Calmar de récif des Caraïbes

Sepioteuthis sepioidea | (Blainville, 1823)

N° 1218

Atlantique Ouest tropical

Clé d'identification

Nage en banc, et à reculons (comme tous les calmars)
Couleur verte à brun tacheté, plus claire sur le ventre
Corps en forme de torpille, entouré presque entièrement d'une membrane ondulante
Tête prolongée de 8 petits bras autour de la bouche et 2 tentacules plus longs armés de ventouses
Deux très grands yeux

Noms

Autres noms communs français

Calmar ris (nom officiel FAO)

Noms communs internationaux

Reef squid, caribbean reef squid, inshore squid, tropical squid (GB); Karibische Riffsepia (D), Calamar de arrecife, chipiron del Caribe (S), Chopo (Venezuela)

Synonymes du nom scientifique actuel

Loligo sepioidea Blainville, 1823
Sepia affinis D'Orbigny, 1826
Sepioteuthis biangulata Rang, 1837
Sepioteuthis sloanii Gray, 1849
Sepioteuthis ovata Gabb, 1869
Sepioteuthis ehrhardti Pfeffer, 1884
Sepioteuthis occidentalis Robson, 1926
Sepia officinalis jurujubai Oliveira, 1940

Distribution géographique

Atlantique Ouest tropical

Zones DORIS : ● Caraïbes

Sepioteuthis sepioidea est une espèce largement représentée dans les eaux tropicales et subtropicales du centre et du nord-ouest de l'Atlantique.
Il est signalé aux Bermudes, aux Bahamas, en Floride, dans tout le golfe du Mexique, dans les grandes et petites Antilles, jusqu'au Venezuela.

Biotope

Sepioteuthis sepioidea est un calmar benthique* et démersal* (proche du fond) qui habite les récifs coralliens entre 0 et 20 mètres.

Les jeunes se trouvent plutôt près des côtes, cachés lorsqu'ils peuvent dans la végétation. Au fur et à mesure qu'ils grandissent, ils s'éloignent des côtes et s'enfoncent en profondeur (jusqu'à 100 m pour les adultes).

Description

Le calmar de récif des Caraïbes vit en banc. C'est un céphalopode de petite taille, de couleur verte à brun tacheté sur le dos, avec une teinte plus claire sur le ventre. A l'âge adulte, il mesure entre 11 et 20 cm (dimension prise "hors tentacules" : des yeux jusqu'au bord arrière du manteau).

Son corps est élancé, en forme de torpille. Les nageoires forment une membrane ondulante qui entoure le manteau presque entièrement. Elles donnent au corps une forme élargie et aplanie, légèrement elliptique, se terminant en losange à l'arrière. Avec ses deux énormes yeux en position latérale, le calmar de récif possède les plus grands yeux du règne animal en proportion par rapport au corps.

Sepioteuthis sepioidea
possède 8 petits bras autour de la bouche et 2 tentacules plus longs ramenés vers l'intérieur et armés de ventouses.

Espèces ressemblantes

Le calmar (ordre des Teuthiides) et la seiche (ordre des Sépioïdes) se ressemblent par leur corps fuselé et leurs tentacules plus petits que le corps. Dans les récifs des Caraïbes, il n'y a cependant pas de confusion possible entre Sepioteuthis sepioidea et une seiche, puisque aucun représentant de l'ordre des Sepiida n'est recensé dans ce secteur.

En revanche d'autres espèces de calmar peuplent aussi ces eaux. Les calmars de récif vivent en bancs organisés, et il arrive que des calmars d'autres espèces se mélangent au groupe, par exemple Loligo plei qui est présent au Panama, Bahamas et aux îles Caïmans. Mais ce dernier est de couleur dominante rouge alors que S. sepioidea est de couleur dominante verte.

Alimentation

Le calmar de récif se nourrit principalement de petits poissons tels que sardines, anchois, harengule écailleux, hareng nain, athérines… Ses besoins quotidiens représentent 30 à 60 % de son poids.

C'est un chasseur aux techniques variées :
- de façon générale, il reste à l'affût pendant la journée, pistant sa proie ou se nourrissant de sa capture nocturne ;
- la nuit il devient plus actif, traquant sa proie au moyen de divers subterfuges : leurres à l'aide de ses tentacules, imitation de la végétation alentour, camouflage en changeant de couleur ;
- il peut dissimuler ses tentacules à la vue de sa proie jusqu'à l'instant de l'attaquer puis les projette brutalement en avant ;
- ou encore il rassemble ses bras en forme de panier, grâce auquel il capture les petites prises ;
- on l'observe aussi s'approchant doucement du sable sur lequel est posée une crevette, il perturbe alors le fond avec ses tentacules pour l'effrayer et l'attraper dans sa fuite.

Les calmars capturent leur proie grâce à leurs longs tentacules. Ils l'apportent ensuite à leur bouche et utilisent leur paire de mâchoires puissantes, semblable à un bec, pour écraser ou déchirer leur nourriture. Ils consomment la chair et des organes internes du poisson, et rejettent la tête, la queue, la colonne vertébrale et les arêtes.

Reproduction - Multiplication

La maturité sexuelle est atteinte autour de 9 cm, après environ 6 mois. La femelle adulte est légèrement plus grande et mesure au moins 12 cm tandis que le mâle dépasse rarement 11 cm. Les mâles se distinguent par leur quatrième bras en position ventrale à gauche, transformé en hectocotyle* (appendice reproducteur) : les ventouses de l'extrémité sont réduites ou absentes et le bras est élargi pour former de grandes papilles charnues.

En période de reproduction, les adultes matures se rassemblent près des récifs entre 1,5 et 8 m de profondeur. Les parades durent toute la journée et s'accentuent à la tombée de la nuit. Les mâles en compétition, qui affichent de belles rayures sur leur ventre et leur dos, se font face et nagent en remontant vers la surface.
Le gagnant du duel retourne vers la femelle en éloignant les autres prétendants éconduits, puis le couple s'éloigne ensuite pour continuer un ballet à deux qui peut durer plus d'une heure. Le mâle change de couleur pour devenir rouge pâle, vient nager parallèlement à la femelle et la frôle avec ses nageoires et ses tentacules. En réponse, la femelle se pare de couleurs spécifiques et nage aux côtés du mâle qui change de nouveau de couleur : une bande brun foncé apparaît au milieu de son dos.
Le mâle dépose un paquet collant de sperme (le spermatophore) sur une zone déterminée du corps de la femelle en émettant des signaux de couleurs réguliers. La femelle récupère ensuite le spermatophore et le place dans son réceptacle séminal. Alors seulement, ses œufs seront fertilisés.

Le couple choisit un rocher ou une crevasse à l'abri dans le récif de corail. La femelle y dépose plusieurs capsules longues de 5 ou 6 mm et de couleur jaunâtre, attachées par une extrémité. Chacune de ces capsules gélatineuses contient 3 ou 4 œufs.
Comme d'autres céphalopodes, le calmar de récif des Caraïbes est semelpare* : une seule reproduction au cours du cycle de vie. Les femelles meurent juste après avoir pondu leurs œufs. Les mâles disposent d'une courte période de répit pendant laquelle ils fertilisent plusieurs femelles avant de mourir à leur tour.

Très rapidement après l'éclosion, les juvéniles commencent à se nourrir de petits crustacés (crevettes, copépodes, amphipodes et petits arthropodes), de larves planctoniques et de vers polychètes. Leur croissance est d'environ 7 mm par jour.

Vie associée

Les prédateurs du calmar S. sepioidea sont principalement des poissons : Lutjanidés, Pomacentridés, Serranidés, Scombridés, Priacanthidés ou Sphyraenidés.

On a observé aussi une association entre le calmar de récif des Caraïbes et les deux espèces de Mullidés locaux, le capucin jaune (Mulloidichthus martinicus) et le barbarin rouge (Pseudupeneus maculatus). Pendant que le poisson fouille le substrat pour y trouver de petits invertébrés et des végétaux, le calmar plane près d'eux, agissant comme une sentinelle, et alertant le poisson du danger.

Divers biologie

Locomotion
Les calmars de récif se déplacent en faisant onduler leur nageoire périphérique, à reculons c'est-à-dire le corps vers l'avant, la tête et les tentacules vers l'arrière. En cas de danger, ils peuvent se propulser violemment, toujours vers l'arrière, en crachant un jet d'eau par le siphon situé sous le manteau. Un calmar en fuite peut projeter de l'encre. Le nuage noir crée un leurre qui distrait l'ennemi et met un certain temps à se dissiper.
Les calmars de récifs sont capables de bondir jusqu'à 1,50 m hors de l'eau à la manière des poissons volants, avec la membrane et les tentacules déployés. Il arrive que le calmar retombe alors sur le pont d'un bateau...

Cycle de vie détaillé
Le cycle de vie des calmars peut être divisé en quatre phases : post-larvaire (tout juste sorti de l'œuf), juvénile, moyen et adulte. Chacune de ces étapes de croissance est marquée par le degré de développement de la membrane entourant progressivement le manteau (75 % chez les jeunes puis 90 % chez les adultes) et d'une meilleure maîtrise des techniques de propulsion, s'accompagnant d'un changement d'habitat :
- les minuscules calmars tout juste éclos mènent une vie semi-planctoniques : leur capacité natatoire ne leur permettant pas de faire face aux courants marins, ils se laissent dériver au milieu du plancton*. Ils restent près des côtes en eaux peu profondes, à proximité ou sous la végétation flottante.
- Les juvéniles de petite taille, qui ont de courtes nageoires, commencent à acquérir la capacité de nager à contre-courant. En journée, ils affectionnent les herbiers de Thalassia où ils peuvent se cacher et trouver de petites proies à chasser. Ils restent entre 25 et 30 cm de la surface dans la journée puis ils se rapprochent du fond pour passer la nuit.
- Les individus de taille moyenne ont une vie de moins en moins planctonique. Leurs nageoires s'allongent et leur nage devient plus rapide et plus efficace au fur à mesure qu'ils atteignent l'âge adulte et ils commencent à parcourir des distances de plus en plus vastes et à descendre en profondeur.
- Les adultes sont capables de parcourir de vastes distances (entre les îles San Blas et les Caraïbes par exemple) et descendre jusqu'à 100 m de profondeur. Ils se rapprochent des côtes dans la journée et fréquentent des fonds variés : sableux, rocheux, coralliens, mais évitent désormais les faibles profondeurs et les herbiers. La nuit ils restent souvent en pleine eau au large, parfois en profondeur.

Communication intra-spécifique
Dans un banc de 2 à 10 individus, tous nagent dans le même sens et de façon coordonnée, comme une escadrille. Ils communiquent entre eux grâce à une grande variété de signaux visuels complexes.
Le banc est souvent disposé en ligne. Des "sentinelles", généralement les individus de grande taille, sont réparties sur les côtés et au centre. Lors de confrontation avec un prédateur, ce sont souvent les plus gros spécimens qui réagissent en premier et jouent de leur couleur et de leur forme pour intimider l'adversaire.

Les calmars de récif ont la capacité de changer rapidement et radicalement la pigmentation de leur peau. A cette signalisation colorée s'ajoutent des attitudes corporelles propres à S. sepioidea. Le contrôle des teintes et des motifs dessinés est réalisé par le système nerveux qui agit sur les chromatophores* (cellules pigmentaires). Le contrôle de la pigmentation est si précis qu'un individu peut afficher des messages de couleurs différentes sur son flanc gauche et sur son flanc droit. Par exemple, il est capable d'envoyer un message d'alerte à un congénère sur sa droite pendant qu'il affiche des couleurs d'intimidation à un prédateur qui se présente par la gauche.

Des colorations et attitudes spécifiques à chaque situation ont été identifiées :
- Lorsqu'il se déplace, le calmar adapte naturellement sa couleur au milieu dans lequel il évolue. Ce camouflage le préserve des prédateurs et lui donne un avantage sur ses proies.
- Lorsqu'il est sur le point d'attaquer pour défendre son territoire contre un intrus, le calmar des récifs prend une teinte violette et décrit des cercles en remontant vers la surface pour intimider l'adversaire.
- S'il est effrayé, il vire au jaune d'or. En cas de légère alarme, ses arcades sourcilières se teintent en or tandis que ses bras et ses tentacules deviennent blancs.
- Pour se défendre, en particulier face à un prédateur, le calmar de récif étire ses bras et ses nageoires pour paraître plus grands. Les schémas colorés qu'il adopte sont très variés : émissions de couleurs vives ou au contraire apparition de taches, de bandes ou de raies sombres sur le ventre ou les bras, coloration mouchetée ou zébrées, taches jaune d'or…

Informations complémentaires

S. sepioidea passe près de 64% de sa journée à se reposer au-dessus des fonds sableux. Le reste de la journée et la nuit sont divisés entre la chasse, les préludes amoureux et à éviter les prédateurs. Sachant qu'un banc de calmar est attaqué par un prédateur environ 6 fois par heure, cela rend ces animaux méfiants vis-à-vis de tout ce qui s'approche de leur territoire.
L'aube et le crépuscule sont les meilleurs moments pour observer S. sepioidea pendant une parade d'accouplement et découvrir tous les changements de couleurs qui se produisent alors. Mais il est plus facile de les approcher la nuit pendant leur chasse car ils sont attirés par la lumière des lampes. Pour avoir une chance de se rapprocher sans que l'animal ne s'enfuie, il faut éviter tout mouvement brusque et avancer doucement en ménageant des pauses pour gagner sa confiance et l'attirer vers la lumière.

Statuts de conservation et réglementations diverses

Sepioteuthis sepioidea ne fait pas partie des espèces menacées et n'est pas inscrit auprès de l'UICN. Les captures de ces calmars se résument à des prises accidentelles dans les filets de pêche, ils sont revendus aux pêcheurs locaux qui les utilisent comme appâts.

Origine des noms

Origine du nom français

Le nom commun du calmar de récif des Caraïbes reprend les caractéristiques d'habitat et de distribution géographique de l'espèce.

Origine du nom scientifique

Sepioteuthis : du latin [sepia] = seiche, et du grec [teuthis] = calmar ;
sepioidea : du latin [sepia], la seiche, et du grec [-oidea], qui signifie "à aspect de, qui ressemble à".

L'ensemble du nom signifie donc "calmar-seiche à aspect de seiche".

Classification

Numéro d'entrée WoRMS : 342241

Termes scientifiques Termes en français Descriptif
Embranchement Mollusca Mollusques Organismes non segmentés à symétrie bilatérale possédant un pied musculeux, une radula, un manteau sécrétant des formations calcaires (spicules, plaques, coquille) et délimitant une cavité ouverte sur l’extérieur contenant les branchies.
Classe Cephalopoda Céphalopodes

Yeux complexes, coquille interne, externe cloisonnée ou absente, cavité palléale musclée, siphon musculeux, tentacules ou bras (munis de ventouses).

Sous-classe Coleoidea Coléoïdes

Ventouses sur les bras, au nombre de 8 au moins. Bras hectocotyle chez le mâle pour le transfert des spermatophores. 2 branchies, 2 néphridies, une coquille interne ou vestigiale, des chromatophores, une poche à encre, un grand cerveau.

Ordre Myopsida Myopsides

Calmars possédant une membrane cornéenne transparente recouvrant l'œil. Les tentacules et les bras portent des ventouses mais jamais de crochets. Cet ordre comprend 2 familles (dont les Loliginidés) et peu d'espèces mais ces dernières sont pour la plupart côtières et donc plus familières.

Famille Loliginidae Loliginidés

Calmars côtiers et peu profonds. Certaines espèces tolèrent de faibles salinités. Les nageoires se rejoignent à l'extrémité postérieure du corps et peuvent s'étendre sur une partie ou sur toute la longueur du manteau. Les bras portent généralement 2 rangées de ventouses et les massues tentaculaires en portent 4 rangées. Le bras inférieur gauche est généralement modifié chez les mâles adultes (bras hectocotyle).

Genre Sepioteuthis
Espèce sepioidea

Nos partenaires