Grandes colonies pennées à rameaux alternes
Hydrocaule (tige) solide, noirâtre, devenant incolore à l'extrémité
Polypes blancs, régulièrement espacés sur chaque branche
Plusieurs cercles de tentacules capités au-dessus d'une couronne de longs tentacules filiformes
Hydraire arbre de Noël, hydraire plume
Feather hydroid, sea nettle (GB)
Halocordyle disticha (Goldfuss, 1820)
Pennaria tiarella (Ayres, 1852)
Halocordyle tiarella Almann, 1872
Corydendrium splendidum Boone, 1938
Cosmopolite, mers chaudes
Zones DORIS : ● Europe (côtes françaises), ○ [Méditerranée française], ● Indo-Pacifique, ○ [Mer Rouge], ● CaraïbesPennaria disticha est une des espèces d'hydroïdes les plus communes aux Antilles, mais on la trouve dans toutes les mers tropicales à tempérées chaudes. Elle est signalée dans l'océan Indien, le Pacifique Est et Ouest, l'Atlantique Est et la Méditerranée (le spécimen type de l'espèce a d'ailleurs été récolté en baie de Naples).
Pennaria disticha s'installe sur tout support, en zone dégagée, où elle peut profiter d'une eau claire et renouvelée. On la trouvera sur substrat dur, mais aussi bien sur des éponges ou des ascidies, et elle peut former de gros "bouquets" de tiges sur tout élément fixe un peu dégagé du fond : corps-morts, pontons, cordages divers, éponges dressées, autres hydraires. Les herbiers ne lui conviennent pas, car probablement ils ne représentent pas un substrat suffisamment solide pour permettre l’ancrage de colonies aussi robustes.
On l'observe aussi bien tout près de la surface qu'à 40 m de profondeur.
Colonies dressées, pennées, (jusqu'à une vingtaine de centimètres) se développant à partir d’un réseau de stolons rampants sur le substrat. La tige principale ou hydrocaule* est dure et résistante, non ramifiée, de couleur noirâtre à la base et devenant progressivement transparente vers son extrémité. Cette tige est presque rectiligne, formant un très léger zigzag avec émission d’une branche latérale (hydroclade*) à chaque angulation : ces branches se forment alternativement de chaque côté et dans un même plan. Elles sont grêles et assez espacées, avec un profil plutôt convexe (légèrement arquées vers leur extrémité). Les branches les plus longues sont celles du milieu de la colonie, s’amenuisant vers le sommet et souvent abîmées ou manquantes vers la base.
La tige et les branches sont couvertes d’un périsarc* chitineux qui a tendance à agglomérer les menus débris en suspension, ce qui donne souvent un aspect "crasseux" aux colonies. Il faut regarder ces hydraires de près, et si possible à la loupe, pour découvrir la délicatesse de leur structure.
Les polypes (5 mm pour les plus grands) semblent "posés" à intervalles réguliers sur le côté supérieur des hydroclades*, au bout d’un court pédoncule, ce qui leur donne un aspect de décoration de Noël. Le périsarc s’arrête juste en dessous de l’hydranthe* qui ne peut jamais se rétracter à l'intérieur, comme c’est le cas chez tous les Athécates ou Gymnoblastiques*.
Les polypes sont allongés en forme de poire. Leur partie basale, la plus large, est entourée d’une couronne de longs tentacules filiformes. C’est juste au-dessus de ces tentacules que bourgeonnent les gonophores* en période de reproduction. Au-dessus de cette couronne, sur tout le corps de l'hydranthe, se trouvent de courts tentacules capités* dispersés en cercles irréguliers. Cela donne un aspect de "pile d’assiettes" à cette partie du polype.
L’hydraire des amarres se nourrit de petites proies du zooplancton* capturées dans l’eau par ses tentacules. Les polypes sont capables d'attraper de petits crustacés aussi gros, et même nettement plus gros qu'eux, parfois conjointement entre plusieurs hydranthes voisins (observation personnelle). Les longs tentacules ramènent la proie tout contre l'hypostome allongé où les tentacules capités finissent de la paralyser et de l'introduire dans la bouche.
La nourriture captée par un polype nourricier est ensuite distribuée à l’ensemble de la colonie, tous les polypes étant reliés par le coenosarc* qui forme un réseau de tubes communicants entre eux.
Chaque colonie est soit mâle, soit femelle. Il n’y pas de polypes reproducteurs spécialisés.
Pendant les mois chauds, des bourgeons médusaires apparaissent directement sur les polypes, juste au-dessus de la couronne de tentacules aboraux* filiformes. Ces bourgeons grossissent en donnant de petites anthoméduses typiques (eumédusoïdes*) : en forme de cloche plus haute que large, avec quatre tentacules rudimentaires réduits à un simple renflement du bord de l’ombrelle, dépourvu d’ocelle* et de statocyste*. Les gonades sont situées sous l’ombrelle, à la surface du manubrium*.
Ces anthoméduses peuvent ou non se détacher du polype et mener une courte vie planctonique, réduite à la seule fonction de reproduction. Il arrive même que les gamètes viennent à maturité et soient libérés dans l’eau alors que le bourgeon médusaire (gonophore*) est toujours attaché au polype.
La fécondation a lieu en pleine eau, les larves (planula*) ciliées iront se fixer sur le substrat et donneront une nouvelle colonie, soit mâle, soit femelle.
En Méditerranée, il est consommé par les nudibranches dont Flabellina affinis.
La croissance de la colonie, en hauteur (allongement de l'hydrocaule*) ou en largeur (allongement des hydroclades*) se fait selon le même mode : les nouveaux polypes bourgeonnent à partir d'une zone de croissance située juste au-dessous du polype terminal.
En conséquence, le plus gros polype d'une branche est celui du bout, le plus âgé ensuite est situé à la base de la branche, le troisième par ordre de taille sera situé entre ces deux premiers, etc. Il sont donc rangés par ordre de taille décroissante de la base vers la pointe, sauf le tout dernier qui est toujours le plus âgé et le plus gros.
Ce mode de croissance (dit "monopodial à polype terminal") est assez répandu chez d'autres hydraires comme Eudendrium, Bougainvillia..., mais il est ici très facile à observer au vu de la taille des hydranthes.
Sans être réellement dangereuse, Pennaria disticha peut laisser des souvenirs cuisants à un plongeur qui saisirait à pleine main une amarre infestée de ses colonies.
"Hydraires des amarres" est une proposition du site DORIS, pour rappeler qu'on les rencontre fréquemment sur ce type de support.
Peu d'hydroïdes fixés ont un nom vernaculaire permettant de les distinguer. En particulier les noms "Arbre de Noël ou Hydraire plume", parfois attribués à Pennaria disticha, désignent indifféremment plusieurs espèces sans rapport entre elles.
Pennaria : du latin [penna] = plume, pour la forme de la colonie dans un seul plan,
disticha : du grec [distich-] = disposé sur deux rangs, décrit l’insertion alterne et opposée des rameaux sur l’hydrocaule*.
Numéro d'entrée WoRMS : 117802
Termes scientifiques | Termes en français | Descriptif | |
---|---|---|---|
Embranchement | Cnidaria | Cnidaires | Organismes aquatiques (marins pour la plupart) libres ou fixés, carnivores, principalement à symétrie radiaire, caractérisés par des cellules urticantes : les cnidocytes. Deux morphologies principales : le polype et la méduse. La larve est une planula. |
Classe | Hydrozoa | Hydrozoaires | Cnidaires dont le cycle de vie est alterné, mais de façon inconstante, par deux phases différentes : le polype et la méduse. Présence d’un velum dans la méduse (dite craspédote), gonades ectodermiques, perte des septes, perte des cnidocytes endodermiques. Coloniaux ou solitaires. Quelques espèces d’eau douce. |
Sous-classe | Hydroidolina | Hydroïdes | Hydrozoaires dont le cycle de vie présente toujours une phase polype. |
Ordre | Anthoathecata | Anthoathécates | Hydraires dont la phase polype est dépourvue de thèques protectrices rigides. Phase polype presque exclusivement benthique, quelques espèces tropicales sécrétant un exosquelette calcaire (coraux de feu). Méduse avec ombrelle haute possédant des ocelles, les gonades se développent autour du manubrium. |
Sous-ordre | Capitata | Capités | Tentacules des polypes le plus souvent capités (avec des nématocystes groupés en « boutons »), parfois seulement chez les juvéniles. Longs pédoncules fixés ou ancrés dans le sédiment. Anthoméduses. Quelques espèces sécrètent un squelette calcaire. |
Famille | Pennariidae | Pennariidés | Colonies en forme de plume, hydroclades alternées, hydranthes en poire. |
Genre | Pennaria | ||
Espèce | disticha |
Aspect caractéristique
Les colonies sont pennées, l’extrémité des branches est recourbée et plus ou moins retombante.
Anse à sable, Guadeloupe (971), 18 m
06/2006
Jardin flottant
C'est le plus souvent ainsi qu'on rencontre l'hydraire des amarres : au palier !
Port-Louis (Guadeloupe), 6 m
20/04/2009
Arbres de Noël de Méditerranée
Les branches latérales (hydroclades*) sortent en alternance dans un même plan des deux côtés de la tige principale (hydrocaule*). Elles sont de plus en plus jeunes, donc de plus en plus courtes, vers le sommet de la colonie, couronné par le plus vieux polype.
Cap d'Antibes, 7 m
11/09/2010
Alignés par ordre de taille
Les polypes édifient une colonie en se multipliant par bourgeonnement.
Les nouveaux polypes apparaissent à la base d’une zone de multiplication située sous le polype terminal : le long d’un rameau en partant de l’hydrocaule vers l’extrémité on trouvera successivement le deuxième, troisième , quatrième, cinquième... (le futur sixième), et enfin le tout premier polype de la série par ordre d'âge et de taille décroissants.
Pointe Lamarre, Nord Martinique (972), 10 m
13/05/2008
Stolons
Les tiges ou hydrocaules* naissent à partir d'hydrorhizes* (stolons) rampant en réseau à la surface du substrat : ici une éponge.
Jardins charmeuse, Nord Martinique, 15 m
23/11/2008
Tentacules capités
Les courts tentacules capités* s'étagent le long de l'hypostome* conique, entre la bouche et une couronne de tentacules filiformes.
Contrairement à ce qu'on pourrait croire, les petits manchons entortillés autour des branches ne sont pas des vers, mais des pontes de nudibranche (peut-être Learchis poica ?).
La Coucoune, Martinique (972), 38 m
23/11/2008
Tentacules (bis)
Les longs tentacules de la couronne aborale sont également terminés par un "bouton", visible ici contre le fond noir.
Cayo Largo (Cuba), 33 m
28/04/2009
Sur des algues vertes
Pas très fréquente dans cet habitat, cette petite colonie a peut-être été arrachée de son support et s’est retrouvée dans une pelote d’algues roulée sur un fond de sable.
Le Carbet, Martinique (972)
17/03/2007
Après un cyclone
Photo prise quelques semaines après le passage de Dean, tout près de la zone de déferlement des vagues. Le fond a été comme "décapé" mais cette grande colonie est déjà en pleine repousse. Remarquer que les rameaux situés près de la base des tiges sont très abîmés ou cassés, mais à partir du dernier tiers des tiges on retrouve le mode de croissance typique, avec des rameaux de taille décroissante.
Anse Figuier, Sud Martinique, 5 m
07/12/2007
Une amarre accueillante !
Il est déconseillé de saisir cette amarre à pleine main ! Les hydraires apprécient ce support bien stable en plein courant.
3 Vallées, Le Marin, Martinique (972), 23 m
10/12/2008
Le long d'un bout
La prolifération des Pennaria sur ce bout le rend absolument inutilisable pour se tenir au palier !
Certains moniteurs sur le bateau l'appellent "lilas de mer".
Remarquer les 2 bourses élancées (Monacanthus tuckeri) qui évoluent à côté.
Baie de Saint-Pierre, Martinique (972)
04/2005
Juste sous la surface
Un beau bouquet s'est installé juste sous une bouée, dans une baie peu agitée. Remarquer l'aspect typiquement "sale" des colonies contrastant avec le blanc pur des hydranthes.
Sainte Anne, Martinique, 0,50 m
09/12/2008
Ou en profondeur
Les mêmes à l'intérieur d'une épave, à l'ombre, mais toujours cette prédilection pour les amarres !
Epave du Méridien, Ténérife, 30 m
26/08/2009
Support
Les colonies servent à leur tour de support : le périsarc* se recouvre rapidement d'algues filamenteuses vertes ou rouges.
La Citadelle, Nord Martinique (972)
13/12/2008
Capture
Sur cet extraordinaire cliché, nous assistons à la capture par les polypes d'un nuage de minuscules crevettes, attirées par l'éclairage.
Remarquer, sur plusieurs polypes en haut de l'image, le petit renflement sous le polype terminal qui est le bourgeon du prochain hydranthe. C'est la zone d'élongation.
Cayo Largo (Cuba), Canal De Las Barracudas, 7 m
28/04/2009
Pom pom spider ?
Comiquement brandies sur les longues pattes de cette minuscule araignée à rostre Podochela sp., s'agit-il bien de jeunes Pennaria ?
Canyons de Babodi, Nord Martinique (972)
21/05/2005
Polypes fertiles
Plusieurs des polypes de cette colonie portent des bourgeons médusaires à divers stades de maturité (flèches).
Le Trou à l'Orage, Port-Louis, Guadeloupe, 5 m
01/12/2009
Associée
Cette crevette totalement transparente, à part une fine ligne noire ou rouge, ne sera repérée que par des yeux avertis !
Eden, Port-Louis (Guadeloupe), 20 m
05/12/2009
Autre associé
Autres mers, autres visiteurs ! Voici, en Méditerranée, une colonie de Pennaria occupée par plusieurs petits amphipodes (Stenothoe sp.).
Cap d'Antibes (06), 5m
13/10/2013
Hydranthes et gonophores
Deux polypes avec des gonophores se développant juste au-dessus de la couronne de tentacules filiformes.
Les petits "boutons" visibles à l'extrémité de la cloche sont les tentacules rudimentaires du médusoïde.
On voit aussi très nettement le périsarc rigide, avec des annulations sur le pédoncule de chaque hydranthe et à la base de chaque segment de l'hydroclade.
Sous la loupe : préparation colorée au carmin
N/A
Tentacule capité
Voici l'extrémité renflée d'un tentacule capité, bourré de nématocystes. L'un d'eux s'est déchargé dans la préparation, on devine le filament dévaginé.
Sous la loupe
N/A
Planche anatomique
Sur cette planche publiée en 1820 on peut admirer :
- en haut la portion distale de la tige (hydrocaule) avec les hydroclades alternes ;
- en gros plan en bas : un hydranthe avec deux gonophores femelles ;
- à droite au milieu : un hydranthe avec gonophores mâles ;
- et à gauche au milieu : petite eumédusoïde femelle, tout juste libérée. Noter la forme en cloche, les quatre minuscules tentacules rudimentaires, et les masses de gamètes collées sur le manubrium.
Handbuch der Zoologie, Goldfuss, 1820
Reproduction de documents anciens
N/A
Rédacteur principal : Anne PROUZET
Correcteur : Horia GALEA
Responsable régional : Anne PROUZET
Calder, D.R., 1988, Shallow-water hydroids of Bermuda : the Athecatae, Royal Ontario Museum Life Sciences Contributions, 148, 1–107.
Galea H., 2008, On a collection of shallow-water hydroids (Cnidaria: Hydrozoa) from Guadeloupe and Les Saintes, French Lesser Antilles, Zootaxa, 1878, 1–54.
Wedler, E., Larson, R., 1986, Athecate hydroids from Puerto Rico and the Virgin Islands, Studies on Neotropical
Fauna and Environment, 21, 69–101.
La page de Pennaria disticha dans l'Inventaire National du Patrimoine Naturel : INPN