria, Açores, 19 m
09/08/2016
Côte à côte
Deux individus nageant côte à côte aux Açores, archipel où la rencontre de ce poisson est assez fréquente en plongée.
Faïal, Açores, 12 m
01/08/2018
Jeune individu
Cet individu de taille modeste, une trentaine de centimètres environ, chassait par petits fonds.
Faïal, Açores, 5 m
01/08/2020
Groupe de juvéniles
Les jeunes individus peuvent se regrouper en bancs comptant plusieurs dizaines d'individus à faible profondeur.
Faïal, Açores, 5 m
22/07/2015
Dans très peu d'eau
Les tassergals peuvent se rencontrer dans très peu d'eau quelle que soit leur taille, en particulier lorsque la houle vient créer une zone d'écume près des berges rocheuses. On voit ici quelques juvéniles chassant dans l'écume tout près du bord.
Faïal, Açores, 1 m
28/07/2015
Adultes en chasse sur un sec
Ces trois individus de belle taille (environ 1 m) chassent ensemble sur un sec occupé par de nombreux chicharros (chinchards aux Açores). Ils ne sont pas seuls puisqu'on peut apercevoir une bécune en arrière-plan. Ce jour-là se trouvaient sur ce spot des bonites et des sérioles se partageant le même terrain de chasse.
Faïal, Açores, 15 m
31/07/2014
Tassergals en chasse
Cette scène prise sur le vif illustre le comportement de prédation d'au moins quatre tassergals de taille respectable en pleine action de chasse dans un banc de poissons blancs.
Faïal, Açores, 10 m
01/08/2018
Rédacteur principal : Gaël MODRAK
Vérificateur : Valérie CARO
Responsable régional : Gaël MODRAK
Bade T. M., 1977, The biology of tailor (Pomatomus saltatrix Linn.) from the east coast of Australia, M Sc thesis School of Biological Sciences of the University of Queensland, 129p.
Champagnat C., 1983, Pêche, biologie et dynamique du tassergal (Pomatomus saltator, Linnaeus, 1766) sur les côtes sénégalo-mauritaniennes, Travaux et documents de l'ORSTOM, 168p.
Cumplido R., Netto E.B.F., Rodrigues M.T., De Melo Junior U.G., Da Costa P.A.S, 2018, A Review and the Length-Weight Relationship of Bluefish, Pomatomus saltatrix (Linnaeus,1766), Pisces: Pomatomidae, at the Marine Extractive Reserve (RESEX-Mar ) of Arraial do Cabo, Rio de Janeiro State, Brazil, Open Access Library Journal, 5:e4770.
Goodbread C.O., Graves J.E., 1996, Genetic Relationships among Geographically Isolated Populations of Bluefish (Pomatomus saltatrix), Marine and Freshwater Research, 47, 347-55.
Le Gall J., 1933, Le tassergal ou blue fish.
(Pomatomus saltatrix Lacépède = Temnodon saltator Linné.)
Résumé des connaissances acquises sur la biologie et l'utilisation de ce poisson., Pêches coloniales, Tome VII, Fasc.1, n°25.
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La page de Pomatomus saltatrix sur le site de référence de DORIS pour les poissons : Fishbase
La fiche de Pomatomus saltatrix dans l'Inventaire National du Patrimoine Naturel : INPN