Cystoseire des Baléares

Ericaria balearica | (Sauvageau) Neiva, Ballesteros & Serrão

N° 3510

Méditerranée

Clé d'identification

Algue cespiteuse pouvant atteindre 40 cm de hauteur
Axes cylindriques jusqu'à 25 cm de hauteur
Ramification au 3e ou 4e ordre
Ramules épineux rares, sauf pour les individus fertiles
Pas de tophules ni d'aérocystes
Réceptacles terminaux non compacts, conceptacles dans la base des ramules épineux
Biotope rocheux éclairé et en mode calme
De la surface à 25 m de profondeur

Noms

Synonymes du nom scientifique actuel

Cystoseira balearica Sauvageau 1912
Cystoseira brachycarpa var. balearica (Sauvageau) Giaccone 1992

Distribution géographique

Méditerranée

Zones DORIS : ● Europe (côtes françaises), ○ [Méditerranée française]

Endémique* de la Méditerranée, Ericaria balearica est surtout présente en Méditerranée occidentale et dans le détroit de Sicile. Sa distribution doit être néanmoins précisée car elle pourrait être moins étendue.

Biotope

Ericaria balearica peut se rencontrer sur les roches bien éclairées (milieu photophile*), de la surface (dans les zones abritées) jusqu'à 25 m de profondeur environ. Elle peut former des peuplements denses (on parle de « forêts » à cystoseires).

Description

Ericaria balearica est une algue brune, présentant plusieurs axes cylindriques dressés (cespiteuse*) pouvant atteindre 25 cm de hauteur, à partir d'une base encroûtante épaisse et digitée.
Les individus mesurent de 10 à 40 cm de hauteur totale, et sont de couleur brun verdâtre à marron clair. Les rameaux deviennent roussâtres en fin de végétation, juste avant leur chute.
Les rameaux sont cylindriques et se ramifient successivement jusqu'au troisième ou quatrième ordre. Les ramules* épineux (« feuilles ») sont rares, sauf chez les individus fertiles.

L'espèce n'a pas de tophules* (organes de réserve courts et renflés, situés à la base des rameaux primaires de certaines espèces de cystoseires) bien que les individus relativement profonds peuvent présenter des rameaux primaires légèrement renflés à leur base. L'espèce ne possède pas d'aérocystes* (flotteurs). Les cryptes pilifères* sont proéminentes. Les organes reproducteurs (réceptacles*), situés à l'extrémité des rameaux fertiles, sont diffus, c'est-à-dire que les conceptacles* (cryptes fertiles) ne sont pas soudés entre eux. Ils se forment dans la base de ramules épineux plus ou moins espacés sur le rameau.

Espèces ressemblantes

Plusieurs espèces cespiteuses peuvent être confondues avec Ericaria balearica :

  • Ericaria amentacea qui est aussi endémique de Méditerranée, se distingue par sa localisation toujours près de la surface, en mode battu, par ses axes courts (quelques centimètres), ses rameaux primaires longs et feuillés et par ses réceptacles terminaux compacts.
  • Ericaria brachycarpa, la cystoseire à petits fruits, a été longtemps confondue avec E. balearica. Des analyses génétiques récentes (2022) ont confirmé le statut d'espèces différentes. Elle n'est pas présente en Corse, ce qui permet de discriminer ces deux espèces sur la base de la distribution géographique.
  • Cystoseira compressa se distingue par ses rameaux d'abord aplatis à la base puis cylindriques au sommet, l'absence de ramules épineux, la présence éventuelle d'aérocystes et par ses réceptacles terminaux compacts
  • Ericaria crinita qui est aussi endémique de Méditerranée, peut aussi se rencontrer sur les roches bien éclairées, de la surface jusqu'à 2 m de profondeur environ. Elle se distingue d'Ericaria balearica par ses axes lisses, noirâtres et droits, ses rameaux adventifs en touffes, l'absence de ramules épineux et par ses réceptacles terminaux compacts et tuberculés.
  • Cystoseira foeniculacea se distingue par son thalle* couvert d'épines fines, par ses rameaux primaires souvent plus ou moins aplatis à la base puis cylindriques au sommet et par ses réceptacles terminaux compacts et tuberculés.

Alimentation

Les algues fabriquent les sucres de leur biomasse par photosynthèse*. Ce processus de transformation de l'énergie lumineuse en énergie chimique grâce à des pigments de type chlorophylle*, n'est possible que dans une situation d'éclairement. Cependant la quantité de lumière nécessaire est très variable selon l'espèce.

Reproduction - Multiplication

Reproduction sexuée : L'espèce est monoïque* (hermaphrodite*). Les gamètes* mâles et femelles sont produits dans de petites cryptes pilifères fertiles (conceptacles*) localisées dans la base renflée de ramules épineux. A maturité, les spermatozoïdes* puis les oosphères* passent à l'extérieur par l'ouverture du conceptacle (ostiole*) et la fécondation a lieu dans l'eau.
Les œufs coulent et se collent au substrat* rapidement après la fécondation, ce qui limite la dispersion de cette espèce et peut expliquer sa vulnérabilité face aux perturbations (faible capacité de dissémination et donc de recolonisation après destruction sur de grandes surfaces).
Certains auteurs considèrent le cycle de vie des cystoseires comme étant monogénétique* diplontique* (une génération à 2n chromosomes), mais de plus en plus de scientifiques le classent parmi les cycles digénétiques* hétéromorphes haplo-diplontiques*, avec alternance d'un sporophyte* (génération macroscopique à 2n chromosomes) et de gamétophytes* mâles et femelles (génération microscopique à n chromosomes) vivant en parasites dans les conceptacles.

Vie associée

A faible profondeur dans les cuvettes abritées, cette algue est souvent associée à d'autres cystoseires (au sens large) telles qu'Ericaria amentacea, Ericaria crinita, Gongolaria barbata, Cystoseira foeniculacea.
La « forêt » que la cystoseire des Baléares peut créer est un biotope* particulier très riche en espèces dans lequel de nombreux Labridés et Serranidés trouvent nourriture et refuge pendant leur phase juvénile.
Lorsque les populations d'herbivores (oursins, poissons et gastéropodes) prolifèrent, ces forêts régressent et cèdent la place à un biotope* très appauvri, uniquement dominé par des espèces encroûtantes, résistantes au broutage, et par des algues gazonnantes.

Divers biologie

Cette algue est pérenne*, mais les rameaux sont caducs.
Dans les cystoseires, on distingue les axes (qui sont l'équivalent des troncs des arbres) des rameaux (les branches). Les rameaux dépassent largement la hauteur des axes.
Le terme de "feuilles" a été introduit par Sauvageau pour définir les ramules du dernier ordre chez les cystoseires.
La croissance se fait à partir d'une cellule apicale*, invisible à l'œil nu.
La durée de vie de cette cystoseire n'est pas connue mais doit très probablement atteindre plusieurs dizaines d'années. En effet, des individus de l'espèce non cespiteuse C. zosteroides de plus de 45 ans ont été observés, E. balearica peut probablement vivre plus longtemps.

Informations complémentaires

En 2020, les études génétiques ont scindé le genre Cystoseira en 3 genres : Cystoseira C. Agardh, Ericaria Stackhouse et Gongolaria Boehmer. En 2021, le genre Ericaria comportait huit espèces acceptées. L'étude par analyse génétique de 2022 porterait le genre à dix espèces. De nouvelles études sont en cours...

Les cystoseires au sens large sont parmi les producteurs de biomasse les plus importants de Méditerranée. Elles sont considérées comme des « espèces ingénieurs* » de leur habitat, ce qui leur confère une importance écologique considérable. La plupart des cystoseires supportent mal les variations de leur environnement ce qui les rend très vulnérables aux perturbations. Cela a motivé le classement de cinq d'entre elles dans la liste des espèces protégées de la convention de Berne et tous les taxons de Cystoseira sensu lato (hormis Cystoseira compressa) ont été placés dans la liste des espèces en danger ou menacées de Méditerranée de la Convention de Barcelone (UICN*).

Statuts de conservation et réglementations diverses

Cette algue est inscrite sur l'Annexe II (Liste des espèces en danger ou menacées) du Protocole ASP/DB (Aires Spécialement Protégées et la Diversité Biologique en Méditerranée) de la Convention sur la protection du milieu marin et du littoral de la Méditerranée (Convention de Barcelone).

Notons que toutes les cystoseires méditerranéennes (au sens large) sauf Cystoseira compressa sont sur cette liste.

Origine des noms

Origine du nom français

Il est d'usage pour les végétaux de franciser le nom scientifique. Le nom « Cystoseire des Baléares » est la traduction du nom scientifique de cette algue.

Origine du nom scientifique

Ericaria : en forme d’Erica (= Bruyères) : qui ressemble à une bruyère.
Cystoseira : du grec [cysto] ou [kustis] = vésicule, vessie et [seira] = série, chaîne : "vésicules ou flotteurs en chaîne".

balearica : des Baléares.

Classification

Termes scientifiques Termes en français Descriptif
Embranchement Ochrophyta Ochrophytes ou Hétérokontes, ou Straménopiles: présence d'un stade unicellulaire à 2 flagelles, un lisse et un à poils tubulaires.
Classe Phaeophyceae Phéophycées Algues brunes.
Ordre Fucales Fucales
Famille Sargassaceae Sargassacées
Genre Ericaria
Espèce balearica

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