Ver plat au corps bleu lumineux, parfois dégradé depuis le blanc et allant jusqu'à la marge (parfois plus sombre, violette)
Bande médiane orange vif plus ou moins large, avec fine ligne longitudinale blanche centrale
2 pseudo-tentacules simples à l'avant, formés des replis marginaux du corps
Ver plat de Suzanne
Susan's flatworm (GB), Planaria de Suzanna (E)
Indo-Pacifique tropical Ouest et central
Zones DORIS : ● Indo-PacifiqueAnimal de l'Indo-Pacifique, la limite ouest dans l'océan Indien semble être l'archipel des Maldives. Il est présent en Indonésie et la limite orientale se trouve probablement dans une zone mélanésienne incluant la Nouvelle-Calédonie et les îles Fidji.
Ce ver plat est un habitant des récifs coralliens.
Pseudoceros susanae est un ver plat d'assez grande taille (55 mm). On le rencontre sous une forme plutôt ovale mais également allongée.
Le corps est bleu lumineux. Cette couleur bleue est parfois (pas toujours) dégradée depuis une zone centrale blanche et elle s'étend jusqu'à la marge. Cette dernière est souvent plus sombre, violette à rouge sombre.
Sur le milieu du dos, il y a une bande orange soutenu, toujours marquée en sa médiane d'une fine ligne blanche. Cette bande orange, plus ou moins large selon les individus, commence derrière la tache oculaire* et se termine avant l'extrémité postérieure du ver plat, sans jamais atteindre les marges.
A l'avant de l'animal, les replis du corps forment deux "pseudo-tentacules" assez simples, dans le même bleu que le corps et porteurs de l'éventuelle couleur de marge.
Pseudoceros bifurcus Prudhoe, 1989 : sa coloration varie dans les mêmes tonalités de bleus (gris-bleu très pâle, ciel à des bleus plus lavande voire bleu roi) s’assombrissant vers la périphérie jusqu’à virer au mauve. Il porte une ligne médiane discontinue et irrégulière, assez fine. Cette ligne est généralement de couleur blanche virant à l'orange vif au niveau de la tête et est délimitée par un trait sombre, pourpre à noir.
Pseudoceros tristriatus Hyman, 1959 : bleu plus ou moins pâle, avec une bordure sombre, il porte 3 lignes dorsales longitudinales orange, bordées généralement de noir.
Pseudoceros sp. 12 : on trouve ce ver plat notamment à Mayotte. Il montre une bande centrale orange mais elle n'est jamais marquée de la ligne médiane blanche. Le reste du corps est blanc avec une marge bleue irrégulière.
Quelques individus semblent proches de la coloration prototypique de P. susanae mais s'en éloignent par quelques détails de motifs ou de couleurs. Appelés génériquement Pseudoceros cf. susanae, on en trouve par exemple dont le bleu n'est plus que très marginal et la bande orange principalement blanche sauf ses bordures extérieure et intérieure (Micronésie).
Il conviendrait d'étudier ces individus pour déterminer s'ils sont bien conspécifiques* à P. susanae ou s'il s'agit d'une autre espèce.
Ces vers colorés peuvent être, au premier abord, confondus avec des nudibranches tout autant bigarrés. En effet, certains nudibranches ont un corps ovoïde et semblent peu épais, à l’instar des vers plats. De plus, les deux plissements des bords à l’avant du corps des vers plats peuvent rappeler la forme des rhinophores* des nudibranches. Mais cette erreur ne résiste pas à une observation attentive : les vers plats sont extrêmement fins (les nudibranches jamais autant), ils n'ont jamais d'organes respiratoires (panache branchial) implantés sur le dos et leur reptation est différente de celle des nudibranches.
Le régime est carnivore. Le ver plat de Susan se nourrit probablement de zoïdes de tuniciers, notamment de synascidies. Durant la reptation, le pharynx musculeux dispense des sucs et des enzymes sur la colonie, permettant de dissoudre les tissus puis de manger le zoïde sans défense.
Reproduction sexuée :
Les vers Polyclades sont hermaphrodites* avec des systèmes reproductifs mâle et femelle simultanément opérationnels, et conjointement utilisés pour la reproduction sexuée.
Le pénis, ou stylet (environ 80 μm de long), est localisé dans une chambre mâle, après la zone pharyngienne*. Et juste derrière se trouve le pore femelle qui servira à la ponte. Car la reproduction ne se fait pas par cette voie-là, qui n'est qu'un simple passage pour les œufs, mais sera intra-cutanée.
En effet, la reproduction chez ces vers plats ressemble à une sorte de "combat" très esthétique durant lequel chacun des protagonistes tente de perforer le corps de son alter ego de son stylet pointu, telle une seringue hypodermique, et ce afin de lui inoculer sa semence.
Les spermatozoïdes* injectés sont biflagellés. Ils se répandront dans le corps de la "victime" et la fécondation est interne, qui se fera au niveau des oviductes*.
La ponte de Pseudoceros susanae est donc émise par le pore génital femelle et sera scellée sur le substrat* en une fine couche de capsules ovigères. Collés dans celles-ci, les œufs poursuivront un développement embryonnaire durant quelques jours puis écloront avec la destruction de la capsule.
Les larves ciliées* (la larve caractéristique des Polyclades, appelée larve de Müller, ressemble parfois à une larve trochophore*) qui émergeront des œufs seront pélagiques* et nageuses, avant de se métamorphoser*.
Reproduction asexuée :
Les vers plats se reproduisent également par scissiparité*. Un fragment de leur corps peut se développer et donner un nouveau ver plat complet, clone génétique du parent, qui peut donc lui même régénérer le fragment manquant.
Ceci est possible grâce à la présence dans les tissus de cellules souches, indifférenciées (appelées néoblastes), qui peuvent migrer vers les zones lésées et, par divisions, produire les cellules spécialisées manquantes.
Comme chez tous les Polyclades, le tube digestif comprend une bouche, située en face ventrale. Logé dans le premier tiers du corps, un pharynx complexe, musculeux, est caractéristique du groupe, montrant plusieurs (souvent 7) lobes ramifiés et s'étendant dans toutes les directions. Il n'y a pas d'anus. Le système excréteur, des proto-néphridies*, est rudimentaire.
De même, le ver plat de Susan n'a pas de système circulatoire et n'a pas d'appareil respiratoire différencié : sa respiration est cutanée, comme chez tous les vers plats.
Sur la bordure arrière des pseudo-tentacules, on peut trouver des zones d'afférences lumineuses (yeux tentaculaires), positionnés en trois ou quatre rangs. Sur le dos et derrière les pseudo-tentacules, se trouve également une tache oculaire, organisée en forme de croissant et comprenant une quarantaine d'yeux cérébraux (des cellules sensibles à la lumière, reliées au ganglion cérébral).
Une sorte de ventouse (le cotylé) se trouve sur la face ventrale de P. susanae, vers le milieu du corps mais ce cotylé est très difficile à voir. Parfois juste une petite bosse, parfois un bourrelet ou une légère dépression dans l'épiderme, il combine des fonctions musculaires et adhésives. Sa présence fonde l'appartenance du ver plat de Susan au sous-ordre des Cotylés.
Les déplacements sont assurés à la fois par un épiderme cilié, avec une densité de cils beaucoup plus forte sur la face ventrale, et de puissants muscles dorsaux-ventraux ainsi que circulaires.
L'holotype* de cette espèce provient de Bathala Island, dans l'atoll d'Ari, aux Maldives (4°04' N, 72°57' E.)
Les versions néo-calédoniennes de cette espèce semblent dépourvues de zone claire entre la bande centrale orange soutenu et la partie bleu vif, qui sont donc juxtaposées. La bordure marginale, même si un peu plus sombre, ne paraît pas montrer la couleur violette à rouge des versions plus orientales.
Ver plat de Susan : francisation du nom scientifique, qui dédie l'espèce à sa première collectrice.
Pseudoceros : du latin [pseudo] = faux ; et [ceros] = cornes. Ce nom évoque les pseudo-tentacules formés par les replis marginaux, à l'avant de l'animal et qui peuvent faire penser à des cornes.
susanae : nommée ainsi en 1997 par Leslie Newman et Charles Anderson en l'honneur de Susan G. Buttress, qui, la première, a collecté cette espèce.
Termes scientifiques | Termes en français | Descriptif | |
---|---|---|---|
Embranchement | Platyhelminthes | Plathelminthes | Vers plats à symétrie bilatérale, portant des organes des sens simples sur la tête, tube digestif à une seule ouverture ventrale. Nombreuses espèces libres ou parasites. |
Classe | Turbellaria | Turbellariés | Vers plats libres (non parasites) mus par une ciliature ventrale. Tube digestif ramifié qui possède une seule ouverture au centre de la face ventrale. |
Sous-classe | Archoophora | Archoophores | |
Ordre | Polycladida | Polyclades | Turbellariés à intestin très ramifié. Espèces de grande taille. Planaires marines. |
Sous-ordre | Cotylea | Cotylés | Polyclades caractérisés par la présence d’une ventouse ventrale permettant aux vers de se maintenir sur le fond. |
Famille | Pseudocerotidae | Pseudocérotidés | Corps ovale, lisse ou à papilles. Tentacules proéminents formés à partir de la marge. |
Genre | Pseudoceros | ||
Espèce | susanae |
Couleurs
Le corps est bleu vif, avec une bordure sombre, bleue, violette à rouge. Une bande centrale orange, plus ou moins large selon les individus, est marquée d'une fine ligne blanche opaque en son centre. La zone orange peut être séparée de la zone bleue par une marge diffuse blanche.
Menjangan, Bali, Petites îles de la Sonde, Indonésie, océan Pacifique, 10 m
13/04/2009
Variations de couleurs I
Le corps est bleu vif mais la marge périphérique, d'ordinaire violette à rouge sombre est ici très peu visible. La bande centrale orange, assez étroite est contiguë à la zone bleue, sans délimitation blanche.
Ce patron de couleur semble constant en Nouvelle-Calédonie.
Nouvelle-Calédonie (988), océan Pacifique, 8 m
31/07/2006
Variations de couleurs II
La zone bleue peut également prendre des tons plus violets. De même, la bande orange centrale peut varier en tonalité pour s'approcher du jaune-orangé et elle peut être séparée de la zone bleue à violette périphérique par une zone blanc opaque à marge diffuse.
Komodo, Petites îles de la Sonde, Indonésie, 10 m
18/11/2014
Distribution ; dans les Maldives
La limite est de la distribution semble se trouver dans l'archipel des Maldives, lieu de sa première récolte. L'espèce n'est pas signalée pour l'instant à La Réunion ou plus à l'ouest de l'océan Indien.
Archipel des Maldives, océan Indien, 15 m
15/12/2011
Distribution : Indonésie
Rencontre sur un tombant balinais.
Pemuteran, Bali, Petites îles de la Sonde, Indonésie, 20 m
20/12/2023
Distribution : en Nouvelle-Calédonie
Ce bien bel individu a été rencontré à proximité du "caillou". Les "pseudo tentacules", replis marginaux du corps, le font sans doute ressembler à un nudibranche. Mais il est facile de ne pas s'y tromper.
Poindimié, Nouvelle-Calédonie (988), océan Pacifique, 18 m
09/10/2009
Espèce ressemblante : Pseudoceros sp.12 (selon Newman & Cannon 2003)
Cette espèce rencontrée à Mayotte présente aussi une large bande centrale orange vif.
Mais le blanc est prégnant sur l'ensemble du corps et le bleu seulement nimbant des taches pourpre à marine sombre isolées, en bordure périphérique.
Même s'il arrive chez P. susanae que la zone bleue soit séparée de la bande orange par du blanc, il s'agit ici probabement d'une autre espèce, encore non décrite et répertoriée dans [Newman & Cannon 2003] comme Pseudoceros sp.12.
Lagon de Mayotte, océan Indien, 12 m
08/12/2010
Rédacteur principal : Alain-Pierre SITTLER
Vérificateur : Stéphane JAMME
Responsable régional : Alain-Pierre SITTLER
Guedelhoefer O.C. IV, Alvarado A.S., 2012, Amputation induces stem cell mobilization to sites of injury during planarian regeneration, Development, 139, 3510-3520.
Newman L.J., Anderson R.C., 1997, A new species and new records of Pseudoceros (Turbellaria, Polycladida) from the Maldives, J. South Asian Natural History, 2, 247-256.