Corps très plat et ovale, 16 à 23 mm
Couleur brun cendré
Pattes antérieures ravisseuses, rappelant celles du scorpion
Long siphon respiratoire situé à l'extrémité de l'abdomen
Réseau de petites nervures sur la membrane de l'hémélytre
Nèpe cendrée, nèpe rousse, scorpion d'eau
Water bug (GB), Escorpion de agua (E), Wasserskorpion (D), Waterschorpioen (NL)
Nepa rubra Linnaeus, 1758
Région paléarctique
Zones DORIS : ● Eau douce d'EuropeLa nèpe est très répandue dans la région paléarctique*. Cette région biogéographique correspond essentiellement aux écorégions terrestres de l'Europe, du nord de l'Asie (jusqu'au nord de l'Himalaya), de l'Afrique (au nord du Sahara) et une petite partie du Moyen-Orient.
La nèpe vit dans les eaux stagnantes telles que les étangs et les mares, mais aussi dans les ruisseaux à courant lent. Elle se déplace en marchant lentement dans la vase dont elle est souvent recouverte, ce qui la camoufle bien. Elle grimpe sur les plantes aquatiques.
Comme la nèpe ne nage pas bien (absence de soies sur les pattes postérieures) et qu'elle a besoin de mettre très régulièrement son siphon respiratoire en contact avec l'air atmosphérique, elle n'est jamais éloignée de la surface et proche des rives. Elle peut se noyer si elle ne remonte pas en surface pour respirer.
La nèpe est de couleur brun cendré et mesure environ 16 à 23 mm sans le siphon respiratoire. Celui-ci peut mesurer 10 à 15 mm. Il est facile de la reconnaître grâce à ce long siphon respiratoire situé à l'extrémité de l'abdomen et ses pattes antérieures ravisseuses rappelant la forme du scorpion.
C'est un insecte au corps très plat et ovale, ce qui est un atout pour la chasse à l'affût. Les tergites* abdominaux, cachés sous les ailes, sont de couleur rouge, d'où son appellation nèpe rousse. Le bord antérieur du prothorax* (premier segment du thorax situé juste derrière la tête) forme une forte concavité dans laquelle vient s'enfoncer une petite tête. Les yeux sont globuleux. Les ocelles* (yeux simples) sont inexistants. Les antennes* (trois articles) sont plus courtes que la tête et cachées dans des fossettes situées sous la tête, et plus précisément entre celle-ci et le thorax. Le rostre*, composé de trois articles, est court, acéré et dirigé vers l'avant. Il sert à piquer les proies avant de les sucer.
Les pattes antérieures sont transformées en organes préhensiles et servent à la prédation. Les hanches sont bien développées et le fémur renflé est pourvu d'une rainure dans laquelle viennent se replier le tibia et le tarse. Par analogie, cela ressemblerait à une lame de couteau pliant (tibia) qu'on rangerait dans son manche (fémur). La gouttière de la cuisse comprend de toutes petites excroissances empêchant ainsi la proie de s'échapper lors de la capture. Le fémur antérieur est à peine plus long que le tibia. Le tarse n'a qu'un seul article dépourvu de griffes.
Les pattes intermédiaires et postérieures ne sont pas adaptées à la nage comme d'autres espèces de punaises aquatiques, mais il n'en reste pas moins qu'elle sait relativement bien nager. Les tarses n'ont qu'un article.
Comme chez toutes les punaises, les hémélytres* (ailes antérieures) sont coriaces à la base et membraneuses à l'extrémité. L'hémélytre de la nèpe est rugueuse à la base, tout comme le pronotum*, la membrane forme un réseau caractéristique de petites nervures. Les hémélytres sont repliées à plat sur le corps et se recouvrent partiellement. Les deux ailes postérieures, membraneuses, ont des muscles assez réduits, ce qui explique qu'elle vole mal et peu.
La nèpe peut emmagasiner de l'air sous ses hémélytres. L'air pénètre dans le long sillon filiforme non rétractile, composé de deux gouttières creuses qui se réunissent pour former un tube, puis arrive jusqu'aux deux premiers stigmates placés au bout de l'abdomen.
Larve* :
Le siphon est une modification du dernier segment : il est allongé et bombé au-dessus alors qu'il forme une sorte de gouttière en dessous. La gouttière est fermée par deux rangées de poils hydrofuges qui se rejoignent. A la base de ce segment, la gouttière se divise en deux sillons qui bordent chacun l'abdomen jusqu'aux premiers stigmates placés sous la plaque coxale*. Grâce à la fermeture par des poils, l'air peut circuler librement dans la gouttière tant que l'extrémité de l'abdomen est en contact avec la surface. Cette gouttière ventrale disparaît à l'âge adulte.
Comme beaucoup de larves, les ailes ne sont que des ébauches, elles sont très réduites et inutiles.
En Europe, les représentants de la famille des Népidés (nèpes et ranatres) sont les seuls à posséder ce long sillon respiratoire au bout de leur abdomen. Il n'y a donc pas de confusion possible avec une autre famille.
Ranatra linearis : le corps de la ranatre est beaucoup plus long (30 à 35 mm sans le siphon respiratoire + 25 mm pour le siphon) et élancé que la nèpe ; elle fréquente les milieux riches en végétation aquatique, elle vole mieux que la nèpe.
Dans la région paléarctique, 4 variétés sont connues ; ce sont principalement des différences de taille :
Nepa cinerea var. minor Puton, 1886 : de 10 à 13 mm, présence dans l'ensemble du pourtour méditérranéen
Nepa cinerea var. major Bergevin, 1926 : 22 mm, sans le siphon, présence au Maroc et Gibraltar
Nepa cinerea var. sardiniensis Hungerford 1928 : le mâle mesure 15 mm, la femelle 15 à 19 mm. Cette variété se reconnaît grâce au prolongement latéral du deuxième article de l'antenne qui est vraiment plus petit. Les antennes étant cachées et courtes, il faut observer ceci à la loupe binoculaire ! Présence en Corse et Sardaigne.
Nepa cinerea var. orientalis Esaki, 1928 : 23 mm, les différences avec la var. major sont réelles mais infimes : taille un peu plus grande, tête et yeux un peu plus petits, pronotum* plus petit, pattes plus grêles, présence dans l'est de la Sibérie.
Grâce à ses pattes ravisseuses, elle attrape diverses proies : larves d'insectes, écrevisses (œufs et adultes), têtards, petits poissons. C'est une prédatrice vorace. Sa tactique de chasse consiste à rester immobile, cachée dans la vase ou sur des végétaux, les pattes antérieures ouvertes et prêtes à se refermer sur la proie qui passe à sa portée. Sa morphologie (corps plat) facilite la chasse à l'affût.
La larve a le même régime alimentaire que l'adulte, avec des proies adaptées à sa taille.
L'accouplement a lieu au début du printemps. Les segments génitaux sont symétriques. En avril-mai, la femelle enfonce ses œufs presque en entier dans des fragments de végétaux aquatiques mous ou à moitié décomposés et flottant à la surface. Seule l'extrémité céphalique dépasse. Celle-ci est ornée de 6 à 8 filaments respiratoires (dits aussi pneumatiques), presque aussi longs que l'œuf lui-même. Ces filaments sont en contact avec l'air et alimentent les œufs en oxygène. Les œufs sont de couleur blanc crème et mesurent environ 2,5 mm.
Lorsque les œufs éclosent entre mai et juillet, l'extrémité qui porte les filaments respiratoires se détache comme un couvercle. Le développement de la larve comprend 5 stades. En septembre, les larves deviennent des imagos* (insecte parfait). Le tube respiratoire grandit au fur et à mesure des mues et n'atteint sa longueur définitive qu'avec la dernière mue. L'imago hiverne à terre. La nèpe ne deviendra adulte qu'au printemps suivant, prête pour l'accouplement.
Les œufs des punaises aquatiques sont souvent parasités par de minuscules Hyménoptères (voir chapitre Vie associée).
Les nèpes sont des insectes fortement parasités aussi bien à l'intérieur qu'à l'extérieur de leur organisme :
Les pattes ravisseuses ressemblent à celles des Mantes (ordre des Mantodea).
La nèpe se camoufle très bien : corps plat adapté à la chasse à l'affût, couleur brune pour se confondre avec les feuilles à moitié décomposées, immobilisme. Ce dernier s'observe aussi chez la ranatre.
Un phénomène d'immobilisation réflexe, différent de l'immobilisme précité, s'observe chez les Népidés, principalement en situation de danger. Cet immobilisme ne simule pas vraiment une mort de l'insecte. En effet, lorsqu'il est mort, ses pattes intermédiaires et postérieures sont fléchies et le corps n'est pas rigide. Dans le cas de l'immobilisation réflexe, ces mêmes pattes sont allongées contre l'abdomen, les pattes antérieures sont dirigées vers l'avant, dans une position rigide.
Attention à sa manipulation, la nèpe peut piquer. La piqûre est infligée avec le rostre. Même si la douleur semble légère et de courte durée, il faut néanmoins rester vigilant quant aux souillures du rostre (voir chapitre Vie associée). La perception de la douleur restant propre à chacun d'entre nous, elle peut être ressentie plus ou moins intensément.
Nèpe : traduction littérale du latin Nepa.
Scorpion d'eau : ce nom est en rapport avec la forme générale du corps de l'insecte et de ses pattes antérieures rappelant celles du scorpion. Attention, l'appellation "scorpion" pour la nèpe n'a rien à voir avec les Arachnides ! Ceci dit, par analogie avec les scorpions, elle ne donne pas envie de la toucher au premier abord.
Nepa : du latin [nep] = scorpion.
cinerea : du latin [ciner] = cendre.
Termes scientifiques | Termes en français | Descriptif | |
---|---|---|---|
Embranchement | Arthropoda | Arthropodes | Animaux invertébrés au corps segmenté, articulé, pourvu d’appendices articulés, et couvert d’une cuticule rigide constituant leur exosquelette. |
Sous-embranchement | Hexapoda | Hexapodes | Arthropodes à six pattes. Ce sont les insectes au sens large. |
Classe | Insecta | Insectes | Hexapodes terrestres et dulcicoles possédant trois paires de pattes et deux paires d’ailes (sauf chez les Diptères). |
Sous-classe | Pterygota Neoptera | Ptérygotes Néoptères | Insectes ailés dont les ailes sont rabattues au repos. L'immense majorité des insectes. |
Ordre | Hemiptera | Hémiptères | Des antennes longues, des pièces buccales piqueuses avec un long rostre, et deux paires d'ailes dont l'une, en partie cornée, est transformée en hémiélytre. |
Sous-ordre | Heteroptera | Hétéroptères | Insectes ptérygotes hétérométaboles, avec un appareil buccal de type piqueur-suceur, deux paires d'ailes : les postérieures sont membraneuses, les antérieures sont partiellement cornées. Antennes longues. |
Famille | Nepidae | Népidés | Hanches postérieures arrondies et suceptible de rotation dans la cavité cotyloïde. |
Genre | Nepa | ||
Espèce | cinerea |
Identification
La nèpe est facile à reconnaître grâce à son long siphon respiratoire situé à l'extrémité de l'abdomen et ses pattes antérieures ravisseuses rappelant la forme du scorpion.
Aquarium IUT Louis Pasteur, Schiltigheim (67)
04/10/2009
Taille
La nèpe mesure environ 16 à 23 mm sans le tube respiratoire. Celui-ci peut mesurer 10 à 15 mm. Les petites bêtes bleues que l'on voit en surface sont des insectes appartenant à l'ordre des Collemboles.
Etang du Boulet, Feins (35), proche surface
14/07/2011
Couleur brun cendré et hémélytres
La nèpe est de couleur brun cendré. C'est un insecte au corps très plat et ovale, ce qui est un atout pour la chasse à l'affût.
L'hémélytre* de la nèpe est rugueuse et coriace à la base, tout comme le pronotum*, les ailes membraneuses forment un réseau caractéristique de petites nervures. Les hémélytres sont repliées à plat sur le corps et se recouvrent partiellement.
Lac de la Lauch, 950 m alt., Fellering (68), proche surface
Laurent et Sandrine SCHWEBEL-MARBACH
09/06/2009
Abdomen rouge
Sur cette planche, on voit très bien trois éléments :
- l'abdomen rouge qui a donné à cette punaise son autre nom : la nèpe rousse tirée du nom latin Nepa rubra
- la paire d'hémélytres* (ailes antérieures) et les ailes postérieures entièrement membraneuses
- le tube respiratoire divisé en deux parties, correspondant à ses gouttières (demi-tubes) non réunies.
Cette planche naturaliste est tirée de Panzer G., 1793, FAUNAE INSECTORUM GERMANICA INITIA - DEUTSCHLANDS INSEKTEN, 4 teil
Cette image fait partie de Kurt Stübers Online Library
N/A
Reproduction de documents anciens
1793
Tête
Le bord antérieur du prothorax (premier segment du thorax situé juste derrière la tête) forme une forte concavité dans laquelle vient s'enfoncer une tête petite. Les yeux sont globuleux. Le rostre, visible entre les deux yeux, sert à piquer les proies avant de les sucer.
Aquarium IUT Louis Pasteur, Schiltigheim (67)
04/10/2009
Rostre piqueur-suceur
Ce spécimen est mort depuis près de 50 ans. Il a donc été relativement bien conservé. Cette tête rappelle que la nèpe est une vorace prédatrice. On voit parfaitement le rostre piqueur-suceur, les yeux globuleux. On distingue la gouttière sur les fémurs des pattes antérieures dans lesquels viennent se placer les tibias lors de la capture de proie.
Versailles (78)
06/1955
Pattes ravisseuses
Les pattes antérieures sont transformées en organes préhensiles et servent à la prédation. Les hanches sont bien développées et le fémur renflé est pourvu d'une rainure dans laquelle viennent se replier le tibia et le tarse.
Ile du Rhin, Geiswasser (68), proche surface
Laurent et Sandrine SCHWEBEL-MARBACH
04/05/2010
Profil
Sur cette photo, on voit bien une partie de l'abdomen. Les segments situés sur la face ventrale s'appellent les sternites*.
Etang de Lannion (22), proche surface
15/04/2008
Camouflage
La nèpe marche lentement dans les eaux stagnantes, de préférence au milieu de la végétation en décomposition. Sa couleur lui permet d'y être bien camouflée. Les végétaux situés en surface serviront de support pour la ponte.
Mare, 700 m alt., Wildenstein (68), proche surface
Laurent et Sandrine SCHWEBEL-MARBACH
01/04/2007
Immobilisme
Ici, la nèpe se ballade sur un fond sablo-vaseux. Là aussi, on a du mal à la voir tant elle se confond avec le milieu. Son immobilisme ne facilite pas les recherches.
Lac de la Lauch, 950 m alt., Fellering (68), proche surface
Laurent et Sandrine SCHWEBEL-MARBACH
09/06/2009
Respiration
Comme la nèpe ne nage pas bien, elle n'est jamais éloignée de la surface car elle a besoin de mettre très régulièrement son long siphon respiratoire en contact avec l'air atmosphérique.
Réserve naturelle de l'île du Rohrschollen, Strasbourg (67), proche surface
Laurent et Sandrine SCHWEBEL-MARBACH
08/10/2009
A l'affût
Sa tactique de chasse consiste à rester immobile, cachée dans la vase ou sur des végétaux, les pattes antérieures ouvertes prêtes à se refermer sur la proie qui passe à sa portée. Sa morphologie (corps plat) facilite la chasse à l'affût.
Réserve naturelle, Ernstein (67), proche surface
Laurent et Sandrine SCHWEBEL-MARBACH
17/03/2008
Prédation
Grâce à ses pattes ravisseuses, elle attrape avec voracité diverses proies : larves d'insectes, écrevisses (œufs et adultes), têtards, petits poissons. Ici, elle a attrapé un petit coléoptère.
Aquarium IUT Louis Pasteur, Schiltigheim (67)
04/10/2009
Adulte et larve
Le siphon est une modification du dernier segment : il est allongé et bombé au-dessus alors qu'il forme une sorte de gouttière en dessous. Ici, c'est une vue du dessus. Comme beaucoup de larves, les ailes ne sont que des ébauches, elles sont très réduites et inutiles.
Notez que le nom latin Nepa rubra n'est plus le nom scientifique valide, il s'agit de l'ancien nom.
Ce schéma est tiré de Poisson R., 1957. FAUNE DE FRANCE n° 61, HÉTÉROPTÈRES AQUATIQUES, ed. P. Lechevalier, 263p.
N/A
Reproduction de documents anciens
1957
Larve
La larve ressemble à un adulte miniature sans le siphon respiratoire au bout de l'abdomen. Cet individu ne mesurait pas plus de 2 cm, pattes ravisseuses tendues.
Etang du Boulet, Feins (35), proche surface
14/07/2011
Larve
La larve est très mimétique, on l'aperçoit le plus souvent lorsqu'elle se déplace.
Etang du Boulet, Feins (35), proche surface
14/07/2011
L'œuf
Les œufs sont enfoncés presque en entier dans des fragments de végétaux aquatiques mous ou à moitié décomposés et flottant à la surface. Seule l'extrémité céphalique dépasse. Celle-ci est ornée de 6 à 8 filaments respiratoires. Ces filaments sont en contact avec l'air et alimentent les œufs en oxygène.
Ce schéma est tiré de Poisson R., 1957. FAUNE DE FRANCE n° 61, HÉTÉROPTÈRES AQUATIQUES, ed. P. Lechevalier, 263p.
N/A
Reproduction de documents anciens
1957
Détail de la tête
Ce schéma permet juste de voir où se situent les antennes sur la tête. Elles sont composées de trois articles et sont plus courtes que la tête et cachées dans des fossettes situées sous la tête.
Le rostre, composé de trois articles, est court, acéré et dirigé vers l'avant. Il sert à piquer les proies avant de les sucer.
Les yeux sont globuleux. Les ocelles (yeux simples) sont inexistants.
Ce schéma est tiré de Poisson R., 1957. FAUNE DE FRANCE n° 61, HÉTÉROPTÈRES AQUATIQUES, ed. P. Lechevalier, 263p.
N/A
Reproduction de documents anciens
1957
Rédacteur principal : Sandra SOHIER
Vérificateur : Jean-Pierre COROLLA
Responsable historique : Sandra SOHIER
Responsable régional : Jean-Pierre COROLLA
La page de Nepa cinerea sur l'Inventaire National du Patrimoine Naturel : INPN