Grande crevette pouvant atteindre 25 cm
Bord de l’éventail caudal bleu-ciel
Corps beige avec bandes transversales sombres, ne formant pas de taches séparées sur les côtés
Trois premières paires de pattes avec petites pinces
Crevette kuruma, crevette du Japon, crevette impériale, crevette impériale japonaise, crevette tigrée, gambas japonaise
Kuruma prawn, kuruma shrimp (GB), Gamberone, mazzancolla, mazzancolla giapponese (I), Camaròn kuruma, langostino japonés (E), Radgarnele (D), Kurumagarnaal (NL), En art reje (danois), Camarão do Japão, camarão japonês, camarão-kuruma, camarão-tigre (PT), Gambari alnamri (Arabe : Syrie, Tunisie), Robian akhdar namri (Arabe : Pays du golfe), Kuruma ebi, saimaki ebi [=juvéniles] (Japon)
Penaeus canaliculatus japonicus Bate, 1888
Marsupenaeus japonicus (Bate, 1888)
Penaeus pulchricaudatus Stebbing, 1914
lndo-Pacifique et mer Rouge. Introduite ça et là en Europe.
Zones DORIS : ● Indo-Pacifique, ○ [Mer Rouge]C'est une espèce native du Pacifique où elle se rencontre de l'Inde et de Taïwan jusqu’aux îles Fidji.
Elle a été introduite en Europe aux fins d'élevage. Les spécimens pêchés en Europe (mer du Nord, Manche, Atlantique, Méditerranée nord-occidentale) sont échappés de ces élevages. Cependant nous ne disposons d'aucune preuve d'installation pérenne de cette espèce dans les zones concernées.
NB. L'espèce lessepsienne* (arrivée par le canal de Suez) abondante en Méditerranée orientale et sur les côtes d’Afrique du Nord (Egypte) où elle est pêchée est en fait une espèce voisine de l'Océan indien : Penaeus pulchricaudatus Stebbing, 1914.
La crevette japonaise est une espèce côtière, présente de quelques mètres à 90 m de profondeur, mais généralement plus commune vers 10 à 20 m. Elle vit sur des fonds vaseux ou sablo-vaseux.
Les adultes vivent enfouis dans le substrat le jour et sont vagiles* la nuit ; les juvéniles sont côtiers et se rencontrent dans les estuaires et les lagunes littorales.
Cette crevette est de grande taille : la longueur totale (de la pointe du rostre à l'extrémité du telson*) est au maximum, chez les mâles de 19 cm (pour un poids de 42 g) et chez les femelles de 25 cm.
Le corps est jaune pâle ou beige avec des bandes transversales de couleur brun-marron sur l’abdomen ; sur le côté, les bandes sombres ne forment pas de taches séparées. Il y a une tache rouge latérale sur le dernier segment abdominal et l’extrémité de l’éventail caudal est bleu ciel ; il est bordé de soies rouges. Les appendices sont plutôt jaunes.
Les trois premières paires de pattes marcheuses sont terminées par une petite pince. Seules les première et deuxième paires de pattes présentent une petite épine basale.
Certains détails d'ornementation de la carapace, très utilisés en systématique, sont difficilement visibles en plongée :
- le rostre est court et dépasse à peine les yeux ; il porte six à onze dents dorsales et une seule ventrale (rarement deux) ; il se prolonge en arrière par une carène post-rostrale et un sillon creux ;
- la carapace porte différentes crêtes (gastrofrontale, hépatique, post-rostrale, carène rostrale) et sillons (sillon médian, sillon cervical) ;
- latéralement, le premier segment abdominal recouvre le deuxième. L’abdomen porte une carène médiodorsale sur les trois derniers segments. Le sixième segment abdominal porte trois "cicatrices" latérales.
Le telson est pointu et muni de trois épines mobiles.
Pendant longtemps, deux espèces très proches ont été considérées comme identiques : la crevette japonaise tigrée Penaeus japonicus (du Pacifique asiatique) et la "crevette japonaise" de l'océan indien Penaeus pulchricaudatus Stebbing, 1914 ; des études de génétique récentes ont montré en effet qu'il est nécessaire de les séparer. La coloration des côtés du céphalothorax permet de les distinguer : chez P. japonicus les bandes transversales brun-sombre se prolongent dans la moitié inférieure de la carapace tandis que ce n'est pas le cas chez P. pulchricaudatus.
En Europe, la crevette japonaise peut être confondue avec la caramote, Penaeus kerathurus. Chez cette dernière les bandes sombres sont interrompues transversalement sur les quatre premiers segments abdominaux ce qui n’est pas le cas chez la crevette japonaise. Il est également possible de distinguer ces deux espèces par le sillon cervical qui atteint la carène rostrale chez Penaeus kerathurus.
Il existe d’autres espèces de pénéides exotiques dont la livrée pigmentaire est plus ou moins proche de celle de la crevette japonaise, mais on ne les trouve pas sur nos côtes.
Les adultes consomment de petits éléments de la faune vagile comme mollusques, petits crustacés, annélides polychètes qu’ils détectent en partie à l’aide de leurs longues antennes.
Dans les étangs d’élevage, cette crevette consommerait entre autres des larves d’insectes. Il est à noter qu'elle est capable de sortir de l’eau (limite eau / berge de la claire) vraisemblablement pour chercher de la nourriture.
Lorsque les femelles sont mûres (avril à septembre au Japon, toute l’année dans les Mascareignes), l’ovaire est gonflé et coloré en beige-verdâtre et est visible dorsalement par transparence dans l’animal.
En Méditerranée orientale, la ponte a lieu d’avril à novembre ; elle est réalisée de nuit en pleine eau. Le nombre d’œufs varie entre 100 000 et 800 000 par ponte selon la taille des femelles (soit une centaine de grammes).
Le développement larvaire dure une quinzaine de jours. Les larves passent par les stades nauplius, zoé et mysis avant la métamorphose en juvénile. Le stade nauplius est court (six stades séparés par cinq mues, l'ensemble durant en tout trente-six heures) ; la larve ne s’alimente pas pendant cette phase (elle utilise les réserves de l’œuf). La phase zoé comprend trois stades et dure un peu plus d’une journée ; pendant ce stade, les larves sont herbivores (phytoplancton). La phase mysis comprend également trois stades et dure 4 jours ; pendant ce stade, les larves deviennent carnivores.
Il suffit de 100 à 120 jours pour porter une post-larve de 10 mg à la taille de commercialisation de 15-20 g. La durée de vie maximale de l’espèce est d’environ 2,5 ans.
La crevette japonaise ne semble pas se reproduire dans la nature en France métropolitaine, même en Méditerranée occidentale. Par ailleurs les rares spécimens échappés des élevages sont voués à une mort certaine, leur métabolisme ralentissant fortement en dessous de 10° C.
Dans les élevages extensifs de crevette japonaise en France, on rencontre plusieurs autres crustacés typiquement présents dans les marais ostréicoles, sans qu'on puisse réellement parler d'association : la crevette blanche « biquette » Palaemon sp., la crevette grise ou "bouc" Crangon crangon et le crabe vert atlantique Carcinus maenas.
Les adultes sont parasités par différents types de virus (white spot syndrome virus ; Mourilyan virus ; Virus REO-III ; penaeid rod-shaped DNA virus) et par Vibrio penaeicida.
La crevette japonaise effectue des migrations en lien avec la reproduction. Les jeunes crevettes gagnent des eaux à salinité faible et relativement chaudes et riches en plancton où elles peuvent grandir rapidement. Ensuite, elles quittent les lagunes côtières pour se rendre en mer où elles finissent leur croissance et se reproduisent. L’espèce nécessite au moins 20° C pour boucler son cycle de reproduction et ne peut survivre très longtemps en dessous de 12° C.
Au niveau comportement, cette espèce présente deux phases d’activité très distinctes. De jour, les animaux sont immobiles, enfouis dans le sédiment et en état métabolique bas (ils "dorment"). La nuit, les animaux sont actifs et le taux de respiration est trois à quatre fois plus élevé que le jour. Ce comportement (rythme nycthéméral) apparaît assez précocement, à l’âge d’un mois environ.
Elevage en fermes à crevettes.
Au Japon, l’élevage dans les étangs a commencé en 1889 et la première ferme à crevettes a ouvert ses portes en 1960. Suite à des recherches en laboratoire effectuées dans différents pays (Japon, Philippines, France, Angleterre, Etats-Unis), la biologie de cette crevette est très bien connue, permettant alors des élevages intensifs en "fermes" ou extensifs en milieu semi-naturel. Aussi, elle est présente en aquaculture dans de nombreux pays comme le Japon, la Thaïlande, Taïwan, l’Australie, différents pays en Amérique centrale etc. En France elle a été introduite en 1969 pour des élevages dans les lagunes méditerranéennes (à Maguelone près de Montpellier, Bages-Sigean…) et dans les marais atlantiques (presqu’île de Quiberon à Plouharnel, en Vendée, en Charente-maritime, Médoc…) avec une production annuelle de 25 tonnes. Spécialité de la Charente-Maritime, l’élevage des crevettes est réalisé en association avec l’élevage des huîtres afin d’augmenter la rentabilité économique. Pour les mono-élevage, certaines exploitations peu rentables ont dû fermer car l’élevage n’est possible en extérieur que de la mi-mai à la mi-octobre. Ailleurs en Europe du Sud, la crevette japonaise est aussi élevée : Italie, Grèce, mer Egée... La production annuelle mondiale de crevettes d'élevage est de près de deux millions de tonnes (autant que la pêche).
Pêche.
La crevette japonaise tigrée et la crevette "japonaise" de l'océan indien, espèces comestibles, sont traditionnellement pêchées sur de nombreuses côtes de l’Indo-Pacifique. Cette dernière est arrivée en Méditerranée orientale par le canal de Suez (espèce lessepsienne*) en 1924. Sur les côtes du Proche-Orient, elle a presque totalement évincé la caramote Penaeus kerathurus, espèce indigène. Certains chercheurs, mettant en avant qu’elle est activement pêchée, utilisent cet exemple pour illustrer le fait que des espèces introduites peuvent être économiquement intéressantes. En fait, l’espèce qu’elle a remplacée était également pêchée et présentait une abondance et un intérêt économique sensiblement égal. Le bilan économique est donc simplement neutre, à moins qu’on ne démontre que les captures sont maintenant supérieures à effort de pêche égal (ce qui ne semble pas être le cas).
Crevette japonaise : parce que cette espèce a été importée du Japon où elle est très commune.
Penaeus est le nom d'une rivière de Thessalie.
japonicus = du Japon.
Numéro d'entrée WoRMS : 127407
Termes scientifiques | Termes en français | Descriptif | |
---|---|---|---|
Embranchement | Arthropoda | Arthropodes | Animaux invertébrés au corps segmenté, articulé, pourvu d’appendices articulés, et couvert d’une cuticule rigide constituant leur exosquelette. |
Sous-embranchement | Crustacea | Crustacés | Arthropodes à exosquelette chitineux, souvent imprégné de carbonate de calcium, ayant deux paires d'antennes. |
Classe | Malacostraca | Malacostracés | 8 segments thoraciques, 6 segments abdominaux. Appendices présents sur le thorax et l’abdomen. |
Sous-classe | Eumalacostraca | Eumalacostracés | Présence d’une carapace recouvrant la tête et tout ou partie du thorax. |
Super ordre | Eucarida | Eucarides | Présence d'un rostre. |
Ordre | Decapoda | Décapodes | La plupart marins et benthiques. Yeux composés pédonculés. Les segments thoraciques sont fusionnés avec la tête pour former le céphalothorax. La première paire de péréiopodes est transformée en pinces. Cinq paires d'appendices locomoteurs (pinces comprises). |
Sous-ordre | Dendrobranchiata | Dendrobranchiates | Pas d'incubation des oeufs sous l'abdomen. Eclosion des larves au stade nauplius. Latéralement, le bas du premier segment abdominal recouvre le deuxième. |
Famille | Penaeidae | Pénéidés | P4 et P5 bien développés. Au moins 15 branchies. Carapace dure. Pléopode 2 du mâle avec un seul appendice. Pléopodes 3 et 4 sans endopodite. |
Genre | Penaeus | ||
Espèce | japonicus |
Femelle adulte
Spécimen adulte, prêt à la commercialisation après plusieurs mois d’élevage semi-extensif. Noter le fond de vase sur lequel se trouvent des cyanobactéries ("algues bleues").
Elevage Charente-Maritime (17), 0,50 m, de nuit
09/10/2008
Mâle et femelle
Récolte de spécimens élevés en parc de "fines de claires", avec deux beaux spécimens en "dessus de panier", probablement un mâle et une femelle.
Elevage, Charente-Maritime (17), 0,50 m, de nuit
06/10/2008
En bassin d'élevage
Spécimen sur fond de vase, fuyant la lumière.
Lorsqu'elles sont dérangées la nuit, elles se déplacent parfois à la surface de l’eau rapidement et sur plusieurs mètres en faisant des bruits secs (claquement de la queue ?).
Charente-maritime (17), 0,50 m, de nuit.
09/10/2008
Femelle en vue dorsale
Photo prise en labo d’un spécimen venant de l’étang de Bages-Sigean.
Noter les bandes brunes transversales sur l’abdomen.
Etang de Bages-Sigean (13), 1 m
29/07/1976
Faune associée
Assortiment des principales espèces associées vivant dans le même milieu que la crevette japonaise (appelée localement "crevette impériale") :
la crevette grise Crangon crangon (appelée localement "bouc"),
la crevette blanche Palaemon longirostis (appelée localement "biquette"),
le crabe vert atlantique Carcinus maenas (appelé localement "beillouc" ou "chancre des marais"), et un gobie.
Charente-maritime (17), 0,50 m, de nuit
09/10/2008
Comparaison caramote / japonaise
Comparaison entre l'espèce indigène Penaeus kerathurus et l'espèce introduite Marsupenaeus japonicus.
En plongée, la principale différence observable pour distinguer les deux espèces concerne la présence de taches sombres sur les flancs de l’animal chez la caramote Penaeus kerathurus (photo du haut) alors que chez la crevette japonaise Penaeus japonicus il s’agit de bandes sombres continues (photo du bas).
N/A
2008
Habitat
Vue générale des marais où sont élevées les crevettes japonaises, associées aux huîtres "pousses en claires". Ce sont des milieux à haute variation de salinité du bassin "Marennes-Oléron". La profondeur de ces bassins est de 80 cm à marée haute et coefficients de vives eaux.
Charente-maritime (17)
10/10/2008
Rédacteur principal : Pierre NOËL
Vérificateur : Thierry LEQUES
Responsable régional : Anne PROUZET
Arrobas I., 1989, Culture of kuruma prawn (Penaeus japonicus) in Portugal, European Aquaculture Society Special Publication, 10, 15-16.
Blachier P., 1998, La crevette impériale, Notes techniques CREAA, Le Château d'Oléron, 25p.
Calvas J., 1985, Bilan des premiers essais d'élevage de la crevette (Penaeus japonicus) dans les marais de la côte atlantique, Aquarevue, 2, 8-13.
De Matthaeis E., Allegrucci G., Caccone A., Cesaroni D., Cobolli Sbordoni M., Sbordoni V., 1983, Genetic differentiation between Penaeus kerathurus and P. japonicus (Crustacea, Decapoda), Marine Ecology Progress series, 12 (2), 191-197.
Hatt P. J., 1991, Grossissement de la crevette impériale dans les marais de l'Atlantique, Equinoxe, 35, 27-33.
Hussenot J., 1987, Réalités et perspectives d'une aquaculture semi-intensive de poissons et de crevettes dans les marais salés de la côte atlantique française, Oceanis, 13 (2), 247-261.
Ishimaru K., Akagawa-Matsushita M.; Muroga K., 1995, Vibrio penaeicida sp. nov., a pathogen of kuruma prawns (Penaeus japonicus), International Journal of Syst. Bacteriol., 45 (1), 134-138.
Laubier A., Laubier L., 1993, Marine crustacean farming : present status and perspectives, Aquatic Living Resources, 6 (4), 319-329.
Laubier L., Laubier-Bonichon A., 1977, L'élevage de la crevette Penaeus japonicus en France, Premiers résultats et perspectives, Editions Sciences Techniques, 44, 49-59.
Lumare F., 1987, Restocking by Penaeus japonicus : a trend to the economic management of the Italian lagoons, Oebalia, 14, 1-14.
Lumare F., Casolino G., 1986, First record of Penaeus japonicus Bate, 1888 (Decapoda Natantia) along Italian coasts, Oebalia (ser. 2), 13, 179-183.
Mazurié J., Hussenot J., Latrouite D., Barret J., Noël P., 2005, Une crevette Pénéide en Baie de Quiberon !, Baies et Rias, 2p.
Pérez Farfante I., Kensley B., 1997, Penaeoid and sergestoid shrimps and prawns of the world. Keys and diagnoses for the families and genera, Mémoires du Muséum national d'Histoire naturelle, Paris, 175, 233p.
Rosecchi E., Noël P. Y., Crivelli A., 1998, Fresh and brackish water decapod Crustacea of the Camargue (Rhône delta, France), Crustaceana, 71 (3), 280-298.
Tom M., Lewinsohn Ch., 1983, Aspects of the benthic life cycle of Penaeus (Melicertus) japonicus Bate (Crustacea Decapoda) along the Southeastern coast of the Mediterranean, Fisheries Research, 2, 89-101.
Tsoi K. H., Ma K. Y., Wu T. H., Fennessy S. T., Chu K. H., Chan T. Y., 2014, Verification of the cryptic species Penaeus pulchricaudatus in the commercially important kuruma shrimp P. japonicus (Decapoda : Penaeidae) using molecular taxonomy, Invertebrate Systematics, 28 (5), 476–490.
La page de Penaeus japonicus dans l'Inventaire National du Patrimoine Naturel : INPN