Allure d'araignée robuste
Couleur : du jaune pâle au brun rougeâtre
Longueur et envergure de 1 à 2 cm
4 paires de pattes marcheuses griffues recourbées
Prosome terminé par une trompe
Araignée de mer (ne pas confondre avec les crustacés du même nom)
Sea spider (GB), Picnogonido litoral (E), Knotige Asselspinne (D), Michelinmannetje (NL), Tyk havedderkop (DK)
Pycnogonum littorale (Strøm, 1762)
Mer du Nord, Manche, océan Atlantique
Zones DORIS : ● Europe (côtes françaises), ○ [Atlantique Nord-Est, Manche et mer du Nord françaises], ● Atlantique Nord-OuestOn peut trouver les pycnogonons depuis la Norvège arctique au nord jusqu'à l'ouest de la Méditerranée au sud. Ils sont aussi abondants de l'autre côté de l'océan Atlantique, depuis le golfe du Saint-Laurent jusqu'à l'état de New-York.
Pycnogonum litorale affectionne les eaux froides à tempérées de l'océan Atlantique Nord. Il s'agit d'un animal benthique* qui fréquente les étages infra et circalittoral* peu profonds, parfois même la laisse de basse-mer. On le trouvera d'ordinaire sur substrat* rocheux, là où se développent des anémones de mer et des hydraires, qui constituent sa nourriture exclusive.
Certains spécimens ont été prélevés par 400 mètres de fond.
Pycnogonum litorale est un étrange petit arthropode robuste et trapu dont l'allure évoque une araignée. Le prosome* est fin et allongé. Il porte la tête, antérieure, surmontée dorsalement par 4 yeux et pourvue d'une longue trompe cylindrique qui s'amincit vers l'avant. Derrière la tête, le prosome est divisé en quatre segments qui portent chacun une paire de pattes locomotrices, dont la longueur peut excéder légèrement celle du corps. Ces pattes sont composées chacune de neuf articles, d'où un nombre d'articulations et de "genous" (étymologiquement) important. Chaque patte est recourbée vers l'avant et se termine par une griffe.
Postérieurement, on observe un opisthosome* minuscule entre les deux dernières pattes.
Dorsalement, la surface de l'animal peut être parsemée de tubercules et d'épines minuscules.
La longueur du tronc (de l'extrémité de la trompe à celle de l'opisthosome) excède rarement le centimètre, l'envergure, elle, ne dépasse pas les deux centimètres.
La couleur du pycnogonon est variable : jaune pâle à brun rougeâtre. Cette coloration dépend du sexe de l'animal (les femelles étant plus claires que les mâles), du temps qui s'est écoulé depuis le dernier repas (les individus rassasiés étant plus foncés) et du temps qui s'est écoulé depuis la dernière mue (les individus dont la mue est "fraîche" sont plus clairs).
Enfin on distinguera les mâles des femelles par la présence de deux appendices supplémentaires portés par le prosome : les ovigères, qui ont un rôle dans la reproduction de l'animal.
Les pycnogonons sont carnivores, ils se nourrissent exclusivement de cnidaires. Adultes, ces organismes percent le tégument de diverses espèces d'anémones au moyen de leur trompe, qu'ils utilisent comme une paille, puis en aspirent les liquides internes.
Les individus juvéniles n'ayant pas une trompe assez forte se contentent d'hydraires, comme Clava multicornis.
Les pycnogonons ne provoquent jamais la mort des anémones. Ils siphonnent simplement une petite quantité de liquides comme un moustique suce le sang de son hôte. Plus qu'un rapport prédateur-proie, les pycnogonons ont un comportement alimentaire à rapprocher davantage du parasitisme. Ils prélèvent des anémones ce dont ils ont besoin pour être rassasiés, sans véritablement leur porter préjudice.
Les anémones convoitées sont Actinia equina, Anemonia viridis, Calliactis parasitica, et Metridium dianthus.
La digestion se fait dans un système digestif ramifié jusque dans les pattes, étant donnée la finesse du prosome.
La reproduction est uniquement sexuée, et les sexes sont séparés. La période de reproduction s'étend du printemps à l'automne. Lors de l'accouplement, le mâle se cramponne à la femelle, au dessus de sa tête. Celle-ci pond ses ovules, qui sont émis ventralement par des orifices situés sous les pattes. Le mâle recueille ensuite les œufs, et au moyen d'appendices spécialisés, les ovigères, il les place sous son ventre, les féconde, et veillera sur eux pendant plusieurs semaines, jusqu'à leur éclosion. Les larves*, de type protonymphon, ne possèdent que trois paires de pattes et passeront par une métamorphose (avant de ressembler à des jeunes adultes) au cours de laquelle elles aquièrent leur quatrième paire de pattes.
Pycnogonum litorale est une des rares espèces d'invertébrés chez qui le mâle prend soin des œufs...
La différenciation des mâles et des femelles chez cette espèce se fait précisément par la présence ou non des ovigères, fins appendices recourbés de part et d'autre du proboscis. Les femelles en sont systématiquement dépourvues.
Cette espèce sera toujours trouvée à proximité d'anémones ou d'hydraires, dont elle se nourrit exclusivement.
Pourtant caractéristiques de chélicérates, les pédipalpes et les chélifores (équivalents des chélicères des arachnides) sont secondairement absents chez cette espèce : les larves protonymphon en sont pourvues, et les perdent ensuite pendant leur métamorphose.
Comme l'immense majorité des arthropodes, Pycnogonum litorale doit muer pour grandir. Lors de la mue, l'animal se départit une à une de chacune des enveloppes de ses pattes.
Prédateur habituel de pycnogonides, le crabe vert (Carcinus maenas) est incapable de se nourrir de Pycnogonum litorale. Ce dernier sécrète deux hormones défensives qui ont un effet désagréable et répulsif sur Carcinus maenas : ce sont deux ecdystéroïdes nommés 20-hydroxyecdysone 22-acétate et 20-hydroxyecdysone (ou taxistérone).
Linné a longtemps considéré les pycnogonides comme des arachnides, et les a notamment rapprochées des opilions, ou faucheurs. Plusieurs espèces de pycnogonides ont porté autrefois le nom de genre Phalangium, attribué de nos jours à des opilions, arachnides à longues pattes fines.
Les pycnogonides sont en outre souvent appelés "faucheurs de mer".
Pycnogonon est un terme directement dérivé du nom de genre Pycnogonum. Il est parfois utilisé, à tort ou à raison, pour désigner également d'autres espèces de pycnogonides.
Leur nom "araignée de mer" (sea spider en anglais) est dû à leur ressemblance avec les araignées terrestres, avec lesquelles ils sont apparentés. Encore une fois, ne pas confondre les pycnogonides avec les grands crabes du même nom, qui sont eux des crustacés !
Pycnogonum : du grec [pycno]= dru, serré, épais, et du grec [goni] = angle, genou : les articulations des 8 pattes sont épaisses et nombreuses,
litorale : du latin [litus] = rivage, côte : en référence au biotope* occupé par cet organisme.
Pycnogonum litorale est donc un organisme aux genoux épais, qui vit près du littoral...
Termes scientifiques | Termes en français | Descriptif | |
---|---|---|---|
Embranchement | Arthropoda | Arthropodes | Animaux invertébrés au corps segmenté, articulé, pourvu d’appendices articulés, et couvert d’une cuticule rigide constituant leur exosquelette. |
Sous-embranchement | Chelicerata | Chélicérates | Corps divisé en prosome* et opisthosome*. Chélicères et Pédipalpes. 4 paires de pattes locomotrices. |
Classe | Pycnogonida | Pycnogonides | Chélicérates exclusivement marins. Opisthosome* fortement réduit voire absent. Une trompe préorale (ou proboscis). Pattes locomotrices composées de 9 segments. |
Ordre | Pantopoda | Pantopodes | Unique ordre de Pycnogonides. Ces 2 termes sont souvent considérés comme synonymes. |
Famille | Pycnogonidae | Pycnogonidés | Corps trapu. Pattes marcheuses courtes et épaisses. |
Genre | Pycnogonum | ||
Espèce | litorale |
Un organisme singulier
Voici Pycnogonum littorale, un étrange petit arthropode côtier dont l'allure évoque une araignée robuste.
Plage du Croisic (44)
20/12/2007
Face dorsale
Observez le tronc allongé porteur de quatre paires de pattes locomotrices, elles mêmes divisées en 9 articles (le dernier est une griffe). Observez l'opisthosome minuscule, et les yeux de couleur orangée. Observez enfin la trompe antérieure qui s'amincit vers l'avant.
Plage du Croisic (44)
20/12/2007
Face ventrale
L'animal a été retourné afin d'observer sa face ventrale, puis a été soigneusement remis en place. Il s'agit d'une femelle, car les ovigères sont absents.
Plage du Croisic (44)
20/12/2007
Un petit arthropode
Il faut avoir l'œil pour débusquer cet étrange animal qui parcourt l'estran légèrement immergé (ici sur un thalle de Fucus serratus) à la recherche d'anémones, des tissus desquelles il pourra siphonner les liquides au moyen de sa trompe.
Plage du Croisic (44)
20/12/2007
Rédacteur principal : Frédéric ZIEMSKI
Vérificateur : Anne PROUZET
Responsable régional : Frédéric ZIEMSKI
Bückman D., Starnecker G., Tomaschko K.H., Wilhelm E., Lafont R. & Girault J.P., 1986, Isolation and identification of major ecdysteroids from the pycnogonid Pycnogonum litorale Strøm (Arthropoda, Pantopoda), J. Comp. Physiol. B, 47, 257-267.
Heard J.R., 2005, Pycnogonum litorale, A sea spider. Marine Life Information Network: Biology and Sensitivity Key Information Sub-programme [on-line]. Plymouth: Marine Biological Association of the United Kingdom.