Petite limace de mer longue et fine, généralement autour de 6-8 mm
Couleur générale brun rouge foncé à noire
Deux parapodies costales se rejoignant sur la médiane du dos
Haut des parapodies sinueux et marqué d'un motif complexe en demi-lunes et croissants jaunes, bleus et orange
Tête marquée d'un Y blanc, s'engageant sur les rhinophores à large base
Golfe du Mexique et mer des Caraïbes, Macaronésie, Andalousie méditerranéenne
Zones DORIS : ● CaraïbesL'espèce est présente dans le golfe du Mexique et dans la mer des Caraïbes (elle est originellement décrite de Cuba et du Costa Rica). Elle est signalée dans les Antilles néerlandaises, dans les eaux de la Guadeloupe, au Bélize, au Honduras et aux Bahamas.
Considérée comme une espèce caraïbe, Thuridilla mazda est néanmoins signalée pour la première fois en 2011 dans l'Atlantique Est, notamment dans l'archipel des Açores (Malaquias et al.) et en 2015 aux Canaries (Ortéa et al.). En 2021, un signalement documente T. mazda (Sanchez-Tocino et al.) en Méditerranée espagnole (à Almuñécar, Andalousie).
La thuridille mazda vit probablement dans des zones algales côtières peu profondes (10 premiers mètres), bien que l'holotype* ait été trouvé à 20 m de profondeur, dans une zone peu végétalisée, vers la Havane (Cuba) en 1999 et le suivant au Costa Rica, même profondeur; en 2000.
C'est une petite limace de mer, généralement d'une longueur de 6 à 8 mm de long (mais pouvant aller selon [Malaquias et al. 2011] jusqu'à 17 mm). Elle est fine et allongée, avec une tête bien visible de par ses rhinophores* et qui émerge d'un fourreau très coloré.
La couleur générale du corps est brun rougeâtre foncé (mais cela peut se rapprocher du noir, notamment vers les côtes du Costa Rica).
Une parapodie* couvre chaque côté du corps et les deux viennent se rejoindre sur la médiane dorsale. A cet endroit, les marges des parapodies sont ondulées et elles sont bordées de plusieurs taches et bandes colorées, qui accentuent encore l'effet d'ondulations.
Le motif marginal des parapodies est assez complexe et peut se décrire ainsi :
Tout au bord, au niveau de la rencontre des deux parapodies, une fine ligne blanche à jaune pâle, pouvant devenir bleu ciel iridescent. En dessous, une série de grosses taches en demi-lunes (en général, 6 à 7) jaunes se dégradant vers l'orange et séparées par des zones noires (celles-ci peuvent même former une large bande sous-jacente). Ces demi-lunes jaune-orange bordées de noir sont soulignées par deux autres taches en croissants, empilées de haut en bas selon l'ordre suivant : bleu iridescent et orange.
Les demi-lunes et croissants correspondent aux ondulations de la bordure parapodiale et se trouvent en face à face sur les deux parapodies. Vers la queue de l'animal, la bordure marginale des parapodies devient entièrement orange.
Si ce motif peut évoluer en fonction de la taille de l'animal (par exemple, tous les croissants orange se rejoignant et formant un feston ininterrompu), l’ordre semble demeurer constant.
L'intérieur des parapodies est vert très sombre à noir uniforme, avec une bande bleue dans la région caudale et des taches orangées au début de la région cardiaque (derrière la nuque).
A l'avant, la tête est brune, marquée de couleurs sur les côtés. Il y a une grosse marque blanche en Y sur le dessus (parfois maculée d'une tache jaune orange), marque blanche qui s'engage sur chaque rhinophore. A la base de ceux-ci se trouvent les deux petites taches oculaires noires. Les deux rhinophores sont courts à base large (coniques), de couleur blanche avec une tache bleue apicale* dans leur moitié dorsale (ou postérieure) et noire dans leur moitié ventrale (ou antérieure). Le noir vient parfois marquer l'apex* dorsal également.
Dans la zone caraïbe, une seule espèce du genre Thuridilla possède une coloration telle qu'elle peut être confondue avec Thuridilla mazda :
Par rapport à la présence de T. mazda signalée dans l’Atlantique Est, et notamment dans l'archipel des Açores (2011) et aux Canaries (2015) ainsi que dans la Méditerranée du sud de l'Espagne (2021), il nous faut aussi citer Thuridilla hopei qui partagerait cette distribution, même si elle est considérée comme une espèce endémique* de Méditerranée. T. hopei a généralement des points clairs indépendants sur les côtés des parapodies, sous le motif ligné, que n'a pas T. mazda.
Les thuridilles se nourrissent généralement de végétaux. Cela est probablement confirmé par le fait qu'on rencontre cette espèce dans les zones où poussent algues et phanérogames*.
La reproduction de Thuridilla mazda n'a pas été précisément étudiée à ce jour. Mais elle doit correspondre à celles des espèces du genre Thuridilla qui ont été étudiées. Il s'agit d’animaux hermaphrodites* simultanés et deux individus sont nécessaires à la reproduction. Le rapport est proximal* pour un échange de gamètes* mâles.
Selon [Ortea et al. 2015], la ponte serait constituée d'un ruban plat enroulé en spirale sur environ deux tours, avec des œufs orange.
Comme la plupart des Mollusques hétérobranches, Thuridilla mazda possède une radula* qui lui sert à se nourrir. La conformation de cette radula est adaptée à l'alimentation par percement de la paroi cellulaire des algues et succion des fluides internes. Les sacoglosses n'ont pas de mâchoire.
Pour l'heure, le mode de développement larvaire* de Thuridilla mazda est factuellement inconnu. Mais on peut imaginer une vie planctonique* soutenue, avec un fonctionnement lécithotrophique* (c'est le cas d'autres espèces de sacoglosses). Ceci pourrait être une explication à la dispersion de l'espèce vers l'est depuis les côtes caribéennes, avec un exemple supplémentaire de l'importance du Gulf Stream* comme moyen de dispersion et de colonisation d'organismes tropicaux dans ces régions de l'Atlantique Nord. Ceci dit, il n'est pas possible aujourd'hui d’exclure une introduction anthropique* de cette espèce par le biais de la navigation et notamment la navigation de plaisance entre les Caraïbes et la Macaronésie.
Thuridille mazda : francisation littérale du nom scientifique de l'espèce.
Thuridilla : on peut supposer que ce nom (créé par Bergh en 1872) provient d'une des mêmes sources que plusieurs des autres noms de genres créés par cet auteur : les grands écrits épiques vikings, racontant la vie des Islandais au Xe s. Originellement rédigée vers le XIIIe siècle en islandais et faisant partie intégrante des Sagas of Icelanders (ou "Sagas des Familles"), la saga de Víga-Glúms (en français : "la saga de Glúmr le Meurtrier") présente dans son chapitre 10 un personnage féminin se prénommant Thurida (c'est l'épouse de Thorvald, fils de Reim). C'est probablement de ce nom que provient la Thuridilla de Bergh.
Le père de Thurida est d'ailleurs Thord de Höfdi, qui donnera sans doute le genre Thordisa Bergh, 1977.
Notons que l'on côtoie également dans d'autres écrits de la même veine, Hallgerda, dans "The Story of Burnt Njal" (Njal's Saga) ou Jórunn Bjarnadóttir dans " The Laxdæla saga", personnages dont on peut penser qu'ils sont sources d'autres noms de genres d'Opisthobranches* (Halgerda et Jorunna), également créés par Rudolph Bergh (1824-1909).
mazda : les auteurs ont ainsi baptisé cette espèce en souvenir de leur véhicule, une voiture de marque Mazda, modèle 626 Glx de 1987, qui a parcouru 198 000 km sur les routes de Cuba, sans pièces de rechange, et qui leur a permis de réaliser leur campagne de collectes.
La localité du type* est La Havane (Cuba).
Numéro d'entrée WoRMS : 420576
Termes scientifiques | Termes en français | Descriptif | |
---|---|---|---|
Embranchement | Mollusca | Mollusques | Organismes non segmentés à symétrie bilatérale possédant un pied musculeux, une radula, un manteau sécrétant des formations calcaires (spicules, plaques, coquille) et délimitant une cavité ouverte sur l’extérieur contenant les branchies. |
Classe | Gastropoda | Gastéropodes | Mollusques à tête bien distincte, le plus souvent pourvus d’une coquille dorsale d’une seule pièce, torsadée. La tête porte une ou deux paires de tentacules dorsaux et deux yeux situés à la base, ou à l’extrémité des tentacules. |
Sous-classe | Heterobranchia | Hétérobranches | |
Super ordre | Sacoglossa | Sacoglosses | Coquille à paroi fine et en forme d’œuf ou de 2 valves, ou absente. Les espèces sans coquille sont pourvues de parapodies ou de cérates. 2 paires ou pas de tentacules sur la tête (rhinophores en tube). |
Famille | Plakobranchidae | Plakobranchidés | |
Genre | Thuridilla | ||
Espèce | mazda |
Robe colorée
C'est une petite limace de mer, faisant généralement autour des 6 à 8 mm de long et rencontrée dans les zones algales côtières.
Elle est fine et allongée, avec une tête bien visible émergeant d'un fourreau très coloré autour de sa médiane dorsale, où se rencontrent les deux parapodies costales.
Pointe Noire, Guadeloupe (971), mer des Caraïbes, 5 m
21/05/2020
Schéma explicite du motif en bordure des parapodies
Si l'on schématise le motif en bordure des parapodies, on pourrait convenir de ce dessin.
Tout en haut, sur la marge, une fine ligne blanche. En dessous, une série de grosses taches en demi-lune jaunes se dégradant vers l'orange et séparées par des zones noires (celles-ci peuvent même former une large bande sous-jacente). Parfois, de petites demi-lunes incomplètes s'intercalent entre les grosses.
Ces demi-lunes jaune-orange sont soulignées par d'abord un croissant bleu puis, juste en dessous, un autre croissant orange (ce dernier pouvant former un feston continu, selon les individu).
Dessin.
01/08/2022
De face
On voit bien sur cette vue de face, les deux parapodies protégeant le corps sur les côtés et venant se rejoindre sur la médiane du dos. Cela forme une ligne sinueuse et marquée d'une fine bande blanche qui, sur cet individu, s’irise en bleu ciel.
Pointe Noire, Guadeloupe (971), mer des Caraïbes, 5 m
21/11/2020
Tête et rhinophores
La tête est de même nuance que le corps, marquée sur les joues des couleurs du motif dorsal : orange et bleu.
Sur le dessus, il y a une grosse marque blanche en Y, qui s'engage sur chaque rhinophore.
A la base de ceux-ci se trouvent les deux petites taches oculaires noires.
Les rhinophores sont courts, plutôt coniques. Outre la couleur blanche venant de la tête, il y a une tache bleue apicale sur leur face dorsale (ou postérieure). La face ventrale (ou antérieure), invisible ici, est noire, cette couleur venant parfois maculer l'apex dorsal également.
Pointe Noire, Guadeloupe (971), mer des Caraïbes, 5 m
21/05/2020
Distribution : en Guadeloupe
L'espèce a été décrite de Cuba, avec un individu de 3,5 mm prélevé en 1999. Ce sera l'holotype, l'animal qui aura servi à la description initiale.
Mais on peut également rencontrer cette petite espèce (avec de bons yeux) dans les eaux françaises de la Guadeloupe, et notamment, comme ici, au large de Pointe-Noire sur la côte ouest de l'île de la Basse-Terre.
La commune de Pointe-Noire se situe au nord de Bouillante, sur le versant ouest du massif volcanique de Basse-Terre qui se jette abruptement dans la mer des Caraïbes. Les massifs montagneux protègent ainsi cette partie de l'île des vents dominants venant de l'est, les alizés. C'est la Côte-sous-le-vent.
Pointe Noire, Guadeloupe (971), mer des Caraïbes, 5 m
21/05/2020
Rédacteur principal : Alain-Pierre SITTLER
Vérificateur : Sylvie DIDIERLAURENT
Responsable régional : Alain-Pierre SITTLER
Malaquias M.A.E., Calado G.P., Da Cruz J.F., Jensen K.R., 2011, On the occurrence of the Caribbean sea slug Thuridilla mazda in the eastern Atlantic Ocean, Marine Biodiversity Records, 5, 1-4.
Ortea J., Espinosa J., 2000, New species of the genus Thuridilla Bergh, 1872 (Mollusca: Sacoglossa) from Cuba and Costa Rica, Avicennia, 12/13, 87-90.
Sanchez-Ocino L., Chamorro M., Tierno des Figueroa, 2021, First record of the Caribbean Sea slug Thuridilla mazda Ortea & Espinosa, 2000 (Mollusca, Sacoglossa) in the Mediterranean Sea, in: Orfanidis S., Alvito A., Azzurro E., Badreddine A., Ben Souissi J., Chamorro C., Crocetta F., Dalyan C., Fortič A., Galanti L., Geyran K., Ghanem R., Goruppi A., Grech D., Katsanevakis S., Madrenas E., Mastrototaro F., Montesanto F., Pavičić M., Pica D., Pola L., Pontes M., Ragkousis M., Rosso A., Sánchez-Tocino L., Tierno De Figueroa J. M., Tiralongo F., Tirelli V., Tsioli S, Tunçer S., Vrdoljak D., Vuletin V., Zaouali J., & Zenetos A., 2021, "New Alien Mediterranean Biodiversity Records", Mediterranean Marine Science, 22(1), 180-198.
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La page sur Thuridilla mazda dans l’Inventaire National du Patrimoine Naturel : INPN