Crabe arrondi à trapu, plus large que long, bombé
Pattes velues, brunes à pourpres sauf aux extrémités rose clair et lisses
Espèce nocturne
Crabe portant souvent sur son dos éponges et colonies de tuniciers, maintenues grâce à ses pattes arrières
Dromie velue, crabe-béret basque, crabe lanigère, crabe-pierre, crabe dormeur, crabe-éponge, crabe-nounours,
Noms régionaux : krank-voulouz (Breton), clospoing, crabe à laine, tourlourou (Cotentin), oumigrana durmeiré (Provençal et Languedocien), franquet dormidor de furari (Catalan)
Sponge crab, Teddy bear crab, sleepy crab (GB) , Granchio facchino, granzo del capotto (I), Dromia, cangrejo dormilón (E), Wollkrabbe (D), Wollkrab, sponskrab (NL)
Dromia vulgaris (H. Milne Edwards, 1837)
Méditerranée, Atlantique Nord-Est
Zones DORIS : ● Europe (côtes françaises), ○ [Méditerranée française], ○ [Atlantique Nord-Est, Manche et mer du Nord françaises]Espèce présente dans toute la Méditerranée, on peut la retrouver également en Atlantique oriental, de la mer du Nord au Sahara occidental (Rio de oro), Açores, Canaries et île de l'Ascension.
Ce crabe se retrouve sur les fonds rocheux, dans les cavités et les fentes sous-marines. Espèce d'eaux généralement peu profondes, elle peut s'observer dès la surface mais également jusqu'au-delà de 130 m de profondeur. Une rencontre attestée à 201 m.
Le corps est très arrondi, bombé. Il est plus large que long (sauf chez les très jeunes individus). Ce crabe parait assez trapu et même lourdaud. Sa carapace peut mesurer jusqu'à dix centimètres de large. Dromia personata possède dix pattes (péréiopodes), de diverses fonctions. Corps et pattes sont entièrement velus, duveteux et de couleur brun à pourpre.
Les pinces sont grandes et lourdes, munies également d'un court duvet ras. Seule l'extrémité de ces pinces est rose clair à mauve et lisse.
Les deuxième et troisième paires de pattes sont terminées par une griffe simple et tranchante.
A l'arrière du corps, les quatrième et cinquième paires de pattes sont courtes, également pubescentes (velues) et dirigées vers le haut, ramenées sur le céphalothorax*. Ces dernières pattes sont terminées par de petits crochets, sortes de fausses pinces incomplètes.
Le reste de l'animal est glabre.
Sur le bord frontal de la carapace de l'animal, les deux yeux sont petits mais bien visibles. Entre les yeux, on peut observer deux dents submédianes distinctes et une troisième plus basse et plus petite, moins visible. De chaque côté des yeux, sur le même bord frontal de la carapace, cinq larges dents antérolatérales, espacées entre elles de manière irrégulière.
On rencontre fréquemment cette espèce dissimulée sous un bouclier protecteur. En effet, la dromie se recouvre, pour se camoufler, d'éponges ou de tuniciers coloniaux notamment, qu'elle découpe consciencieusement sur le substrat. Elle porte ces morceaux sur son dos à l'aide de ses quatrième et cinquième paires de pattes postérieures. Les fausses pinces de ces dernières servent à maintenir l'épibionte*. On trouve le nom de "béret" pour ce couvre-chef. Certains de ces organismes épibiontiques recouvrent progressivement toute sa carapace. La technique de camouflage rend la dromie assez mimétique et elle s'en trouve difficilement observable lorsqu'elle reste statique.
La taille assez importante des grands individus et leur côté trapu empêche généralement la confusion avec d'autres crabes. Le bout rose des pinces est un bon critère de discrimination.
En Méditerranée, il est donc difficile de confondre la dromie velue avec d'autres espèces.
Il existe toutefois une espèce de la famille Dromidés, originaire de l'ouest africain, Sternodromia spinirostris (Miers, 1881), qui a été signalée dans le golfe de Tarente en Italie (FAO). Si Dromia personata adulte est plus large que longue, Sternodromia spinirostris est aussi longue que large et en cela peut être confondue avec les juvéniles de Dromia personata, respectant souvent ces proportions égales.
Une autre espèce de dromie, Dromia marmorea Forrest, 1974, est présente en Atlantique.
Même si elles recouvrent également leur carapace d'organismes divers, notamment algaux, il est fort difficile de confondre la dromie avec les différentes araignées de mer Maja sp.. La forme des deux animaux n'est pas du tout la même et leur comportement non plus. Seul le mode de camouflage par utilisation d'épibiontes est plus ou moins commun.
Grâce à son camouflage, elle surprend les petits animaux dont elle se nourrit.
Espèce gonochorique*. Reproduction sexuée.
Les orifices génitaux sont situés ventralement, entre les pattes marcheuses. Le mâle doit retourner la femelle sur le dos afin de pouvoir introduire ses stylets copulateurs dans les vulves de sa partenaire. On observe donc une position "ventre à ventre" lors de la copulation.
La question de savoir si les deux protagonistes doivent lâcher leur éponge protectrice (pour des raisons de manipulation du partenaire avec les pattes arrières) reste posée. Jusqu'à un témoignage d'un mâle ET d'une femelle encore couverts.
Diamètre des œufs 0,5 mm. En Bretagne, les pontes ont lieu en juillet et larves rares dans le plancton en août. En Espagne, femelles ovigères* en juillet et en août. Les larves métazoés de l'espèce atteignent un stade presque mysidien.
Ce crabe établit une véritable association symbiotique avec des éponges (telles que Suberites massa) ou des tuniciers (comme Aplidium conicum). Pour cela, il va par exemple découper une éponge à la forme de sa carapace et la fixer sur son dos. Dans ce cas, il va profiter du camouflage du spongiaire ainsi que de sa protection olfactive.
La dromie voit sa carapace progressivement recouverte des divers épibiontes choisis. Ces derniers bénéficient de la mobilité du crabe qui leur confère ainsi une diversité alimentaire plus importante et une meilleure dispersion de leurs gamètes.
La dromie est l'un des crabes les plus primitifs.
L'espèce se rencontre plutôt la nuit.
Principaux prédateurs de Dromia personata : le poulpe, des étoiles de mer, des poissons carnivores comme le mérou...
Dromie : directement francisé depuis le nom de genre scientifique, Dromia.
Dromia : provient du grec [dromos] = course, eu égard à la vélocité particulière de notre crustacé.
personata : du latin [personata] = masquée. Allusion directe à son habitude de se camoufler avec un morceau d'éponge.
On pourrait donc traduire le nom scientifique de l'animal par "coureuse masquée".
Termes scientifiques | Termes en français | Descriptif | |
---|---|---|---|
Embranchement | Arthropoda | Arthropodes | Animaux invertébrés au corps segmenté, articulé, pourvu d’appendices articulés, et couvert d’une cuticule rigide constituant leur exosquelette. |
Sous-embranchement | Crustacea | Crustacés | Arthropodes à exosquelette chitineux, souvent imprégné de carbonate de calcium, ayant deux paires d'antennes. |
Classe | Malacostraca | Malacostracés | 8 segments thoraciques, 6 segments abdominaux. Appendices présents sur le thorax et l’abdomen. |
Sous-classe | Eumalacostraca | Eumalacostracés | Présence d’une carapace recouvrant la tête et tout ou partie du thorax. |
Super ordre | Eucarida | Eucarides | Présence d'un rostre. |
Ordre | Decapoda | Décapodes | La plupart marins et benthiques. Yeux composés pédonculés. Les segments thoraciques sont fusionnés avec la tête pour former le céphalothorax. La première paire de péréiopodes est transformée en pinces. Cinq paires d'appendices locomoteurs (pinces comprises). |
Sous-ordre | Brachyura | Brachyoures | Les brachyoures ont un abdomen réduit replié sous le céphalothorax. Ils sont représentés par les crabes et les araignées de mer. |
Famille | Dromiidae | Dromiidés | |
Genre | Dromia | ||
Espèce | personata |
Dromie nue
L'animal tel qu'on le rencontre lorsqu'il n'est pas camouflé par un épibionthe quelconque.
Ici, à la sortie d'une grotte de l'archipel du Riou.
Une carapace bombée, un poil ras un peu partout sur la carapace et les pattes, le bout des pinces rose, ce sont des éléments caractéristiques de la dromie.
Impérial de terre, Marseille (13), 8 m
24/04/2007
Avec son éponge
Une vue courante de la dromie : chapeautée par son éponge qu'elle tient grâce à ses pattes arrières. Son air bourru, renfrogné, ressort pleinement !
Côte d'Azur (06)
28/09/2007
Dans une grotte
Voici Dromia personata, toujours planquée sous une éponge et qui gambade sous la voûte d'entrée d'une grotte sous-marine. On reconnaît aisément la dentelle de Neptune ainsi que le champ de corail rouge qui tapisse le plafond de la grotte. Prudemment, tous les polypes à proximité directe ou en contact avec la dromie sont rétractés et leur branche de corail est quasiment nue.
Grotte du Lido, Rade de Villefranche (06), 21 m
28/09/2007
Y a pas que les éponges dans la vie !
Cet individu semble s'être recouvert d'un épibionte inhabituel. Ce n'est pas un spongiaire, ça ressemble à un thalle végétal (peut-être même l'udotée Flabellia petiolata)... Tout est donc bon pour passer inaperçu ?
La Fourmigue, Antibes (06), 10 m, de nuit
14/08/2007
Avec "béret" de synascidie
Cette dromie juvénile porte une espèce (encore) indéterminée de synascidie sur son dos.
On appelle souvent ce couvre-chef protecteur, "le béret".
L'Ocell, Cerbère (66), 15 m
03/07/2008
Avec mantille de gorgones
Le photographe : La dromie était aggripée sur un tube vertical de l'épave, sans bouger... C'est quand elle a ensuite commencé à se déplacer que l'on s'est rendu compte que les les 2 gorgones orange étaient fixées sur le dos du crustacé !!
Epave Le vapeur, Erquy (22), 20 m
18/09/2010
Avec chapeau en dentelle
On a l'habitude de croiser la dromie avec une éponge sur la tête, voire des synascidies mais un si beau chapeau de dentelles...
Antibes (06), 27 m
21/07/2006
Quand la mode est au jaune...
Quand la tendance est au jaune vif, les anémones encroutantes Parazoanthus axinellae siéent particulièrement à la dromie...
Port-Cros (83), 20 m
12/01/2011
Yeux rouges et poils
Les petits yeux sont bien visibles sur la crête frontale de la carapace. On distingue également bien le duvet de poils qui recouvre pattes et carapace. Seul l'extrémité des pinces, rose, est glabre.
Impérial de terre, Marseille (13), 8 m
24/04/2007
Pattes arrières
On distingue nettement sur ce cliché la position des pattes arrières, beaucoup plus courtes que les autres et remontées vers le haut de l'animal, repliées vers le corps.
Côte d'Azur (06)
15/02/2007
Crochets
Il s'agit d'un individu très jeune. Ce cliché montre bien la cinquième paire de pattes qui sont dirigées vers le haut et ramenées sur le dos. Ces pattes sont terminées par de petits crochets, sortes de fausses pinces incomplètes. Ce sont elles qui vont agripper la pièce protectrice que trimballent souvent les dromies.
Pointe de la Cuisse, Rade de Villefranche-sur-mer (06), 9 m, de nuit
21/08/2008
Avec les pattes arrières
Sur le cliché de cette dromie dans une position renversante, on distingue le moyen d'accroche de la colonie de synascidies qu'elle tient sur (sous !) sa tête. La dromie se sert de ses pattes arrières pour cramponner sa protection par l'intérieur et ce, grâce aux crochets terminaux, bien visibles sur la photo précédente.
L'Ocell, Cerbère (66), 15 m
03/07/08
Un lieu de vie en elle-même (2)
Sur le dos nu de cet individu, de la vie s'est installée. On peut distinguer notamment des tubes de petits vers annélides. Eux aussi profiteront de la protection spongieuse que mettra en place la dromie lorsqu'elle en aura besoin.
Côte d'Azur (06)
28/09/2007
Un lieu de vie en elle-même (1)
Beaucoup de vie fixée sur la carapace de cette dromie. En plus du poil ras que porte l'espèce, divers épibiontes se sont installés : des végétaux, des hydraires, des bryozoaires...
Epave du Lawford, Ouistreham (14), 20 m
21/12/2008
Reproduction (1)
Mâle et femelle sont disposés à engendrer une descendance !
Les orifices génitaux sont situés ventralement, entre les pattes marcheuses. Ici, le mâle a retourné la femelle sur le dos et la scène montre clairement une copulation (ventre contre ventre) où normalement les abdomens sont relevés (non visibles sur la photo). Ceci est donc la position d'intromission des stylets copulateurs du mâle dans les vulves de la femelle (ce qui peut-être n'exclue pas un petit bisou tendre ?).
Notons que les deux protagonistes se sont débarrassé de leurs couvre-chefs respectifs ! En effet, on pourrait penser que tous les appendices sont nécessaires pour l'acte (question de prise).
Sauf que... d'autres clichés (voir photo suivante) montrent qu'au moins l'un des deux a gardé son éponge ! Mais il est également possible ici que les "bérets" protecteurs aient été posés à proximité et que les partenaires aient pu les récupérer... après.
Grande Livière, Saint Cast (22), 23 m
31/05/2009
Reproduction (2)
Ici, l'individu du haut (probablement la femelle, eut égard à la différence de taille) a apparemment gardé son éponge durant le câlin. Nous pourrions donc penser que l'animal n'a pas spécialement besoin de ses paires de pattes arrières pour tenir sa (ou son) compagnon. A moins qu'un seul des partenaire (le mâle ?) ne tienne l'autre et que ce dernier ait donc les pattes libres pour garder son chapeau !
A suivre...
Cap Croisette, Marseille (13), 20 m
28/05/2005
Larve de dromie
Larve de Dromia personata capturée parmi le plancton de surface en baie de Banyuls et photographiée en laboratoire.
Baie de Banyuls (66), laboratoire Arago, photo ex-situ
1972
Juvénile de dromie
Voici un juvénile de dromie, probablement au stade 1 ou 2 après le stade mégalope de son développement. C'est donc bien un adulte en miniature.
Pointe de la Cuisse, Rade de Villefranche (06), 9 m, de nuit
21/08/2008
Juvénile avec chapeau d'anémones
Cette dromie petit format (environ 1,5 cm !) se camoufle déjà sous une protection, comme une grande. Elle a choisi un bouquet de Parazoanthus axinellae (eux aussi de petit format).
Pointe de la Cuisse, Rade de Villefranche-sur-mer (06), 16 m, de nuit
30/07/2009
Chromatisme changeant
Pierre NOEL : "D'une façon générale, les juvéniles de crabes ont des colorations assez différentes des immatures et des adultes. Il s'agit d'une forme particulière de polymorphisme, le polychromatisme, qui a tendance à s'estomper avec l'âge. Le sujet est presque vierge de toute investigation et il y a encore beaucoup à découvrir sur le pourquoi et le comment des changements de coloration chez les jeunes crustacés. Les variations de coloration des adultes en fonction du stade de mue, du groupement, de la couleur du substrat, de la maturité sexuelle, du sexe, de l'âge, de l'heure, du jour lunaire, de l'époque de l'année sont mieux connues.
L'albinisme total est extrêmement rare chez les crustacés, pour la bonne raison qu'il y a plusieurs pigments en jeu : des caroténoïdes, des ptérines, des flavines et des ommochromes, pour ne citer que les principaux. La probabilité pour qu'il y ait assez de mutations allant toutes dans le même sens de la suppression de la synthèse ou l'accumulation de ces pigments est presque nulle."
Port-Cros (83), 8 m
12/08/2009
Azuréenne au beau capeù !
Un beau morceau de démosponge protège Dromia personata. On pense qu'il s'agit principalement d'un bouclier olfactif.
Grotte du Lido, Villefranche-sur-mer (06), 20 m
26/08/2005
Marseillaise véloce
La dromie est un crabe très véloce et il est capable de s'enfuir à grande vitesse, quitte à laisser tomber son fardeau spongieux.
Archipel de Riou, Marseille (13), 8 m
24/04/2007
Girondine
Une dromie du Pays de Buchs. Ne pas commettre le contresens sur personata et se dire qu'elle ressemble... à une personne.
Lieu-dit St-Yves, Arcachon (33), 10 m, de nuit
11/06/2008
Normande
Dromie des pays normands. Normal qu'elle porte un manteau plus chaud que ses consœurs méditerranéenes !
Epave du Lawford, Ouistreham (14), 20 m
21/12/2008
Rédacteur principal : Aedwina REGUIEG
Rédacteur : Alain-Pierre SITTLER
Correcteur : Pierre NOËL
Responsable historique : Aedwina REGUIEG
Responsable régional : Alain-Pierre SITTLER
Balss H., 1921, CRUSTACEA VI : Decapoda Anomura (Paguridea) und Brachyura (Dromiacea bis Brachygnatha I.), in Michaelsen, W., Beiträge zur Kenntnis der Meeresfauna Westafricas, 3, 37-68.
Bourdon R., 1965, INVENTAIRE DE LA FAUNE MARINE DE ROSCOFF. Décapodes – Stomatopodes. Editions de la station biologique de Roscoff, 45p.
Vadon C., 1981, LES BRACHYURES DES HERBIERS DE POSIDONIES DANS LA REGION DE VILLEFRANCHE-SUR-MER : biologie, écologie et variations quantitatives des populations, Thèse de Doctorat de 3ème cycle, Université P. et M. Curie-Paris VI, 227p.