Feuilles vertes et rubanées, larges de 4 à 10 mm
Trois à cinq nervures parallèles et longitudinales
Rhizome enfoui dans le sédiment
Racines adventives partant des nœuds
Inflorescences en forme d'épis de la largeur des feuilles, de mai à août
Grande zostère, chiendent marin, verdière ou verdrière, pailleule, foin de mer, herbe à outarde (Québec)
Common sea grass, wrack grass, sea eel grass (GB), Gemeines Seegras, Echtes Seegras (D), Gewoon zeegras (NL), Hierba de mar (E)
Cosmopolite
Zones DORIS : ● Europe (côtes françaises), ○ [Méditerranée française], ○ [Atlantique Nord-Est, Manche et mer du Nord françaises], ● Indo-Pacifique, ● Atlantique Nord-OuestCette phanérogame se rencontre dans l'Atlantique, le long des côtes françaises aussi bien que du littoral belge, mauritanien ou canadien, en particulier dans la zone estuarienne du golfe du Saint-Laurent. On la trouve également dans quelques stations lagunaires de Méditerranée, étang de Thau par exemple, et dans le Pacifique Nord, mais aussi en Australie.
Zostera marina vit dans les baies abritées en milieu sablo-vaseux, parfois sur des fonds de sable grossier ou même de graviers, entre le niveau des BMVE (Basses mer de vives eaux) qui découvre à marée basse lors des forts coefficients, et quelques mètres de profondeur, au maximum 11 m. Elle peut supporter l'exondation environ une heure pendant les marées basses de fort coefficient, ainsi que l'eau saumâtre.
La grande zostère est une plante vivace à feuilles vertes souples, rubanées, alternes sur 2 rangs, arrondies au sommet, larges de 4 à 10 millimètres, avec 3 à 5 nervures longitudinales, pouvant atteindre 20 à 120 centimètres de longueur.
Ses feuilles sont portées par une tige souterraine, ou rhizome*, ancrée dans le sédiment sablo-vaseux grâce à des racines adventives*.
Le rhizome (cf. photo) qui s'accroît comme celui du chiendent ou du muguet, permet une multiplication végétative des pieds de zostères qui forment alors des peuplements denses et étendus, véritables prairies sous-marines, appelées « herbiers ».
Les fleurs, très discrètes, apparaissent de mai à juillet ou août. Elles sont regroupées en inflorescences* en forme d'épi jaunâtre enveloppé dans la gaine d'une feuille (cf. reproduction et photos).
Zostera noltei (Hornem), anciennement Zostera nana (Roth.p.p.) ou zostère naine, est une espèce différente mais du même genre. Elle forme également des herbiers, ou « crassats ». Ses feuilles sont plus courtes et plus étroites (2 à 3 mm) et elle vit à un niveau supérieur, découvrant à chaque marée, également sur sédiment sablo-vaseux en milieu abrité.
Zostera angustifolia possède des feuilles de largeur intermédiaire.
En fait, il existerait douze espèces de zostères de par le monde, dont trois en Europe.
D'autre part, l'aspect des zostères marines est très voisin de celui des posidonies de Méditerranée, si on excepte la forme des inflorescences.
La zostère marine doit sa couleur verte à la chlorophylle*.
Comme les végétaux terrestres, elle fabrique sa propre matière organique, sa matière vivante, et donc s'accroît, par la photosynthèse*, grâce à l'énergie solaire, et aux substances minérales : eau, sels minéraux et dioxyde de carbone. Ce dernier, dissous dans l'eau, est capté et assimilé par les feuilles, qui absorbent aussi, comme les racines, l'eau et les sels minéraux ; d'où la nécessité d'eaux claires ou peu profondes.
De plus, les réactions chimiques qui permettent la croissance de la plante dégagent de l'oxygène, qui est utilisé pour la respiration de tous les êtres vivants aérobies*.
Multiplication sexuée
Bien que peu visibles, les épis de fleurs jaunâtres, pas plus larges que les feuilles, longs d'environ 4 à 5 cm, apparaissent dans notre région atlantique de mai à juillet. Elles donnent formation à des graines dont la dissémination par les courants est à l'origine de l'implantation de nouveaux pieds, dans un milieu favorable.
Ces épis de fleurs, bisexués*, sont enveloppés dans des feuilles portées par une tige dressée. Si on écarte les deux bords repliés de la feuille, on peut examiner la lame aplatie portant les fleurs disposées sur deux rangs (cf. photo).
Les fleurs mâles, représentées par une étamine à deux loges polliniques jaunes alternent régulièrement avec les fleurs femelles plus vertes formées d'un ovaire oblong et d'un style* court prolongé par deux stigmates* en fourche. Ces derniers peuvent ainsi arrêter les « grains » de pollen. Ils ont en réalité la forme de longs filaments, libérés en paquets dans l'eau par éclatement des loges polliniques (cf. photo). Cette forme filamenteuse tout à fait particulière favorise ainsi leur capture par les stigmates lors de leur libération.
Après fécondation, chaque ovule produit une graine. Le fruit (cf. photo) résultant de l'ovaire la libère par décomposition de sa paroi. Emportée par le courant, elle germera sur un substrat* favorable pour redonner un nouveau pied de zostère, un peu plus loin.
Multiplication végétative
Toutefois, l'extension des herbiers se fait surtout grâce à la multiplication végétative.….
Celle-ci s'opère très efficacement par le rhizome qui s'allonge, se ramifie et donne naissance à partir de ses bourgeons à d'autres pieds de zostère.
Tous ces individus, nés à partir d'un même pied, ont donc le même patrimoine génétique, et forment un « clone* ».
Ces véritables champs sous-marins sont un refuge pour quantité d'animaux adultes qui viennent y chercher un hâvre ou un lieu de reproduction : crénilabres cendrés, hippocampes, crustacés tels que Hyppolite inermis, Pisa sp., seiches qui accrochent leurs œufs autour des feuilles, nasses, bigorneaux Ocinebra sp., Spurilla neapolitana, et les lièvres de mer, Aplysia sp. dont la ponte ressemble à des spaghettis plus ou moins colorés (cf. photos).
Après les naissances, les jeunes se trouvent protégés dans cette « jungle » : pour eux, c'est une nurserie.
Les feuilles aux lanières assez larges, peuvent servir de support pour des anémones Anemonia viridis ou des étoiles de mer Asterina gibbosa (cf. photos). Leur base permet l'installation d'éponges, d'ascidies ou de jeunes moules, ainsi que d'algues rouges.
Les zostères enrichissent l'eau en oxygène grâce à leur fonction photosynthétique (cf. nutrition).
Il ne semble pas que Zostera marina ait de prédateur.
Les ennemis des herbiers sont les ancres de mouillage des bateaux.
Les oies bernaches préfèrent pour leur menu les zostères naines, plus accessibles à marée basse.
La régression actuelle des zostères constatée par le rédacteur dans le Bassin d'Arcachon est inquiétante, et des études sont lancées pour essayer d'en déterminer les causes : maladie ? pollution ? envasement par dépôt des boues de dragage ? baisse de luminosité par la turbidité de l'eau ? ...
Un article scientifique dans la prestigieuse revue Nature est paru (février 2016) au sujet de cette plante et de ses relations phylogénétiques avec les plantes à fleur terrestres.
Le port dressé des feuilles à marée haute ralentit le flot de particules amenées par les courants et favorise leur dépôt, d'où l'exhaussement des fonds qui accompagne la présence des herbiers à zostère marine et leur remplacement par ceux à zostère naine puis par la suite, …..le pré salé.
Les laisses de mer de la zostère marine et de la zostère naine, improprement appelées "varech", étaient autrefois employées dans la confection des matelas et fibres d'emballage, et servait également de très bon engrais !
Des recherches sont en cours pour intégrer les fibres de zostère marine dans des matériaux biocomposites pouvant servir à la construction de bateaux de plaisance. Ces fibres végétales présentent une rigidité relativement importante pour une densité bien moindre que celle du verre.
La zostère marine est protégée en région Aquitaine par l'arrêté du 8 mars 2002, en son Article 1 :
"Afin de prévenir la disparition d'espèces végétales menacées et de permettre la conservation des biotopes correspondants, sont interdits, en tout temps, sur le territoire de la région Aquitaine, la destruction, la coupe, la mutilation, l'arrachage, la cueillette ou l'enlèvement, le colportage, l'utilisation, la mise en vente, la vente ou l'achat de tout ou partie des spécimens sauvages des espèces ci-après énumérées.
Toutefois, les interdictions de destruction, de coupe, de mutilation et d'arrachage ne sont pas applicables aux opérations d'exploitation courante des parcelles habituellement cultivées."
Simple transcription du nom latin : Zostera, transformé en zostère.
Son nom vient du grec [zôstêr] qui veut dire « ruban » ou « ceinture ».
marina : en latin = qui vient de la mer.
L. est l'abréviation codifiée de Linnaeus, qui l'a décrite en 1753.
Numéro d'entrée WoRMS : 495077
Termes scientifiques | Termes en français | Descriptif | |
---|---|---|---|
Embranchement | Magnoliophyta | Angiospermes | Plantes à fleurs dont les graines fécondées sont renfermées dans un fruit. |
Classe | Liliopsida | Monocotylédones | Un seul cotylédon* dans la graine. Les nervures des feuilles sont parallèles. |
Ordre | Alismatales | Alismatales | |
Famille | Zosteraceae | Zostéracées | |
Genre | Zostera | ||
Espèce | marina |
Herbier de Zostera marina
Vue d'ensemble d'un herbier par sa bordure, ici sur un fond graveleux.
Sud des Iles Chausey, Granville (50), 4 m
04/09/2007
Herbier sur fond de sable
Sur fond de sable, les herbiers contribuent à freiner le courant et limiter l'érosion.
Le Grand-Banc, Bassin d'Arcachon (33), 2 m
15/04/2007
Herbier de l'étang de Thau
Herbier sur fond vaseux. En l'absence de courant fort, le fond est tapissé d'une algue verte filamenteuse.
Etang de Thau (34), 3 m
17/05/2007
Feuilles en bonne santé
Les feuilles rubanées sont ici en pleine santé. Elles servent de support à des petites gibbules.
Landéra (29)
19/09/2007
Feuilles malades
L'extrémité des feuilles est arrondie. Les taches noires sont un signe de maladie. Des petits gastéropodes profitent du support élevé.
Ponton de la bordelaise, Etang de Thau (34), 3 m
23/03/2007
Herbier à marée basse
Par marée basse de coefficient 106, les zostères émergent à peine.
Au fond, les "pignots" ou lattes qui délimitent les parcs à huîtres.
Chenal du Courbey, Bassin d'Arcachon (33), en surface
30/08/2007
Rhizome
De gauche à droite, le rhizome de l'année précédente, la pousse de cette année, une touffe de feuilles d'un an avec des racines adventives longues, et la touffe de cette année avec les racines adventives en cours de développement..
Bélisaire, Cap-Ferret, bassin d'Arcachon (33), en surface
31/05/2007
Epis de fleurs
A gauche, un épi a été dégagé de sa gaine, et l’on peut voir facilement les loges polliniques jaunes et ovoïdes des étamines.
Bélisaire, Cap-Ferret, bassin d'Arcachon (33), en surface
31/05/2007
Epi de fleur dégagé
Les fleurs mâles, représentées par 2 loges polliniques jaunes, alternent régulièrement avec les fleurs femelles, formées d’un ovaire aplati surmonté d’un style très court avec 2 stigmates minces et allongés, et ceci sur 2 rangées.
Bélisaire, Cap-Ferret, bassin d'Arcachon (33), en surface
31/05/2007
Dessin de l'inflorescence
Dessin de la photo précédente, montrant l'alternance d'une fleur mâle et d'une fleur femelle, sur chacune des deux rangées.
N/A
31/05/2007
Fruits
Trois fruits, trois ovaires contenant chacun une graine, sont bien visibles entre les bords de la gaine entr'ouverte. En haut, un épi de fleurs, sur son axe aplati, a été dégagé.
Bélisaire, Cap-Ferret, bassin d'Arcachon (33), en surface
31/05/2007
"Grains" de pollen
Le pollen, sous forme d’un paquet de filaments, sort de la loge pollinique déchirée, que l’on aperçoit à droite. Les "grains" de pollen ne sont pas sphériques, mais filamenteux.
Observation au microscope x20
31/05/2007
Rhizome, ancrage d'hippocampe
Les hippocampes s'accrochent volontiers par la queue aux rhizomes de zostère. De nombreuses racines, ici déterrées par le courant, partent des « nœuds ».
Le Grand-Banc, bassin d'Arcachon (33), 3 m
08/09/2007
Crabe Pisa sp.
Les Pisa, à la carapace recouverte d’organismes variés, grimpent souvent le long des feuilles de zostère.
Pointe de Graouères, bassin d'Arcachon (33), 5 m
24/06/2007
Œufs de seiche
Chaque œuf de Sepia officinalis est attaché par un lien autour de la feuille de Zostera marina, échouée à marée basse sur des Zostera noltii.
Bélisaire, Cap-Ferret, bassin d'Arcachon (33), en surface
31/05/2007
Pontes de nasses (Hinia sp.)
A marée basse : Les œufs de nasses sont enfermés dans des capsules transparentes au sommet desquelles on devine l’ouverture.
Bélisaire, Cap-Ferret, bassin d'Arcachon (33), en surface
31/05/2007
Ponte d'aplysie
L’aspect en plat de spaghetti est tout à fait caractéristique.
Le Grand-Banc, bassin d'Arcachon (33), à marée basse, en surface
O9/09/2006
Anemonia viridis
Les anémones montent souvent le long des feuilles de zostères ; l'animal ajoute une fleur à cette plante qui cache les siennes. Les tentacules non rétractiles de l'anémone lui permettent de se nourrir de proies variées se déplaçant dans l’herbier.
Pointe de Graouères, bassin d'Arcachon (33), 2 m
24/06/2007
Etoile bossue
Cette petite étoile, Asterina gibbosa, se maintient sur les feuilles grâce aux ventouses de ses podia* (petits pieds) commandées par son «système hydraulique» interne.
Pointe de Graouères, bassin d'Arcachon (33), 5 m
24/06/2007
Rédacteur principal : Annie DUPRAT-BRUSSAUT
Vérificateur : Michel BARRABES
Correcteur : Jean LAPORTE-CRU
Responsable historique : Michel BARRABES
Responsable régional : Véronique LAMARE
Auger R., Laporte-Cru J., 1982, FLORE DU DOMAINE ATLANTIQUE DU SUD-OUEST DE LA FRANCE, ed. CRDP de Bordeaux, (2ème ed), 516p.
Bonnier G., 1960, FLORE COMPLETE DE FRANCE (SUISSE et BELGIQUE), ed Librairie générale de l'Enseignement, tome 11, 159p.
Chadefaud M., Emberger L., 1960, TRAITE DE BOTANIQUE SYSTEMATIQUE, ed. Masson, tome 2, fasc. 2. 789p.
La page sur Zostera marina sur le site de référence de DORIS pour les plantes : Tela Botanica
La page de Zostera marina dans l'Inventaire National du Patrimoine Naturel : INPN