Isopode minuscule incolore, adulte d'environ 4 mm
Adultes avec 5 paires de pattes, un gros corps et un abdomen court et étroit
Mâles avec une gosse tête carrée, femelles plus rondes et plus volumineuses
Larves parasites sur des poissons, en forme de tonnelet quand elles sont repues
Adultes dans des terriers creusés dans la vase à la limite des hautes mers
L'ancée-fourmi
Zeebrems (NL)
Anceus formica Hesse, 1864
Gnathia formica Hesse
Anceus halidaii Bate & Westwood, 1866
Paragnathia halidaii (Bate & Westwood, 1866)
Atlantique européen et Méditerranée
Zones DORIS : ● Europe (côtes françaises), ○ [Atlantique Nord-Est, Manche et mer du Nord françaises], ○ [Méditerranée française]Ce petit Isopode se rencontre en Atlantique Nord-Est et en Méditerranée.
Les larves* peuvent se rencontrer en pleine eau mais elles nagent le plus souvent près du fond à la recherche de poissons benthiques* dont elles sucent le sang. La gnathie-fourmi adulte vit dans des petits terriers de 2 à 3 cm de longueur et de 2 à 5 mm de diamètre, creusés à l’accore* des prés-salés dans la vase compacte du haut d'estran des estuaires et lagunes, entre schorre* et slikke* à la limite des hautes mers au niveau des obiones (Halimione portulacoides).
La première larve* de ces petits crustacés est normalement segmentée et ressemble à un Isopode classique (corps avec segmentation régulière bien visible et aplatissement dorso-ventral ; yeux relativement grands). Dès son éclosion, elle nage à la recherche d'un poisson à parasiter. Elle prend un repas sanguin pantagruélique qui distend sa région thoracique postérieure. Cette larve a la forme d'un tonnelet. Après la digestion, elle redevient plus svelte. Sa croissance qui se réalise sans réelle mue se poursuit et après un 2e puis un 3e repas sanguin, elle devient alors adulte, avec 5 paires de pattes ambulatoires*, un gros corps incolore et un abdomen court et étroit. La femelle est gironde, ses formes sont assez rondes, et peu différente morphologiquement des larves gavées ; le mâle possède une grosse tête carrée et de très fortes mandibules* faisant ressembler l'animal à un soldat-termite. Les pièces buccales des larves sont transformées en stylet piqueur et suceur. Les femelles ont de petits yeux et un fouet antennaire à 8 articles ; la tête du mâle est plus large que longue. Les pièces buccales des femelles sont atrophiées ; les mandibules du mâle sont fortement proéminentes et lui servent à creuser les galeries dans la vase. Le dimorphisme* sexuel est très accentué mais la taille est minuscule, environ 4 mm.
Quelques éléments de vocabulaire... Dans les travaux anciens, différentes espèces ou genres ont été décrits avant que l'on sache qu'il s'agissait de différents stades de développement ou de réplétion des crustacés de la famille des Gnathidés. Ainsi, le stade Pullus correspond à la première larve nageuse à l'éclosion ; Anceus désigne les mâles avec de grosses mandibules en avant d'une grosse tête ; Praniza désigne les larves ou les femelles avec un corps gonflé ; Zuphaea désigne les larves ou des jeunes avec un corps mince.
Une quinzaine d'espèces de Gnathidés se rencontrent en Europe. Certaines comme la gnathie de Monod (Bathygnathia monodi), la gnathie blanchissante (Gnathia albescens), la gnathie feinte (G. fallax), la gnathie rustre (G. illepidus), la gnathie inopinée (G. inopinata), la gnathie phallonajopsis (G. phallonajopsis), la gnathie à front denté (G. serrulatifrons), la gnathie de Teissier (G. teissieri) et la gnathie élégante (G. venusta) vivent en profondeur ou sont très rares et ne sont en principe pas visibles par les plongeurs.
Les espèces côtières suivantes peuvent être vues en plongée en France métropolitaine mais sont délicates à identifier in situ ou sur photo ... et même au laboratoire !
Une fiche DORIS a été consacrée aux Gnathidés avec un certain nombre de photos prises en plongée : Gnathia spp.
L'ancée maxillaire (Gnathia maxillaris) est sans doute l'espèce la plus commune. Le mâle a une "tête" plus large que longue et le front présente un léger arrondi médian. Elle se rencontre en bas d'estran sur les côtes de l'Atlantique de l'Islande au Maroc ; elle serait très rare en Méditerranée. Des larves ont été vues à faible profondeur sur des poissons comme le mordocet (Lipophrys pholis), la motelle à 5 barbillons (Ciliata mustela), le chabot-buffle (Taurulus bubalis) ou le crénilabre commun (Symphodus melops). Des adultes ont été trouvés dans des éponges, des balanes vides, des anfractuosités, des crampons de laminaires, sur des bois immergés et un peu plus profondément sur le maërl, sur des sédiments grossiers à amphioxus (Branchiostoma lanceolatum) et sur des fonds à crépidules (Crepidula fornicata).
Chez la gnathie vorace (Gnathia vorax) le mâle a le front avec une nette concavité médiane et avec une toute petite pointe centrale. L'adulte est relativement grand : il mesure 5 à 7 mm de long. L'espèce a été observée sur toutes les côtes européennes et dans toute la Méditerranée. Des spécimens de cette espèce ont été observés dans des trous du bois flotté ou coulé, près des côtes ou un peu plus au large.
Chez le mâle de la gnathie à queue pointue (G. oxyuraea), la "tête" est plus large que longue et une crête est présente au-dessus de chaque œil. L'espèce vit un tout petit peu plus profond que les espèces précédentes (on ne la trouve pas en bas d'estran). Elle a été signalée en mer près de l'estuaire de la Rance sur divers types de sédiment. Elle se rencontre dans toute l'Europe, Méditerranée comprise.
Le mâle de la gnathie dentée (G. dentata) possède une dent latérale sur chaque mandibule. C'est une espèce européenne plutôt d'eaux froides qui a été signalée du cercle polaire à la Manche (et plus rarement en Espagne) ; sa présence en Méditerranée est douteuse.
D'autres espèces sont présentes en outre-mer mais sont très mal connues.
Les espèces de la famille des Gnathidés présentent un parasitisme protélien*, c'est-à-dire que seuls les stades larvaires sont parasites. Ces larves se nourrissent de façon intermittente du sang de poissons côtiers benthiques* comme la plie (Pleuronectes platessa), les mulets (Mugil spp.), le flet (Platichthys flesus), divers gobies, l’anguille (Anguilla anguilla), le dragonnet (Callionymus lyra) etc. Si elles sont en grand nombre, les larves provoquent chez les poissons infectés une réaction inflammatoire sur le site d’implantation des pièces buccales ; il s’ensuit une anémie, un amaigrissement et une diminution du taux de croissance du poisson hôte.
Les femelles vivent en groupe et forment de véritables harems ; elles sont cachées dans des élargissements de galeries ou dans des interstices à proximité d'un mâle. Peu à peu pendant la saison de reproduction en été, le thorax de la femelle se déforme en tonneau. C'est dans les ovaires fonctionnant en poches utérines qu'incubent de nombreux embryons jusqu'à l'éclosion des larves. L'éclosion a lieu de juin à septembre. Les larves peuvent se fixer sur divers poissons côtiers. La fin de vie des femelles est en octobre. La longévité n'est pas connue avec précision mais pourrait être d'environ 1 an.
Il n'y a pas de spécificité parasitaire chez les Gnathidés. Les larves se fixent généralement sur le premier poisson de passage.
En principe, il n’y a qu'un mâle près de l’entrée du terrier et une vingtaine de femelles qui vivent plus profondément ; ainsi le mâle est une sorte de ‘’pacha’’ accompagné de son harem !
De nombreux poissons sont connus comme prédateurs de la gnathie-fourmi. Citons en particulier la plie (Pleuronectes platessa), le bar (Dicentrarchus labrax), le gobie tacheté ( Pomatoschistus microps), le gobie de sable (Potamoschistus minutus), le merlan (Merlangius merlangus), les sars (Diplodus spp.) etc.
Francisation du nom latin.
Paragnathia du grec [para-] = à côté de, car espèce proche du genre Gnathia ; et gnathos qui signifie mâchoire, probablement en rapport avec l'importance
de la mâchoire du mâle.
formica du latin fourmi, en raison de la ressemblance de l'adulte avec l'insecte du même nom.
Termes scientifiques | Termes en français | Descriptif | |
---|---|---|---|
Embranchement | Arthropoda | Arthropodes | Animaux invertébrés au corps segmenté, articulé, pourvu d’appendices articulés, et couvert d’une cuticule rigide constituant leur exosquelette. |
Sous-embranchement | Crustacea | Crustacés | Arthropodes à exosquelette chitineux, souvent imprégné de carbonate de calcium, ayant deux paires d'antennes. |
Classe | Malacostraca | Malacostracés | 8 segments thoraciques, 6 segments abdominaux. Appendices présents sur le thorax et l’abdomen. |
Sous-classe | Eumalacostraca | Eumalacostracés | Présence d’une carapace recouvrant la tête et tout ou partie du thorax. |
Super ordre | Peracarida | Péracarides | Les femelles sont dotées d'une cavité d'incubation formée par des expansions lamelleuses des péréiopodes. |
Ordre | Isopoda | Isopodes | Corps comprimé dorso-ventralement, première paire d’antennes beaucoup plus petite que la seconde, yeux non pédonculés. 7 paires de pattes de même apparence. |
Sous-ordre | Cymothoida | Cymothoides | ils portent des appendices buccaux comprenant une mandibule et un processus permettant de couper. |
Famille | Gnathiidae | Gnathiidés | 5 paires de pattes visibles de dos ; abdomen minuscule ; mâle à grosse tête et à mandibules énormes, femelle à petite tête et mandibules peu visibles ; les larves sucent le sang des poissons. |
Genre | Paragnathia | ||
Espèce | formica |
Un bel individu
Un individu dont on peut bien observer toutes les caractéristiques, notamment les fortes mandibules.
Sillon de Talbert, Pleubian (22), estran
2017
Sur un dragonnet
C'est un dragonnet (Callionymus lyra) qui est ici victime du parasite.
Lannion (22), estran
20/09/2016
Un mâle et une femelle
La gnathie-fourmi adulte vit dans des petits terriers de 2 à 3 cm de longueur et de 2 à 5 mm de diamètre.
Louannec (22), estran
10/04/2014
Mâle et femelles au terrier
Les terriers sont creusés à l’accore* des prés-salés dans la vase compacte du haut d'estran des estuaires et lagunes.
Lannion (22), estran
30/05/2016
Densité des terriers
Un coup de bêche a mis au jour au moins 5 terriers occupés.
St Jacut de la Mer (22), estran
04/10/2018
Terriers à Arcachon
Dans ces terriers, beaucoup de femelles.
Arcachon (33), estran
16/06/2018
Femelle et mâle au terrier
Dans un terrier une femelle et un mâle pour lesquels on peut bien observer la grande différence de morphologie.
Arcachon (33), estran
16/06/2018
Mâle à Arcachon
Dérangé, ce mâle est sorti de son terrier.
Arcachon (33), estran
16/06/2018
Mesures
Sur le terrain, un morceau de papier millimétré permet de mesurer immédiatement la taille d'individus prélevés, ici, des femelles.
Chaque petit carré fait 1 mm de côté.
Arcachon (33), estran
16/06/2018
Appendices
Sur le terrain, un morceau de papier millimétré permet de mesurer immédiatement la taille d'individus prélevés, ici, des mâles, et la vue au microscope permet une vue de détail de certains appendices (en haut, mandibule)
Chaque petit carré fait 1 mm de côté.
Arcachon (33), estran
16/06/2018
Femelles et mâles
Ce dessin représente fidèlement deux femelles, à gauche, et trois mâles, à droite.
Ouvrage ancien
Reproduction de documents anciens
1864
Vue latérale
Ce dessin au trait représente une femelle en vue latérale. Sa forme gironde apparaît aisément.
Monod T., 1926, Les Gnathiidae. Essai monographique (morphologie, biologie, systématique), Mémoires de la Société des Sciences Naturelles du Maroc, 13, 1-667.
Reproduction de documents anciens
1926
Evolution des œufs
Schéma présentant l'évolution des œufs (à gauche) en larves (à droite) à l'intérieur d'une femelle.
Monod T., 1926, Les Gnathiidae. Essai monographique (morphologie, biologie, systématique), Mémoires de la Société des Sciences Naturelles du Maroc, XIII, 1-667.
Reproduction de documents anciens
1926
Vue dorsale de larve
Vue dorsale d'une larve "pranize", colorisée.
Slabber M., 1778, NATUURKUNDIGE VERLUSTIGINGEN, BEHELZENDE MICROSCOPISE WAARNEEMINGEN VAN IN- EN UITLANDSE WATER- EN LAND-DIEREN, J. Bosch, Haarlem, 166p.
Reproduction de documents anciens
1778
Rédacteur principal : Pierre NOËL
Responsable régional : Vincent MARAN
Monod T., 1926, Les Gnathiidae. Essai monographique (morphologie, biologie, systématique), Mémoires de la Société des Sciences Naturelles du Maroc, 13, 1-667.
Slabber M., 1778, NATUURKUNDIGE VERLUSTIGINGEN, BEHELZENDE MICROSCOPISE WAARNEEMINGEN VAN IN- EN UITLANDSE WATER- EN LAND-DIEREN, J. Bosch, Haarlem, 166p.
La page de Paragnathia formica dans l'Inventaire National du Patrimoine Naturel : INPN