Carapace arrondie et fortement bombée
Grande taille : carapace jusqu'à 25 cm de long
Bords latéraux armés de larges épines
Surface dorsale couverte de nombreux tubercules pointus
Rostre composé de deux piquants épais
Pattes longues et fines
Couleur variant du brun-rouge au brun-jaune
Araignée de mer, eskinado, esquinade, esquinado, esquinadoun, squinado (Provençal), cabra de mar, cabra (Catalan), cabre (Languedoc), chèvre, gramola (Algérie)
Common spider crab, spinous spider crab, king crab, spiny spider crab (GB), Granceola (I), Centolla, araña de mar (E)
Cancer cornutus Fabricius, 1787
Cancer squinado Herbst, 1788
Maia squinado (Herbst, 1788) est un synonyme [variante orthographique]
Méditerranée
Zones DORIS : ● Europe (côtes françaises), ○ [Méditerranée française]Cette espèce est endémique de Méditerranée.
Espèce benthique, M. squinado se trouve bien partout, sur des fonds rocheux, sableux, parmi les algues ou les posidonies, entre la surface et 50 m de fond. Elle a été observée jusqu'à 150 m de profondeur, parfois jusqu'à 600 m (mer Ligurienne). Dans l'Adriatique, on la trouve sur la côte orientale pendant l'hiver, et sur la côte occidentale en été, à une profondeur moindre.
Les jeunes se développent près des côtes, dans des baies à fonds sablo-vaseux entre la surface et 20 m de fond.
La carapace de Maja squinado peut mesurer jusqu'à 25 cm de long et 18 cm de large. Elle est bombée et arrondie. Chez les grands individus, elle est un peu plus large que longue, alors que chez les jeunes individus, la longueur est nettement supérieure à la largeur.
Vue du dessus, la carapace a une forme triangulaire, arrondie à l'arrière. Ses bords latéraux sont armés de larges épines, suivies de plusieurs dents plus petites. La surface dorsale est pourvue d'une rangée d'épines plus petites, mais parfois très aiguës, situées sur la ligne médiane, dont certaines sont plus développées.
La première paire de pattes plus large que les autres est lisse et munie de pinces. Les quatre autres sont plus fines et couvertes de petites soies. Comparées à d'autres crabes, les pinces ne sont pas très fortes, surtout chez les femelles.
L'abdomen n'est pas visible en vue dorsale car replié sous le céphalothorax.
Les pédoncules oculaires sont relativement courts, fins et divergents. Les yeux sont entièrement rétractiles. Entre les yeux, le rostre est formé de deux piquants épais disposés en V ; la base des antennes est large et comporte de petites épines.
Maja squinado peut être confondue avec Maja brachydactyla, Maja crispata et Maja goltziana.
En 1998, Maja squinado a été distinguée de l'espèce atlantique Maja brachydactyla, présente seulement sur les côtes françaises de Manche-Atlantique. Les populations atlantiques et méditerranéennes étaient classiquement placées dans une seule et même espèce, Maja squinado. Le travail de Neumann (1998) a montré que M. brachydactyla se distingue de M. squinado surtout par les gonopodes qui sont les premiers appendices abdominaux modifiés des mâles.
Cette distinction a été confirmée par les résultats d'une analyse phylogénétique en 2008. Cette analyse a révélé que chacune de ces espèces forme un clade distinct et bien défini. Les résultats confirment le caractère génétique distinctif de chaque taxon et permettent de les désigner comme espèces différentes. Désormais, M. squinado désigne uniquement l'espèce méditerranéenne. Notons que tous les scientifiques ne sont pas d'accord sur la validité de ces deux espèces ; voir par exemple en bibliographie Ng et al. 2008. A l'origine, Balss (1922) en faisait une sous-espèce nommée Maja squinado var. brachydactyla.
Apparemment il n'y aurait pas de formes intermédiaires dans la zone de brassage des eaux méditerranéennes et atlantiques (sud de l'Espagne, Maroc, Gibraltar).
Maja crispata ne dépasse pas 8 cm, ses pointes rostrales sont plus longues, sa carapace est toujours plus longue que large.
Maja goltziana se distingue par la présence d'une rangée très nette de longues épines médianes sur la carapace et d'une forte épine sur la première articulation de chaque patte. Elle n'existe pas sur les côtes françaises.
L'araignée de mer en phase larvaire se nourrit de plancton*. Juvéniles et adultes varient leur menu avec des algues, des oursins et étoiles de mer, ophiures, crustacés (anomoures, brachyoures, isopodes), annélides polychètes, hydraires, mollusques (bivalves et gastéropodes) et poissons morts.
Selon les auteurs, la période de reproduction débuterait entre décembre et avril. Femelles ovigères* et embryons de janvier à avril.
Les sexes sont séparés. Les araignées se regroupent en grands nombres. Ces agrégations semblent présenter deux avantages : la rencontre d'un congénère et la protection contre les prédateurs.
Il semblerait y avoir entre une et trois pontes par an. Une controverse existe sur l'accouplement. Selon les auteurs, l'accouplement pourrait se faire entre mâles et femelles durs (nombreuses observations), d'autres prétendant que la fécondation aurait lieu après la mue de la femelle, lorsque la carapace est encore souple. Une autre divergence d'appréciation réside dans la nécessité d'un accouplement immédiatement avant la deuxième ou la troisième ponte, malgré la présence d'une spermathèque* chez la femelle. Certains auteurs supposent donc implicitement que les spermatozoïdes ne sont pas viables pendant suffisamment longtemps dans la spermathèque pour féconder plusieurs pontes. D'autres observations démontrent le contraire, des femelles ayant été observées pondant deux à trois fois sans accouplement. Lorsqu'on fait une préparation histologique de la spermathèque, on constate qu'il a pu y avoir eu jusqu'à une dizaine d'accouplements avec des mâles différents. La conséquence est que c'est le dernier mâle à s'être accouplé, donc pas nécessairement le plus beau et le plus fort, mais le plus patient, qui fécondera en premier la ponte qui suivra. Il semblerait que le sperme puisse être conservé très longtemps vivant dans les voies génitales de la femelle.
Ce qui est certain, c'est que la femelle n'est mature qu'à l'âge adulte et plus précisément dans l'année qui suit la phase terminale de la mue. Cette maturité n'est pas une question de taille, puisqu'on observe des femelles ovigères allant de 85 mm à 165 mm et pouvant peser de 200 g à 1500 g.
La ponte qui comprend entre 50 000 et 500 000 œufs selon la taille des génitrices, est portée par les femelles durant plusieurs mois (minimum 3 mois) jusqu'à l'éclosion. Les œufs rouges éclosent 6 à 7 semaines après la ponte. Les larves sont pélagiques. La vie larvaire durerait environ quinze jours. On observe trois stades larvaires (zoé) et un post-larvaire (mégalope).
La couleur de cette araignée, variant du brun-rouge au brun-jaune, l'aide bien au camouflage, mais l'araignée le parfait en se recouvrant d'algues, d'éponges, d'hydraires, de petites anémones, de mollusques, de crustacés, d'ascidies, de bryozoaires parfois d'échinodermes, tout ce monde la rendant parfois difficile à voir.
Ce camouflage ne concerne que les juvéniles et se fait par fixation active des organismes. L'araignée prend les organismes par la pince et les accroche à l'aide des soies qui parsèment la carapace et les pattes. La répartition des organismes sur le corps et les pattes est équilibrée entre la droite et la gauche. Ce comportement de camouflage (="autodécoration") s'observe plus fréquemment dans les endroits peu profonds.
Les grands individus présentent peu d'activité de camouflage et si des organismes sont présents, il s'agit de fixation passive. Après la mue, une des premières activités du juvénile est de se camoufler, au besoin en récupérant les algues de son ancienne carapace (observation en aquarium).
Plusieurs espèces de vers nématodes infestent l'araignée de mer (voir la bibliographie) ; d'autre part, certains petits invertébrés (copépodes harpacticoïdes, vers polychètes) sont considérés comme commensaux des Maja spp.
Comme tous les crustacés, l'araignée croît par mues successives. Durant la phase juvénile (appelée moussette) qui dure deux ans, sa taille augmente de 25 à 40% et son poids double (facteur 1,8 à 2,7). On a observé treize mues durant la première année, et seulement deux la seconde. Le poids et la taille sont néanmoins des données très variables et on a observé des proportions très différentes entre araignées du même âge.
L'adulte peut mesurer entre 85 et 200 mm et peser de 250 g à 3000 g selon les individus. L'animal atteint sa taille adulte vers deux ans et la conservera durant cinq à six ans.
La longévité exacte est incertaine chez l'araignée, mais se situerait entre sept et huit ans. Notez que contrairement aux autres crustacés, les araignées de mer ont une mue terminale. Ceci génère plusieurs conséquences :
- l'adulte ne mue plus et donc ne grandit plus,
- il ne peut plus régénérer les pattes perdues en cours de migration (d'où une forte sensibilité par rapport aux chaluts, contrairement au tourteau qui est lisse),
- la longévité est plus courte.
En septembre-octobre, les adultes migrent vers le fond, au-delà de 50 m, et vers le large pour hiverner (migration descendante). En avril, voire en février-mars, elles remontent entre la surface et 50 m, se rapprochant des côtes, pour y rester tout le printemps et l'été (migration montante).
Ses prédateurs sont le poulpe, le homard, les poissons carnassiers pour les jeunes (loup, congre).
La pêche s'effectue au casier et au filet et, en tant que prise accessoire, au chalutage. Les araignées sont commercialisées fraîches.
Maja squinado est une espèce craintive : lorsqu'elle se sent menacée, elle relève ses pattes antérieures, en écartant celles qui portent des pinces et repousse l'agresseur à coups de pinces.
Maja squinado bénéficie d'une protection :
Son nom vient de la forme rappelant celle de ses cousines terrestres.
Maja ou Maia : nom d'une espèce de Crustacé dans Aristote (Perrier fasc II), sorte de crabe ou fille d'Atlas et de Pleioné, mère de Mercure, également une des Pléiades ou fille de Faunus, divinité romaine incarnant le printemps, dont la fête se déroulait en mai.
squinado : de l'occitan (provençal) eskinado, esquinade, esquinado, esquinadoun, ou squinado, noms provençaux de l'araignée de mer.
Numéro d'entrée WoRMS : 107350
Termes scientifiques | Termes en français | Descriptif | |
---|---|---|---|
Embranchement | Arthropoda | Arthropodes | Animaux invertébrés au corps segmenté, articulé, pourvu d’appendices articulés, et couvert d’une cuticule rigide constituant leur exosquelette. |
Sous-embranchement | Crustacea | Crustacés | Arthropodes à exosquelette chitineux, souvent imprégné de carbonate de calcium, ayant deux paires d'antennes. |
Super classe | Multicrustacea | ||
Classe | Malacostraca | Malacostracés | 8 segments thoraciques, 6 segments abdominaux. Appendices présents sur le thorax et l’abdomen. |
Sous-classe | Eumalacostraca | Eumalacostracés | Présence d’une carapace recouvrant la tête et tout ou partie du thorax. |
Super ordre | Eucarida | Eucarides | Présence d'un rostre. |
Ordre | Decapoda | Décapodes | La plupart marins et benthiques. Yeux composés pédonculés. Les segments thoraciques sont fusionnés avec la tête pour former le céphalothorax. La première paire de péréiopodes est transformée en pinces. Cinq paires d'appendices locomoteurs (pinces comprises). |
Sous-ordre | Brachyura | Brachyoures | Les brachyoures ont un abdomen réduit replié sous le céphalothorax. Ils sont représentés par les crabes et les araignées de mer. |
Famille | Majidae | Majidés | Araignées de mer. |
Genre | Maja | ||
Espèce | squinado |
Tubercules sur le dos
Chez les grands individus, la carapace est un peu plus large que longue. La surface dorsale est couverte de nombreux tubercules pointus, situés sur la ligne médiane.
Port-Cros (83)
31/05/2009
Caractéristiques générales
Les bords latéraux sont armés de larges épines. Le rostre est composé de deux piquants épais. Les pattes sont longues et fines.
Cap d’Antibes (06), 17 m
01/02/2009
Maja squinado en balade
Cette espèce benthique présente une carapace arrondie et bombée. Les bords latéraux sont armés de larges épines, les pattes sont longues et fines. La couleur varie du brun-rouge au brun-jaune.
Cap d’Antibes (06), 17 m
01/02/2009
Vue ventrale
Les bords latéraux de la carapace sont armés de larges épines. La première paire de pattes, plus large que les autres, est lisse et munie de pinces. Les quatre autres sont plus fines et couvertes de petites soies.
Lorsqu’elle se sent menacée, elle relève ses pattes antérieures, en écartant celles qui portent des pinces et repousse l’agresseur à coups de pinces. L’abdomen large de cet individu montre qu’il s’agit d’une femelle. L’abdomen étant plaqué contre le corps de l’animal, cette femelle de grande taille manifestement adulte, n’est pas encore ovigère.
Cap d’Antibes (06), 17 m
01/02/2009
Vue dorsale
La carapace de Maja squinado est fortement bombée et arrondie. Le rostre porte deux piquants épais.
Bastia (2B), 10 m
06/2005
Tenue de camouflage
Maja squinado parfait son camouflage en se recouvrant d’algues, d’éponges, d’hydraires, de petites anémones, de mollusques, de crustacés, d’ascidies, de bryozoaires parfois d’échinodermes, le tout la rendant parfois difficile à voir.
Cap d’Antibes (06), 19 m
25/12/2008
Dans les gorgones rouges
Maja squinado, équilibriste ...
Giens (83), Roche jaune, 35 m
03/05/2009
Dans son milieu
Maja squinado, immobile, se confond avec son milieu.
Galeria (2B), 43 m
15/06/2007
Dans les algues
Cette grosse araignée se camoufle en se recouvrant des algues parmi lesquelles elle vit.
Les Pyramides, Agay (83), 18 m
11/07/2017
Femelle ovigère
Chez l’araignée de mer, les œufs sont particulièrement petits et nombreux, jusqu’ à 500 000 ! Leur couleur varie en fonction du stade d’incubation. Peu après la ponte, ils sont de couleur rouge orangé et évoluent ensuite vers des teintes brunes ; à proximité de l’éclosion (cette photo), ils deviennent plus gris, en raison de la formation presque achevée de la larve zoé.
Antibes (06), de nuit
26/06/2008
Anomalie ?
La pince droite de cet individu semble bien curieuse ; en fait, il s’agit partiellement d’une illusion, la pince étant repliée sous l’animal, on ne voit que la partie appelée méropodite* ; cet article semble recouvert d’un épibionte* non identifié.
Hyères (83), Sec des deux ancres, 22 m
01/05/2009
Rédacteur principal : Marie-Pierre FEUGAS
Correcteur : Pierre NOËL
Responsable régional : Véronique LAMARE
Neumann V., 1996, Comparative gonopod morphology of the European spider crabs of the genus Maja Lamarck 1801, Senckenbergiana biologica, 75 (1/2), 143-157, fig. 1-10.
Neumann V., 1996, Comparative investigations on the systematics and taxonomy of European Maja species (Decapoda, Brachyura, Majidae), Crustaceana, 69, 7, 821-852.
Neumann V., 1996, On the status of Maja brachydactyla (Balss, 1922), a spider crab species closely related to Maja squinado (Herbst, 1788) (Decapoda : Brachyura : Majidae), 6th Colloquium Crustacea Decapoda Mediterranea, Florence 12 - 15 September 1996, Abstracts Volume, Museum of Zoology of the University of Florence, La Specola, 64.
Neumann, V., 1998, A review of the Maja squinado (Crustacea : Decapoda : Brachyura) species-complex with a key to the eastern Atlantic and Mediterranean species of the genus, J. Nat. Hist., 32(10-11), 1667-1684.
Sotelo G., Morán P., Posada D., 2008, Genetic identification of the northeastern Atlantic spiny spider crab as Maja brachydactyla Balss, 1922, Journal of Crustacean Biology, 28(1), 76-81.
La page de Maja squinado dans l'Inventaire National du Patrimoine Naturel : INPN