Racines aériennes à nombreux arceaux
Feuilles luisantes vert clair, elliptiques, pointant vers le haut
Petites fleurs blanches
Plantule vivipare sous forme d'un long hypocotyle vert
Palétuvier à échasses, manglier à arceaux, manglier à échasses, rhizophore, Kéö (dialecte néo-calédonien païcî), Kwéö (dialecte néo-calédonien ajië), Némi (dialecte néo-calédonien djigo), Kebeu (dialecte néo-calédonien nénéma)
American mangrove (GB), Akik jalar (dans le Johore, Malaisie), Tongo (Tonga), Dogo (Fidji), Togo (Samoa), Hembra (Guam)
Littoraux Indo-Pacifique
Zones DORIS : ● Indo-PacifiqueLittoraux du pourtour Indo-Pacifique.
Les Rhizophora sont un élément essentiel des mangroves*. Les sols de mangrove sont souvent sableux-vaseux et limoneux, mais les palétuviers s'accommodent aussi des substrats plus durs comme les roches coralliennes. Il est très rare de voir des Rhizophora sur du sable pur.
Les mangroves sont toujours partiellement inondées, la plupart du temps par les eaux marines. Les Rhizophora sont communs dans les baies abritées et aux embouchures des rivières à faible courant.
Le R. stylosa est considéré comme relativement ubiquiste* des différents types de mangroves existantes.
Rhizophora stylosa est un petit arbre de moins de 10 m de haut, mais certains spécimens atteignent 25 m. Son aspect global est une grosse masse de feuillage épais qui surmonte des racines en forme d'arceaux plantés dans l'eau.
Les feuilles sont vert clair, elliptiques, en position opposée de part et d'autre de la branche et dirigées vers le haut. Leur épiderme est revêtu d'une épaisse cuticule* luisante et protectrice. Leur face inférieure est tachetée de points marron.
Cet arbre forme des racines marron remarquables : elles sont aériennes, partent du tronc ou des racines, et ont une forme en arceau. Leur diamètre est uniforme (quelques cm) tout du long de la racine. Elles font office de pilotis dans le substrat meuble. La partie émergée des arceaux porte de nombreuses lenticelles*. Les arceaux se ramifient en s'éloignant du tronc, les uns à la suite des autres. Ils forment ainsi un couvert enchevêtré de solides racines sur plusieurs m² autour du tronc.
Les fleurs sont petites (environ 1 cm) et disposées en inflorescence*. Les quatre sépales* sont jaunes, tandis que les quatre pétales sont blancs, poilus et fins. Sépales et pétales forment deux étoiles à quatre branches bien symétriques, empilées de manière opposée. Cette délicate corolle aux couleurs pâles tirant sur les verts et les jaunes offre au regard une floraison plutôt discrète.
Les fruits sont massifs (environ 3 cm), marron foncé, de forme légèrement conique et ne contiennent qu'une seule graine. Cette dernière se développe sur l'arbre en une plantule au long hypocotyle* vert qui, lorsqu'il chute, se plante au pied de l'arbre dans le substrat meuble.
La confusion est possible entre plusieurs espèces de Rhizophora.
Cependant R. stylosa semble le seul palétuvier à faire des racines en arceaux successifs qui donnent l'impression de courir à la surface de l'eau.
R. selala produit quant à lui des racines à cordes qui tombent verticalement des branches.
R. apiculata porte des fleurs aux sépales pointus à leur sommet, et ces feuilles ne sont pas tachetées de pois marron sur la face inférieure.
R. mucronata porte des feuilles très arrondies et ses racines ne font qu'un seul arc pour s'enchâsser (pas ou peu de ramifications).
Comme tous les végétaux, les palétuviers pratiquent la photosynthèse* qui est leur seule source de carbone. L'eau et les sels minéraux sont puisés dans le substrat grâce aux racines.
R. stylosa est une plante pérenne*.
Les petites fleurs ne sont ni chatoyantes, ni odorantes, ne produisent pas de nectar et n'attirent ainsi pas les oiseaux pollinisateurs. Seuls quelques insectes comme les abeilles et les fourmis les visitent et les pollinisent.
La fructification et la floraison se chevauchent durant 2 à 3 mois dès le début de saison estivale.
Les fruits ne sont pas disséminés car l'espèce est vivipare* : la graine germe alors qu'elle est encore sur l'arbre (dans le fruit), et se développe en plantule. C'est l'arbre qui nourrit directement cette plantule. Cette dernière est faite d'un très long hypocotyle* vert qui pointe vers le bas, très caractéristique des Rhizophora.
La plantule se détache de l'arbre lorsqu'elle est trop lourde. Elle peut flotter à la surface de l'eau avant de se planter verticalement dans le substrat meuble.
Dès son enchâssement, des racines aériennes se développent à partir de l'hypocotyle* et la jeune pousse croît alors rapidement, ce qui évite qu'elle soit engloutie dans la vase ou le sable.
La forte salinité du milieu et les variations de cette salinité au fil du temps (lors des pluies, selon la marée) induisent des conditions de vie relativement extrêmes pour ces arbres. En effet, le sel de mer, s'il pénètre dans les tissus de la plante, conduit à une modification des équilibres osmotiques, ce qui peut être mortel.
La résistance des Rhizophora stylosa à ces conditions de vie est due aux caractéristiques physiologiques et morphologiques suivantes :
- La majeure partie des racines est aérienne, nonobstant ainsi partiellement l'eau de mer.
- La partie aérienne des racines en arceau porte des lenticelles*, qui sont des pores perméables aux gaz respiratoires de l'air, tandis que la partie immergée et souterraine de ces racines est imperméable à l'environnement, et donc aux sels de mer.
- Les feuilles de bas niveau ont une cuticule* plus épaisse que celles des hauts niveaux, ce qui leur permet d'être imperméables à l'eau de mer lors des temps d'immersion à marée haute.
Différentes parties des palétuviers du genre Rhizophora sont parfois utilisées par les populations locales de l'Asie comme source de remèdes médicinaux pour de nombreuses maladies. Des recherches ont montré que les tiges de R. stylosa peuvent contenir des flavonoïdes = des molécules aux propriétés anti-radicaux libres.
Dans certains pays, le bois est utilisé comme matière première pour faire du papier et sert aussi de bois de chauffage.
Les arceaux enchevêtrés des racines forment un maillage au-dessus du substrat qui peut retenir prisonniers les objets et particules y parvenant, comme les alluvions et les divers produits d'éboulements en provenance des terres. La présence des mangroves à R. stylosa évite donc les envasements du lagon. Elles protègent aussi le littoral de l'érosion marine, en formant un écran aux vagues et turbulences de la mer.
En zone urbaine, les mangroves* retiennent les polluants et les rejets non biodégradables. Elles sont alors des lieux pollués et parfois détériorés.
L'eau saumâtre* des mangroves* permet le développement d'une faune subaquatique tout à fait caractéristique, souvent riche en juvéniles d'espèces lagonnaires, voire pélagiques*.
Cependant, les mangroves* sont gravement menacées dans certains pays au profit de l'aménagement urbain des littoraux.
Dans la classification phylogénétique (1998) la famille des Rhizophoraceae fait partie de l'ordre des Malpighiales, mais dans la classification Cronquist (1981) elle appartient à l'ordre des Rhizophorales.
R. stylosa est inscrite depuis 2010 sur la liste rouge de l'UICN au statut LC (Least Concern, soit peu préoccupante).
Les mangroves sont cependant souvent incluses dans les aires marines protégées du monde.
Cette espèce est inscrite dans l'Annexe I à l'arrêté n° 2007-4901/GNC du 23 octobre 2007 : liste des organismes nuisibles dont l'introduction est interdite en Nouvelle-Calédonie.
Elle est considérée comme un espèce introduite envahissante en Polynésie française.
L'origine du terme palétuvier semble inconnue. Jusque vers la fin du XVIIe siècle, palétuvier n'était employé qu'à la Martinique, et s'appliquait même à certains arbres qui ne se développent pas dans l'eau.
Rhizophora : du grec [rhizo-] = racine, et [phor-] = qui porte. Tous les arbres de ce genre sont en effet caractérisés par le port de nombreuses racines aériennes très développées.
stylosa : du grec [stylo-] = colonne. Les racines de cette espèce ressemblent à des tiges.
Numéro d'entrée WoRMS : 235098
Termes scientifiques | Termes en français | Descriptif | |
---|---|---|---|
Embranchement | Magnoliophyta | Angiospermes | Plantes à fleurs dont les graines fécondées sont renfermées dans un fruit. |
Classe | Magnoliopsida | Dicotylédones | Embryons à deux cotylédons*. |
Sous-classe | Rosidae | Rosidés | |
Famille | Rhizophoraceae | Rhizophoracées | |
Genre | Rhizophora | ||
Espèce | stylosa |
Palétuvier à arceaux
Les racines en forme d'arceaux sont nettement visibles à la base de l'arbre. Elles semblent courir à la surface de l'eau. Les feuilles vert clair relevées vers le haut donnent à l'arbre un aspect bien touffu sur toute sa hauteur.
Nouvelle-Calédonie, Nouméa, mangrove
26/11/2008
Face inférieure d'une feuille
La face inférieure de ces feuilles est ponctuée de tout petits points marron. La forme elliptique de la feuille est ici bien reconnaissable.
Nouvelle-Calédonie, Nouméa, mangrove
2008
Fleurs et boutons floraux
Les fleurs sont reconnaissables à leurs quatre pétales blancs sur les quatre sépales jaunâtres. La floraison s'étale sur plusieurs semaines, d'où la présence de boutons et de fleurs épanouies en même temps.
Nouvelle-Calédonie, Nouméa, mangrove
22/11/2008
Les plantules vivipares
Les fruits sont marron et ont une forme conique, de quelques cm de long. Ils sont surmontés par les quatre sépales de l'ancienne fleur. La graine germe à même la plante-mère : c'est la viviparité du palétuvier. A l'extrémité du fruit émerge alors l'hypocotyle (la 1ère tige de la jeune pousse), qui va fortement s'allonger sur une dizaine de cm.
Nouvelle-Calédonie, Nouméa, mangrove
26/11/2008
Polluants retenus dans les arceaux
Les déchets des villes peuvent facilement être retenus puis s'accumuler dans l'enchevêtrement des racines échasses des Rhizophora.
Nouvelle-Calédonie, Nouméa, mangrove
22/11/2008
Les genres Rhizophora et Avicennia se côtoient en mangrove
A gauche se tient un Avicennia marina var. resinifera et à droite se distingue un Rhizophora stylosa. La mangrove est d'une biodiversité globalement pauvre du fait de son environnement très spécifique (eau saumâtre ou salée, fonds meubles), où s'érigent quelques espèces de palétuviers seulement. Une seule espèce de palétuvier peut couvrir à elle seule plusieurs dizaines de m² de mangrove.
Nouvelle-Calédonie, Nouméa, mangrove
22/11/2008
Rédacteur principal : Virginie LEON
Vérificateur : Cédric MITEL
Responsable historique : Cédric MITEL
Responsable régional : Anne PROUZET
Dong-Li L., Xiao-Ming L., Ze-Yu P., Bin-Gui W., 2007,Flavanol derivatives from Rhizophora stylosa and their DPPH radical scavenging activity, Molecules, 12, 1163-1169.
Muzinger J., Lebigre J.M., 2007, THE FLORA OF THE NEO CALEDONIAN MANGROVES SWAMPS, In: Compendium of marine species of New Caledonia, Documents scientifiques et techniques vol. II-7, éditions IRD, 63-67.
La page de Rhizophora stylosa dans l'Inventaire National du Patrimoine Naturel : INPN